BeHere

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Auteur·trice·s : Celina Marques Teixeira, Thomas Goffin et Kenneth Rioja.
Page rédigée dans le cadre du cours ADID en Décembre 2022.
BeHere

Introduction

Résumé

BeHere est une plateforme en ligne (mobile et desktop) de mise en relation et de communication destinée aux utilisateur·trice·s de l’espace de conception de l’Université de Genève appelé FacLab. Les utilisateur·trice·s peuvent ainsi s’entraider et collaborer à distance. Pour ce faire, le dispositif inclut l’utilisation de lunettes de réalité augmentée et de robots mobiles, afin de relier les utilisateur·trice·s distant·e·s aux utilisateur·trice·s présent·e·s au FacLab.

Le nom de la plateforme BeHere, de l'anglais "Être là", a été choisi en concordance avec les besoins de la commanditaire, d'être présent au Faclab malgré les contraintes de distance et de temps. Être là quoi qu'il advienne pour collaborer/coopérer ensemble sur le même projet présent au Faclab.

Descriptif du projet

Équipe du projet

Nom et prénom Rôle dans le projet Contact
Thomas Goffin Concepteur thomas.goffin@etu.unige.ch
Celina Marques Teixeira Conceptrice celina.marques@etu.unige.ch
Kenneth Rioja Concepteur kenneth.rioja@etu.unige.ch

Contexte

Situé dans les bâtiments de Battelle, à Carouge, le FacLab de l’Université de Genève est un espace institutionnel de plus de 600m2 consacré à la fabrication assistée par diverses technologies (impression 3D, gravure laser, broderie numérique, etc.), mais également à la conception intangible :

Articulé autour de capacités, le FacLab accueille des étudiants, des chercheurs, des acteur·trice·s de la vie associative et économique et des citoyens, dans le cadre de ses activités. C'est un espace de création, de partage et d'apprentissage collaboratif ayant comme fondement la pérennisation de la connaissance produite et accumulée sous forme de bien commun. La fabrication doit se comprendre au sens large, ne se limitant pas à la seule fabrication d'artefacts tangibles (impression 3D, découpe laser, etc.), mais recouvrant aussi la fabrication de l'intangible par exemple des politiques publiques, des modèles économiques, de la loi ou encore des expériences. (FacLab UNIGE, s.d.)

Formalisation des objectifs

Notre dispositif porte quatre objectifs :

  • Favoriser la continuité des activités collaboratives de fabrication digitale
  • Mettre en relation les usager·e·s/facilitateur·trice·s/contributeur·trice·s lorsqu’ils/elles sont à distance ou en présentiel
  • Collaborer avec un groupe tout en étant à distance
  • Créer et visionner des tutoriels

Public cible

BeHere vise le même public cible que le FacLab, à savoir les étudiant·e·s, les enseignant·e·s et les chercheur·e·s, mais également les citoyen·ne·s intéressé·e·s par la conception participative.

Besoins des utilisateur·trice·s

BeHere sera implémentée dans un Faclab, en ce sens il dépasse la dichotomie hiérarchique “appenant·e / enseignant·e” et cherchera plutôt à qualifier ses utilisateur·trice·s sur un terrain d’égalité comme étant Seeker et Provider. Nous utiliserons ces termes dans cette page pour désigner respectivement une personne demandant de l’aide et une personne offrant de l’aide.

Revue de littérature

Dans les parties qui vont suivre, nous essayerons de répondre à trois questions que nous nous sommes posées et qui nous ont guidées tout au long du prototypage. Ces trois questions sont énoncées ci-bas. Chaque réponse apportée essayera de prendre en compte les modalités de lieu (présence/distance) et de temps (synchrone/asynchrone).

En quoi notre dispositif permet-il une continuité pédagogique entre aidé·e·s et aidant·e·s ?
La continuité pédagogique se résume par toutes “dispositions matérielles et méthodologiques prises pour assurer un enseignement momentanément réalisé à distance” (Wikitionnaire, s. d.).
En quoi notre dispositif permet-il d’assurer un apprentissage collaboratif entre les différentes parties ?
La collaboration peut être définie en ces termes : “a coordinated, synchronous activity that is the result of a continued attempt to construct and maintain a shared conception of a problem” (Roschelle et Teasley, 1995, cité par Molinari, 2022, slide 33). Les enjeux fondamentaux de l’apprentissage collaboratif résident donc dans les interactions d’apprenants qui œuvrent ensemble à la co-construction de connaissances ou de compétences. Ainsi, dans la partie dédiée, nous verrons comment BeHere favorise l’apprentissage collaboratif.
En quoi notre dispositif permet-il une régulation socioémotionnelle des deux parties ?
Par “régulation socioémotionnelle”, nous entendons la capacité d’une personne et/ou d’un groupe d’adapter ses comportements, pensées, cognitions, émotions en ligne avec le but d’une tâche dans le cadre d’une activité collaborative (Järvelä et al., 2016). Les questions que se posaient la commanditaire, Mme Nathalie Borgognon, étaient “comment les personnes peuvent-elles suivre et comprendre le raisonnement et les émotions d’autrui ?”. Nous tenterons de répondre à ces différentes questions dans la partie dédiée.

Définitions

Schéma illustrant le concept d'espace "phygital", par Nathalie Borgognon (2022).

Phygital

Comme l’illustre le schéma ci-contre, un espace phygital est la jointure entre les espaces physique et digital (Borgognon, 2022). Ainsi, BeHere a été pensé pour répondre aux besoins du travail phygital, notamment grâce à une plateforme de mise en relation entre utilisateur·trice·s et l’intégration de la réalité augmentée, une technologie prometteuse sur le plan pédagogique :

La réalité augmentée définit de nouvelles perspectives d'interaction qui permettent d'exploiter les différents contextes d'utilisation. En effet, la réalité augmentée vise à une meilleure intégration des mondes réels et informatiques. Ainsi de nouvelles techniques d'interaction qui exploitent les objets de l'entourage de chaque utilisateur·trice du groupe sont à concevoir : l'objectif est d'augmenter l'utilisabilité du collecticiel, en améliorant à la fois la production du groupe, la coordination et la communication entre les membres du groupe. (Renevier, 2000, p.10)

FabLab / FacLab

En 2016, Lhoste et Barbier présentent les FabLabs en ces termes :

Issus d’initiatives privées ou publiques, ces ateliers de fabrication sont animés par des collectifs hybrides formés d’artistes et d’ingénieurs, d’amateurs et de salariés qui explorent et revendiquent de nouvelles formes de production et de circulation des savoirs. Les fablabs mettent à disposition de leurs utilisateur·trice·s des lieux équipés, notamment de machines à commande numérique (découpeuse à laser, découpeuse de vinyle, fraiseuse, etc.). (p.43-44)

Par extension, les FacLabs sont des FabLabs institutionnalisés, généralement rattachés à la Faculté d’une Université, “sortes de « tiers lieux » (Oldenburg, 1989) qui sont des laboratoires d’expérimentation créés dans le sillage des fablabs, mais destinés aux étudiants universitaires” (Nedjar-Guerre et Gagnebien, 2015).

Continuité pédagogique

Tout l’enjeu de ce projet réside dans la garantie d’avoir une continuité pédagogique lorsque l’on se trouve au FacLab ou à distance.

Prenons l’exemple d’une bouteille. Comment permettre à un groupe travaillant sur la création d’une bouteille au sein du FacLab de poursuivre leur activité malgré le fait que certains soient à distance ? Ou alors comment une personne se trouvant au FacLab pourrait-elle obtenir de l’aide sur l’impression 3D d’un expert qui n’est pas présent ce jour-là ?

Tout d’abord, qu'entendons-nous par "continuité pédagogique" ? Celle-ci n’est pas définie de manière définitive. On constate, à travers la littérature, une évolution de sa définition, et ce notamment, depuis la crise sanitaire de 2020. Si avant la pandémie, elle évoquait plutôt des « questions très techniques de l’organisation des cycles scolaires et des liens entre le premier et le second degré » (Wagnon, 2020, §3). Aujourd’hui, elle est définie comme étant « destinée à s’assurer que les élèves poursuivent des activités scolaires leur permettant de progresser dans leurs apprentissages, de maintenir les acquis déjà développés depuis le début de l’année (consolidation, enrichissements, exercices…) et d’acquérir des compétences nouvelles lorsque les modalités d’apprentissage à distance le permettent » (Salah, 2022, §9). Dans cette définition, il est important de mettre en lumière le terme « à distance », car cette modalité apporte un grand changement dans l’apprentissage/enseignement. En plus de la modalité « à distance » citée dans la dernière définition, d’autres auteurs ont également nommé la modalité synchrone/asynchrone. Celle-ci est également importante, car elle fait partie des quatre modalités auxquelles notre interface doit répondre, les deux autres, étant le présentiel et le distanciel. Ces différentes modalités font que la manière d’apprendre, d’interagir, d’enseigner, de collaborer change, car on n’est plus forcément dans une salle de classe en face à face. Notre interface a été construite afin de permettre une continuité pédagogique entre les activités se déroulant au sein du FacLab, mais également lorsqu’on est à distance de celui-ci. Il est important que les activités se poursuivent en présentiel ou à distance et de manière synchrone ou asynchrone.

L’évolution de la définition de la continuité pédagogique montre que la manière d’apprendre ou encore de collaborer a changé.

Présentiel vs distanciel ?

En présentiel, la communication se fait de manière spontanée, naturelle. La gestuelle du corps accompagne le discours ainsi que le non verbal. Plusieurs applications ou plateformes ont été développées ces dernières années afin de permettre de « casser » les barrières du physique et ainsi permettre le travail collaboratif en ligne. L’émergence de technologies (par exemple, internet, le courrier électronique, les téléphones portables, le partage de bureau, la messagerie instantanée, la vidéoconférence, etc.) permet une nouvelle pratique de travail où l’emplacement physique importe peu (Broughton et al., 2009).

BeHere utilise par exemple la technologie de la visioconférence. Les utilisateurs de l’application peuvent créer des réunions à deux ou à plusieurs afin de pouvoir échanger et poursuivre une activité en cours. Le plus de BeHere c’est l’utilisation d’un robot présent au FacLab qui permet de rejoindre physiquement une autre personne ou un groupe, être présent autour d’une table au même titre que les autres personnes. Cela donne la sensation d’une réelle présence au FacLab sans pour autant y être. Le robot étant géré par la personne à distance, il peut se déplacer au sein du labo et ainsi suivre les déplacements effectués par son contact si par exemple, celui-ci devait lui montrer comment utiliser la brodeuse numérique. Une autre technologie utilisée est celle de la réalité augmentée. Des études ont montré que la réalité augmentée réussit à promouvoir l’apprentissage à tous les niveaux scolaires et dans tous les domaines (Enyedy et al., 2012 ; Klopfer, 2008, cités par Enyedy et al., 2015, traduction libre). L’utilisation de cette technologie permet également de rapprocher au plus près les personnes à distance. La personne présente au FacLab, porteuse des lunettes de réalité augmentée, permet de renvoyer une vision claire de ce qu’elle est en train de regarder afin d’inclure au maximum la personne à distance.

Synchrone vs asynchrone ?

Lors d’un cours synchrone par exemple, l’enseignant dispense son cours et les étudiants ont la possibilité de poser des questions et d’interagir avec l’enseignant. Cela reste toutefois un cadre rigide, car si l’étudiant est indisponible, il ne pourra plus rattraper le contenu perdu. On pourrait voir ici une discontinuité pédagogique. L’asynchrone permet une accessibilité en tout temps à des contenus pédagogiques, des apprentissages. Avec l’application BeHere, les utilisateurs ont à disposition BeTuto, qui leur permet d’accéder à des espaces et des ressources d’apprentissage pour favoriser leur auto et co-construction des connaissances (Milrad et al., 2013 cité dans Kohls et al., 2022, traduction libre) et ont également la possibilité de partager leurs ressources avec d’autres. Cela permet une réelle continuité pédagogique, car la construction des connaissances n’est pas délimitée dans le temps mais se fait en fonction de l’utilisateur.

En résumé, BeHere est une application qui permet aux utilisateurs de travailler, d’interagir, de collaborer et d’apprendre d’une manière adaptée à leurs besoins (Kohls et al., 2022, traduction libre) car elle permet aux utilisateurs de collaborer tout en étant en présentiel ou à distance et de manière synchrone ou asynchrone.

Assurer l’apprentissage collaboratif

La collaboration au service de l’apprentissage

La littérature scientifique permet de saisir les enjeux inhérents à l’apprentissage collaboratif : “les apprenants doivent s’engager mutuellement à construire une représentation partagée du problème à résoudre (espace cognitif) et à gérer leurs relations interpersonnelles de sorte à maintenir un climat de travail positif et engageant (espace relationnel)” (Molinari et al., 2021, p.53). Lorsque des personnes collaborent au FacLab, on peut donc supposer qu’elles font face à des défis cognitifs et relationnels qu’il serait opportun d’accompagner. Considérant cela, nous avons conçu BeHere précisément pour que les utilisateur·trice·s du FacLab puissent se retrouver sur une plateforme afin de faciliter les interactions et favoriser la collaboration.

Le contexte du FacLab semble particulièrement intéressant, car de tels lieux ont une vocation éminemment sociale et “s’inscrivent dans une triple logique : une revalorisation des compétences pratiques, le travail par projet et une focale sur les usagers et les usages des outils numériques. En ce sens, ils sont le lieu de pédagogies actives” (Lhoste, 2017, p.16). Dans sa publication, Lhoste (2017) explicite l’apport du travail autour d’un projet collectif au sein d’un FabLab institutionnalisé, pour les apprenants et l’apprentissage :

Au cours du processus de coproduction de l’objet, ils expérimentent des formes d’apprentissage par les pairs. N’importe quel membre du collectif porteur de savoirs populaires ou experts peut alors proposer et conduire une formation technique. [...] Le processus de conception d’un objet conduit l’élève à acquérir la maîtrise et la compréhension des technologies de la fabrication et de l’exploration (Blikstein et al., 2017). C’est son implication dans des projets collectifs qui lui permet d’acquérir des savoirs opérationnels et le conduit, autant que ses enseignants, à reconnaître l’existence de savoirs distribués (Cornu, 2016). (p.19)

Toutefois, la collaboration n’est pas automatiquement synonyme d’apprentissage. D’après Dillenbourg et al. (1995), on peut distinguer trois catégories de variables qui conditionnent l’apprentissage collaboratif : celles liées à la composition du groupe, celles liées aux caractéristiques de la tâche, et celles qui relèvent du contexte de collaboration et du support de communication disponible. BeHere vise ainsi à rendre la collaboration féconde en apportant une solution de communication concrète à intégrer au contexte du FacLab. En conséquence, indépendamment des deux premières catégories de variables évoquées, le fait de renforcer le contexte et la communication devrait bénéficier au groupe. En sus, BeHere permet aussi aux utilisateur·trice·s isolés de trouver des partenaires avec qui collaborer, ce qui s’apparente in fine à la constitution d’un groupe (aussi temporaire soit-il).

Nous postulons également que favoriser la collaboration représente un atout pour les apprenant·e·s, notamment en matière de partage de la charge cognitive et de l’autorégulation :

(...) la volition est moins nécessaire en groupe car les apprenants se protègent mutuellement. Les processus métacognitifs de contrôle sont répartis entre tous les membres du groupe (Corno, 2001, 2004). Le partage des fonctions de contrôle est une spécificité de l’autorégulation groupale (Cosnefroy, 2010, p.37)

La régulation sera abordée plus en détail dans la partie dédiée.

Apprentissage collaboratif et technologies

BeHere est un dispositif qui inclut l’utilisation de lunettes de réalité augmentée. Loin d’être un simple artifice, l’intégration de technologies à des situations d’apprentissage peut représenter un véritable atout, comme l’expliquent Fleck et Audran (2016) :

La réalité augmentée offre de nombreuses possibilités nouvelles pour soutenir l’attention, l’explicitation, étayer l’apprentissage sur des aspects qui, sans elle, ne sont tout simplement pas perceptibles (par exemple l’ajout de guides visuels réalistes et en trois dimensions dynamiques, le feedback d’auto-évaluation, l’affordance de tâches, etc.). (p.86)

Ces aspects cités paraissent avoir une importance considérable pour des débutants dans le contexte du FacLab, d’autant plus que les projets qui y sont menés relèvent de la conception et impliquent d’utiliser divers outils/logiciels parfois inconnus qui nécessitent une assistance. BeHere pourrait ici jouer un rôle de facilitateur communicationnel et pédagogique, tout au long du processus d’apprentissage collaboratif.

Le choix de la réalité augmentée est en fait directement conditionné par les activités menées au FacLab et la notion d’espace “phygital” évoquée par la commanditaire, Mme Nathalie Borgognon ; le dispositif vise à créer un pont entre le FacLab et l’extérieur, par le biais du digital, mais toujours dans l’objectif d’en faire bénéficier la situation de conception et d’apprentissage. En d’autres termes, BeHere se veut une solution “transparente” :

La transparence recherchée dans l'interaction permet à l'utilisateur·trice de porter son attention sur la tâche à réaliser et non sur l'utilisation de l'outil informatique. Il convient alors de ne pas séparer l’homme de son environnement physique lors de l’utilisation de l’ordinateur. Nous visons à limiter les contrastes des deux contextes d’un utilisateur·trice : il y a d’une part le monde réel et d’autre part le matériel informatique

et les informations qu’il retranscrit. La réalité augmentée, axe de recherche du domaine de l'Interaction Homme-Machine (IHM) s'inscrit dans cette approche. (Renevier, 2000, p.9)

Enfin, les recherches dans le domaine du Computer Supported Collaborative Learning (CSCL) mettent en lumière la pertinence d’un dispositif technologique qui encourage les interactions entre apprenants, notamment en matière d’agentivité (agency) :

Learners’ agency, i.e., learners’ capacity to act in their current environment, is a core issue of any educational setting. However, it is of specific importance in CSCL given the central importance of considerations such as motivation, engagement or self-determination (Wise and Schwarz 2017; Stahl et al. 2006). The agency of learners engaged in CSCL settings is supported and/or restricted by a range of factors (e.g., psychological, educational or institutional factors), including the technology used by learners. This is particularly the case when learners are engaged in computer-mediated elaboration of artifacts and/or computer-mediated communication. As mentioned by Stahl et al. (2006) in their analysis of the historical development of the field, in CSCL contexts, the group interactions among individuals are mediated by computer environments. (...) The technology side of the CSCL agenda focuses on the design and study of fundamentally social technologies. To be fundamentally social means that the technology is designed specifically to mediate and encourage social acts that constitute group learning and lead to individual learning (p. 420). (Tchounikine, 2019, p.238-239)

Ce faisant, on peut considérer que BeHere, en tant que plateforme de mise en relation d’apprenants, est une solution judicieuse pour favoriser et soutenir l’apprentissage collaboratif.

Régulation socioémotionnelle

Dans cette partie, les deux problématiques qui ont guidé notre réflexion sont :

“Comment suivre et comprendre le raisonnement de l’autre ?”
“Comment suivre et comprendre les émotions des autres ?”

Par “raisonnement” et “émotions”, nous nous appuyons sur tous les indices visuels et verbaux que les personnes peuvent partager afin de partager leur raisonnement (cognition, motivation) et leurs émotions (intérêt, plaisir, etc.). BeHere se veut utile pour 1) partager ce que font, regardent ou montrent les personnes, 2) partager le plaisir et l’intérêt au sein du groupe et 3) induire un sentiment de présence sociale pour la personne à distance.

La partie ci-dessous, appuyée par la littérature, montre pourquoi BeHere se focalise sur la régulation socioémotionnelle dans le cadre d’environnements informatisés pour l’apprentissage collaboratif (EIAC). Nous répondrons aux deux questions posées précédemment plus bas. De plus, une liste d’exemples de fonctionnalités pour la régulation socioémotionnelle se trouvera dans les parties “Régulation socioémotionnelle” de chaque outil présenté plus bas.

"groups do not necessarily recognize nor react to challenging collaborative situations. Thus, they need to be alerted to and learn to regulate, those processes" (Järvelä et al., 2016 cité dans Velamazán et al., 2022, p.96)

Pourquoi BeHere souhaite-t-elle réguler les processus socioémotionnels ? Tout d’abord, une tâche collaborative permet de partager et mettre en jeu les compétences, connaissances et expertises de chacun·e (Järvelä et al., 2020). Lors de la collaboration et lorsque "chaque membre de l’équipe active et maintient sa cognition, motivation, comportement et émotions à destination du but à atteindre" (traduction libre, Schunk et Greene, 2017, cité dans Järvelä et al., 2020) un apprentissage collaboratif est mis en place. De plus, "sans représentations et buts communs, le travail collaboratif peut devenir moins satisfaisant pour les apprenants, ce qui engendre un apprentissage moins efficace, moins performant et/ou moins amusant" (traduction libre, Järvelä et Hadwin, 2013). Ces processus sont cependant invisibles aux yeux des autres et doivent être partagés dans la collaboration afin de permettre un apprentissage collaboratif (Järvelä et Hadwin, 2013, cité par Järvelä et al., 2020). BeHere se focalise donc à faire émerger ces processus par un partage ponctuel et/ou longitudinal du raisonnement (cognition, motivation) et des émotions ressenties afin d’améliorer la collaboration et ultimement améliorer l’apprentissage qui en découle.

Selon la littérature, trois types de régulations sont en jeu dans des tâches collaboratives : a) l’apprentissage auto-régulé où chacun est responsable de ses propres connaissances, actions, motivation et émotions dans une tâche collaborative, b) l’apprentissage co-régulé où chaque engagement d’une personne est soutenu par les autres membres du groupe, la technologie ou le contexte, c) la régulation de l’apprentissage socialement partagée où tous les membres d’un groupe régulent leur comportement, motivation et émotion de manière synchronisée (Järvelä et Hadwin, 2013; Hadwin et Oshige, 2011; Hadwin et al., 2011; cité dans Järvelä et al., 2016). BeHere se focalise sur les deux derniers points : la co-régulation socioémotionnelle par les pairs et par les technologies et la régulation socialement partagée.

Nous sommes conscient·e·s que ces régulations socioémotionnelles à effectuer en même temps que la tâche peuvent être perçues comme une charge cognitive supplémentaire et inutile pour la complétion de la tâche (Tricot, 2017). Nous nous positionnons sur le fait que les gains escomptés (meilleure collaboration) seront supérieurs aux inconvénients (partage des émotions), ce qui permettra aux utilisateur·trice·s de percevoir la situation comme une réelle opportunité d'apprentissage et d’instancier une intention d'apprendre (Boekaerts, 1998, cité dans Cosnefroy, 2010).

Le modèle SIPS (Sociabilité, Interaction sociale, Présence sociale, eSpace), par Kreijns et Kirschner (2018).

Enfin, nous nous appuyons sur le modèle SIPS (Sociabilité, Interaction sociale, Présence sociale, eSpace) pour l’apprentissage collaboratif de Kreijns et Kirschner (2018). Ce modèle postule que l’apprentissage est directement affecté par les interactions sociales. Ces interactions sociales sont influencées par l’aspect hédonique, éducatif et social de l’environnement informatisé pour l’apprentissage collaboratif. De plus, les interactions sociales sont aussi influencées par la présence sociale, décrites comme "le degré selon lequel l’autre personne est perçue comme physiquement ‘réelle’ dans la communication" (traduction libre, Kreijns et al., 2018, cités par Kreijns et Kirschner, 2018). BeHere souhaite, en plus des aspects hédonique, éducatif et social, prendre en compte cet aspect de présence sociale considéré comme important pour chaque personne à distance.

Comment suivre et comprendre le raisonnement d’autrui ?

Le principal mécanisme mis en jeu dans la compréhension du raisonnement d’autrui dans l’interaction entre des personnes à distance et une personne portant les lunettes de réalité augmentée est celui de l’attention conjointe. L’attention conjointe se passe lors d’un processus d’interaction entre au moins deux personnes. Originellement, cette attention conjointe caractérisait une interaction entre un enfant et son parent. L’enfant manipule physiquement un objet, le déplace dans le champ de vision du parent jusqu’à ce que la réponse verbale/corporelle attendue soit effectuée par le parent (Kidwell et Zimmerman, cité dans Due et Toft, 2021). Goodwin (1994) reprend ce terme en le modifiant pour un contexte professionnel, il appelle alors ceci la “vision professionnelle” qui est « tout moyen socialement organisé de voir et comprendre des événements» (traduction libre). Les lunettes vont donc permettre à la personne au faclab portant les lunettes d’être guidée par le biais de flèches et de dessins faits en temps réel par les providers à distance (Due et Toft, 2021; Spitzer et al., 2018). De cette manière, les providers permettent de ‘faire voir’ au seeker, sa “vision professionnelle” en lui indiquant directement les moyens/indices pour comprendre un événement particulier et donc de suivre le raisonnement des expert·e·s. Il se peut aussi que le/la seeker portant les lunettes interagisse avec les personnes présentes au faclab, les providers pouvant parler à tout le groupe à travers le robot.

Cette fois-ci l’argumentaire s’inverse pour le provider. C’est ce dernier qui est en attente de suivre le raisonnement d’autrui. Le seeker, comme attendant une réponse face à un problème, peut pointer et dessiner sur son interface des objets dont il n’est pas sûr de l’utilité ou la fonctionnalité par exemple. Nous pouvons donc faire la comparaison avec un·e professeur·e qui, en expliquant un savoir, attend ou encourage ses élèves de poser une question - ce qui permet au/à la professeur·e de comprendre le raisonnement d’autrui afin de les ajuster selon l’objectif pédagogique.

En outre, la vue à la première personne (filmée par les lunettes de réalité augmentée) permettra de voir l’action en direct ainsi que les endroits que la personne en présence pointera. De plus, la vue à la troisième personne (robot) permettra aussi d’identifier l’environnement actuel dans lequel se déplace la personne en présence pour ainsi guider de manière plus globale et décrire les éléments qui se trouvent en dehors du champ de vision de la personne en présence.

Comment suivre et comprendre les émotions d’autrui ?

Comment les personnes en présence peuvent-elles suivre les émotions des personnes à distance ? Sachant que l’objet d’intérêt est fondamentalement le projet, la vue de la personne en présence portant les lunettes ne devra donc pas être interrompue par d’autres « distracteurs » (surtout si la manipulation à effectuer est considérée comme dangereuse). C’est pour cela que la fonction ‘smiley à l’écran’ sera désactivée en fonction des mouvements enregistrés au travers des lunettes. Plus les mouvements (tête par des capteurs de mouvements, mains par leur représentation à travers les lunettes) sont lents/précis/immobiles et les yeux pointant pendant une longue durée sur un objet en particulier, moins les smileys seront en visu (plus ils seront transparents, voire désactivés). En dehors, la personne à distance sera invitée aussi à encourager ( 💪, 👏 ) ou à exprimer ses émotions ( 🤩, 😥, 😭, 😁, 😂) qui seront visible par la personne en présence par les lunettes (proche de la fovée) ou via le robot. Cette expression d’émotion émettra un petit son (désactivé après une utilisation abusive de 3 fois) sur le robot afin de prendre en compte cette présence ‘physique’ de la personne à distance.

Comment les personnes à distance peuvent-elles suivre les émotions des personnes en présence ? Premièrement, les personnes à distance auront accès aux vues à la première et à la troisième personne. Les gestes des mains (vue lunettes) ou du langage corporel (vue robot) permettront aux personnes à distance de juger et de suivre les émotions des personnes en présence. Si les images sont de mauvaise qualité, un guidage aux émotions analysées par les caméras (lunettes et robot) sera à disposition et désactivable à tout moment. Par exemple, si le robot capture un relâchement des épaules, du corps accompagné d’une tête vers le bas, l’interface de la personne à distance proposera “Votre collègue semble déçu… 😕 Ne plus afficher / Il s’agit d’une autre émotion”. Libre choix sera donné à la personne sur la façon de réagir, il n’y aura pas de smileys à présenter par exemple. La personne à distance, si elle estime que les émotions analysées ne reflètent pas la réalité, pourra indiquer de quelle émotion il s’agit (afin d’entraîner le système à la reconnaissance d’émotions).

Le robot mobile aura également un rôle important dans le fait d’être présent ‘physiquement’ pour la personne en présence et ‘digitalement’ pour la personne en distance. C’est ce qu’on appelle la téléprésence (Petit et al., 2020).

Prototype final

Exemple de fonctionnalités

Les outils impliqués avec BeHere
BeEyes
La fonction “BeEyes” de l’interface permet d’afficher la vue à la première personne capturée par les lunettes de réalité augmentée. Cette fonction est disponible dans la partie “Chat” de l’interface. Elle est présente (de manière inactivée) dans chaque conversation avec les personnes avec qui l'on souhaite collaborer et est activable lorsque les lunettes sont portées. La fonction “BeEyes” est utilisée par les personnes à distance qui collaborent avec les personnes présentes au faclab. Les fonctionnalités à disposition sont le “pointage”, le “dessin” (suivre le raisonnement) et le “partage de smileys” (suivre les émotions). Ces fonctionnalités permettent de partager l’écran de la personne à distance (avec le raisonnement et les émotions) sur les lunettes de réalité augmentée de la personne les portant.
De plus, une vue à la troisième personne de la personne en présence pourra être visible par les personnes à distance afin d'avoir une vision d’ensemble du contexte. Ainsi, le langage corporel sera perçu par les personnes à distance (voir si les personnes en présence sont avachies, actives, etc.) Le robot aussi aura un rôle important dans le fait d’être présent ‘physiquement’ pour la personne en présence et ‘digitalement’ pour la personne en distance. C’est ce qu’on appelle la téléprésence (Petit et al., 2020).
BeChat
La partie “BeChat” sera le lieu central pour comprendre les émotions d’autrui. Par exemple, avant de se rejoindre pour collaborer sur un projet, des propositions de partage d’émotion sous forme de smiley/gif sont affichées de manière “prêtes à être envoyées”. En cliquant dessus on partage ce type de texte/smiley : “J’ai hâte de travailler avec toi ! 🤓”, “Merci pour ton aide ! 🤩”, “On va y arriver 💪”
BeTuto
La fonction “BeTuto” de l’interface permet de créer des vidéos mais aussi de consulter ces dernier·e·s. Ceci se fait donc de manière asynchrone. Les fonctionnalités à disposition sont les tutoriels en asynchrone. Au FacLab, chacun·e peut utiliser les lunettes de réalité augmentée pour filmer ses propres projets afin de documenter le processus et créer des tutoriels. Les tutoriels sont disponibles pour toute personne sur la plateforme. La partie “BeTuto” de l’interface présentée plus haut (voir continuité pédagogique) contient des fonctionnalités différentes liées à la régulation socioémotionnelle en fonction de notre statut (seeker ou provider ). Lorsqu’elle est utilisée par les personnes faisant le tutoriel, un texte d’introduction est affiché avant d’appuyer sur le bouton “Enregistrement” qui propose de “bien expliquer chaque mouvement, et de décomposer la tâche globale en plusieurs sous-tâches”. Ceci permet aux personnes qui regardent la vidéo de suivre le raisonnement de manière asynchrone. Dans la partie “BeTuto”, si nous nous positionnons du côté du demandeur·euse d’aide, lors du visionnage de la vidéo, il sera possible d’annoter à la seconde près la vidéo ou de commenter généralement la vidéo pour permettre de partager ses émotions. L’annotation de la vidéo propose automatiquement deux types de smiley “ 😍”, “ 🤔” aux côtés d’une fenêtre pour commenter. Pour le commentaire général, un pop-up sera automatiquement présenté 5 secondes avant la fin de la vidéo pour suggérer l’écriture d’un commentaire (on peut imaginer aussi que chaque commentaire écrit nous donne des points de présence, visible par tout·e·s les utilisateur·trice·s). Ceci permettra aux personnes autrices de la vidéo de suivre et comprendre les émotions des visionneur·euse·s afin d’y répondre le plus adéquatement possible.

Scénarios d’usage

Interface de BeHere

Dans les parties présentées ci-dessous, nous énumérerons quatre scénarios d’usages qui sont : 1) le seeker présent et le provider distant, 2) le seeker distant et le provider présent, 3) un groupe de seeker présent et un groupe de provider et seeker distant, et 4) l’asynchronie médiée par des tutoriels.

Cas 1 : Seeker présent/Provider distant

Demande d’aide à travers BeHere
  • Gab veut aller au FacLab pour faire une impression 3D.
  • Comme il est novice, il se rend d’abord sur le site du FacLab, où notre service/plateforme est bien mis en évidence.
  • Sur BeHere, il décrit en quelques mots son projet, la technologie utilisée (= compétence recherchée pour aide), et le moment où il compte se rendre au FacLab (il peut aussi faire cela sur place et indiquer qu’il est présent, mais il risque d’attendre avant de recevoir une réponse).
Alerte indiquant une nouvelle demande d’aide
  • Sur la plateforme, les autres utilisateur·trice·s peuvent voir que Gab demande de l’aide.
Confirmation de la mise en relation entre deux utilisateurs
  • Gab reçoit ensuite une réponse favorable : May, dont le profil indique 5/5 en compétence impression 3D, sera disponible pour assister à distance au moment demandé !
Exemple de vue pour l’utilisateur·trice des lunettes de réalité augmentée (source : Microsoft)
  • Le jour choisi, Gab va au FacLab, prend une paire de lunettes de réalité augmentée disponible à l’entrée (boite qui s’ouvre par authentification avec téléphone pour traçabilité, ou demande au responsable du FacLab sur place), il s’installe et démarre l’appel avec May.
Exemple d’écran de la personne aidante (source : youtube.com/watch?v=lYcYWlghfQQ)
  • À distance, cette dernière voit tout ce que fait Gab, et elle peut pointer, entourer ou écrire des infos qui s’afficheront directement sur les lunettes de réalité augmentée.
Illustration d’une situation de travail (source : Microsoft)
  • Gab est content d’avoir dépassé ses difficultés et May est contente d’avoir pu aider un débutant.

Note : Pas besoin de technologie à outrance ! Si un utilisateur·trice veut demander de l’aide à une personne présente au FacLab, il peut évidemment toujours le faire. Et s’il demande de l’aide sur la plateforme mais que la personne qui répond peut se rendre au FacLab, pas besoin de lunettes de réalité augmentée !

Cas 2 : Seeker distant/Provider présent

Interface de vidéoconférence

La plateforme permet de mettre en relation un utilisateur·trice distant à un utilisateur·trice présent au FacLab :

  • Un utilisateur·trice distant doit lancer une impression 3D qui durera 3h, ou cette dernière va se finir mais l’utilisateur·trice a dû partir.
  • L’utilisateur·trice distant utilise BeHere pour poster une demande de type “simple coup de main” et décrit son besoin, par exemple “je voudrais lancer l’impression de tel fichier sur telle machine avec tels paramètres” ou “mon impression au poste X se terminera à telle heure, merci de le mettre de côté (à un endroit prévu pour)”.
  • Un sympathique utilisateur·trice présent au FacLab voit la demande et répond “pas de problème, je m’en charge”.
  • L’utilisateur·trice distant ira récupérer son objet à l’endroit prévu à cet effet, quand il le pourra.

Cas 3 : Groupe/individu présents & groupe/individu distant

Interface de vidéoconférence
  • Des membres ne peuvent pas être présents au FacLab, mais ils sont disponibles à distance.
  • Une personne du groupe présente au FacLab porte les lunettes de réalité augmentée pour que les absents puissent tout voir.
Combo enceinte + micro pour que les utilisateur·trice·s à distance puissent communiquer avec l'ensemble du groupe présent au FacLab (source : Beyerdynamic)
  • Utilisation d’une petite enceinte avec micro pour que les absents puissent communiquer avec tout le monde et pas seulement celui qui porte les lunettes de réalité augmentée.

Cas 4 : Asynchronie médiée par tutoriels

Accès aux tutoriels vidéo

Tout utilisateur·trice du FacLab peut utiliser les lunettes de réalité augmentée pour filmer ses propres projets afin de documenter le processus et créer des tutoriels (comme le site instructables.com, mais davantage axé sur la vidéo). Les tutoriels sont disponibles pour tout le monde sur la plateforme (on peut imaginer quelques critères de tri, par exemple par technologie ou par difficulté).

Plus-value

  • Amélioration des capacités d’aide et de collaboration à distance + communauté de pairs
  • Valeur pédagogique du dispositif (apprentissage expérientiel, on apprend auprès d’une personne compétente, autour d’un projet concret)
  • Possibilités aide/collab au-delà de l’uni (ajout/consultation de tutoriels aussi)
  • Pas d’isolement total avec le monde réel
  • Faisabilité au niveau technique
  • L’acceptabilité pour les lunettes de réalité augmentée est garantie dès le moment où les bénéfices fonctionnels sont clairement démontrés aux utilisateur·trice·s (Rauschnabel et Ro, 2016). Dans une étude de Spitzer et al. (2018), le fait d’écouter ou de voir les annotations en temps réel de l’aidant·e à travers les lunettes a été essentiel pour le guidage lors d’une manipulation.

Limites

  • En matière de limites, pragmatiquement, on peut en premier lieu mentionner le prix du dispositif. Les lunettes de réalité augmentée et les robots mobiles représentent un investissement considérable, d’autant plus que le FacLab est dépendant des fonds qui lui sont alloués et ses dépenses prioritaires concernent certainement les machines dédiées à la conception.
  • Un défi non négligeable réside dans l’intégration matériel-logiciel, soit la compatibilité entre les technologies employées (robots mobiles et lunettes de réalité augmentée) et les applications de vidéoconférence ainsi que les outils de guidage pour pointer/entourer. Dans l’idéal, il faudrait s’appuyer sur un équivalent opensource de Microsoft Dynamics 365 Remote Assist, combiné à un parc d’appareils compatibles.
  • Une autre limite du dispositif concerne son utilisation effective et spontanée par les apprenants : “co-learners do not spontaneously engage in efficient social interactions and cognitive processes” (Sangin et al., 2011). En 2017, Mulet et al. expliquent les problèmes d’évitement ou de sur-sollicitation d’aide, qu’ils associent à un problème d’autorégulation :
Certains évitent la recherche d’aide lorsqu’ils en ont besoin, d’autres au contraire sursollicitent les aides et les consultent sans essayer d’accomplir la tâche visée seuls – on parle alors d’abus de la demande d’aide. Ces comportements dénotent un manque d’autorégulation : l’apprentissage autonome à distance nécessite en effet la mobilisation de stratégies d’autorégulation de la part des apprenants (Jézégou, 2010 ; Jézégou, 2008). Or, la recherche d’aide, lorsqu’elle est strictement limitée aux besoins de l’apprenant, est considérée comme une stratégie d’autorégulation bénéfique pour les performances d’apprentissages en contexte d’apprentissage social (Nelson-Le Gall, 1981 ; 1985) comme en EIAH (Vaessen et al., 2014).
  • On peut également relever la difficulté de contrôle de la qualité de l’aide fournie à un apprenant ; l’approche collaborative peut certes favoriser l’apprentissage, mais pas obligatoirement la transmission de bonnes pratiques.
  • L'application reste un outil ne permettant "que" de la visualisation d'images vidéo soit en direct, soit en asynchrone. Afin que l'application réponde encore mieux au défi du phygital, il serait nécessaire d'inclure une modalité qui permet à la personne à distance de toucher des objets afin d'apporter encore plus de concret à la collaboration dans le domaine du phygital (ex. problème de la bouteille).
  • Par ailleurs, pour que le dispositif de mise en relation et d’aide fonctionne, BeHere dépend de la disponibilité et de la bonne volonté des aidant·e·s.
  • Le partage des émotions se fera pour la plupart du temps de manière volontaire (ce qui induit une certaine charge cognitive) - nous pouvons penser à une automatisation grace à des mesures physiologiques comme l’activité électrodermale, fréquence cardiaque, reconnaissance faciale, etc.
  • BeHere a été conçu et réfléchi selon trois scénarios énumérés dans la partie Scénarios d’usage. Ces trois scénarios ne rendent pas compte de l’univers des possibilités d’utilisation de BeHere. Le tableau ci-dessous montre que nos scénarios ne renseignent que trois cas parmi 64 possibilités de cas d’usages imaginables :
Champ des possibilités de BeHere

Références

  • Borgognon, N. (2022). Conception d'un prototype d’espace phygital pour la continuité présence-distance des activités au faclab [Présentation]. Université de Genève.
  • Broughton, M., Paay, J., Kjeldskov, J., O’Hara, K., Li, J., Phillips, M., & Rittenbruch, M. (2009). Being here : Designing for distributed hands-on collaboration in blended interaction spaces. Proceedings of the 21st Annual Conference of the Australian Computer-Human Interaction Special Interest Group on Design: Open 24/7 - OZCHI ’09, 73. https://doi.org/10.1145/1738826.1738839
  • Dillenbourg, P., Baker, M., Blaye, A., & O'malley, C. (1995). The evolution of research on collaborative learning. In E. Spada et P. Reiman (dir.), Learning in Humans and Machine: Towards an interdisciplinary learning science (p. 189-211). Elsevier.
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  • Järvelä, S., Kirschner, P. A., Hadwin, A., Järvenoja, H., Malmberg, J., Miller, M., & Laru, J. (2016). Socially shared regulation of learning in CSCL: Understanding and prompting individual- and group-level shared regulatory activities. International Journal of Computer-Supported Collaborative Learning, 11(3), 263-280. https://doi.org/10.1007/s11412-016-9238-2
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  • Lhoste, É., & Barbier, M. (2016). FabLabs : L’institutionnalisation de Tiers-Lieux du « soft hacking ». Revue d'anthropologie des connaissances, 10(1), 43-69. https://doi.org/10.3917/rac.030.0043
  • Molinari, G., Muller Mirza, N., & Tartas, V. (2021). Regards croisés des approches cognitives et socioculturelles sur l’apprentissage collaboratif : quelles contributions dans le domaine de l’éducation ?. Raisons éducatives, 25, 41-64.
  • Molinari, G. (2022). Apprentissage collaboratif et awareness [Présentation]. Université de Genève.
  • Mulet, J. Sakdavong, J.-C., & Huet, N. (2017). Quels tuteurs informatisés pour réduire les comportements d’évitement de la recherche d’aides des apprenants ? Distance et Médiations des Savoirs, 19.
  • Nedjar-Guerre, A., & Gagnebien, A. (2015). Les fablabs, étude de cas : Le faclab de Cergy-Pontoise à Gennevilliers est-il un lieu d'expérimentation sociale en faveur des jeunes ?. Agora débats/jeunesses, 69, 101-114. https://doi.org/10.3917/agora.069.0101
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  • Renevier, P. (2000). Supports mobiles d’interaction et réalité augmentée en situation collaborative [thèse de DEA, Université Joseph Fourier / Institut National Polytechnique, Grenoble, France]. Équipe Ingénierie de l'Interaction Humain-Machine. http://iihm.imag.fr/publs/2000/DEA_Renevier.pdf
  • Sangin, M., Molinari, G., Nüssli, M.-A., & Dillenbourg, P. (2011). Facilitating peer knowledge modeling: Effects of a knowledge awareness tool on collaborative learning outcomes and processes. Computers in Human Behavior, 27, 1059-1067.
  • Tricot, A., (2017). Quels apports de la théorie de la charge cognitive à la différenciation pédagogique ? Quelques pistes concrètes pour adapter des situations d’apprentissage. Dans Notes remises dans le cadre de la conférence de consensus du Cnesco et de l’Ifé/Ens de Lyon « Différenciation pédagogique : comment adapter l’enseignement pour la réussite de tous les élèves ?», pp.157-165.
  • Velamazán, M., Santos, P., & Hernández-Leo, D. (2022). Socio-emotional regulation in collaborative hybrid learning spaces of formal–informal learning. In Hybrid Learning Spaces (pp. 95-111). Springer, Cham.

Ressources

  • Cette présentation a été créée à partir d’un template créé par Slidego et qui inclut des icônes de Flaticon et des images et infographies de Freepik. Les modifications d’images ont été faites sur Powerpoint et Photopea.
  • Images Freepik :
  • Pack D'illustration De Personnage Masculin de pikisuperstar
  • Smartphone maquette isolé de zlatko_plamenov
  • Set D'étudiants Avec Différentes Postures de pikisuperstar
  • Set D'étudiants Avec Différentes Postures de pikisuperstar
  • Illustration Dessinée à La Main De Personnes Avec Un Smartphone Pour Le Marketing de pikisuperstar

26 décembre 2022 à 19:24 (CET)