Temporal Motivation Theory
Introduction
Nombreux ont été les travaux issus de la littérature scientifique à avoir été produits concernant la motivation (Dörnyei et Ushioda, 2011). Étudiée sous toutes ses coutures, la motivation, qu’elle soit intrinsèque ou extrinsèque ne cesse de questionner. En effet, les mécanismes complexes à l’œuvre dans le fonctionnement de la motivation humaine nécessitent une approche elle aussi complexe pour être expliqués le plus précisément possible.
Deux acteurs majeurs impliqués dans cette quête de compréhension et de définition de la motivation, Piers Steel et Cornelius J. König se sont attaqués à étudier la motivation sous le versant de la procrastination afin d’observer dans quelles conditions (internes ou externes à l’individu), les stratégies d’auto-régulation de la motivation échouent.
Steel et König, en développant la Temporal Motivation Theory (TMT), se sont ainsi appuyé sur l’intégration de plusieurs approches et modèles théoriques majeurs de la motivation, tels que la théorie des attentes (expectancy theory), la théorie des besoins (need theory), la théorie des perspectives cumulatives (cumulative prospect theory) et le modèle de l’aversion temporelle (hyperbolic discounting).
Le temps est ici placé au centre de l’attention de ce modèle et vient jouer le rôle de perturbateur au sein des stratégies motivationnelles des individus. Ces échecs à l’auto-régulation (self-regulatory failure) menant invariablement, dans le meilleur des cas, à la procrastination, si ce n’est à l’abandon pur et simple de la tâche initiale.
Temporal Motivation Theory en pratique ?
Afin d'expliquer la temporal motivation theory rapidement et facilement, prenons un angle d'approche pédagogique original, l'approche dialogique.
Laissez-vous guidez étape par étape et profitez de ce court module en 8 étapes de quelques minutes reposant sur les travaux de Piers Steel et Cornelius J. König (2006).
Qu’est-ce que la procrastination ?
Qu’elle soit chronique (qui dure ou se répète dans le temps) ou ponctuelle, la procrastination, n’en déplaise aux plus motivés d’entre-nous, est un de ces comportements humains que tout un chacun a déjà expérimenté. Elle se caractérise essentiellement par le fait de repoussé volontairement la réalisation d’une tâche nonobstant la connaissance des conséquences négatives en résultant.
En quelques chiffres
Selon les nombreux travaux portant sur la procrastination chronique (Abbasi et Alghamdi, 2015; Harriott et Ferrari, 1996, Steel, 2007), sa prévalence est estimée entre 20 et 25% chez la population adulte. Pas moins de 80 à 95% des étudiants du secondaire estiment également se considérer comme procrastinateur réguliers à différents niveaux (Steel, 2007).
En soit, procrastiner n’est pas un mal en soi et pourrait être considéré comme une réponse “normale” de notre organisme afin de conserver son homéostasie, moins d’efforts, plus de réconforts. S’il n’y a pas d’action (que j’évalue comme) insurmontable à réaliser, je peux conserver cette énergie et l’allouer à des activités qui sur le moment t me procurent plus de satisfaction ou impliquent l’apparition d’émotions identifiées comme positives (Sirois et Pychyl, 2013).
Mais ce n’est bien sûr pas sans conséquence, et ce n’est pas non plus sans raison que la procrastination est vue d’un mauvais œil la grande majeure partie du temps : toujours d’après les travaux de Steel en 2007, à l’issue d’une enquête, 94% des individus interrogés ont indiqués que la procrastination a déjà eu un effet significatif sur leur bonheur et 18% ont indiqués cet effet comme extrêmement négatif.
En pratique
Un comportement impliquant de la procrastination, d’ordre académique, est éminemment contre-productif, inutile et retardateur (Schraw et al., 2007). Steel (2007) conclue également que la procrastination “correspond au fait de volontairement retardé une activité ou une action tout en s’attendant consciemment au revers négatif dû au délais”.
L’évaluation du plaisir ressenti à l’instant t, comparativement à celui que je ressentirai à t+1, est un élément majeur lié à la prise de décision concernant la réalisation d’une activité, ou à son report.
Or, admettons un individu calculant cette balance coûts bénéfices selon ce dilemme simple. Deux récompenses lui sont proposées :
- Une de faible valeur (2€) qu’il perçoit instantanément,
- Une de grande valeur (10€) qu’il percevra dans un mois.
Deux évaluations sont réalisées par l’individu en question, à savoir (1) le différentiel des sommes perçues - 2€ contre 10€ - et le différentiel temporel (instantané contre un délais d’un mois).
Selon la Temporal Motivation Theory, la probabilité de succès (récupérer une récompense) est plus élevée pour la plus petite somme que pour la plus grande, d’autant plus que le délais est important.
En résumé, au plus je suis temporellement distant du résultat, au plus que je suis susceptible de retarder la mise en place des comportements permettant de l’atteindre, ou d’accepter un résultat de substitution de moindre valeur.
Est-on voué à procrastiner à vie ?
La procrastination résulte finalement de mécanismes cognitifs et affectifs normaux. Ces derniers nous aiguillant sur les comportements adaptés à adopter en visant à maintenir un état interne (émotionnel, affectif) stable malgré les changements extérieurs, selon le contexte environnemental et social, dans lequel on se situe selon des évaluations cognitives complexes.
On voit ainsi rapidement se dessiner que l’intérêt n’est pas tant de chercher à supprimer totalement la procrastination de nos habitudes (en vain), mais plutôt d’essayer de limiter autant que possible les effets négatifs de la procrastination que nous vivons potentiellement tous au quotidien à différents niveaux, à différentes échelles.
Quelles stratégies pour ne plus procrastiner ?
[En construction].