Favoriser la qualité des apprentissages grâce aux interactions sociales et personnelles

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Thomas Wünsche - Volée Aegir

Résumé

Dans le monde de l'apprentissage, il existe plusieurs types d'interactions entre apprenants. Le but de cet article va être d'en répertorier quelques-unes qui favoriseraient la progression des apprentissages.

Introduction

En tant qu'enseignant ou formateur, il est logique de se questionner sur les moyens à mettre en place pour permettre la meilleure progression possible des apprenants dans un domaine visé. L'intégration d'interactions sociales dans le travail est une piste d'action plus que prometteuse afin de favoriser la qualité des apprentissages. C'est pour cette raison qu'il parait pertinent de s'y pencher plus en détail. Cet article Wiki a comme objectif de présenter les bienfaits des interactions sociales et individuelles dans les apprentissages en faisant des liens entre différents articles issus de la littérature scientifique en Sciences de l'Éducation.

Développement

Il est important de préciser que les interactions sociales n’ont pas forcément un effet positif sur l’apprentissage. En effet, on peut citer en exemple la situation d’un apprenant donnant une réponse à un autre. Ce genre d’interaction n’apporte que peu sur le plan des apprentissages, autant pour celui qui partage la réponse que pour celui qui la reçoit (Dillenbourg, Baker, Blaye & O'malley, 1996, p.13). Il faut donc se questionner sur les conditions nécessaires pour qu’une collaboration soit source de progression dans les apprentissages. Il s’agit là du « paradigme des interactions » décrit par Dillenbourg et al. (1996).

Les interactions sociales dans l’apprentissage collaboratif

Pour commencer, il est important de faire la distinction entre la collaboration et la coopération. La coopération se réfère plus à une répartition des tâches dans un travail donné afin d’atteindre un but commun. La collaboration de son côté peut se définir par l’engagement mutuel des apprenants afin de résoudre un problème donné (Dillenbourg et al., 1996, p.2).. Il faut alors se questionner sur les différentes situations qui favoriseraient la collaboration et donc les apprentissages. Tricot (2017) propose une piste de réponse à cela en expliquant que les effets positifs du travail de groupe dépendent de différents facteurs. Par exemple, il est pertinent de « proposer du travail en groupe (selon un scénario précis) quand l’apprentissage visé est éloigné des élèves ; sinon, le travail peut être réalisé seul » (p.6). À l’inverse, pour les apprenants ayant plus de facilité, il est également possible de tirer profit des interactions. Pour cela, il faut que l’accès aux connaissances d’autrui soit une nécessité pour avancer. Ces pistes de réponse proposées par Tricot (2017) mettent en évidence un aspect central de la collaboration : l’entraide doit être une nécessité pour résoudre la tâche et non une option possible. Cela fait écho à la notion d’« interdépendance positive » qui joue un rôle central dans la mise en place d’une pédagogie coopérative aux profits des apprentissages. Pour stimuler les interactions collaboratives, il est donc impératif que les apprenants aient un rôle actif et unique à jouer au sein du groupe. Buchs (2017) souligne d’ailleurs l’importance de l’engagement actif des apprenants au travers d’interactions sociales afin de favoriser les apprentissages au sein d’un groupe (p.191).

Le rôle du conflit socio-cognitif dans les interactions sociales

Il faut noter que les interactions sociales entre apprenants ne vont pas toujours dans le même sens. Il arrive régulièrement qu’elles soient source de désaccords. La confrontation d'opinions peut toutefois être très constructive et mener à une meilleure compréhension des savoirs visés. Cela permet de faire un lien avec le concept de conflit socio-cognitif. Le conflit socio-cognitif peut se définir de la manière suivante : il s’agit d’ « un processus paradoxal déclenché par un désaccord explicite entre deux personnes et qu’elles résolvent d’un commun accord » (Maulini, 2016). On retrouve ce concept dans l’approche socio-constructiviste exposée dans l’article de Dillenbourg et al. (1996). Cette approche valorise beaucoup le rôle des interactions et présente le conflit notamment au sein d’un cercle vertueux : un apprentissage individuel permet de prendre part à des interactions sociales, ces interactions sociales créent de nouveaux apprentissages individuels. Pour favoriser les apprentissages, il est donc important de se questionner sur comment intégrer le conflit socio-cognitif dans un travail collaboratif. Pour cela, les auteurs proposent plusieurs solutions. D’une part, il est possible de faire collaborer deux apprenants à des stades différents d’apprentissage. D’une autre part, les auteurs évoquent la possibilité de regrouper entre eux des apprenants ayant une certaine non-maitrise du sujet (« inconsistency among the knowledge »)(p.4).

Les interactions personnelles et l'autorégulation

Quand on parle d’interactions dans l’apprentissage, on pense souvent à des interactions verbales entre pairs et donc à un discours social. Or l’approche socio-culturelle présentée dans l’article de Dillenbourg et al. (1996, p.5) présente un deuxième type de discours menant à un autre type d’interactions : le discours intérieur ou « inner speech ». Le discours intérieur est source d’interactions avec soi-même et mène à la réflexion. Il permet la mise en place d’un processus d’autorégulation (p.6). Il est donc possible de faire un lien direct avec l’article de Cosnefroy (2010) qui explique les bienfaits de l’autorégulation dans l’apprentissage. En effet, il existe différentes stratégies d’autorégulation que l’auteur décrit comme favorable à l’apprentissage. On peut citer par exemple les stratégies cognitives et métacognitives qui ont pour fonction d’ « optimiser le traitement de l’information » (p.24) ou encore les stratégies volitionnelles qui permettent à l’apprenant de soutenir sa motivation à apprendre.

Conclusion

Finalement, ce travail autour de différents articles de littérature scientifique a permis non seulement de mettre en valeur les enjeux majeurs des interactions dans l'apprentissage, mais aussi de souligner la complexité de leur mise en place en situation d'apprentissage. En effet, les interactions sociales et personnelles semblent efficaces pour soutenir les apprentissages. Or, leur simple présence ne suffit pas à aider les apprenants à avancer dans leur compréhension. Plusieurs facteurs sont à prendre en compte comme la présence d'interdépendance positive ou de conflits socio-cognitif au sein d'un groupe de travail pour améliorer la qualité des interactions.

Bibliographie

Buchs, C. (2017). Apprendre ensemble : des pistes pour structurer les interactions en classe. Les interactions sociales en classe : réflexions et perspectives (pp. 189-208). Berne: Peter Lang.

Cosnefroy, L. (2010). L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes. Savoirs 2010/2 (n°23), pp.9-50. doi : 10.3917

Dillenbourg, P., Baker, M., Blaye, A. & O'malley, C. (1996). The evolution of research on collaborative learning. In E. Spada & P. Reiman (Eds) Learning in Humans and Machine: Towards an interdisciplinary learning science. (pp.189-211). Oxford : Elsevier.

Maulini, O. (2016). L’activité des élèves : entre intérêt, conflits et sens (UF742000 Processus de formation et d’apprentissage : métier d’enseignant et évolutions de l’école) [Présentation PowerPoint]. Genève : Université de Genève. Repéré à http://www.unige.ch/fapse/sse/teachers/maulini/2016/cours-tc-04d.ppt

Tricot, A. (2017). Quels apports de la théorie de la charge cognitive à la différenciation pédagogique ? Quelques pistes concrètes pour adapter des situations d'apprentissage. In Conférence de consensus (Lyon 7-8 mars 2017). Repéré à https://www.cnesco.fr/fr/differenciation-pedagogique/paroles-dexpert/conditions-de-reussite/