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: [http://franck.varenne.perso.monsite-orange.fr/ Franck Varenne] - Directeur du département de philosophie et Maître de conférences HDR en philosophie des sciences (Université de Rouen, France)
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Si on conçoit tout environnement informatique comme le déroulé d’un modèle, d’une représentation simplifiée, on peut douter de l’apport de l’informatique dans les apprentissages de la complexité, en particulier pour les phénomènes humains. Dans cet exposé, j’essaierai cependant de montrer que certains dispositifs de simulation informatique à multi-modèles peuvent aider à cet apprentissage, notamment en géographie, archéologie et histoire.
== Résumé ==
Comme les enseignants en font l’expérience, il est plus aisé d’enseigner – et de faire mémoriser – des hypothèses causales simples pour expliquer un phénomène mathématique, physique, biologique ou humain que des hypothèses à causalités plus complexes et combinées. Or, parfois, ce sont ces causalités combinées, entrelacées, qui sont réellement à l’œuvre. Alors, comment transmettre aussi le goût de rechercher des explications plus complexes ? Comment susciter le sens de la complexité, si justement vanté par ailleurs par Edgar Morin, parmi d’autres, et, plus récemment encore, par Boris Cyrulnik, à une époque où acquérir et faire acquérir le sens de la mesure et de la complexité devient crucial et urgent ? Comment éveiller à l’intuition des systèmes complexes si tant est que ce ne soit pas une entreprise auto-contradictoire ?
 
Dans cet exposé, je suggérerai l’idée que la pratique et l’usage d’environnements informatiques eux-mêmes relativement complexes et multiparamètres tels que des simulations intégratives d’écosystèmes ou de systèmes hybrides (bio-géo-humains) pourraient être d’un certain secours en la matière. En revenant sur quelques épisodes récents d’histoire des sciences humaines computationnelles, je montrerai que l’approche par simulations intégratives multiprocessus a pu aider des chercheurs de sciences humaines à complexifier et pluraliser leurs hypothèses causales en archéologie, en histoire et en géographie humaine notamment. Ces environnements permettent en effet une approche modeste, en retenue et expérimentale – par essais hypothétiques et erreurs observées – plutôt qu’analytique ; et ils promeuvent également des hypothèses multiprocessus plutôt que monocausales.
 
Les sciences humaines continuent à être traversées par de grands récits explicatifs hypothétiques relativement simplistes et largement incompatibles (marxismes, holismes, libéralismes juridiques, libéralismes économiques, individualismes méthodologiques, sociobiologie, etc.). Peut-être l’heure est-elle venue de faire d’abord expérimenter non seulement les chercheurs mais aussi les apprenants en sciences humaines de façon à leur faire d’abord sentir et ressentir l’épaisseur d’abord contre-intuitive de la complexité des phénomènes humains, épaisseur non dépourvue de comportements locaux parfois simples ou simplifiables, il est vrai, mais qui ne peut être fondée elle-même sur des schémas causaux uniques et majoritaires comme aimait encore à l’espérer Stuart Mill, un des fondateurs de l’épistémologie des sciences humaines contemporaines.


==Documents ==
==Documents ==

Version du 4 octobre 2022 à 17:36

Apports des simulations intégratives dans la recherche académique et dans les apprentissages

Franck Varenne - Directeur du département de philosophie et Maître de conférences HDR en philosophie des sciences (Université de Rouen, France)

Résumé

Comme les enseignants en font l’expérience, il est plus aisé d’enseigner – et de faire mémoriser – des hypothèses causales simples pour expliquer un phénomène mathématique, physique, biologique ou humain que des hypothèses à causalités plus complexes et combinées. Or, parfois, ce sont ces causalités combinées, entrelacées, qui sont réellement à l’œuvre. Alors, comment transmettre aussi le goût de rechercher des explications plus complexes ? Comment susciter le sens de la complexité, si justement vanté par ailleurs par Edgar Morin, parmi d’autres, et, plus récemment encore, par Boris Cyrulnik, à une époque où acquérir et faire acquérir le sens de la mesure et de la complexité devient crucial et urgent ? Comment éveiller à l’intuition des systèmes complexes si tant est que ce ne soit pas une entreprise auto-contradictoire ?

Dans cet exposé, je suggérerai l’idée que la pratique et l’usage d’environnements informatiques eux-mêmes relativement complexes et multiparamètres tels que des simulations intégratives d’écosystèmes ou de systèmes hybrides (bio-géo-humains) pourraient être d’un certain secours en la matière. En revenant sur quelques épisodes récents d’histoire des sciences humaines computationnelles, je montrerai que l’approche par simulations intégratives multiprocessus a pu aider des chercheurs de sciences humaines à complexifier et pluraliser leurs hypothèses causales en archéologie, en histoire et en géographie humaine notamment. Ces environnements permettent en effet une approche modeste, en retenue et expérimentale – par essais hypothétiques et erreurs observées – plutôt qu’analytique ; et ils promeuvent également des hypothèses multiprocessus plutôt que monocausales.

Les sciences humaines continuent à être traversées par de grands récits explicatifs hypothétiques relativement simplistes et largement incompatibles (marxismes, holismes, libéralismes juridiques, libéralismes économiques, individualismes méthodologiques, sociobiologie, etc.). Peut-être l’heure est-elle venue de faire d’abord expérimenter non seulement les chercheurs mais aussi les apprenants en sciences humaines de façon à leur faire d’abord sentir et ressentir l’épaisseur d’abord contre-intuitive de la complexité des phénomènes humains, épaisseur non dépourvue de comportements locaux parfois simples ou simplifiables, il est vrai, mais qui ne peut être fondée elle-même sur des schémas causaux uniques et majoritaires comme aimait encore à l’espérer Stuart Mill, un des fondateurs de l’épistémologie des sciences humaines contemporaines.

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