Gameflow

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Introduction

Aristote avait déjà conclu il y a 2300 ans, que les êtres humains recherchent le bonheur et le plaisir personnel. Un but qui est partagé par une majorité d’individus dans divers domaines. Mais encore faut-il être motivé ! Dans le domaine des théories de la motivation, nous pouvons distinguer trois approches conceptuelles différentes de la motivation : L’autodétermination, l’auto-efficacité et l’autotélisme. Dans l'élaboration de ce travail, nous allons nous intéresser à la dernière approche en ciblant une théorie importante, celle du flow.

Csikszentmihalyi, psychologue hongrois, a énormément travaillé sur le concept du bonheur et devint le concepteur de la notion du flow. Le flow (le flux en français traduit de l'anglais), est une expérience que vous avez peut-être déjà vécue. Cet instant où vous êtes littéralement absorbés par une activité, dont l'importance et l'intérêt passe au-dessus de toutes autres activités prévues ou nécessaires, voire vital dans des cas extrêmes. La notion du temps devient abstraite sur l'instant. L'individu se retrouve seul à seul avec l'activité en lui procurant cette sensation de flow. Beaucoup de jeux vidéo sont connus pour leur capacité à amener les joueurs vers une situation du flow très profonde, qui leur permet de passer des heures sans ennui. Mais est-ce que les jeux vidéo éducatifs ont le même effet sur les joueurs ?

Le flow est très important dans des situations d’apprentissage pour pouvoir se concentrer dans une activité et améliorer les compétences requises, mais alors que manque-t-il au jeu éducatif pour amener le joueur vers une situation du flow ?

Dans cette revue, après la présentation de la théorie du flow, nous développerons quelques exemples ainsi que des applications qui utilisent cette dernière et qui sont élaborées autour de cet état mental, en se concentrant notamment sur le lien entre flow et jeux vidéo éducatifs. Nous présenterons les principales mesures du flow, en discutant les résultats et les limites, tout en passant par le point central et incontournable : le gameflow (global, pour les jeux pervasifs et les jeux pédagogiques).

La motivation et ses trois approches conceptuelles

Selon Fenouillet (2009), la motivation est « une hypothétique force intra-individuelle protéiforme, qui peut avoir des déterminants internes et/ou externes multiples, permettant d’expliquer la direction, le déclenchement, la persistance et l’intensité du comportement ou de l’action. »

La motivation est hypothétique car elle est une construction mentale, dont chacun a sa définition, dépendant de facteurs multiples et tendant à déterminer les choix pris dans nos interactions. Ces trois conceptions sont importantes, mais ne sont qu’une surface en regard des 101 théories de la motivation développées par F. Fenouillet (2009).

Conception liée à des besoin/motif : l’autodétermination (Deci & Ryan)

Les besoins déterminent l’orientation. Cela devient la partie la plus importante, tout individu tend à satisfaire ces trois besoins : autodétermination, compétence, et appartenance sociale. L’appartenance sociale est celui qui est de loin le plus important selon J. Heutte (2013). Il renvoie à la notion de l’autonomie (besoin des autres) et d’indépendance (être seul). La compétence quant à elle, est une reconnaissance sociale : "sans les autres, je ne peux pas vraiment savoir si je suis compétent". Le besoin d’avoir un collectif pour la vérification de ses compétences et de son autonomie est donc de loin très important.

L’auto-efficacité (A. Bandura)

Les prédictions déterminent le comportement. Pour l’auto-efficacité, ce sont les individus qui s’engagent dans une action, lorsqu'ils pensent avoir toutes les ressources pour réussir. Il n'y a pas de sentiment de compétence mais une prédiction à pouvoir y arriver. C’est ce qui déclenche le comportement.

L’état de flow (Csikszentmihalyi 1990, 1997, 2005)

Les résultats déterminent la persistance. La théorie du flow, c’est l’idée d’étudier une notion dans un domaine qui relève à la fois d’une réaction physiologique et psychologique. C’est ce qu’on ressent sur la première émotion. Le flow est alors provoqué par le plaisir de comprendre. Il ne s'agit pas de l’atteinte de l’objectif qui est importante mais de percevoir qu’on a progressé. C’est souvent par un défi personnel. Quand on ressent cette réussite, « les poils dressés » d’avoir réussi. Le flow est une expérience autotélique ("télos" signifiant "le but"), c’est-à-dire qu’il a pour objectif rien d’autre que soi-même. Selon J. Heutte (2013), 17% de personnes sont autotélique.

Cadre Théorique

Flow

Le flow est selon Csikszentmihalyi (2004), lorsque "les individus sont tellement intensément impliqués dans une activité que rien ne semble autrement importer, l'expérience elle-même est si agréable que les gens la fassent même à un grand coût, dans l'intérêt fin de la faire". "L'expérience de flow est une expérience autotélique se caractérisant par une récompense intrinsèque (self-oriented reward) impliquant un sens profond d'enjouement, de joie et d’enrichissement" (J. Heutte 2013). Le flow est composé de trois étapes qui permettent d’atteindre le degré maximum du flow :

  • Les antécédents.
  • L’expérience.
  • Les effets.

Les antécédents comprennent: les objectifs clairs, le feedback ainsi que le défi qui convient aux compétences de la personne.

L'expérience comprend une fusion d'actions en conscience, un sens du contrôle de l'activité, et le plus important : la concentration.

La dernière étape selon J. Pearce, M.Ainley et al. (2004) décrit l'expérience intérieure de l'individu (les effets). Cette étape fait état d’une perte de la conscience de soi, d’une distorsion du temps, d’un sentiment de bien-être et la réalisation de cette activité pour sa propre satisfaction personnelle, pour "le plaisir de soi" (autotélique). D’après J. Heute (2013), les deux premières étapes (antécédents et expérience) contiennent les conditions du flow et la troisième (les effets) contient les caractéristiques du flow.

Les conditions

1. Équilibre entre défi et habilité « Challenge–skill balance : Knowing the activity is doable - that the skills are adequate, and neither anxious or bored »

2. Concentration sur la tâche « We must be able to concentrate on what we are doing »

3. Cible claire « The task has clear goals »

4. Rétroaction, feedback clair et précis « The task provides immediate feedback »

5. Absence de distraction « One acts with a deep but effortless involvement that removes from awareness the worries and frustrations of everyday life »

6. Contrôle de l’action « People can exercise a sense of control over their actions »

Les caractéristiques

7. Absence de préoccupation à propos du soi – dilatation de l’ego (allocentrisme) « Sense of serenity – no worries about self, feeling of growing beyond the boundaries of ego – afterwards feeling of transcending ego in ways not thought possible »

8. Altération de la perception du temps « The sense of the duration of time is altered ; hours pass by in minutes, and minutes can stretch out to seem like hours »

9. Expérience autotélique – bien être. « sense of ecstasy - of being outside everyday reality - Intrinsic motivation – whatever produces "flow" becomes its own reward »

Imaginé dans les années ’70, le flow a été un concept fondamental de la psychologie positive. Cette « expérience optimale » visait principalement les sportifs de haut niveau et les artistes. L’engagement de cette sensation peut être si fort, qu’il peut provoquer l’oubli de se nourrir ou de dormir.

Si ce concept se base sur l’intérêt d’une tâche ("challenge", les défis), par rapport à nos propres capacités ("abilities", les habilités), le flow forme alors une zone d’engagement de l’individu dans ce qu’il effectue. Si le but est trop difficile, au delà des capacités de la personne (un joueur par exemple), alors il sera sujet à de l’anxiété vis à vis de la tâche. A l’inverse, si le challenge est trop faible, alors l’individu risque de s’ennuyer (Figure 1).

Figure 1

Les dimensions du flow

Il a des hypothèses sur les dimensions du flow. En générale, on peut dire qu'il y a une relation entre le flow et la compétence personnelle.

D'après Heutte & Fenouillet (2010), il y a 4 dimensions du flow:

  • FlowD1 : Sentiment de maîtrise/contrôle de l'activité – absorption cognitive Knowing the activity is doable - that the skills are adequate, and neither anxious or bored (Csikszentmihalyi, 2004)
  • FlowD2 : Perception altérée du temps Timeliness - thoroughly focused on present, don't notice time passing (Csikszentmihalyi, 2004)
  • FlowD3 : Absence de préoccupation à propos du "soi" - dilatation de l'ego Loss of self-consciousness Sense of serenity - no worries about self, feeling of growing beyond the boundaries of ego afterwards feeling of transcending ego in ways not thought possible (Csikszentmihalyi, 2004)
  • FlowD4 : Sentiment de bien-être - activité autotélique motivation intrinsèque - whatever produces "flow" becomes its own reward Sense of ecstasy - of being outside everyday reality (Csikszentmihalyi, 2004)

Les instruments pour mesurer le flow

La Méthode d'Échantillonnage

Dans les recherches concernant la théorie du flow, l'instrument de mesure le plus connu est la méthode d'échantillonnage (experience sampling ou experience sampling method ou ESM). Celle-ci est une méthodologie de recherche développée par Larson and Csikszentmihalyi (1983). Lors de moments précis et aléatoires, il est demandé aux participants de cette mesure de s'arrêter dans leur activité et de prendre des notes sur leurs expérience (par exemple leur comportements, pensées ou sentiments) en temps réel. Il est important d'écrire les réponses au moment exact où ils vivent l'expérience.

Selon Tamilin Conner (2003), il y a trois critères pour utiliser la méthode d'échantillonnage:

1. Les expériences doivent être effectuées dans un milieu naturel. 2. Elles doivent être faites en temps réel (ou le plus proche possible à l'expérience). 3. Les expériences doivent être répétées plusieurs fois.

Limites

Malgré sa célébrité, la méthode d’échantillonnage présente une limite très importante. D'après Conner, T. et al. (2009), c’est une méthode lourde pour les participants. En effet, elle demande du temps et des ressources importantes. Même si ces limites varient selon le protocole d'échantillonnage, il faut tenir compte de la plus grande. Selon la théorie du flow, il y a une continuité dans le temps, dans l’absorption du sujet, dans l’action de l’activité etc. Dès lors que l’on averti le sujet qu’il doit effectuer son “rapport” de l’instant, alors le flow est interrompu.

D'ailleurs, selon Scollon C. et al. (2003), cette méthode ne peut pas être adaptée pour l'étude de certaines personnes ou groupes. Par exemple, comme Csikszentmihalyi et Larson (1987) ont rapporté dans une de leurs expériences, leur plus jeune participant avait 10 ans et le plus âgé avait 85 ans. Si on imagine que leur expérience est sur l'utilisation de technologies, les personnes âgées et les enfants peuvent rencontrer des problèmes pour réussir les tâches de cet expérience.

Questionnaire de flow

Le questionnaire quantitatif du flow va tenter d’expliquer un concept en demandant aux participantes de décrire leurs expériences antérieures similaires. Ce genre de questionnaire est principalement utilisé dans les recherches effectuées par Internet.

L'expérience de Rettie (2001) liée aux expériences d'utilisation d'Internet, en est un exemple. Dans une salle, il y a 32 participants qui utilisent Internet. Avec un certain intervalle, les participants doivent répondre à un questionnaire qui apparaît sur leur écran sous forme de pop-up afin de mesurer leur expérience.

Limites

  • Il y a seulement 32 participants. Ils ne sont par représentatifs des utilisateurs d'internet.
  • Il y a un groupe focus qui aide les participants à décrire leurs sentiments. Cela implique une certaine influence sur les réponses naturelles des utilisateurs.
  • Les questionnaires sous forme de pop-up sont ennuyeux pour les participants. Ils diminuent le moral, la concentration et la continuité dans l’activité.

Résultats obtenus

Actuellement, environ la moitié des utilisateurs d'Internet vivent l'expérience de flow. Ces utilisateurs prennent plaisir au travers de cette expérience et ils augmentent le temps passé sur Internet, grâce à la distorsion du temps. Pour le web pratique, le flow est un concept difficile à mesurer, parce qu'il y a beaucoup d'éléments qui influencent l'expérience. Par exemple, nous pouvons mentionner le développement technologique, la navigation sur Internet, le contrôle de l'utilisateur sur le site web, la taille du dossier que l'on télécharge, etc.

Exemples de mise en œuvre dans des domaines variées

La théorie de flow s'applique à plusieurs domaines. Nous allons ici présenter une liste exemplaire et non exhaustive.

Musique

Le domaine de la musique est un des domaines dans lequel nous pouvons constater les effets du flow. Comme Csikszentmihalyi (1990) avait déjà noté, les musiciens, et plus spécialement les solistes lors d'une improvisation, peuvent expérimenter un état similaire lorsqu'ils jouent de leur instrument. D'après Manzano Ö. et al. (2010), lorsque l'on demande de jouer une pièce musicale à un pianiste, nous pouvons constater une relation significative entre le flow et la période cardiaque, comme la pression artérielle, la variabilité du taux (pulsation), l'activité cardiaque du muscle grand zygomatique et la profondeur des voies respiratoires.

Sport

S'engager dans une activité sportive difficile, mais faisable, présente un léger étirement de ses capacités. C'est aussi un bon exemple de "flow". Comme Csikszentmihalyi avait décrit, une personne pratiquant le sport est «complètement impliquée dans une activité pour son propre bien. L'ego diminue. Le temps passe vite. Toute action, mouvement, ou pensée découle inévitablement de la précédente, comme jouer du jazz. L'ensemble de votre être est impliqué, et il utilise vos compétences à l'extrême. " (Geirland, J., 1996).

Le concept d'être dans la "zone" durant une performance athlétique, correspond à la description du flux de Csíkszentmihályi. On peut prendre en compte l'exemple du pilote de Formule 1 Ayrton Senna, qui, durant les qualifications du grand prix de Monaco 1988, a déclaré avoir l'impression de piloter la voiture au-delà de ses limites. "J'étais déjà en pôle position, [...] et je continuais. D'un seul coup j'avais deux secondes d'avance sur tout le monde, même sur mon binôme qui avait la même voiture. Immédiatement, j'ai réalisé que je ne conduisais plus la voiture consciemment mais instinctivement. J'étais dans une autre dimension. J'étais comme dans un tunnel. Pas seulement dans le tunnel sous l'hôtel mais tout le circuit était devenu un tunnel. Je continuais et continuais, encore et encore et encore et encore. J'avais largement dépassé la limite mais j'étais toujours capable de plus." (Wikipedia).

Workspace / Espace de travail

Il peut arriver que lorsqu'on travaille sur un projet à haut niveau de concentration, on tombe dans l'effet de flow. Par exemple, un écrivain qui écrit un livre ou un graphiste qui travaille sur un nouveau graphique devant l'ordinateur, peut perdre facilement le perception du temps.

Flow et Jeux vidéo

Les nouvelles générations d’êtres humains sont totalement immergées, dès la naissance, aux nouvelles technologies. Certains scientifiques pensent donc qu’il parait normal de se poser la question quant à l’apprentissage avec les jeux vidéoludiques (vidéo pour la technologie, ludique du latin "ludus" qui signifie "jeu, amusement"). Notons qu’un jeu est "un système dans lequel les joueurs s'engagent dans un conflit artificiel, défini par des règles, qui se traduit par un résultat quantifiable" (B. Paras, 2005). Commençons tout d’abord par la pensée des designers qui doivent respecter certains éléments importants. Étant donné que le but est de vendre un produit qui fonctionne, économiquement parlant, il faut être le plus compétitif sur le marché et le plus important, répondre aux besoins de l’utilisateur. La théorie du flow est largement prise en compte dans ce domaine. Dans la figure précédente (Figure 1) nous avons vu comment ce situe cette zone d’ « expérience optimale ». Si on ajoute les caractéristiques des différents joueurs, nous pouvons constater qu’il y a trois genres de zone du flow. Celle du joueur expert, du joueur normal et du novice (Figure 2).

Figure 2

La solution revient ainsi dans la création de choix offerts au joueur afin de lui permettre de progresser de manière adaptée à ses capacités, afin de maintenir un état de flow (Figure 3). Cependant, il y a deux inconvénients majeurs à cela. Tout d’abord, l’importance de rendre la procédure transparente à l’utilisateur. En effet, si le joueur se rend compte d’un changement de difficulté du jeu, en devenant par exemple trop facile pour lui, le risque de troubler l’intérêt du challenge sera alors important. Enfin, pour les concepteurs, le coût de production d’un tel jeu est important sur le plan de la complexité. Le risque le devient aussi car, trop de choix provoque l’ennui ou une difficulté inadaptée.

Figure 3

Principe dans la conception des jeux

Selon B. Paras (2005) il existe certain principes importants dans la création d’un jeux vidéo.

  1. Le défi, le désir d’atteindre les objectifs et avoir un bon feedback pour améliorer ses compétences.
  2. Un jeu capable de créer une curiosité sensorielle et cognitive chez l’apprenant.
  3. L'apprenant doit avoir un sentiment de contrôle par rétroactions fournies par le jeu.
  4. Les jeux devraient utiliser le fantasme et l’imagination pour renforcer les objectifs pédagogiques et stimuler les intérêts intrinsèques de l'apprenant.

Ces principes sont très similaires aux conditions du flow. Ceci démontre en effet, que les jeux à partir d’une même base en ce qui concerne l’apprentissage, et que jouer, produit une situation de flow qui, à son tour, améliore la motivation qui supporte l’apprentissage.

Games → Play → Flow → Motivation → Learning

Pour avoir une description plus détaillée de l’environnement d’apprentissage fructueux, Paras a présenté les sept principes de conception efficace de Houser& Deloach :

  1. Fournir une haute intensité d'interaction et de rétroaction.
  2. Avoir des objectifs spécifiques et des procédures établies.
  3. Motiver.
  4. Fournir un sentiment continuel de défi qui n'est ni difficile, ni facile.
  5. Fournir un sens de l'engagement direct, produisant le sentiment de vivre en direct l'environnement, en travaillant directement sur la tâche.
  6. Fournir des outils appropriés qui correspondent à l'utilisateur et à la tâche, si bien qu'ils l'aident et ne le gênent pas.
  7. Évitez les distractions et les perturbations qui interviennent et détruisent l'expérience subjective.

Nous pouvons ajouter à ces sept principes, un élément très important qui amène l’apprenant vers une situation du flow : donner une forme de liberté aux joueurs pour choisir la manière d’atteindre leurs objectifs (tel que débattu précédemment). En effet des instructions strictes limitant la liberté des joueurs peuvent quelques fois “tuer” la possibilité d’arriver à une situation de flow.

Le gameplay

"Gameplay est un terme caractérisant des éléments d'une expérience vidéoludique, c'est-à-dire le ressenti du joueur lorsqu'il utilise le jeu. Cet anglicisme n'a pas de réel équivalent en un seul mot en France. Au Québec, jouabilité est le terme français proposé" (Wikipédia).

Noyau central d’un jeu, cette partie ne doit pas être sous-estimée. K. Kiili (2005) affirme qu’il faut pour un jeu à vocation pédagogique, un équilibre entre la qualité du gameplay (la qualité de prise de décision de chacun des joueurs en interaction avec le jeu) et des objectifs d’apprentissages fixés. Ceci permettra alors d’atteindre de manière motivante, des objectifs ayant un sens pour l’apprenant.

Le joueur, l’apprenant ou l’élève est celui qui peut résoudre le problème que le jeu offre et comme défit pour apprendre quelque chose. Dès lors, "les éducateurs ont essayés de développer des environnements d'apprentissage intégrant des problèmes à résoudre de situations complexes comme dans la vie réelle" (Suomala, 1999, traduction libre de l'anglais). En effet, en faisant en sorte que l’élève puisse se référer à des situations de vécus ou proche de la réalité, l’implication sera plus forte. Selon Bruner (1961), la motivation se transformera aussi, car l’apprenant, en devenant un acteur principal et actif du jeu dans un processus d’apprentissage, va passé d’une motivation extrinsèque à intrinsèque. Habgood, Ainsworth et Benford (2005) soutiennent cette vision d’apprentissage intrinsèque, pour autant que le jeu offre et intègre les éléments permettant de vivre un état de flow. Malone et Lepper (1987) avaient déjà travaillé sur des environnements d’apprentissage favorisant la mise en place d’une motivation intrinsèque. La figure 4 illustre ce lien entre gameplay et implication de l’apprenant dans l’apprentissage.

Figure 4

Journey

Journey est un jeu sur console qui n’a pas un caractère pédagogique, mais qui est fortement basé sur la théorie du flow. Nous n'allons pas développer l’analyse de ce jeu, mais nous vous conseillons de voir les vidéos disponibles dans la bibliographie. En effet, la co-fondatrice de la compagnie du jeu explique, lors d’une conférence, l’usage du flow dans les jeux (Flow in Games and in Life), ainsi que les vidéos montrant le gameplay du jeu. La puissance du flow est tellement réussie que juste en regardant la vidéo on a envie d’y jouer. Le but est simple : atteindre le sommet d’une montagne très éloignée lors d'une expédition somptueuse et mystérieuse, regorgeant de secrets sur une civilisation disparue.

Serious Games / Jeux Sérieux

On utilise le terme "jeux sérieux" depuis plus que 40 ans. Distinguer les jeux que l'on peut utiliser pour l'éducation est parfois une tâche ambiguë (Aldrich, 2009). Pour cela, nous trouvons dans la littérature on trouve plusieurs définitions de "serious games". Selon Clark Abt (1970), qui a utilisé et discuté l'idée des jeux sérieux pour la première fois, a écrit:

"Reduced to its formal essence, a game is an activity among two or more independent decision-makers seeking to achieve their objectives in some limiting context. A more conventional definition would say that a game is a context with rules among adversaries trying to win objectives. We are concerned with serious games in the sense that these games have an explicit and carefully thought-out educational purpose and are not intended to be played primarily for amusement."

Après les succès qu'ont rencontrés les jeux vidéo digitales, les définitions du terme se sont adaptées. D'après Zyda (2005) :

"Serious game: a mental contest, played with a computer in accordance with specific rules, that uses entertainment to further government or corporate training, education, health, public policy, and strategic communication objectives"

Et selon Stone (2008) :

"There is no one single definition of the term “serious games”, although it is widely accepted that they are games “with a purpose”. in other words, they move beyond entertainment per se to deliver engaging interactive media to support learning in its broadest sense."

Après toutes ces définitions, nous pouvons dire qu'un jeu sérieux doit satisfaire au moins à ces trois éléments:

  1. diffuser un message.
  2. dispenser un entraînement.
  3. permettre l'échange de connaissances.

Les "serious games" combinent une dimension vidéoludique et une dimension sérieuse/éducative (Alvarez J. et Djaouti D., 2010). La dimension vidéoludique d’un jeu éducatif doit créer un sentiment de plaisir chez l’utilisateur. C'est pourquoi, les créateurs des jeux doivent trouver des solutions pour que s'applique le sentiment de "flow" sur les joueurs. Par exemple ils commenceront par utiliser les critères de motivation pour appliquer l'effet de flow, puisque cette dernière suscite le flow.

1066

Voici un « serious game » de stratégie qui fonctionne au « tour par tour ». Nous sommes en l’an 1066, période de la conquête de l’Angleterre entre différents peuples. C’est une redécouverte des batailles importantes de cette époque dans un contexte historique où l’on apprend en jouant. Sur le plan de l’apprentissage, ce jeu permet de « découvrir ou redécouvrir la crise de succession d'Angleterre en 1066, avec au centre, les grandes batailles et les enjeux militaires de cette période. Plus généralement, 1066 oriente l'attention du joueur sur l'importance du placement des unités par rapport à l'issue finale du combat. Le jeu initie ainsi le joueur à certains concepts de stratégies militaires (formation, moral des troupes, atouts et faiblesses de chaque combattant de l'époque) » (Julien Da Costa, 2012).

Ce jeu va centrer la motivation du joueur en captivant son attention grâce à une immersion importante, tout en recherchant un état de flow, plaisir d’expérience optimal du jeu ressenti par le joueur entre sa capacité à avancer, et la progression dans l’histoire. La perte de notion du temps peu être un facteur important dans ce jeu. En effet, les batailles peuvent être assez longues. Malgré quelques limites sur la validation pédagogique du jeu, par rapport aux caractéristiques du flow, 1066 est un « serious game » de bonne qualité.

Gameflow

Gameflow est un système d’évaluation adaptant la théorie du flow crée par Csikszentmihalyi en lien avec les jeux vidéo. Il s'agit de créer des situations difficiles pour les joueurs qui seront récompensés lorsque le but est atteint, et que ce même but soit des plus motivants pour donner au joueur l'envie de l’atteindre (wikidot.com). Les jeux vidéo sont souvent conçus comme une série d'énigmes / puzzles (Newman 2004), qui utilisent des récompenses pour motiver leur achèvement. Bleszinski (2001) décrit ce processus comme "gameflow".

Bleszinski soutient qu’un bon "gameflow" dépend de deux facteurs:

  1. Le puzzle doit offrir un défi, il ne devrait pas sérieusement arrêter le progrès. Les puzzles (énigmes) qui ne peuvent pas être résolus d'une manière adaptée aux capacités du joueur sont susceptibles d'entraver et empêcher le "flow" (Newman 2004).
  2. Offrir des récompenses appropriées pour résoudre des puzzles.

“L'amusement du joueur est la tâche la plus importante pour les jeux vidéo. Si les joueurs ne s'amusent pas, ils ne joueront pas” (traduction de l’anglais, Sweetser, P., & Wyeth, P. (2005)).

Selon Federoff (2002), la littérature concernant l’utilisabilité des jeux vidéo se concentre principalement sur trois éléments, en ne tenant pas compte de l’amusement du joueur :

  1. L’interface (graphique et contrôles du jeu).
  2. La mécanique (interaction avec le monde du jeu).
  3. Le gameplay (problèmes et défis, cité précédemment comme un des facteurs important dans la liaison entre la création d’un jeu et la théorie du flow).

C’est ainsi que Sweetser, P., & Wyeth, P. (2005) propose le modèle du "gameflow" pour allié la théorie du flow avec l’amusement du joueur dans un jeu vidéo. Ce modèle est basé sur huit critères:

  • Concentration : Le jeu doit demander de la concentration.
  • Challenge (défi) : Le jeux doit présenter des défis ; ceux-ci doivent être compatibles avec les capacités du joueur.
  • Compétences des joueurs : Le jeu doit suivre le développement des capacités du joueur.
  • Contrôle : Le joueur doit avoir le sens du contrôle sur ses actions dans le jeu.
  • Objectifs clairs : Le jeu doit présenter des buts et objectifs claires, qui peuvent être accompli dans un temps approprié.
  • Feedback : Le joueur doit recevoir des feedback appropriés à des moments opportuns.
  • Immersion : Le joueur doit avoir une expérience d'immersion profonde dans le jeu mais elle ne doit pas être épuisante.
  • Interaction sociale : De préférence, le jeu doit posséder et pouvoir créer des opportunités d'interaction sociale.

Dans le Tableau 1, Sweetser, P., & Wyeth, P. (2005) effectuent une mise en relation entre leur concept de "gameflow" avec la théorie du flow de Csikszentmihalyi (1990).

Gameflow Flow
Le Jeu Une tâche qui peut être complétée
Concentration Compétence de se concentrer sur la tâche
Défi des compétences des joueurs Compétences perçues qui doivent correspondre à des défis (challenges) et les deux doivent dépasser un certain seuil
Contrôle Autoriser à exercer un certain contrôle sur les actions
Objectifs clairs La tâche a des objectifs clairs
Feedback La tâche fournit une rétroaction immédiate
Immersion Profonde, mais sans implication d’effort, elle réduit le souci de soi et le sens du temps
Interaction sociale n/a

Tableau 1 - Tableau de "gameflow" (traduction libre de l’anglais)

Le gameflow peut ainsi être utilisé comme un guide pour des évaluations critiques des jeux vidéo en ce qui concerne les aspects liés à l'amusement du joueur. Chacun de ces critères est important dans la création d’un jeu vidéo afin de permettre d’atteindre les buts fixés par le jeu tout en y prenant plaisir. Le dernier élément, l’interaction sociale, est un facteur qui risque d’interrompre un processus de flow. Cependant, selon Lazarro (2004), cet élément est un facteur conséquent dans la motivation et le plaisir de jouer à un niveau social, tant pour la compétition que pour la coopération.

L’étude menée par Sweetser, P., & Wyeth, P. (2005) concernant le gameflow a été testée sur deux jeux pervasifs de type “stratégie en temps réel” (STR). Elle démontre l’impact important du flow lié à un jeu vidéo. Ils concluent cependant à la difficulté de leur outil d’évaluation de l’amusement dans un jeu vidéo en ce qui concerne le choix de jeux stratégiques. Cependant, leur tableau et leurs critères restent une base fondamentale et importante en ce qui concerne la création d’un jeu vidéo souhaitant procurer au joueur un état d’amusement et de plaisir. L'idée centrale étant de le maintenir au maximum dans cet état.

Gameflow et jeux pervasifs

Jeux pervasifs

Jeux pervasifs (ou location-based games en anglais) sont des jeux qui se déroulent dans le monde réel sous toutes formes pouvant allier la réalité au virtuel, que cela soit avec un ordinateur, une tablette ou des Smartphones. Ce type de jeux utilise presque toujours la technologie de localisation comme par exemple, le système de positionnement par satellites (GPS et SMS) permettant ainsi aux joueurs de s'engager dans le paysage urbain. Par exemple, nous pouvons citer "Urban gaming" ou "Street Games" pour les jeux pervasifs de type multi-joueurs. Dans ce type de jeux, il faut utiliser les rues de la ville et construire des environnements urbains. Voici d'autres exemples:

  • Jeux immersifs
  • World of Warcraft
  • Jeux de réseau social, tels que
  • Foursquare, un des plus anciens jeux pervasifs des réseaux sociaux. On compte aujourd'hui pour l'application originale "check-in to collect badges" 25 millions d'utilisateurs.
  • SCVNGR est un jeu qui consiste à "faire des challenges dans des lieux". Il est similaire à Foursquare.
  • Jeux vidéo multi-joueurs tel que MyTown 2 (par Booyah), Famiglia (Gbanga), Life is Crime (Red Jeux Robot) et Shadow Cities (Grey Area Labs).

Selon Jegers, K. (2007), le jeu pervasif se base sur trois principaux critères (traduit de l’anglais) :

1. Jouer n’importe quand et n’importe où : jeux qui permettent au joueur de jouer à n’importe quel moment et / ou dans n’importe quelle circonstance (par exemple travian.fr, jeu en ligne STR qui permet d’utiliser tout type de dispositif connecté à Internet).

2. Intégration entre mondes physiques et virtuels : les jeux qui utilisent des espaces physiques et des endroits comme les parties significatives du monde du jeu et / ou l'utilisation d'objets et / ou couches virtuelles servent à améliorer d'une certaine façon (réalité augmentée), le monde physique.

3. Interaction sociale comme force agissante dans le gameplay : les jeux qui permettent aux acteurs (joueurs) de formuler et poursuivre leur propre avancement dans le jeu, en collaboration avec d'autres; les jeux qui "permettent" non seulement l'interaction sociale entre des acteurs (joueurs), mais procurent l'interaction significative et nécessaire dans l’optique de jouer à ce jeu.

Le gameflow dans les jeux pervasifs

Le modèle original du "gameflow" selon Sweetser & Wyeth (2005) est composé de huit éléments et trente-six critères. Le modèle du "gameflow" pour les jeux pervasifs garde les mêmes huit éléments mais y ajoute une dizaine de critères :

  • Concentration :
  • Les jeux pervasifs devraient soutenir le joueur dans le processus d’échange de concentration entre les tâches du jeu et les facteurs d’importance qui gravitent autour.
  • Challenge :
  • Les jeux pervasifs devraient stimuler et soutenir le joueur dans sa propre évolution et sa propre création du scénario du jeu.
  • Les jeux pervasifs devraient aider le joueur à garder un équilibre entre la création de chemin et de développement dans le monde virtuel. Ils ne doivent pas mettre trop de restriction quant à l’évolution du défi et des contraintes à sa réussite.
  • Capacité du joueur :
  • Les jeux pervasifs devraient être très flexibles et permettre aux capacités du joueur de se développer dans un lieu choisi et définit par le joueur lui-même.
  • Contrôle :
  • Les jeux pervasifs devraient facilement prendre le jeu en main et progresser de manière suffisamment constante pour avoir une image de ce que le monde virtuel lui réserve. Savoir si la situation du jeu a changé depuis sa dernière visite (dernière partie).
  • Buts clairs :
  • Les jeux pervasifs devraient aider le joueur à atteindre et comprendre ses propres buts intermédiaires.
  • Immersion:
  • Les jeux pervasifs devraient soutenir le joueur afin que la transition entre les différents contextes quotidiens ne soit pas forcées par l’action du joueur. Il en résulterait une violation des normes sociales quotidiennes (le virtuel occupe une place importante dans le monde réel).
  • Les jeux pervasifs devraient permettre au joueur de passer du monde virtuel aux parties physiques du monde du jeu sans trop perdre la sensation d’immersion.
  • Interaction sociale :
  • Les jeux pervasifs devraient aider et offrir les possibilités d’un système d’interaction social (lié ou non directement ou indirectement au jeu).
  • Les jeux pervasifs devraient incorporer des éléments (missions, événements, alliances, guildes, etc.) afin de motiver le joueur à communiquer et interagir socialement.

Jeux vidéo pédagogiques (E-learning Games)

Pour un étudiant, l'apprentissage ne peut pas se focaliser uniquement par l’usage de technologies de l'information et de la communication pour l'enseignement (TICe). C’est la raison pour laquelle, des chercheurs se sont consacrés au domaine des jeux vidéo. En effet, ceux-ci sont souvent synonymes de plaisir. On peut donc supposer qu’il y a une motivation et un engagement dans ce domaine. Malheureusement, K. Kiili (2005) met en évidence le fait que les jeux pédagogiques ont, pendant très longtemps, été des outils de supports aux pratiques factuelles des informations vues en classe. Souvent assimilés à une fonction de drill et non d’action-réflexion, les jeux vidéo pédagogiques ne plaisent pas. C’est ainsi que les développeurs se sont intéressés au développement d'une forme de motivation de l’apprentissage grâce au flow.

Dans ce domaine, la structure organisationnelle de la motivation de l’apprentissage et du sentiment de flow peut se décrire comme suit : lorsqu'un problème posé est en équilibre avec une habileté à le résoudre, alors il y a motivation d’apprentissage. Un problème trop difficile provoque l’anxiété et des habiletés trop faciles rendront le jeu ennuyeux.

Mais la motivation ne suffit pas. Le principe d’immersion occupe une place aussi importante. Si Csikszentmihalyi (1990) décrit l’immersion comme un engagement profond sans effort, c’est bien dans le but de parler d’une bulle créée par le flow, altérant tout ressenti extérieur, de même que celui du temps. Cet état d’absorption total dans l’engagement de l’activité, reflète l’implication psychologique à vouloir résoudre ou atteindre un but clairement fixé et motivant, permettant de mettre des stratégies en place, et d’atteindre la solution comportant un équilibre entre le défi et les capacités du joueur. Webster, Trevino & Ryan (2003) ont, au travers de leurs recherches, déterminé un impact positif du flow sur l’apprentissage.

L’environnement d’apprentissage d’un étudiant a considérablement évolué grâce au progrès des nouvelles technologies. Leur situation d’apprentissage est passée du rôle passif à celui de constructeur actif des connaissances. C’est ainsi que les progrès en matière de technologie, ont permis la création des jeux d’apprentissage (e-learning tools), se basant sur différentes théories favorisant l’immersion du joueur. Différents éducateurs se sont longtemps penché sur la plus-value de ce genre d’outils pédagogiques. Certains pensent que c’est un outil indispensable dès l’instant où le public ciblé est, jour après jour, né dans une ère digitale. D’autres ne sont pas favorables à leur utilisation car ils ne sont pas convaincu du potentiel de ces jeux. En effet, selon eux, les jeux à vocation pédagogique n’offrent pas encore un haut niveau d’apprentissage ou d’approche didactique en comparaison des méthodes dites “traditionnelles”.

Pourtant, les jeux d’apprentissage ne sont pas uniquement basés sur la fourniture de contenus d’apprentissages. Ils sont aussi basés sur la théorie du flow. Ainsi, au travers d’une participation active et motivée par des objectifs clairs, l’apprenant devient un acteur actif dans son apprentissage. Pour créer ce genre de jeux, il faut que le jeu pédagogique se rapproche d’avantage du jeu de divertissement, tout en conservant un contenu pour la production de savoirs. “Une étude a démontré que les jeux vidéo pédagogiques aident les étudiants à consacrer plus de temps à leurs études et à les percevoir comme plus intéressantes aussi” (traduction libre de l’anglais, Fu & Yu, 2006).

L’apprentissage est une discipline qui demande beaucoup de concentration. Pour ce faire, il faut que le jeu puisse offrir la même situation, la même expérience. Il doit contenir une forme de balance entre l’ensemble des éléments qui composent le jeu et le joueur lui-même. A ce propos, Csikszentmihalyi (1998) a mis l'accent sur l’importance des compétences du joueur par rapport au jeu afin de lui permettre de rester dans sa zone de flow. Par conséquent, les jeux vidéo pédagogiques doivent permettre au joueur d’atteindre des objectifs de connaissance au travers de l’expérience du jeu (proche du jeu commercial de divertissement).

EGameflow

Différents critères d’évaluation sont proposés. Pour l’étude des jeux vidéo pédagogiques, une fusion de différentes théories a été mise en point par Chu et al. (2006) afin de créer une échelle d’évaluation de ces jeux. Les différentes théories sont :

  • La taxonomie des objectifs d’apprentissage (Bloom, 1984) classés en six catégories : la mémorisation, la compréhension, l’application, l’analyse, la synthèse et l’évaluation.
  • L’échelle de "gameflow" (Sweetser, P., & Wyeth, P., 2005) basée sur huit critères d’évaluation du plaisir dans le jeu vidéo alliant la théorie du flow.
  • La théorie du flow (Csikszentmihalyi, 1990) pour inclure l’ensemble des critères de cette théorie pour justifier notamment celui de l’immersion.

L’échelle est composée de huit dimensions et cinquante-six critères :

  1. Concentration
  2. But clair
  3. Feedback
  4. Défi
  5. Autonomie
  6. Immersion
  7. Interaction sociale
  8. Amélioration des connaissances

En ce qui concerne le concept du "gameflow" vu précédemment, la compétence du joueur a été modifiée pour l’amélioration des connaissances (dès l’instant qu’il s’agit d’une échelle d’évaluation d’un jeu pédagogique).

Exemples de jeux éducatifs dans différents domaines

Comme les jeux vidéo sont très attirants pour les enfants et les adolescents, et qu'ils sont considérés comme une des activités préférées des enfants, en sachant que les joueurs passent en moyenne une heure et demi par jour sur ces jeux vidéo, les producteurs ont essayé, depuis des années, avec différents logiciels, de créer des jeux éducatifs dans différents domaines, en tenant compte du fait que ces jeux se développent d’une année à l’autre au niveau technique, graphique, et pédagogique, mais aussi au niveau de l'animation, de l’engagement et de l’évaluation.

Prenons un exemple des années nonante. Dans le domaine de l'éducation de la santé, quelques jeux ont été créés pour la console de jeux vidéo Super Nintendo. "Packy & Marlon" était un jeu pour enrichir ses connaissances dans le domaine du diabète. Un type de jeu sous forme d’aventure pour créer une sensibilisation sur cette maladie : quelle alimentation choisir, comment programmer les repas correctement, etc. L’aspect ludique de ce jeu était par ses deux personnages représentés par des éléphants diabétiques, qui vont dans une école d’été où commence leur aventure. Un jeu facile à jouer, possédant des instructions claires, avec la progression des capacités et des connaissances d’une étape à l’autre, une simulation aux vrais outils médicaux utilisés pour mesurer le diabète, un engagement ainsi qu'une immersion présents tout au long du jeu. Un autre jeu de la même série, appelé "Bronkie the Bronchiasaurus" tentait d'enseigner aux enfants le contrôle de leur asthme (S.Brown 1998).

Avec l’évolution technologique de nos jours, ces deux jeux n'ont plus d'attrait, tant sur le plan graphique que sur celui de l'’aventure qui sont très limités si nous les comparons avec les jeux d’aventure actuels. Nous n’avons pas trouvé d'étude sur ces jeux qui nous fournisse une preuve d’une situation de flow. Toutefois, si nous regardons les conditions du flow, ce jeu contient beaucoup de ces éléments mais aujourd'hui il ne peut plus engendrer la curiosité ni même la motivation en raison de son ancienne conception.

En ce qui concerne le domaine de la physique, une étude faite sur un jeu pédagogique en 2005, consistait à mesurer une situation de flow relative à la vitesse et l'accélération. Cette recherche était appliquée sur deux groupes d’étudiants en systèmes d’information d'une Université d’Australie. Un groupe a utilisé un logiciel de simulation engageant les apprenants dans une activité de drag and drop, l’autre groupe ne possédait pas cette simulation mais n'avait que des vidéos à regarder. Les résultats ont démontré différents modèles de flow ayant été atteint plusieurs fois à différents degrés. Il est aussi à souligner qu'en général, la présence du contrôle et de la jouabilité du groupe de l'exercice de simulation font que ces éléments ne sont pas suffisants pour obtenir des résultats d’apprentissage positifs liés à ce flow, contrairement à ce que les professeurs attendaient comme apprentissage profond du sujet (J.M.Pearce et al. 2005).

Un troisième exemple était appliqué pour l’apprentissage de l’histoire médiévale d’Amsterdam avec le jeu "Frequency 1550". Ce jeu pervasif était joué par 216 étudiants de différentes écoles. Ils étaient divisés en plusieurs groupes pour une activité qui a duré une journée scolaire. Ce jeu n’est pas un jeu vidéo typique mais un jeu de collaboration, basé sur les technologies des portables et GPS. Les joueurs ont démontré une situation de flow, comportant une distraction grâce à l’utilisation de technologies. Il en est ressorti que les étudiants étaient moins distraits par l’utilisation des technologies étant ainsi plus engagés dans la compétition. Le flow ainsi lié à la performance dans le jeu, ne l'était pas dans les résultats d’apprentissage (W.Admiraal, J.Huizenga et al 2011).

Limites

En ce qui concerne les résultats d’apprentissage, l’étude du jeu de physique cité précédemment, a fait ressortir que la relation entre flow et l'apprentissage n’est pas simple. Il est impossible de prédire la rapidité du développement des compétences du joueur durant le jeu, ce qui rend la conception des jeux de plus en plus difficile (les concepteurs du "EGameflow" le reconnaissent).

Aussi, l'utilisation d'un tel jeu une fois n’est pas suffisante pour obtenir des résultats d’apprentissage positifs. La nécessité d'effectuer une répétition du jeu est un élément très utile et accentue son efficacité pour l’apprentissage (S.Brown 1998). Les résultats dans les études précédentes ont été obtenus après avoir jouer une seule fois au jeu. Même si les échelles de type "gameflow" ou "EGameflow" sont efficaces, elles ne peuvent évaluer et affirmer une progression notable dans l'appropriation de connaissances.

De manière générale, nous avons observé que les jeux vidéo pédagogiques que nous trouvons en ligne sont, pour la plupart d’eux, des petits exercices concernant différents sujets en science, mathématique, géographie…etc. Ils sont bien conceptualisés très motivants et attirants, mais pour avoir une situation de flow avec des résultats pédagogiques, il faut utiliser un jeu bien structuré qui procure une progression des compétences au moyen de différentes étapes. Cette progression des compétences est impossible avec un exercice court qui ne donne pas la possibilité de maintenir et améliorer les compétences apprises. Pour cela, il est préférable d'étudier les jeux qui contiennent le programme entier d’une matière et les différents thèmes du sujet, qui progressivement sont liés et bien systématisés avec lesquels les joueurs pourront résoudre des problèmes, expérimenter une situation, pouvoir observer et réfléchir. Reste le problème des jeux qui couvrent l'ensemble d’un programme éducatif. Ils risquent de contenir beaucoup d’instructions qui peuvent distraire l’attention et parfois la navigation dans le jeu. Ceci va rendre l’activité complexe ou bien peu claire. Des raisons suffisantes qui amènent à distraire notre attention vers d’autres éléments que l’activité principale, empêchent la possibilité d’avoir une situation de flow favorisant l’apprentissage de la théorie basée sur les jeux vidéo pédagogiques.

Conclusion

Le flow est un état mental fortement lié à la motivation. L'étude de cette théorie est importante notamment pour amener les émotions au service de la réalisation et de l'apprentissage. Dans l'état de flow, les émotions sont positives, pleines d'énergie, et en lien avec la tâche à accomplir. La caractéristique du flow est un sentiment de joie spontané, tout en effectuant une tâche. En même temps, il est caractérisé par une concentration totale sur l'activité, causant ainsi une perte de conscience de soi-même ou de ses émotions.

Nous ne pouvons pas déterminer avec certitude que le flow met en évidence les performances des élèves en terme d’apprentissage (Wouters et al., 2009). De plus, la création de jeux qui répondent aux conditions du flow tout en liant des objectifs pédagogiques, et aussi (oui il faut le dire), une compétitivité commerciale, sont deux éléments difficiles et complexes. Bien que les études démontrent le potentiel important de la théorie du flow, la tâche des concepteurs reste conséquente quant au domaine de la création de jeux vidéo à vocation pédagogique.

Créer un jeu éducatif parfait est difficile mais pas impossible. Dans un premier temps, un vrai jeu doit amener le joueur vers l'expérience du flow pour améliorer l’apprentissage. Dans le cas contraire ce jeu ne pourra pas réussir à fournir les résultats d’apprentissage attendus. Dans un second temps, une mauvaise ergonomie, des défis et des objets inappropriés brisant ainsi l'harmonie dans le jeu, diminue la probabilité d’une expérience du flow. De plus, il est important de conserver l’idée de ce que l'on crée. Si le jeu va perd son aspect ludique et engageant (il ne doit pas ressembler à un tutoriel ou un cours e-learning), il ne sera plus un vrai jeu. Enfin, cette courte revue de littérature nous a permis de prendre conscience du grand besoin de posséder plus en détail des études concrètes sur les jeux pédagogiques, nous permettant de comprendre ce qui manque à ces jeux pour obtenir les résultats attendus et être compétitif avec les jeux ludiques. Il existe un grand nombre de jeux pour lesquels il manque des études qui permettraient d'évaluer leur efficacité et par conséquent, contribueraient à leur amélioration. L’échelle EGameflow reste un outil important mais devrait encore ère développée. L’apprentissage au travers d’objets vidéoludiques reste incontournable dans un monde ou le numérique et l’amélioration de la technologie deviennent non seulement des références pour les jeux apprenants, mais aussi des moyens motivant comme outils complémentaires à toutes les références en matière de pédagogie traditionnelle.

Bibliographie et Webographie

Sources EdutechWiki

Sources Wikipedia & Wiktionary

Sources YOUTUBE


Source : How to Create a Reference for a Youtube Video. APA Style Blog.