BASES:Cours BASES 2021-22/Serious Games et évaluation
Auteur-e (à modifier à votre username) : Kelly Weibel Thome, Florent Dupertuis et Lorain Freléchoux
Groupe de travail et thématique choisie
Notre groupe de travail, composé de Kelly Weibel Thome, Lorain Freléchoux et Florent Dupertuis, est le groupe PEYTON. Nous avons choisi de nous intéresser au serious game éducatif et à son potentiel évaluatif s'inscrivant dans un des objets de l'évaluation décrit dans le cours BASES, à savoir "évaluer l'apprentissage en cours ou son résultat, dans le cadre d'une activité réalisée seul.e ou en groupe, dans le contexte d'un enseignement en présentiel ou à distance. Cette évaluation peut se faire par l'équipe enseignante, les pairs ou les apprenant.e.s eux/elles-mêmes par l'intermédiaire du numérique" (cf. descriptif du cours BASES 2021 sur Moodle). Plus précisément, nous abordons l'évaluation des apprentissages d'un apprenant par son enseignant à partir de l'utilisation du serious game éducatif dans un contexte d'enseignement en présentiel ou à distance.
Problématique et questions de recherches
Problématique
Perrenoud (2010) affirme que l'être humain a une tendance naturelle à évaluer ses pairs. Dans le domaine de l'éducation, l'évaluation occupe une place centrale tout en cristallisant d'importantes tensions. Elle repose en effet généralement sur des évaluations formalisées et critériées dans le but de garantir une certaine objectivité des résultats mesurés, indicateurs explicites des performances de l’apprenant. Néanmoins, certains types d’évaluations, comme les tests standardisés, bien que faciles et rapides à administrer, sont parfois d’une efficacité limitée pour mesurer les capacités de résolution de problèmes complexes, de communication ou encore de raisonnement, et n’ont pas la flexibilité nécessaire pour s’adapter à certains profils d’apprenants (Bellotti et al., 2013).
En outre, faire de l’école obligatoire une période marquée par des réalisations et expériences positives est considéré aujourd’hui comme un enjeu important. Les élèves sont en effet confrontés à des situations stressantes, des pressions, des critiques et des comparaisons, notamment avec les évaluations traditionnelles qui « sanctionnent » l’apprentissage par des notes, ce qui influence au fil des ans la perception de soi. Selon Vitaro et Gagnon (2000), un niveau élevé d’anxiété lié à ces situations et la difficulté à les gérer peuvent engendrer des problèmes de comportement ou d’apprentissage, allant parfois jusqu’au décrochage scolaire (Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport [MELS], 2009) ceci générant, entre autres, des débats sur le rôle et la légitimité de l’évaluation.
Partant de ces constats, notre groupe de travail s’est interrogé sur les alternatives possibles aux formes habituelles d'évaluation en s’intéressant à des outils ayant récemment émergés dans un contexte d’hybridation des enseignements-apprentissages avec le développement des technologies de l’information et de la communication (TIC). Notre regard a ainsi été attrié par les serious games. Développés dès les années quatre-vingt par l’armée américaine et devenus populaires il y a une vingtaine d’années (Egenfeldt-Nielsen, 2006 ; Prensky, 2001 ; cités par Sanchez et al., 2011), ils sont aujourd’hui définis de manière assez large et non consensuelle. D’après la revue de littérature réalisée par Berry (2011), ce terme désigne un « ensemble extrêmement hétérogène de produits vidéoludiques » utilisant les mêmes supports médias que les jeux développés à des fins récréatives (Klemke et al., 2015) et permettant de simuler des situations critiques ou pratiques (Rodrigues et al., 2014). Il peut servir plusieurs types d’intérêts : l’apprentissage d’une part, mais aussi le développement de compétences transversales, l’expérimentation, la sensibilisation, l’incitation à faire de l’exercice, le diagnostic et le traitement médical, le recrutement, le marketing, etc. (Dörner et al., 2016).
Notre réflexion porte sur le serious game éducatif – appelé aussi educational game – que nous définissons comme un jeu vidéo dont les contenus ont été développés à partir d'objectif d'apprentissages prédéfinis. Nous nous centrons sur son potentiel pour l’évaluation des apprenants du point de vue de l'enseignant. Cela nous amène à poser la question suivante : « Quel rôle le serious game éducatif peut-il prendre dans le processus évaluatif ? »
Cette question semble relativement peu abordée dans la littérature, ce que Sanchez et Romero (2020) expliquent par une idée reçue attribuant principalement au serious game éducatif un but d’enseignement-apprentissage. Les études menées sur le sujet ont ainsi tendance à porter sur l'évaluation du jeu plutôt que dans le jeu or, pour que sa validité pédagogique puisse être reconnue, il doit permettre à l'élève d'atteindre les objectifs pédagogiques sur lesquels il repose, ce qui se matérialise a priori par les performances de l'élève dans le jeu mais également par la démonstration de sa capacité à transférer ses apprentissages dans son quotidien. La légitimité du serious game éducatif est ainsi souvent remise en cause par sa nature ludique, une caractéristique considérée moins essentielle dans l'apprentissage bien que reconnue comme une composante de la motivation (voir à ce propos la revue systématique de Dicheva et al. (2015) sur l’intégration du principe de gamification dans l’éducation).
Questions de recherche
Question de recherche | Justification | Dimension principale |
---|---|---|
Quelles sont les mécaniques et fonctionnalités des serious games éducatifs pouvant être assimilées à des formes d’évaluation ? | Nous partons du postulat que les interactions entre le joueur et le jeu vidéo sont assimilables à une communication indirecte entre l’apprenant et l’enseignant (qui a choisi et parfois contribué à concevoir le jeu en question à des fins didactiques). En ce sens, nous nous interrogeons sur la possibilité d’associer ou non cette communication à des formes d’évaluation. Nous nous intéressons i) aux traces laissées par le joueur dans le jeu, ii) aux niveaux de difficulté croissante dans le jeu et iii) aux rétroactions (ou feedbacks) faites au joueur par le jeu. | Numérique |
Quelle complémentarité pédagogique le serious game éducatif peut-il apporter à l’apprenant et à quel coût ? | Comme en fait mention la littérature autour de la thématique, deux problèmes conséquents se matérialisent lorsque l’on évoque l’utilisation de serious games éducatif en dehors de l’aspect purement évaluatif. Le premier, plutôt pragmatique, questionne l’origine même des jeux, de leur justification pédagogique d’une part jusqu’à la prise en compte du facteur économique. Le deuxième concerne la manière dont l’enseignant va intégrer l’outil à son scénario pédagogique et les finalités qu’il va lui attribuer. | Pédagogique |
Quelles sont les caractéristiques des serious games éducatifs qui pourraient favoriser l'apprentissage et leur utilisation comme méthode d'évaluation, ainsi que réduire la tension déclenchée par les formes traditionnelles d'évaluation ? | Nous partons du principe que l'utilisation de serious games éducatifs comme outil d'évaluation peut réduire la tension générée par les tests formels et, d'autre part, augmenter le niveau de confiance de l'étudiant en lui-même, ce qui améliore par conséquent ses performances. C'est pourquoi nous étudions les caractéristiques des serious games éducatifs qui favorisent l'apprentissage et le potentiel de l'utilisation de cet outil comme méthode d'évaluation. | Psychologique |
Réponses aux questions de recherche
Quelles sont les mécaniques et fonctionnalités des serious games éducatifs pouvant être assimilées à des formes d’évaluation ?
Les traces
Les serious games éducatifs offrent la possibilité, moyennant une conception adéquate, de collecter des traces de l’activité des utilisateurs (joueurs-apprenants). Le traitement de ces traces peut servir à adapter le jeu aux besoins de l’élève ou à générer des données potentiellement utiles à l’enseignant dans son action pédagogique. Dans leur ouvrage dédié aux fondements, concepts et pratiques du serious game, Dörner et al. (2016) – chercheurs et praticiens en science informatique, éducation, sociologie, économie, psychologie et game design – distinguent ce qui relève de l’online assessment – dans le jeu – et de l’offline assessment – en dehors du jeu. Les traces correspondent aux données issues de l’online assessment et leur analyse et interprétation ont fait émerger des disciplines telles que les learning analytics (LA) et l’educational data mining (EDM), consistant à explorer des données issues de contextes éducationnels.
Il convient de préciser d’une part que la quantité de données collectées dans le cadre de ces recherches est souvent colossale et nécessite des outils de modélisation afin de les rendre lisibles et de pouvoir faire des inférences sur les apprentissages des apprenants. D’autre part, les LA en particulier visent des retombées pratiques devant contribuer à soutenir l’enseignant dans son travail, mais la nature ouverte des jeux vidéo, autrement dit la pluralité des comportements pour lesquels un apprenant peut opter en y jouant, rend la collecte de données probantes difficile. Certains auteurs, tels que Bellotti et al. (2013) ou Chatti et al. (2012) cités par Dörner et al. (2016) évoquent en effet les difficultés à prouver que les mesures obtenues correspondent à celles souhaitées et la nécessité de les compléter par des formes d’évaluation plus standards pour démontrer les capacités de transfert de connaissances de l’apprenant dans « le monde réel », c'est-à-dire en situations pratiques. En effet, il n'est pas certains que l'apprenant soit capable de suivre le même raisonnement face à une situation-problème dans le jeu et hors du jeu, même si les connaissances et compétences qu'il doit mobiliser sont les mêmes. Or, in fine, c'est bien la capacité de l'apprenant à résoudre cette situation-problème en contexte réel qui intéresse l'enseignant.
Les auteurs s’accordent donc à dire que, pour être pertinente, l’évaluation par analyse de traces nécessite un dispositif de recherche relativement complexe et difficile à mettre en place par l’enseignant seul.
Les niveaux
Pour progresser dans un serious game éducatif, l’apprenant doit a priori développer des connaissances et compétences, mais la progression prouve-t-elle l’apprentissage? Dörner et al. (2016) rattachent l’évaluation dans un jeu à la mesure de la performance du joueur. Le passage de niveaux de difficulté croissante donne, entre autres, une indication sur la progression de la performance du joueur (Arnab et al., 2015 ; Belotti et al. 2013). L’évaluation peut reposer ici sur l’observation par l’enseignant de l’apprenant en train de jouer et le debriefing après avoir joué. Si nécessaire et selon les jeux, il peut notamment adapter le niveau de difficulté aux besoins des apprenants (adaptability) (Dörner et al. (2016). En outre, certains jeux adaptent directement leur niveau de difficulté selon le profil du joueur (adaptivity), par exemple en générant ou en retirant des indices, ou encore en effectuant des modifications de scénario. Un jeu trop facile ou trop difficile suscitant l’ennui et/ou la frustration, les paramètres de personnalisation du jeu constituent un enjeu central pour optimiser le potentiel impact de du jeu sur l’apprentissage.
Toutefois, les processus cognitifs à l’origine des actions du joueur-apprenant sont multiples et parfois non visibles et, comme le soulignent Dörner et al. (2016) : « pour que l'adaptabilité soit efficace, cela requiert une évaluation valide et ciblée au cours du jeu des aspects tels que l'état émotionnel et cognitif du joueur ou les difficultés qu’il rencontre » (p. 10, traduction libre). La démarche expérimentale mise en place dans le cadre du travail de thèse de Bugmann (2016), qui a porté sur l'observation de la relation entre les apprentissages issus de la pratique d'un jeu vidéo par des enfants et le socle commun de connaissances et compétences du programme officiel français, a en outre montré que l’effet est variable selon le profils des joueurs. L’évaluation proposée a par exemple mis en évidence que ceux défavorisés et jouant habituellement peu aux jeux vidéo sont aussi ceux qui ont le plus progressé.
Les rétroactions (ou feedbacks)
Dicheva et al. (2015) montrent que les « réponses » données par un serious game éducatif selon les choix et actions d’un joueur lui fournissent des informations quantitatives et qualitatives sur sa performance, le guident vers l’atteinte d’objectifs et stimulent sa compétitivité. L’octroi de récompenses ou pénalités (badges, points, etc.) et les feedbacks audios ou textuels sont ainsi susceptibles d’influencer des aspects liés à l’estime de soi tels que la capacité à faire face aux difficultés, le sentiment d'efficacité ou la volonté d'apprendre. Nous y reviendrons dans la partie consacrée à la question de recherche centrée sur la dimension psychologique.
En termes d’évaluation, les feedbacks permettent à l’apprenant de recevoir de manière plus ou moins explicite un retour formatif sur ses actions et performances, ce qui peut être qualifié d’ « évaluation furtive » (Shute et al. 2009, cité par Bellotti et al. 2013). L’enseignant est ainsi dissimulé dans l’environnement du jeu, notamment dans les personnages avec lesquels il interagit (Sanchez et al., 2011). Tout l’enjeu ici est d’être capable de prévoir des feedbacks pertinents pour intégrer l’évaluation formative des apprenants de manière appropriée dans leur expérience de jeu (Shute et al., 2009, cités par Bellotti et al. 2013).
En ce qui concerne les mécaniques de récompense et de pénalité, il faut toutefois tenir compte des limites de leur « valeur globale qui ne donne pas d’indications détaillées sur les actions correctes ou erronées du joueur » (Sanchez et al., 2011). De plus, la mise en compétition des joueurs générée par ces mécaniques – intensifiée lorsque leurs performances sont classées – peut être à la fois source de motivation pour certains et source d’émotions négatives pour d’autres. Il faut aussi mentionner que la place des feedbacks qualitatifs varie selon l’approche pédagogique privilégiée par les concepteurs de jeux. Elle est par exemple limitée dans une approche behavioriste ou cognitiviste alors qu’elle est centrale dans les approches socio-culturelles (Egenfeldt-Nielsen, 2006).
Enfin, pour pouvoir considérer le serious game éducatif comme un outil de communication interposée entre l’enseignant et ses apprenants, il est indispensable que l'enseignant soit mis à contribution dans la conception du jeu afin qu’il indique quelle rétroaction prévoir à quel moment et sous quelle forme, en faisant un compromis entre réalisme, apprentissage et jeu (Sanchez et al., 2011). Bien que certains jeux offrent la possibilité aux enseignants de donner ponctuellement un feedback direct à leurs apprenants – par exemple dans des jeux de réalité virtuelle – l’échange reste plus limité dans le temps qu’en conditions réelles. Il semble donc pertinent de préserver, en dehors de l’environnement technologique, un temps de débriefing sur l’expérience d’apprentissage.
Quelle complémentarité pédagogique le serious game éducatif peut-il apporter à l’apprenant et à quel coût ?
La machine au service de la relation pédagogique
Le serious game éducatif offre une potentialité encore inédite dans le domaine éducatif, notamment parce qu’il permet de collecter quantité d’informations sur le travail de l’apprenant et, grâce à celles-ci, de restituer des feedbacks individualisés là où un enseignant n’est pas en capacité de se démultiplier.
Les traces de l’activité de joueurs offrent des perspectives intéressantes mais restent encore largement sous exploitées selon Buenaño Fernández et Luján-Mora (2016), car plutôt envisagées dans le cadre de learning management systems (LMS) que de jeux pédagogiques. Selon eux, ces collectes de données visent généralement la modélisation de l’apprenant par rapport à ses caractéristiques individuelles (âge, background éducatif, genre, etc.) mais également par rapport à ses actions sur la plateforme ou - dans le cas que nous envisageons - dans un jeu. Si le premier type de données est déjà largement répandu hors du monde éducatif et de ce fait transférable, l’utilisation des données issues des LMS ou des jeux pédagogiques nécessitent de définir des méthodologies de traitement mais également les finalités visées. Celles-ci pourront ainsi constituer une réelle plus-value pour l’apprenant grâce à des feedbacks personnalisés, essentiels pour sa progression (Shute et al.2009, cités par Bellotti et al. 2013).
Potentialité du serious game éducatif en milieu scolaire
Le principal intérêt relevé concerne la motivation. En effet, hormis la motivation extrinsèque induite par le game play motivant l’élève à performer, il est également constaté que les jeux numériques influencent positivement l’engagement des élèves dans une activité d’apprentissage (Papadakis et Kalogiannakis, 2017). L’aspect social n’est pas à négliger également car le jeu peut également engendrer des échanges entre élèves et du travail d’équipe en établissant des stratégies (Allal-Charif et Bajard, 2011). Le serious game éducatif peut également, dans une démarche évaluative dont les finalités nécessitent d’être préalablement définies, représenter une alternative favorable à une évaluation formalisée d’un type plus conventionnel, génératrice de stress pour les apprenants. Cette proposition qui sera détaillée dans les lignes suivantes se heurte néanmoins à plusieurs contraintes d’ordres:
- pédagogique dans la mesure où son utilisation doit être réfléchie, scénarisée et portée par l’enseignant ;
- technique car une solution numérique pertinente doit être disponible ou prête à être développée ;
- économique car son coût doit rester raisonnable par rapport aux bénéfices escomptés.
La conception du jeu (tâches, épisodes, événements, actions) doit être alignée avec la proposition pédagogique, le programme académique et, clairement, le contenu éducatif à travailler (Moizer et al., 2019). Ainsi, une mise en correspondance complexe entre les actions du jeu, les principes pédagogiques et les composantes du programme d'études doit être élaborée. La configuration de cet alignement est un exercice laborieux. Il faut construire un matériel qui précise comment chaque tâche du jeu est alignée sur des principes et des objectifs d'apprentissage particuliers. Le moindre détail négligé peut rendre le jeu incomplet et inefficace à des fins éducatives ou d'évaluation. (Graesser, 2017).
Si de nombreux jeux (voir 3.4) ont été développés ces dernières années pour compléter les méthodes d'enseignement et d'évaluations scolaires traditionnelles, leur insertion dans des routines scolaires s’avèrent difficiles. En effet, un obstacle considérable à l'intégration des serious games éducatifs dans le curriculum serait le « mismatch » entre les compétences et les connaissances développées dans les jeux et celles validées au sein du système scolaire (McFarlane et al., 2002 ; Papanastasiou et al., 2017 ; Papadakis, 2018).
Pour terminer, la question du financement se pose, particulièrement dans le secteur public. Selon Alvarez et al.(2012) les coûts de développement d’un serious game éducatifs par une entreprise spécialisée sont de l’ordre de 150’000 €. A titre individuel, un enseignant est généralement contraint d’investir du temps pour chercher des outils déjà existants susceptibles de répondre à ses besoins et de considérer la plus value pédagogique qu’ils représentent.
Typologies d’usage de serious games éducatifs
Si l’utilisation des données issues de plateformes de formation en ligne ou de serious games éducatifs s’avère prometteuse, elle nécessite préalablement d’imaginer comment celles-ci peuvent être exploitées. Actuellement, deux types de perspectives apparaissent dans la littérature. La première est une visée prédictive s’appuyant essentiellement sur les interactions qu’a l’apprenant avec l’interface, telles que le nombre de clics, le temps passé sur les pages, etc. Si ces données sont susceptibles d’être récupérées de manière analogue dans un LMS ou dans un serious game éducatif, leur pertinence pédagogique dans le cas d’un jeu reste davantage à nuancer que dans le cas d’un LMS car elles nécessitent le pilotage et l’intervention d’un enseignant ou, à minima, d’une personne ayant le rôle de tuteur en temps réel afin de pouvoir proposer de l’aide à l’apprenant.
Le deuxième type de perspective relève du potentiel de correction évoqué par Aberkane (2016) permettant à l’apprenant d’être régulièrement corrigé par l’ordinateur, décuplant ainsi le « temps humain » que nécessiterait un suivi aussi soutenu. Cependant, cette possibilité ne se prête pas à n’importe quel type de travail et nécessite au préalable un important travail de définition des typologies d’erreurs possibles, puis d’une mise en œuvre technique dans le jeu des différentes réponses envisagées. Si certaines logiques algorithmiques permettent d’implémenter un repérage des erreurs et une adaptation du contenu en vue de proposer à l’apprenant des exerciseurs gamifiés, celles-ci restent basées sur des enseignements très procédurés où la plus-value apportée par l’outil est très onéreuse au regard de formes d’enseignement plus traditionnelles. D’autre part, le jeu vidéo permet également de proposer un apprentissage expérientiel et authentique comme évoqué précédemment (Sanchez et al., 2011), en amenant l’élève à vivre virtuellement des situations dans un environnement protégé et exempt de conséquences réelles dans des domaines dans lesquels il n’est généralement pas possible de s’entraîner afin de réaliser des simulations (pour rappel, les premiers jeux vidéos étaient issus du monde militaire).
Quelles sont les caractéristiques des serious games éducatifs qui pourraient favoriser l'apprentissage et leur utilisation comme méthode d'évaluation, ainsi que réduire la tension déclenchée par les formes traditionnelles d'évaluation ?
Les caractéristiques des serious games éducatifs favorisant l'apprentissage
Les caractéristiques inhérentes aux jeux sérieux favorisent l'apprentissage par leur système basé sur l’exploitation des erreurs, ainsi que par l'évocation des sentiments de « flow » et d'immersion (Marne et al., 2011 ; Cohard, 2015). Le « flow » suppose un état de concentration élevée sur une activité donnée, où l'individu s'engage à atteindre le but qui anime sa motivation (Ndao et al., 2017). L'immersion serait également une caractéristique psychologique associée aux serious game éducatif . Selon Witmer & Singer (1998), l'immersion est un état psychologique dans lequel on entre dans un système stimulant, ce qui entraîne une motivation et un engagement accrus pour atteindre des objectifs préalablement établis. Grâce à ces concepts de flow et d'immersion, les serious game éducatifs pourraient modifier positivement l'environnement évaluatif et renforcer la motivation des apprenants (Ndao et al., 2017).
L'apprentissage, en tant que processus actif et constructif, pourrait être évalué positivement par l'insertion de serious game éducatifs en raison de la stratégie « learning by doing », car l'étudiant, constructeur de sa propre réalité, établit des liens cognitifs entre les connaissances déjà intégrées et celles en cours d'acquisition (Lombardo & Dumas, 2006). Ainsi, en réduisant le facteur de stress inhérents aux évaluations (Galois-Faurie & Lacroux, 2014), l'élève peut mieux prendre en charge son apprentissage et mieux orienter ses actions; de plus, dès lors que les serious game éducatifs ont des objectifs bien définis, ils peuvent susciter une plus grande concentration de l’élève et un sentiment de contrôle face à la tâche à réaliser (Cohard, 2015).
Il est important de considérer que l'expérience psychologique de l'apprenant est affectée par le niveau de fidélité du jeu au monde réel. Certaines dimensions doivent être structurées avec précision pour susciter l'engagement et créer une expérience significative. Une attention particulière doit en effet être portée à ce que le jeu ne surcharge pas inutilement la cognition de l’apprenant, par exemple avec des sons ou musiques superflues (Nadolski & Hummel, 2016).
Il faut aussi tenir compte du fait qu'il existe plusieurs types de serious games éducatifs et que, selon le modèle retenu, certains avantages sur les méthodes d'évaluation traditionnelles sont négligeables voire inexistants. Selon la méta-analyse réalisée par Wouters et al. (2013), trois facteurs pourraient être à l'origine de cette situation : les limites de temps imposées par certains serious games éducatifs, qui s'apparentent aux formats des évaluations traditionnelles où la variable temps agit comme un agent stressant ; la priorisation de la structure pédagogique sur la structure ludique ; et l'utilisation de questionnaires pour évaluer l'état affectif et estimer la motivation.
Le potentiel des serious games éducatifs comme méthode d’évaluation
L'évaluation des apprentissages nécessite souvent une approche systématisée pour refléter les faiblesses et les forces d'un contenu scolaire donné. À cet égard, les méthodes d'évaluation traditionnelles sont standardisées, donc faciles à appliquer et fournissent des résultats simples à interpréter. Cependant, il faut reconnaître que, entre autres limites, ils ne mesurent pas les compétences de communication, le raisonnement logique et la résolution de problèmes complexes (Clarke et al., 2000, cité par Bellotti et al., 2013). Selon Olombel et al. (2021), les serious games éducatifs peuvent être utilisés comme moyen alternatif pour réduire la pression inhérente aux moments évaluatifs traditionnels. Pour que les jeux soient acceptés par les élèves et ne déclenchent pas de tensions, il est essentiel qu'ils aient un objectif et un ensemble de règles qui permettent au joueur d'évoluer dans son environnement et le guident tout au long de son apprentissage (Salen & Zimmerman, 2004).
Keller (2000, cité par Lewis., 2018) a proposé un modèle simplifié pour stimuler la motivation lors de la conception d'un serious game éducatif, basé sur l'attention, la pertinence, la confiance et la satisfaction. Pour donner confiance aux élèves, il est nécessaire de leur expliquer et de s'assurer qu'ils ont compris les objectifs d'apprentissage attendus par le jeu. Il est également important de créer une atmosphère dans laquelle l'élève se sent en confiance et a la certitude de pouvoir faire des erreurs et de recommencer sans être pénalisé. En travaillant sur la confiance en soi de l'élève, celui-ci prend conscience de son potentiel et sera capable d'accomplir la tâche avec plus d'aisance, car il ne se sentira pas contraint de le faire.
Lewis (2018) complète ce point en soulignant que, pour que les serious games éducatifs soient efficaces, il est nécessaire de recréer une dimension ludique qui maintient un environnement « irréel » favorisant chez les élèves la confiance d’acquérir de nouvelles connaissances. Cependant, comme le souligne Hotte (2016, cité par Lewis, 2018), le point critique de la conception d'un serious game éducatif est l'intégration du contenu éducatif dans son scénario, c'est-à-dire la création d'un jeu intéressant d'un point de vue ludique et qui parvient simultanément à transférer efficacement les connaissances pertinentes.
Selon Slussareff et al. (2016), pour que l'utilisation des serious game éducatifs comme méthode d'évaluation soit efficace, il est nécessaire qu'en plus d'aider à l'apprentissage et au développement des compétences, elle permette de mesurer la performance des élèves. Oliveira et al. (2021), soulignent que la plupart des évaluations médiatisées par les jeux sérieux sont basées sur le modèle de Kirkpatrick, plus axé sur la capture de la satisfaction, de la motivation et d'autres perceptions des élèves ; mais, en même temps, l'évaluation du niveau d'apprentissage - centrée sur la mesure des changements d'attitude, de connaissances et de compétences, serait négligée, puisqu'il manque des moyens (processus, cadres) qui envisagent la planification de l'insertion d'une évaluation dans le serious game éducatif pendant le cycle de son développement, l'engagement étant plus important dans la conception du jeu que dans la conception de l'évaluation de la performance de l'étudiant dans le jeu (Rocha, 2014 ; Oliveira et al. , 2018 ; Emmerich et Bockholt, 2016, cités par Oliveira et al. 2021).
Discussion
À l'issue de ce travail, il est possible de répondre à la question initiale du rôle que peut prendre le serious game éducatif dans le processus évaluatif en considérant que cet artefact digital ne peut avoir un rôle central, mais que son potentiel n'a pas encore été assez exploré. En effet, si de nombreux indices permettent de considérer les vertus du jeu vidéo dans le milieu éducatif, que ce soit du point de vue de l’apprentissage, pour sa composante motivationnelle ou dans une perspective d’évaluation détournée réduisant les émotions négatives de l’élève évalué, de nombreux points de tension subsistent.
Une réflexion approfondie autour du bien-fondé de la volonté d'utiliser cet outil est donc nécessaire et, pour qu'elle soit pertinente, un certain nombre d’éléments doivent être considérés. Le jeu peut en effet tout à la fois être un collecteur de traces de l’activité de l’apprenant, un tuteur intelligent capable d’adapter le contenu à son utilisateur ou une interface de pilotage voire d’évaluation pour l’enseignant. De ce fait, de nombreuses disparités peuvent apparaître entre les différents travaux de recherche, les méthodologies et hypothèses de recherche étant parfois diamétralement opposées.
Des difficultés majeures sont également présentes dans le triptyque financement-développement-usage et une action coordonnée des pouvoirs publics, des équipes de développement et des futurs utilisateurs du système est indispensable à la production de contenus pédagogiquement enrichissants et pertinents.
Cette synergie et ce travail mutualisé sont essentiels à la mise en place de serious games éducatifs pensés et structurés pour collecter une information exploitable, que ça soit par l’outil lui-même ou par ses utilisateurs potentiels. La collaboration nécessaire à la réussite de ce travail architectural implique d'avoir une vision de ses finalités dès le début de la conception et une bonne compréhension des attentes et possibilités d’y répondre.
Néanmoins, si une préconisation devait être adressée à des enseignants souhaitant introduire un serious game éducatif en classe, nous leur conseillerons de penser son implémentation au sein d'un dispositif d'enseignement plus large, en complément d'autres outils didactiques, et de concevoir des items d'évaluation en dehors du jeu (offline assessment) en reprenant des éléments du jeu pour que les apprenants puissent faire des rapprochements, ce qui favorise le transfert de connaissances. Un deuxième conseil serait de remobiliser les feedbacks donnés aux joueurs-apprenants dans un jeu afin de débriefer sur ce qui a été appris et ce qui reste à apprendre. Par exemple, dans le jeu la la Galax’CiS (MALTT - TECFA, 2021) destiné aux étudiants genevois dans le domaine de la santé, un commentaire sur la manière dont ils ont mobilisé ou pas des compétences interprofessionnelles leur est fait en fin de partie. En synchrone, l'enseignant peut questionner les choix des étudiants à tel ou tel passage du jeu en faisant des liens avec des connaissances et capacités d'interprofessionnalité qu'il souhaite que ces derniers développent.
Pour conclure, l'identification, parmi les jeux éducatifs disponibles, de ceux qui répondent aux besoins et aux attentes des enseignants ainsi qu'aux exigences des programmes d'enseignement, est un point d’attention à l’intégration des jeux sérieux aux méthodes actives d'enseignement et d'évaluation. Si de nombreux titres de jeux éducatifs sont proposés sur le marché depuis des années, leur adoption dans le monde éducatif reste très marginale et les recherches s’intéressant à leurs apports très nuancées. Il semble inévitable qu’il faille plus de temps et davantage d’études avant que les jeux sérieux ne deviennent une réalité ancrée dans le quotidien scolaire et encore davantage un outil d’évaluation reconnu comme tel.
Références
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Allal-Cherif, O., & Bajard, A. (2011). Serious games as a basis for human resource management: examples from the banking sector. MCIS 2011 Proceedings, (53), 1-13.
Alvarez, J., Alvarez, V., Djaouti, D & Michaud, L. (2012). Serious Games : Enjeux, offre et marché. Enseignement - Formation - Santé - Intormation et Communication - Défense. IDATE.
Arnab, S., Lim, T., Carvalho, M. B., Bellotti, F., de Freitas, S., Louchart, S., Suttie, N., Berta, R., & De Gloria, A. (2015). Mapping learning and game mechanics for serious games analysis. British Journal of Educational Technology, 46(2), 391 411. https://doi.org/10.1111/bjet.12113
Bellotti, F., Kapralos, B., Lee, K., Moreno-Ger, P., & Berta, R. (2013). Assessment in and of Serious Games : An Overview. Advances in Human-Computer Interaction, 2013, 1‑11. https://doi.org/10.1155/2013/136864
Berry, V. (2011). Jouer pour apprendre : Est-ce bien sérieux ? Réflexions théoriques sur les relations entre jeu (vidéo) et apprentissage. La Revue canadienne de l’apprentissage et de la technologie, 37(2), pp. 2-14.
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Bugmann, J. (2016). Apprendre en jouant : Du jeu sérieux au socle commun de connaissances et de compétences. Université de Cergy-Pontoise.
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