Les technologies numériques : Synonymes d’innovation pédagogique ?

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Résumé

Cet article vise une réflexion et l'apport d'un regard critique sur les usages des diverses technologies numériques dans l’éducation et l’apprentissage en mettant en lumière ses opportunités, mais aussi, ses limites et ses défis.
À travers une approche pluridisciplinaire, il croise les regards de chercheurs en sciences de l’éducation, en sciences de l’information et de la communication, en philosophie, en anthropologie et en sociologie. En effet, il s'appuie sur trois concepts sélectionnés et issus de trois articles, différents certes, mais complémentaires :

  • «Le numérique permet-il des apprentissages scolaires moins contraints ? Une revue de la littérature.» (Tricot, 2021)
  • «Numérique en formation : des mythes aux approches critiques.» (Fluckiger, 2019)
  • «Le dialogue homme-machine: Intelligence artificielle / intelligence humaine : manipulation et évaluation.» (Devillers, 2019)

Mots-clés : innovation pédagogique, contraintes, IA, responsabilité, réflexions, technologie numérique, éducation

Introduction

Dans le contexte actuel sociétal, et plus précisément dans celui de l'enseignement et apprentissage, nous observons une importante croissance de l'usage des technologies numériques qui semblent s’installer de manière durable dans le paysage. 
Ces dernières offrent de nombreuses opportunités pour concevoir et accompagner des situations d’apprentissage, mais elles soulèvent également de nombreux enjeux et interrogations.
Face à ce phénomène, il semble nécessaire d’adopter une posture plus critique et réflexive, qui ne prend pas pour acquis les promesses du numérique, ni se résigner à son inéluctabilité.

Développement

Les quatre contraintes de l’apprentissage par enseignement

Dans le contexte de l’éducation numérique, Tricot (2021) rappel qu'il est essentiel de comprendre les contraintes inhérentes à l’apprentissage, le tout en les reliant au numérique. Les trois première sont les :

  1. Contrainte de temps : L’apprentissage nécessite du temps. Les élèves en ont besoin pour comprendre, pratiquer et mémoriser de nouvelles informations. Le numérique peut aider en leur permettant, par exemple, de travailler à leur propre rythme.
  2. Contrainte de lieu : Traditionnellement, l’apprentissage se fait dans un lieu spécifique. Le numérique peut réduire cette contrainte.
  3. Contrainte de la manière d’apprendre : Il existe des méthodes spécifiques pour enseigner et apprendre. Le numérique peut aider à gérer cette contrainte en offrant divers outils (logiciels, lecteur MP3, etc.).


Cependant, il souligne également que le numérique ne supprime pas ces contraintes, mais les déplace souvent vers les élèves, qui doivent autogérer leurs apprentissages dans les environnements numériques éducatifs, notamment à distance. 

De plus, il met en évidence qu’un accroissement des exigences est souvent observé avec le numérique, au détriment des apprenants les plus fragiles ou les moins compétents dans l’autorégulation de leurs apprentissages.

En ce qui concerne la quatrième contrainte des savoirs à apprendre, cela renvoie à une quantité spécifique de connaissances que les apprenants doivent acquérir. Le numérique peut certes modifier la manière dont les apprenants interagissent avec le savoir et l’école, mais ne modifie pas le statut de ces deux entités, et peut même les renforcer. 

En somme, le numérique offre de nombreuses opportunités, mais une adoption non critique de ces outils dans l'apprentissage serait néfaste. Une utilisation réfléchie et intentionnelle du numérique, tenant compte des besoins et des préférences des apprenants, des objectifs pédagogiques et des valeurs éducatives devrait être préconisée.

Éthique by design

L’intelligence artificielle (IA), comprise dans les technologies numériques, n’est pas une innovation si récente. Cette dernière a connu, dès son introduction, diverses phases d’enthousiasme et de désillusion depuis les années 1950. Actuellement, l’IA tire parti des avancées dans des domaines tels que le big data, le cloud computing, les réseaux neuronaux et l’apprentissage profond. Cependant, elle est également confrontée à une série de défis techniques, éthiques, juridiques et politiques.
Dans le contexte actuel d'introduction de l'IA à plus large échelle, Laurence Devillers plaide pour une approche d' "éthique by design" visant à intégrer les principes éthiques dès la conception de cette dernière, et plus particulièrement celles qui interagissent avec les humains. Elle a pour objectif d'assurer le respect des droits fondamentaux, la protection des données personnelles, la transparence des algorithmes, la prévention des biais et des discriminations, ainsi que la responsabilité des concepteurs et des utilisateurs.
L'éthique by design est importante pour pouvoir instaurer la confiance et l'acceptabilité des technologies numériques, tout en préservant la dignité humaine face aux machines. "Il est important de commencer très tôt à démystifier les robots et d’apprendre les concepts fondateurs de l’IA. Donner de bonnes pratiques pour utiliser ces machines et comprendre les enjeux éthiques pour débusquer les abus est indispensable. Se doter d’outils que tout le monde puisse utiliser est important, qu’il s’agisse des citoyens ou d’experts comme par exemple les médecins." (Devillers, 2021, p.61). En définitive, l'autrice plaide en faveur d'une régulation et d'une évaluation des systèmes d'IA, impliquant les citoyens, les experts, les législateurs et les instances internationales pour un usage plus éclairé, maîtrisé et responsable.

Innovation pédagogique

Cédric Fluckiger (2019) présente l’innovation pédagogique comme un concept complexe et multidimensionnel avec l’idée d'éloignement des méthodes dites "traditionnelles" qui implique une transformation profonde des pratiques. Historiquement, les innovateurs pédagogiques, ceux qui cherchaient à enseigner de manière moins rigide et automatique, ont eu souvent recours à des outils technologiques pour réaliser leurs idées.
Cependant, il attire l'attention sur le principe que la simple introduction d’outils technologiques entre les mains des enseignants ou des élèves ne conduit pas nécessairement à une innovation pédagogique. En effet, "il peut alors être tentant d’inverser l’ordre des causalités et de penser que c’est la technologie qui est au principe de l’innovation pédagogique…, alors qu’il s’agit précisément du contraire. Mettre en place une classe inversée peut conduire à utiliser Internet, mais Internet n’a pas de raison particulière d’inciter un enseignant à un tel choix pédagogique." (Fluckiger, 2019, p.24)
Enfin, l'auteur fait le même constat avec l'IA, porteuse de nombreuses opportunités, mais qui semble aujourd’hui incarner les mêmes promesses et illusions que l'introduction des autres technologies avant elle si l'on ne prend pas en compte les spécificités du contexte éducatif, les objectifs didactiques et les besoins des apprenants.

Regards croisés

Au prisme des trois concepts présentés, nous pouvons dégager deux principaux constats :

  • L’innovation pédagogique ne se limite pas à l’introduction de nouvelles technologies, mais implique également une transformation des pratiques d’enseignement et d’apprentissage, nous pouvons dès lors dégager un premier élément de réponse questionnement de départ. Cela soutient que ce sont les méthodes pédagogiques et non les supports, qui permettent un apprentissage opérant.

Et pour que ces technologies numériques puissent être au service des apprentissages ou des innovations pédagogiques, il y a certains impératifs que l'on retrouve chez les trois auteurs :

  • Une adoption critique des outils numériques dans l’apprentissage et une utilisation réfléchie et intentionnelle nécessitant une régulation, une responsabilité et une participation des divers acteurs. En effet, que ce soit sur l'IA ou sur d'autres technologies, tous s'accordent à dire que cela nécessite une réflexion collective, une régulation démocratique et une éducation critique.

Conclusion

En conclusion, les technologies numériques offrent indéniablement des opportunités considérables pour l'innovation pédagogique, mais leur succès dépend de la manière dont elles sont mises en œuvre et adaptées aux besoins du milieu éducatif tout en prenant en compte leurs limites. Adopter une perspective holistique qui intègre les dimensions humaines, contextuelles, éthiques et pédagogiques semble essentiel pour maximiser les avantages de ces technologies dans le domaine de l'éducation.
Bien que cela puisse paraître évident, il faut rappeler qu'elles ne sont pas des agentes autonomes d'innovation, mais plutôt des catalyseurs qui dépendent largement des interactions humaines, des stratégies pédagogiques et des choix éducatifs (et politiques).
En guise d'ouverture réflexive, voici des propos tenus par Thomas Edison qui, en 1913 déjà, voyait le cinéma comme une technologie révolutionnaire pour l’éducation, capable de transformer radicalement la façon dont nous apprenons. « Les livres seront bientôt obsolètes dans les écoles. [...] Notre système scolaire va complètement changer d’ici dix ans.» ...

Bibliographie

Liens

Cette page fait référence à la page ADID1, les productions des étudiant.es


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