Analyse des traces par une EIAH : quelle plus-value pour les utilisateurs ?
Sandra La Torre - Volée Aegir 20-21
Cours ADID 1 - Texte réalisé pour la période 2
Résumé
Les EIAH permettent de récolter beaucoup de données lors de leur utilisation. Ces informations permettent, si elles sont correctement analysées par l'EIAH de s'adapter à l'utilisateur et à ses difficultés afin de le faire progresser. Ce n'est que qu'à cette condition que son utilisation apporte une plus-value pédagogique. Pour illustrer ce propos, nous prendrons comme exemple les système de tuteurs intelligents, qui ne sont qu'une catégorie des EIAH, mais dont le principe d'adaptation à l'utilisateur peut se transférer sur d'autres technologies.
Introduction
Lorsque l'on parle d'EIAH, on parle automatiquement d'apprenants. Or, ce terme désigne un groupe très hétérogène de personnes, aux profils et parcours variés. Les concepteurs d’EIAH, dont le but est de créer une interaction entre les humains et les machines, doivent tenir compte de cette richesse des profils. Sans différenciation, l’EIAH risque d’être inadaptée pour certains apprenants, voire contreproductive, comme le serait toute différenciation pédagogique avec ou sans intégration de la technologie (Tricot, 2017).
Selon Meyer (2010), pour que l’enseignement par la technologie soit efficace, il doit faciliter et décharger le traitement cognitif des apprenants. Pour y parvenir, la technologie doit réduire le traitement inutile, contrôler le traitement essentiel et stimuler le traitement génératif. Il est donc important de développer une technologie centrée sur l’utilisateur afin d’y intégrer les mécanismes propres aux apprentissages. C’est donc la technologie qui s’adapte aux besoins des apprenants et non les utilisateurs qui s’adaptent à la technologie. Pour que la technologie puisse s’adapter aux besoins des apprenants, l’analyse des traces durant l’utilisation de la technologie est primordiale. Mais, encore faut-il que cette analyse soit pertinente et qu’elle aboutisse à une réponse en lien avec les compétences de l’utilisateur. C’est tout le défi des EIAH et particulièrement des tuteurs intelligents (ITS).
Développement
Le terme EIAH regroupe des technologies très variées. Depuis les années 80 et l’utilisation des tuteurs intelligents, la récolte des traces au moment de l’utilisation de la technologie a pour but de modéliser les comportements de l’apprenant pour s’adapter à ses difficultés et lui proposer un parcours d’apprentissage personnalisé. La modélisation de l’apprenant se fait donc de manière dynamique lors de l’utilisation de la technologie.
Malheureusement, les limites des tuteurs intelligents résident dans l’interprétation des erreurs des apprenants (George, Michel et Ollagnier-Beldame, 2013). En effet, le résultat d’un exercice peut être faux pour plusieurs raisons, et l’analyse de l’erreur prend ici toute son importance. L’erreur ne nécessitera pas la même remédiation si elle est due à un manque de concentration, à un manque de compréhension de l’exercice ou à un manque de connaissances préalables, entre autres exemples.
Pour atteindre cet objectif, il est nécessaire de concevoir des EIAH pouvant s’adapter au contexte d’apprentissage ou au niveau des élèves comme le ferait un·e enseignant·e. Pour y parvenir, les travaux sur les tuteurs intelligents ont intégré ceux sur l’intelligence artificielle symbolique. Ce rapprochement a permis de doter les ITS de connaissances et de capacités leur permettant de gérer des situations de guidage et d’interaction avec l’apprenant (Touchnikin et Tricot, 2010). C'est ce qui se produit, par exemple, lors de l'utilisation des tuteurs intelligents pour favoriser la réflexivité des apprenants (système métacognitif)
Ce type de tuteurs donne à l’utilisateur des informations qui l’amènent à développer ses capacités métacognitives dans les domaines de la reconnaissance, de l’évaluation ou de la réflexion (Pena et al., 2012, cité par George, Michel et Ollagnier-Beldame, 2013). Parmi ce type de tuteurs, nous mentionnerons plus spécifiquement le système de coaching qui fournit à l’apprenant des conseils de façon automatique selon l’analyse de l’activité qui est menée, afin de permettre à l’apprenant d’auto-évaluer ses apprentissages durant le déroulement de l’exercice. Ces tuteurs prennent en compte les sentiments de l’apprenant sur son parcours d’apprentissage. En posant des questions à l’apprenant sur son sentiment de réussite, le système compare les résultats effectifs des exercices et l’autoévaluation de l’apprenant pour lui restituer un feed-back sur l’auto-analyse faite de ses propres compétences à la fin des exercices. Cette représentation entre les faits issus de la réussite ou non des exercices et l’auto-évaluation de l'apprenant aident ce dernier à prendre du recul et à analyser sa perception de réussite. À force d’utiliser ce type de tuteur intelligent, l'utilisateur apprendra à autoréguler l’évaluation de ses compétences pour que le sentiment de réussite s’approche des faits analysés par la technologie grâce aux logs. Le but de ce processus réflexif est d’amener une transformation cognitive qui permette de s’affranchir du tuteur intelligent pour apprendre à autoréguler son apprentissage.
Conclusion
Les tuteurs intelligents offrent un soutien aux apprentissages. Leur plus-value réside dans les feedbacks riches et variés qu’ils peuvent fournir à l’apprenant. Mais pour que cela soit efficace, il faut que la technologie soit orientée sur l’apprenant et non sur les connaissances. Ce n’est pas l’apprenant qui doit s’adapter au tuteur intelligent, mais bien la technologie qui doit être pensée, dès sa conception, pour s’adapter aux différents profils et niveaux des apprenants. Une technologie inadaptée n’apportera pas de résultats si elle n’est pas basée sur l’apprenant et une pédagogie adaptée.
Un dernier point dont il est aussi important de tenir compte, et qui n’a pas été développé ici, est la capacité de l’apprenant à s’approprier la technologie utilisée. Parfois, la difficulté d’appropriation de la technologie empêche son utilisation. Elle met donc le système en échec, alors qu’une formation à l’usage aurait permis d’avoir un résultat différent.
Bibliographiques
ATIEF : Ressources sur les EIAH (2018, 18 décembre), Analyse des traces : Objectifs de traçage [vidéo]. YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=aQMnhcq4HBM
ATIEF : Ressources sur les EIAH (2018, 15 décembre), Adaptation : Analyser l'appropriation pour analyser l'adaptation [vidéo]. YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=9soVe48UClo
ATIEF : Ressources sur les EIAH (2018, 14 décembre), Méthodes de conceptions : Recherche orientée par la conception [vidéo]. YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=iiN3Axy5a9c&feature=emb_logo
George, S., Michel C., Ollagnier-beldame M. (2013). Usages réflexifs des traces dans les environnements informatiques pour l'apprentissage humain. Intellectica, 2013/1, 1-36.
Mayer R.E (2010) Apprentissage et technologie. Dans H. Dumont, D. Istance, F. Benavides (dir.), Comment apprend-on? La recherche au service de la pratique (pp. 191-211). OECD 2010
Touchkine, P., Tricot A. (2010). Environnements informatiques et apprentissages humains, 167-200.
Tricot, A. (2017). Quels apports de la théorie de la charge cognitive à la différenciation pédagogique ? Quelques pistes concrètes pour adapter des situations d’apprentissage? Consulté sur http://www.cnesco.fr/wp-content/uploads/2017/03/170313_16_Tricot_def.pdf