Technologies éducatives et handicap mental

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Le droit d'accès aux nouvelles technologies par la totalité de la population est aujourd'hui reconnu par la législation d'un grand nombre de pays. Dans le cas de personnes présentant un handicap, psychique ou physique, on parle de technologie d'assistance (assistive technology): "tout outil, équipement ou système de production, acquis commercialement ou élaboré ou transformé par soi-même qui est utilisé pour accroître, maintenir ou améliorer des capacités fonctionnelles ou individuelles de personnes avec handicap." (Wallace, Flippo Barcus Behrmann, 1995, p3).

Wehmeyer (1998) parle de deux obstacles majeurs à l'utilisation d'appareils d'assistance par des personnes avec un retard intellectuel: peu d’appareils spécifiques pour de personnes avec un retard mental sur le marché, et la difficulté de conception de ces appareils pour les accommoder à des capacités cognitives affectées. A ces deux obstacles il ajoute leur difficulté à assurer une maintenance.

Au cours d'une enquête auprès de 1218 familles aux Etats-Unis, Wehmeyer (1998) a constaté qu'il y a une sous-utilisation des outils technologiques (<10% de cette population). La première barrière pour l’utilisation est le manque d’information de l’entourage sur les disponibilités, les coûts et les aides. La deuxième, la non-adéquation à un "universal design", c'est-à-dire la conception de produits qui soient accessibles à tout le monde. En ce qui concerne l'ordinateur, les utilisations les plus fréquentes étaient pour les loisirs et les suivis d’objectifs éducatifs. Ils étaient peu exercés à la complexité de l'outil, car il n'existe que peu de programmes qui sont conçus pour l'utilisation par des adultes avec un retard mental. Les programmes existants sont soi trop complexes, ou s'ils ne le sont pas, ils ne sont pas adaptés à l'âge de l'utilisateur. Souvent, quand le logiciel est disponible, les systèmes d'opération existants créent des barrières pour des individus avec un retard mental. L'adaptation pour chaque personne de l'utilisation de l'ordinateur doit inclure "le développement de logiciels avec une navigation et recherche de l'information sous un format non textuel (graphique, vidéo, audio), une minimisation du nombre et complexité des points de décision, une présentation séquentielle de l'information, et une faible dépendance de la mémoire" (Wehmeyer 1998). Ces principes découlent des connaissances actuelles sur le fonctionnement cognitif de personnes avec une déficience intellectuelle.

Braddock et al (2004) étendent leur étude au-delà de ce qui est défini comme déficience intellectuelle pour parler de déficience cognitive: limitation importante de la capacité de penser (conceptualiser, planifier, séquencer d'idées ou actions, se souvenir, interpréter des répliques sociales et comprendre nombres et symboles). De ce point de vue, la proportion de population qui peut présenter des difficultés cognitives est importante (20 millions aux États-Unis) avec une tendance à augmenter à cause du vieillissement de la population. Bradoock et al (2004)soulignent trois domaines d'intérêt dans le développement: Technologies de soutien personnel, technologies d'assistance et technologies virtuelles.

Technologies de support (soutien) personnel

Les supports (soutiens), tels que définis par The American Association on Mental Retardation, sont les ressources et stratégies qui aident à la promotion des intérêts et des causes d'individus avec ou sans déficiences; qui les conduisent aux ressources d'accès, d'information et relationnelles inhérentes dans un travail intégré et environnement de vie, et qui aboutissent à une meilleure indépendance, productivité, intégration dans la société et satisfaction. (Autodétermination). Luckason et Spitalnik (1994), ont suggéré que ces supports se référent à un ensemble de services, individus et actions adaptés aux besoins de la personne, qu'ils décrivent comme une constellation de supports, où la personne est au centre (ses capacités d'autodétermination), et autour le soutien des proches (Famille et amis), de l'entourage (voisins ou collègues de travail), génériques (les services communs) et les services spécialisés (encadrement éducatif). Figure1

Les technologies de support personnel contribuent à augmenter l'indépendance, la productivité et la qualité de vie de personnes avec déficiences cognitives. L'intégration de ces technologies peut prendre différents chemins:

  • Le développement de logiciels pour l'aide éducative ou d'aide à la vie quotidienne; pour l'organisation du temps personnel (Davies, Stock et Wehmeyer 2002b), pour une aide individualisée pendant le travail (Davies, Stock et Wehmeyer 2002a), pour la gestion d l'argent personnelle (Davies, Stock et Wehmeyer 2003). Davies et al(2001) énumèrent une série de compétences individuelles pouvant être développées par une utilisation adéquate de l'outil informatique:
  1. Amélioration de l'indépendance: L'ordinateur peut automatiser des processus qui autrement demandent une importante charge cognitive.
  2. Entrainement: Un entrainement par ordinateur peut favoriser une auto-formation et l'utilisation d'éléments multimédia favoriser une généralisation.
  3. Favoriser l'autodétermination: Par l'utilisation d'éléments multimédia qui peuvent faciliter l'utilisation indépendante de l'ordinateur.
  4. Gestion du temps: En réduisant les besoins d'intervention de l'entourage pour gérer les occupations, les horaires, les rendez-vous, etc.
  • L'enrichissement, avec l'introduction de l'ordinateur, des démarches d'apprentissage ou de communication auprès des personnes avec des difficultés cognitives, tels les programmes d'entraînement spécifiques (Davis, Stock, Wehmeyer 2003,2004) ou les sites web adaptés (Davis, Stock, Wehmeyer 2001).
  • L'application des principes universels dans la conception d'outils technologiques ("Universal desing"), dans le but de rendre les interfaces accessibles à tous les utilisateurs possibles.

Les technologies basées dans l'utilisation de l'ordinateur peuvent devenir un moyen permettant aux personnes avec une déficience de devenir leur propre soutien (Davies, Stock et Wehmeyer, 2001; Wehmeyer 1998).

Intégration professionnelle

Liste de recommandations pour la création "softwares" éducatifs proposée par Okolo, Barh et Rieth (1993):

  • Interfaces claires et épurées.
  • Commandes et actions cohérentes pour le passage d'un écran à un autre.
  • Séquences et vitesse de transition appropriées.
  • Développement de exemples suffisants et appropriés.
  • Donner à l'étudiant, la plus grande possibilité de répondre (éviter les embouches).
  • Introduire les animations et graphiques nécessaires en évitant la distraction.
  • Donner des Feedbacks fréquents.
  • Adapter le nombre d'opportunités d'entraînement.
  • Multiplier les explications d'un mot ou action.

Davies et al. (2001), en ciblant un utilisateur avec une déficience ont ajouté:

  • Combiner l'utilisation d'images avec des incitations audio pour la navigation.
  • Dessins d'interface, comme des boutons agrandis, qui maximisent l'effectivité de que l'utilisateur réalise une action.
  • Maintenir la cohérence dans la conception actions.
  • Minimiser les erreurs, (ex: effacement de boutons dont l'usage serait inapproprié).
  • Utilisation d'options de personnalisation qui permettent l'adaptation à un utilisateur particulier.
  • Utilisation d'un système* de rétention de données qui permette le suivi des progrès.
  • Rendre ludique et intéressante l'utilisation du software.
  • Un procès de recherche pour déterminer les besoins et une conception efficace.

Davies, Stock et Wehmeyer (2002a) ont expérimente l'utilisation d'un ordinateur manuel, auprès d'utilisateurs avec un retard mental, pour intégrer une séquence de travail que la personne pouvait utiliser pendant la réalisation d'une tâche. Cette séquence, sur un support visuel et audio, pouvait être activé et désactivée à souhait. Leurs résultats montrent que l'utilisation de cet outil améliorait la qualité d'exécution du travail et, surtout diminuait leur dépendance d'un encadrement. Dans leur travail, ils ont dû concevoir une séquence, visuelle et audio, expliquant la tâche à accomplir (voir encadré).

Accès à internet

Si l'utilisation d'internet n'a pas cessé de s'accroitre, très peu de personnes avec une déficience mental bénéficient d'un usage similaire (Wehmeyer 1995). Et pourtant, internet est un outil qui facilite l'autonomie et la productivité, donc intéressant pour une éducation visant l'autodétermination. Selon des études récentes, le principal usage du web est l'obtention d'information , ensuite le loisir et les buts éducatifs, (Eighth WWW user survey). Mais, aujourd'hui encore, la plupart de navigateurs ne sont pas utilisables par des personnes avec une déficience mentale. Et pourtant, comme développé ci-dessus, il existe des expectatives importantes dans ce domaine.

Les caractéristiques particulières de cette population déterminent la nécessité d'un type de navigateur adapté, reposant sur des tâches qui ne dépassent pas leur capacité de lecture, de traiter l'information d'une interface ou de retenir l'enchaînement des étapes d'une tâche.

Davies et al.(2001)) et ablelinktech ont conçu un navigateur (Web treck) capable de réaliser les tâches les plus communes sur Internet: entrer une adresse URL, effectuer une recherche, sauver des sites sur un marque-pages et retrouver ensuite ces pages.

Les caractéristiques principales de ce navigateur sont les suivantes :

  • Accompagnement audio: pour l'identification des commandes et actions en réaction au pointage par la souris, mais aussi pour la minimisation des erreurs, déclenché après une action pour expliquer les actions suivantes.
  • Interface simplifiée: Le navigateur évite un encombrement, en limitant les commandes présentes aux strictement nécessaires pour l'action suivante.
  • Options de personnalisation.
  • Utilisation d'éléments graphiques: Le navigateur s'appuie sur des icônes (accompagnés de messages audio) pour éviter les difficultés de le lecture et écriture.
  • Méthodologies de minimisation des erreurs: Emplacements familiers des boutons récurrents, automatisation de certaines étapes.

Par la suite, ils l'ont testé comparativement avec Internet explorer, auprès de 12 personnes avec un handicap mental. Leurs résultats montrent le net avantage de l'utilisation de web trek.

Le W3C (Word Wide Web consortium) a établi une série de directives pour concevoir des sites Web plus accessibles rassemblés sous le nom de Web Accessibility Initiative (WAI), ces directives ont surtout trait à l'organisation des pages et aux outils ou procédures de navigation.

Rocque et al. (2007) ont abordé le problème de la lisibilité et l'intelligibilité des pages web, en explorant les pistes établies par l'ensemble de règles "Savoir-simplifier" (Inclusion Europe-ILSMH, 1998), ils présentent trois modèles d'adaptation de textes:

  • Texte simplifié: Par la simplification du vocabulaire utilisé, des constructions syntactiques et de la structure du texte. Cette simplification exige beaucoup de temps et ne permet pas de l'envisager pour une simplification massive. Une solution pourrait être apportée par l'automatisation (Simplification automatique des phrases), pas suffisamment développée.
  • "Ortograf altêrnativ": conçue exclusivement pour des personnes avec des limitations d'activité intellectuelle moyenne à sévère. Elle consiste à transposer un texte simplifié en un code alternatif basé sur seulement 34 correspondances graphème-phonème au lieu de 4400, et le recours à des règles de transposition qui assurent la normalisation des processus.
  • Soutien phonétique. Destinée à des élèves avec une limitation d'activité intellectuelle légère, cette alternative propose l'insertion des caractères phonétiques au-dessus des graphèmes complexes d'un texte. Le but serait la création d'un logiciel d'ajout qui pourrait offrir la possibilité d'un soutien phonétique régressif.

Les deux premiers modèles, la simplification du texte et l'utilisation de "l'ortograf altêrnativ" sont présentés par les site Accès simple de la Ville de Montréal. (Rocque, S. Rioux, S. et Langevin, J. 2007).

Communication

Les dernières décennies ont impliqué d'importantes avancées technologiques dans le domaine de la communication. Ces avancées ont été suivies de près par les personnes avec déficiences cognitives qui les ont trouvées dans leur environnement de vie, mais les systèmes ont évolué vers une sophistication qui les rend de moins en moins accessibles pour eux.

Able Link technologies Inc. a développe un programme mail (Web Trek connect) qui permet l'accès de cette technologie à des personnes ne sachant pas lire ou écrire.

Technologies d'assistance

Les technologies d'assistance (assisted care systems technology) pour des personnes avec une déficience cognitive, sont en général intégrées à une structure ou bâtiment: Des appareils de contrôle qui peuvent être distribués sur un lieu de vie (Maison intelligente), pour faciliter la vie de la personne qui habite (ouverture des portes, régulations de lumière, bases de données, prévision de situations de danger); Transports intelligents (ex: systèmes d'alerte GPS); robots personnels;

Technologies virtuelles

Dans l'actualité, la simulation est utilisée dans multitude de domaines pour un entraînement virtuel avant de procéder à un entraînement manuel, plus coûteux et risqué. L'utilisation des technologies virtuelles avec des personnes avec une déficience cognitive est toute récente. Dans l'enseignement de la lecture, du calcul, mais aussi pour l'apprentissage d'actes de la vie courante tels les achats, les interactions sociales ou des règles de sécurité.

Davies et al. (2003), ont montré l'efficacité d'un entraînement virtuel à l'utilisation d'un distributeur automatique (bancomat) auprès de personnes avec un retard mental. Une des caractéristiques intéressantes révélées par leur expérience, est que les participants étaient motivés par ce type d'apprentissage et en même temps rassurés, car leurs erreurs ne pouvaient pas avoir des graves conséquences (non-retour de la carte bancaire).

Limitations cognitives: Adaptation de l'utilisation des TIC

Langevin et Rocque proposent cinq balises pour la conception des produits ou des processus d'intervention auprès d'élèves avec des limitations d'activité intellectuelle. Ils en déduisent cinq règles d'adaptation qui peuvent s'appliquer aussi à l'utilisation des TIC et à l'accessibilité de l'information.

Références

  • Braddock, D. Rizzolo M.C., Thompson,M. Bell, R. (2004), Emergin Technologie and cognitive disability Journal of special Education Technology. 19 (4).
  • Daniel K. Davies and Steven E. Stock Michael L. Wehmeyer (2001). Enhancing Independent Internet Access for Individuals with Mental Retardation through Use of a Specialized Web Browser: A Pilot Study. Education and Training in Mental Retardation and Developmental Disabilities, 2001, 36(1),107-113
  • Davies and Steven E. Stock Michael L. Wehmeyer (2002a) Enhancing Independent Task Performance for Individuals with Mental Retardation Through Use of a Handheld Self-Directed Visual and Audio Prompting System. Education and Training in Mental Retardation and Developmental Disabilities, 2002, 37(2), 209-218.
  • Davies, Daniel K., Stock, Steven E., Wehmeyer, Michael L. (2002b) Enhancing Independent Time-Management Skills of Individuals With Mental Retardation Using a Palmtop. Mental Retardation Volume: 40 Issue: 5 Pages: 358-365.
  • Davies, Daniel K.; Stock, Steven E.; Wehmeyer, Michael L. (2003) Utilization of Computer Technology To Facilitate Money Management by Individuals with Mental Retardation. Education and Training in Developmental Disabilities, v38 n1 p106-12 Mar 2003.
  • Davies, Daniel K.; Stock, Steven E.; Wehmeyer, Michael L. (2003b) Application of Computer Simulation to Teach ATM Access to Individuals with Intellectual Disabilities. Education and Training in Developmental Disabilities, 2003, 38(4), 451–456
  • Langevin, J. et Rocque, S. (2007) Balises et processus d’adaptation pour l’utilisation des TIC et pour l’accessibilité à l’information au regard de limitations cognitives. Symposium REF 2007, Université de Sherbrooke.
  • Rocque, S. Lagevin, J. Roland, D. et Duquette, M. (2007) Trois modalités d’adaptation de textes. Symposium REF 2007, Université de Sherbrooke.
  • Rocque, S. Rioux, S. Lagevin, J. (2007) Accessibilité à l’information, incapacités intellectuelles et ouverture sociale : le site WEB adapté AccèsSimple la Ville de Montréal. Symposium REF 2007, Université de Sherbrooke.
  • Wallace, J.F. Flippo, K.F. Barcus,J.M. et Behrmann,M.M. (1995) Legislative foundation of assistive technology policy in United States. K.F. Flipo. K.J. inge et J.M. Barcus (Eds.) Assistive technology: A ressource for school, work and community (pp 3-22) Baltimore Brookes.
  • Wehmeyer, Michael L. (1998). National Survey of the Use of Assistive Technology by Adults With Mental Retardation. Mentalé retardation Vol. 36, No. 1, 44-51, February 1988

Liens

Handiacces : site avec les dernières nouveautés techniqués adaptés.

Siwadam.com : autour de l’handicap mental. logiciels

Logicom : Site d’outils informatiques adaptés.

Ablelink technologies : Technologies pour personnes avec des difficultés d’apprentissage.

Journal of Special Education Technology (JSET)

WAI web accessibility initiative: lancée en février 1997 par le World Wide Web Consortium (W3C).

NovitaTech, assisting people with disability to lead fuller and more satisfying lives, with the help of aids and equipment.

Accès simple Site adapté de la ville de Montréal, pour des personnes avec des incapacités intellectuelles.