« Réflexions sur la conception d’EIAH pour favoriser l’engagement des apprenants » : différence entre les versions

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De plus, Jézégou (2014) met en évidence les bienfaits de construire « une communauté d’apprentissage en ligne » qui constitue une « agentivité collective ». Selon elle, cette communauté se constitue d’un
De plus, Jézégou (2014) met en évidence les bienfaits de construire « une communauté d’apprentissage en ligne » qui constitue une « agentivité collective ». Selon elle, cette communauté se constitue d’un


 
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« groupe de personnes, membres volontaires aux expertises diverses et d’égale valeur, engagées conjointement dans une dé- marche collaborative de résolution d’une situation problématique ; cette dé- marche facilitant la construction individuelle et collective de connaissances. » (Jézégou, 2012, cité dans Jézégou, 2014, 279)  
 


Cette communauté en ligne a alors l’avantage de diviser la charge de travail des apprenants, ce qui permet à l’apprenant de partager ses difficultés et de trouver des solutions de manière collaborative, l’engageant ainsi de manière sociale mais aussi cognitive. La collaboration entre pairs peut donc favoriser l’engagement des apprenants. Les efforts à fournir en collaboration que formulent Jézégou sont divers :
Cette communauté en ligne a alors l’avantage de diviser la charge de travail des apprenants, ce qui permet à l’apprenant de partager ses difficultés et de trouver des solutions de manière collaborative, l’engageant ainsi de manière sociale mais aussi cognitive. La collaboration entre pairs peut donc favoriser l’engagement des apprenants. Les efforts à fournir en collaboration que formulent Jézégou sont divers :

Version du 24 janvier 2023 à 18:06

Résumé

Dans la conception de EIAH hybride à distance, il est essentiel, pour l’enseignant, de guider l’apprenant dans son apprentissage et plus particulièrement de lui donner les outils pour soutenir son engagement (cognitif, émotionnel et métacognitif) à long terme et pas uniquement en début d’activité. J’ai choisi de discuter sur ce sujet car je pense que l’engagement des apprenants est un aspect essentiel au bon déroulé de leur apprentissage et qu’il est encore aujourd’hui malheureusement trop peu considéré dans les classes, surtout dans le cadre des études supérieures, où les cours hybrides alternant cours en présence/distance et en synchrone/asynchrone deviennent chose habituelle.

Introduction

La Haute Autorité de Santé définit l’e-learning comme : « un apprentissage ouvert, favorisant l’accessibilité du contenu, des lieux, du temps, des modes d’enseignement et des médias » (HAS, 2015, 10, cité dans Alves et Lerner, 2021). En effet, l’ère numérique a permis d’implémenter des centaines de plateformes e-learning, mais cette expansion du numérique nécessite une attention toute particulière aux apprenants et aux problèmes d’isolement et d’engagement que ceux-ci rencontrent au cours de leurs études à distance. Pour que les apprenants sachent ce qui est attendu d’eux, il est nécessaire que les enseignants conçoivent une formation médiatisée répondant aux besoins des apprenants. Dans cette production, nous allons nous intéresser au problème de l’engagement que les apprenants peinent à maintenir tout au long de leurs études, puis nous ferons une réflexion autour des scénarios pédagogiques à prendre en compte lors de la conception d’un EIAH (Environnement informatique pour l’apprentissage humain), afin de favoriser l’engagement des apprenants.

Développement

Problème d’engagement chez l’apprenant

Il n’est pas rare de voir des étudiants ne pas finir une formation, un cours ou prolonger ses études à cause de cette modalité hybride qui est apparu en force depuis la pandémie du Covid-19. De nombreux étudiants dans les universités ont exprimé leur démotivation due aux cours donnés à distance par des audios pré-enregistrés. Le sentiment d’isolement a renforcé ce mal-être et a même poussé certains étudiants à abandonner ou à repousser pour plus tard leur formation. Aujourd’hui, de plus en plus de formations sont proposées en e-learning et cela constitue un défi pour les enseignants et formateurs ; celui de concevoir des EIAH qui engagent les apprenants dans leurs études et qui les guident dans cet effort soutenu tout au long de leur formation.

Engagement personnel

Qu'est-ce que l'engagement ?

L’engagement, de manière générale, peut être définit comme « l’interaction dynamique de trois éléments, les forces affective, comportementale et cognitive, qui font qu’une personne initie, puis maintient une ligne d’action ou de pensée envers un objet social important et valorisé » (Brault-Labbé et Dubé, 2009, 120, cité dans Alves et Lerner, 2021, page ???). L’engagement en formation ajoute la dimension d’un « fort sentiment de détermination ainsi [que] la volonté de faire des efforts pour atteindre le but fixé » (Boudrenghein et al., 2009:5, cité dans Alves et Lerner, 2021, page ???). Ainsi, c’est par le désir d’apprendre et la curiosité qu’une personne maintient son engagement dans une formation. L’engagement est

un facteur de la réussite académique (Molinari, Poellhuber, Heutte, Lavoué, Widmer et Caron, 2016 ; Pirot et De Ketele, 2000) et […] un des piliers du bien-être. Il est ainsi un prédicteur de l’expérience positive en contextes de travail et d’apprentissage (Schueller et Seligman, 2010, cité dans Molinari et Schneider, 2020, 1)

Dans le modèle de l’autodirection personnel que propose Carré (2003), l’engagement (qu’il nomme autodétermination) est une des deux dimensions (l’autre étant l’action, ou pour reprendre le terme de Carré, l’autorégulation) qui constitue ce modèle.

Figure 1. La double dimension de l’autodirection d’après Carré (2003)

L’autodétermination (engagement) de l’apprenant est un comportement qui « est nécessaire pour qu’il se mobilise personnellement dans une activité de formation pour atteindre ses propres buts » et pour lui permettre de réguler son activité (action) par des stratégies volitionnelles afin d’atteindre ses buts (Jézégou, 2014, 272). Ainsi, l’autodétermination, l’autorégulation et le sentiment d’auto-efficacité qui en découleent permettent « d’expliquer les grands mécanismes psychologiques de l’agentivité́ individuelle » (Jézégou, 2014, 274).Quelles sont les stratégies utilisées pour rester engagé dans une activité ?

D’après Cosnefroy, l’engagement (qu’il nomme la volition) se manifeste par un ensemble de stratégies volitionnelles, telles que la structuration du temps et de l’environnement de travail, la gestion des émotions et de la motivation, et la recherche de soutien social (Molinari et Schneider 2020), qui permettent aux apprenants de pratiquer un apprentissage autorégulé (Cosnefroy, 2010)[1] et d’atteindre les objectifs fixés par soi-même. Molinari et Schneider porpose quelques exemples de stratégies volitionnelles privilégiant le maintien de l’engagement dans les études à distance :

  • s’inciter à se récompenser après l’effort (ex. faire une activité plaisante pour soi) ;
  • documenter ses réussites (ex. cocher des cases avec un vu pour voir l’avancée du travail) ;
  • prendre conscience de ses émotions et de ses besoins ;
  • signaler à ses proches le besoin de ne pas être dérangés ;
  • fractionner le temps et prendre régulièrement des pauses.

(Molinari et Schneider, 2020, 17)


Comment mesurer l’engagement chez les étudiants ?

L’engagement se décrit sur la base de trois dimensions (Molinari et Schneider, 2020) :

  • L’engagement cognitif : « des processus et stratégies pour apprendre en profondeur et réguler l’apprentissage (par exemple, réflexion critique, autorégulation métacognitive) »
  • L’engagement émotionnel (affectif) : l’engagement est « associé à des comportements observables (par exemple, participation, effort, attention), des émotions (positives et négatives), des croyances motivationnelles (par exemple, sentiment d’efficacité́ personnelle, perception de la valeur de la tache) »
  • L’engagement comportemental (social) : « des comportements observables (par exemple, participation, effort, attention) »

Pour rester engagé dans une activité et s’y maintenir (i.e. volition), l’apprenant doit effectuer le travail métacognitif d’autoréguler son apprentissage. L’apprentissage autorégulé

réfère aux processus par lesquels l’apprenant planifie, surveille, ajuste et évalue, de façon active et autonome, ses cognitions, motivations, émotions et comportements ainsi que son contexte d’apprentissage. (Pintrich, 2004 et Zimmerman, 2002, cités dans Molinari et Schneider, 2021, 3)

Cependant, ces processus d’autorégulation demandent un effort constant en termes d’énergie et de charge cognitive (voir Tricot, 2017).

Les trois phases d’autorégulation proposées par Pintrich (2004) et Zimmerman (2002) (cité dans Molinari et Schneider, 2020, 3) sont :

  • La prospection [anticipation dans Carré, 2003] qui est « une phase de planification (but, plan d’action, temps, effort, auto-observation) et d’activation (connaissances antérieures et métacognitives ; perceptions de soi, de la tâche et du contexte) en amont de la tâche. » Elle est liée au concept de la motivation.
  • La performance [action dans Carré, 2003] qui « s’organise en deux phases interreliées qui ont lieu pendant la tâche : le monitoring (prise de conscience et suivi) et la régulation (contrôle et ajustement). » Elle est liée au concept de la volition.
  • La rétrospection (autoréflexion, c.f. Carré, 2003) qui « consiste en une évaluation réflexive (jugements cognitifs et réactions émotionnelles) du résultat d’apprentissage. » Elle est liée au concept de l’évaluation.

Si ces stratégies métacognitives ne sont pas mises en œuvre par l’apprenant, il est difficile pour celui-ci d’arriver aux buts finaux qu’il s’est fixés.

Engagement collectif

Pour pallier ce problème, Alves et Lerner (2021) discutent du rôle de l’environnement social personnel de l’apprenant et de l’influence de l’entourage familial (proches), professionnel (relations de travail) ou formatif (enseignants et pairs). Ces acteurs jouent un rôle dans le soutien apporté à l’apprenant en e-learning. Les résultats d’une étude empirique réalisée avec 256 personnes (Alves et Lerner, 2021) montrent que « il existe de réelles motivations à s’engager dans une formation en e-learning mais que l’expérience antérieure de cette modalité́ de formation joue un rôle modérateur important. » (Alves et Lerner, 2021, 208). Ainsi, il est possible d’expliquer le désengagement pour les formations en e-learning par la déception des apprenants dans leur formations antérieures.

Cette étude indique également l’importance du soutien social, c’est-à-dire de l’entourage de l’apprenant. Il en résulte que dans une formation, « le formateur est le premier acteur de soutien » (Alves et Lerner, 2021, 208) : « Le soutien social (professionnel et formatif) est, en conclusion, nécessaire à l’engagement et à la volition des apprenants en e-learning ; mais ce soutien répond à différents types selon les caractéristiques individuelles des apprenants ». Ce soutien social est donc une des stratégies volitionnelles (voir Cosnefroy, 2010).

Alors que les cours en présentiel, des groupes se forment. Ces groupes ont « une fonction cognitive pour se distribuer les tâches et alléger la charge de travail, et une fonction motivationnelle pour se soutenir et partager ses émotions » (Molinari et Schneider, 2021, 9). Ceci n’est pas forcément le cas pour les cours à distance, car les apprenants tendent à s’isoler dans leur travail personnel et ne recherchent pas d’aide autour d’eux par peur d’avoir l’aire faible devant les autres et ainsi garder la face.

De plus, Jézégou (2014) met en évidence les bienfaits de construire « une communauté d’apprentissage en ligne » qui constitue une « agentivité collective ». Selon elle, cette communauté se constitue d’un

« groupe de personnes, membres volontaires aux expertises diverses et d’égale valeur, engagées conjointement dans une dé- marche collaborative de résolution d’une situation problématique ; cette dé- marche facilitant la construction individuelle et collective de connaissances. » (Jézégou, 2012, cité dans Jézégou, 2014, 279)

Cette communauté en ligne a alors l’avantage de diviser la charge de travail des apprenants, ce qui permet à l’apprenant de partager ses difficultés et de trouver des solutions de manière collaborative, l’engageant ainsi de manière sociale mais aussi cognitive. La collaboration entre pairs peut donc favoriser l’engagement des apprenants. Les efforts à fournir en collaboration que formulent Jézégou sont divers :

-       Au niveau cognitif :

o  définir des modalités de fonctionnement de la collaboration à distance

o  adopter et conduire une démarche conjointe et commune de résolution de la situation problématique.

o  construire une production collective

-       Au niveau rétrospectif (évaluation) :

o  la mise à l’épreuve des résultats issus de cette démarche

o  l’évaluation de l’atteinte de ces résultats

o  l’explicitation des éléments de satisfaction collective

-       Au niveau métacognitif :

o  réaliser des bilans intermédiaires

o  mettre en place des processus de régulation des activités à mener

(Jézégou, 2014, 280)

Créer de la présence à distance : le design pédagogique

Le scénario d’apprentissage

Le scénario médiatique

Le scénario d'accompagnement

Soutien par l'enseignant

Soutien par les pairs dans la communauté numérique

Conclusion

Références bibliographiques

Alves, S. et Lerner, L. (2021). Engagement et volition en e-learning : quelle place pour l’environnement social ? Institut de socio-économie des entreprises et des organisations (Écully, Rhône). recherches en sciences de gestion, 144, 193–224.

Carré, P. (2003). La double dimension de l’apprentissage autodirigé contribution à une théorie du sujet social apprenant. Canadian journal for the study of adult education, 17(1), 66–. Cosnefroy, L. (2010). L'apprentissage autorégulé : perspectives en formation d'adultes. Savoirs, 23, pp.9-50. https://doi.org/10.3917/savo.023.0009

Dillenbourg, P., Baker , M., Blaye, A. & O'Malley, C. (1996). The evolution of research on collaborative learning. In E. Spada & P. Reiman (Eds) Learning in Humans and Machine: Towards an interdisciplinary learning science. (Pp. 189- 211). Oxford: Elsevier.

Jézégou Annie. L’agentivité humaine : un moteur essentiel pour l’élaboration d’un environnement personnel d’apprentissage. In: Sciences et Technologies de l'Information et de la Communication pour l'Éducation et la Formation, volume 21, 2014. Évaluation dans les Jeux Sérieux / Les EPA : entre description et conceptualisation. pp. 269-286; doi : https://doi.org/10.3406/stice.2014.1099. https://www.persee.fr/doc/stice_1764-7223_2014_num_21_1_1099

Molinari, G., Poellhuber, B., Heutte, J., Lavoué, E., Widmer, D. S., et Caron, P.-A. (2016). L’engagement et la persistance dans les dispositifs de formation en ligne : regards croisés. Distances et Médiations Des Savoirs, 13(13). https://doi.org/10.4000/dms.1332

Molinari, G. et Schneider, E. (2020). Soutenir les stratégies volitionnelles et améliorer l’expérience des étudiants en formation à distance. Quels potentiels pour le design tangible ? Distances et médiations des savoirs, 32. https://doi.org/10.4000/dms.5731

Tricot, A. (2017). Quels apports de la théorie de la charge cognitive à la différenciation pédagogique ? Quelques pistes concrètes pour adapter des situations d’apprentissage. Dans Notes remises dans le cadre de la conférence de consensus du Cnesco et de l’Ifé/Ens de Lyon « Différenciation pédagogique : comment adapter l’enseignement pour la réussite de tous les élèves ?», pp.157-165.

Rédigé par Ana Rajic dans le cadre du cours ADID, Volée Concordia, le 24.01.2023


[1] Pour plus de contenu sur l'autorégulation et les stratégies volitionnelles, voir page Autonomie dans l'apprentissage : le problème de la volition chez l'apprenant (Editechwiki)