Handicap mental: fonctionnement cognitif

De EduTech Wiki
Aller à la navigation Aller à la recherche

Cet article est en construction: un auteur est en train de le modifier.

En principe, le ou les auteurs en question devraient bientôt présenter une meilleure version.



Introduction

Handicap mental, mais aussi déficience mentale, débilité mentale, arriération mentale, retard mental ou déficience intellectuelle. Ces dénominations ne sont sont pas le fruit d'un manque d'accord conventionnel, ces différentes dénominations font référence à des approches théoriques différentes.

Par déficience on entend une absence de dispositions, d'habilités ou de croyances. Si on parle de retard, on pense à un déficit fonctionnel, à un ralentissement du développement. Dans les deux cas il y a une comparaison par rapport à une norme, un individu type qui est "normal", en termes psychométriques, d'inadaptation ou inadéquation sociale ou en terme d'un déficit fonctionnel entre l'individu et son environnement. Cette comparaison peut se faire à âge mental égal (L'individu est comparé à des individus sans incapacités intellectuelles du même âge mental) ou à âge chronologique égal ( La personne est comparée à ses pairs sans incapacités intellectuelles du même âge réel). L'expression "déficience" est la plus courante dans la littérature francophone. Dans la littérature anglophone, les auteurs préfèrent celle de "retard mental".

Position théoriques

Dans le regard sur le handicap mental, on trouve deux positions: causaliste ou comportementaliste. La première centrée sur les causes et liée à l'étiologie, implique un diagnostique des déficits et prend le risque d'un attitude positiviste, la deuxième se centre sur les conséquences du handicap, et risque la généralisation de comportements à partir de quelques observations. Entre les deux on trouve une tendance intéractioniste qui prendra en compte que "tout individu est le résultat d'une interaction entre un héritage biologique spécifique et l'environnement dans lequel il évolue" (Lambert 1981, p.14)). Certains auteurs proposent de remplacer l'évaluation statique de l'intelligence à un moment donné de leur évolution par l'analyse de leur potentiel d'apprentissage (Büchel, 1995), en référence à la zone proximale de développement (écart entre la performance spontanée du sujet et celle qu'il peut atteindre avec de l'aide) (Vygotsky, 1978).

Une approche multidisciplinaire (évaluation des causes et analyse des conséquences) permet " de situer la personne mentalement handicapée dans un système complexe, où les causes ne sont pas réduites à des facteurs uniquement organiques, mais au contraire interagissent avec des facteurs sociaux, affectifs et cognitifs, pouvant conduire à des différences interindividuelles importantes pour des causes biologiques identiques" (M.J. Chapelle 1997).

D'un point de vue cognitif, la déficience intellectuelle s'exprime par un double constat, celui d'une différence (moindre efficience à même age chronologique) et celui du retard (assimilation à l'efficience de l'enfant normal plus jeune) (Paour 1988). Pour Paour, les deux conceptions sont indissociables et il constate que trois conceptions psychologiques sur la déficience mentale s'affrontent: le retard, le déficit et les discordances.

Paour critique les trois positions. La conception "retard" n'explique pas les différences à même age mental, ne tient pas compte des déficiences d'étiologie principalement organique et sur le plan théorique on suppose des processus cognitifs identiques à partir l'observation de l'identité des conduites et de leur ordre d'apparition, ce qui est une inférence contestable.

La conception "déficit" suppose un déficit isolable, central (qui affecte des processus de base de traitement de l'information: encodage, mémorisation et récupération des informations, apprentissage discriminatoire, mécanismes perceptifs etc), et constant. Paour la critique aussi, car elle explique la déficience à partir d'un seul fonctionnement cognitif déficitaire (qui varie selon les auteurs) ; sur le plan méthodologique, comment prouver que face à une tâche "le niveau de développement et l'organisation de la personnalité ne sont pas mobilisés à travers la formation d'une présentation de la situation" (Paour, 1998).

Une troisième conception considère le Handicap mental sous le point de vue des "discordances", et propose des cadres descriptifs qui permettent d'établir une typologie clinique de chacune d'elles. Cette approche tient compte de la complexité de l'individu et de sa relation avec l'environnement, considérant la déficience multidéterminée, mais ces discordances ne sont ni suffisamment spécifiques ni stables pour permettre une catégorisation de valeur empirique. Paour propose une intégration constructive des trois conceptions.

Fonctionnement cognitif

Aujourd'hui le handicap mental est décrit en termes de (in)capacités à s'adapter au milieu environnant (un système social). Cette inadaptation fait référence plus à une infonctionnalité qu'à une incapacité structurelle (Chapelle 1997). On attribue à la personne avec un handicap mental des systèmes de traitement de l'information limités. Paour dit: "Ces déficits de base se manifesteraient tout particulièrement dans les processus de mémorisation, de récupération de l'information mémorisée, d'orientation de l'attention au cours de l'apprentissage, d'accès au lexique, de traitement de l'information sémantique, d'évocation verbale et imagée comme aide à l'apprentissage". Dans des situations spécifiques de résolution de problèmes, les personnes déficientes se caractérisent par une moindre efficience à toutes les étapes de la mémorisation (à court, moyen ou long terme) et par une durée de traitement plus longue (mesure des temps de réaction). Certains auteurs attribuent cette moindre efficience à la limitation du nombre d'informations pouvant être simultanément traitées, ainsi que celle de la gestion temporelle du traitement qui implique de garder en mémoire le produit de calculs intermédiaires. Paour par contre la situe au niveau de l'exercice de contrôle volontaire du traitement de l'information et non sur le traitement lui-même, ce qui souligne l'importance des processus métacognitifs dans ces situations (Büchel 1992).

Inhelder (1963) note que le développement d'une personne handicapée mentale est identique à celui d'une personne non handicapée mais plus lent. Mais cette progression n'est pas continue comme pour l'enfant non handicapé et s'arrête dans un certain stade piagétien. Elle appelle cet arrêt "fixation" et le définit comme "l'arrêt de la construction d'opérations logiques". Paour parle de sous-fonctionnement chronique, qui caractérise la genèse de structures cognitives chez les retardés, caractérisé par des phénomènes de lenteur, de fixations et d'inachèvement qui serait dûs à une mobilisation inefficace des outils cognitifs (Paour 1980). Il défend aussi une certaine plasticité développementale et propose des apprentissages opératoires pour accéder à des stades de développement supérieurs et surmonter les fixations. Cette vision constitue un modèle théorique à partir duquel proposer de modèles de remédiation, passer de la théorie à la pratique. Dans ce modèle Paour adopte et concilie les conceptions "retard" et "déficit" : il y a un retard dans le développement des structures cognitives et un déficit dans la capacité d'utilisation des outils cognitifs.

Paour (1991) a recensé 24 caractéristiques cognitives qui sont ensuite réunies en cinq caractéristiques majeures (Langevin et Rocque (2007)):

  • Lenteur et retard du développement, mésuré par l'écart entre âge mental et âge chronologique.
  • Ralentissement et arrêt prématuré du développement.
  • Moindre efficience du fonctionnement intellectuel, due à un déficit de l'attention sélective (la personne ne choisit pas les bonnes informations), déficit de la mémoire de travail, moindre efficience systématique en situation de résolution de problèmes, manque de stratégies cognitives et métacognitives. Cette différence d'efficience augmente en fonction la complexité de la tâche.
  • Base de connaissance pauvre et mal organisée.
  • Difficultés de transfert et de généralisation.

Ces caractéristiques cognitives favorisent le développement d'autres difficultés non cognitives associées à l'expérience de l'échec: faible motivation, faible estime de soi, certitude anticipée de l’échec, faiblesse du degré d’exigence au regard d’une tâche et pauvreté des investissements dans la tâche, système d’attribution des échecs inadapté (s'attribuer un échec qui est dû à l'environnement), absence ou inadéquation du scénario de vie (Langevin et Rocque (2007)).

Mémoire à court terme

L'autorépétition interne est une stratégie cognitive, qui permet de maintenir des informations dans la mémoire à court terme le temps nécessaire pour leur traitement (comparaison avec les connaissances antérieures et intégration). Des chercheurs on montré que cette stratégie est moins utilisée et avec moins d'efficacité par la personne avec un déficience . Cette carence peut être corrigée par l'entraînement: "si les conditions d'apprentissage (type de tâche, conditions de représentation) le permettent et si l'empan de mémoire ne dépasse un seuil inférieur, les personnes avec une déficience intellectuelle développent, après entrainement, des stratégies qui permettent de compenser la limitation de leur empan mnésique"(Büchel, Paour 2005).

La métacognition

Certains auteurs attribuent le handicap à un déficit dans les processus qui réclament un effort volontaire et une analyse consciente des demandes cognitives. Ainsi il n'y a pas des différences prouvées entre personnes avec et sans retard mental au niveau de la mémoire incidente (fonctionnement inconscient). Selon la théorie métacognitive la conscience et la connaissance de son propre fonctionnement, en tant qu'apprenant et par rapport aux stratégies les mieux adaptés pour une tâche dont l'apprenant a une certaine préconnaissance, sont à la base de la planification et le contrôle de l'apprentissage. Aujourd'hui l'hypothèse d'un déficit métacognitif chez les personnes présentant un retard mental est largement répandue.

Références

  • Büchel, F. (1992). Difficultés d'apprentissage et intervention, Psychoscope, 13, 8-10.
  • Büchel, F. (1995). L'éducation cognitive: le développement de la capacité d'apprentissage et son évaluation. Neuchâtel; Paris: Delachaux et Niestlé.
  • Büchel,F.P. et Paour J-L. (2005). Déficience intellectuelle: déficits et remédiation cognitive. Enfance Vol 57,2005/3, p. 227 à 240.
  • Chapelle Marc J.(1997). Handicap mental et lecture de mots. Ed. SZH.
  • Ellis, N.R. (1970). Memory processes in retardates and normals. In N.R. Ellis (ED.) International Review of Research in Mental Retardation (Vol 4) New York: Academic Press.
  • Inhelder, B. (1963). Le diagnostic du raisonnement chez les débiles mentaux. Neuchâtel: Delachaux et Niestlé.
  • Lambert, J-L. (1981) Enseignement spécial et handicap mental. Bruxelles: P. Mardaga.
  • Langevin, J. et Rocque, S. (2007) Balises et processus d’adaptation pour l’utilisation des TIC et pour l’accessibilité à l’information au regard de limitations cognitives.
  • Paour, J-L. (1988) Retard mental et aides cognitives. In J.P. Caverni (Ed.), Psychologie cognitive, modèles et méthodes (pp.191-216). Grnoble:PUG.
  • Paour, J_L. (1991) Un modèle cognitif et développemental du retard mental pour comprendre et intervenir. Aix en Provence, Université de Provence, Laboratoire de Psychologie du développement. Texte de soutenance de thèse.
  • Vygotsky, L.S. (1978; orig. 1933). Mind in society: The developpment of higher psychological processes. Cambridge: harvard University Press.