Gérer la demande d'aide des novices
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Objectif du travail à rendre
Production libre de 1000 mots sur les concepts que vous avez envie de décrire et de mettre en lien à partir des 3 lectures suivantes : (1) le texte de Tricot (2017) sur la charge cognitive, (2) le texte de Cosnefroy (2010) sur l’apprentissage autorégulé et (3) le texte de Dillenbourg et al. (1995) sur l’apprentissage collaboratif.
Les lectures proposées dans cette période sont :
- Vienneau, R. (2011). Apprentissage et enseignement: théories et pratiques. Montréal : Gaëtan Morin.
- Bourgeois, É. (2011). Chapitre 1. Les théories de l’apprentissage: Un peu d’histoire... In Apprendre et faire apprendre (pp. 23–39). Presses Universitaires de France. https://doi.org/10.3917/puf.brgeo.2011.01.0023
- Tricot, A., (2017). Quels apports de la théorie de la charge cognitive à la différenciation pédagogique ? Quelles pistes concrétes proposer pour adapter les situations d'apprentissage. Conférence de consensus "Différenciation pédagogique : comment adapter l'enseignement pour la réussite de tous les élèves ?"
- Sweller, J. (2007). Human Cognitive Architecture. In Handbook of Research on Educational Communications and Technology (3rd ed.). Routledge.
- Cosnefroy, L. (2010). L’apprentissage autorégulé: Perspectives en formation d’adultes. Savoirs, 23(2), 9–50. https://doi.org/10.3917/savo.023.0009
- Dillenbourg, P., Baker, M. J., Blaye, A., & O’Malley, C. (1995). The evolution of research on collaborative learning. In Spada, E. and Reiman, P. Learning in Humans and Machine: Towards an interdisciplinary learning science (pp.189-211). Elsevier, Oxford.
- Molinari, G., Muller Mirza, N., & Tartas, V. (2021). Regards croisés des approches cognitives et socioculturelles sur l’apprentissage collaboratif: Quelles contributions dans le domaine de l’éducation ? Raisons éducatives, 25(1), 41–64. https://doi.org/10.3917/raised.025.0041
- Molinari, G., Avry, S., & Chanel, G. (2017). Les émotions dans les situations de collaboration et d’apprentissage collaboratif médiatisées par ordinateur. Raisons éducatives, 21(1), 175–190. https://doi.org/10.3917/raised.021.0175
- Pekrun, R. (2006). The Control-Value Theory of Achievement Emotions: Assumptions, Corollaries, and Implications for Educational Research and Practice. Educational Psychology Review, 18(4), 315–341. https://doi.org/10.1007/s10648-006-9029-9
- National Research Council 2000. How People Learn: Brain, Mind, Experience, and School: Expanded Edition. Washington, DC: The National Academies Press. https://doi.org/10.17226/9853.
Résumé
La demande d'aide des élèves novice n'est pas automatique. Cette page explore les fondements théoriques à l'origine de la demande d'aide ( et essayera d'articuler ces derniers ensemble afin de répondre aux questions suivantes : "Quels sont les processus internes à la demande d’aide ?" et "Pourquoi un élève n’arriverait-il/elle pas à demander de l’aide ?".
Introduction
Certaines visions de l’apprentissage omettent totalement le caractère social de l’apprentissage (behaviorisme, cognitivisme, constructivisme Piagétien) et peuvent donner une définition de l’apprentissage comme un « changement relativement permanent dans le potentiel de comportement dû à l'expérience » (Vienneau, 2005). Cependant, dès nos premiers souffles de vie, nous apprenons de nos proches tout comportement attentivement observé, mémorisé, reproduit et positivement renforcés (Bandura, 1977). Cette théorie « sociale-cognitive » de Bandura met en avant un apprentissage ‘vicariant’ (« qui remplace quelque chose d’autre », Larousse en ligne, s.d.) et ajoute ainsi le paramètre social dans la conception de l’apprentissage. Dans les années 1970, à Genève, plusieurs collaborateurs de Piaget montrent que les interactions sociales facilitent l’apprentissage que sous certaines conditions (Doise et al., 2013).
Dans le cadre d’un travail collaboratif, c’est-à-dire une « activité coordonnée et synchrone qui résulte dans un essai continu de construire et maintenir une conception partagée d’un problème » (traduction libre, Roschelle & Teasley, 1995), nous verrons ici comment la demande d’aide par les novices est un facteur à prendre en compte dans l’apprentissage de ces dernier·es.
Développement
Paradoxe de la demande d’aide
La théorie de la charge cognitive de Sweller (cité par Tricot, 2017) est une théorie basée sur la connaissance de la cognition humaine. Elle stipule que la mémoire de travail, qui permet le transfert du contenu d’apprentissage en mémoire à long-terme, a une capacité limitée. Lors d’une tâche pédagogique, notre mémoire de travail se partage entre trois sources : 1) le contenu d’apprentissage, dite la charge essentielle), 2) les informations inutiles présentes sur les supports, dite charge extrinsèque et 3) les informations à traiter pour réaliser la tâche, dite charge intrinsèque. Le but est de réduire la charge des deux dernières pour un meilleur apprentissage.
Tricot (2017) fait un état des lieux des travaux sur la différenciation pédagogique et trouve qu’un facteur important pour tirer le meilleur parti de la charge cognitive serait de laisser les élèves choisir eux/elles-mêmes une version adéquate d’une tâche en fonction de leur niveau (Lemercier et al., 2001, cité par Tricot, 2017).
Malheureusement, il n’en résulte qu’une réplication de l’effet du « paradoxe de la demande d’aide » (Nelson-Le Gall, 1985, cité par Tricot, 2017). En effet, Tricot relève que les élèves ayant le plus besoin d’aide dans la réalisation de tâches scolaires peuvent « sous-demander » de l’aide.
D’où vient la demande d’aide ?
Avant de demander de l’aide (passage à l'action), il faut que l’élève en ressente le besoin (métacognition). Pour reprendre la théorie piagétienne de l’équilibration, le besoin d’aide pourrait être le « conflit cognitif » résultant de l’incompatibilité entre la nouvelle connaissance et les connaissances antérieures (prior knowledge). Un parallélisme peut se faire avec le modèle d’apprentissage autorégulé de métacognition de Winne (1996). Le flux montant (monitoring) informe de l’activité en cours et c’est ici que le besoin d’aide surgit (dimension non consciente de l’autorégulation). De plus, l’obstacle à l’atteinte des buts d’accomplissements ou de compétence (Pintrich, 2000) comme apprendre et progresser et éviter l’échec pourrait augmenter un besoin de demande d’aide. La demande d’aide viendrait donc d’une incongruence entre les buts attendus en termes d’objectifs d’apprentissage et l’état du système actuel.
Pourquoi un élève n’arriverait-il/elle pas à demander de l’aide ?
Cette charge grandissante de rétablir un certain équilibre cognitif ne peut être libérée qu’à la suite d’une mise en action. Or, pourquoi un·e élève ne franchirait-il/elle pas le pas ?
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Cosnefroy (2010) nous parle du modèle de Boekaerts qui semble résumer les points précédents : « Une évaluation menaçante de la situation survient lorsqu’un but important est en jeu et que l’apprenant détecte un décalage entre les exigences de la tâche et les ressources dont il dispose. Des émotions négatives, telles que (…) l’anxiété ou le désespoir sont activées et des stratégies de coping sont déclenchées pour juguler ces émotions. C’est ce que Bœkærts appelle se mettre en mode défensif, l’objectif n’étant plus alors de réussir au mieux mais d’abord de (…) restaurer un minimum de bien-être »
En effet, Pekrun (2006) dans sa théorie Contrôle-Valeur, indique que l’anxiété et le désespoir sont des émotions élicitées par une vision prospective de l’objet (je ne vais pas réussir à…) et sont évalués négativement (valeur) avec une perception de faible capacité à produire les actions nécessaires à la réussite de la tâche (contrôle). De plus, l’anxiété est reliée à des mécanismes d’inhibition comportementale (Gray, 1982).
Dillenbourg et al. (1995) nous met cependant en garde sur la composition des groupes de travail qui pourraient être un facteur dans la non-demande d’aide. Les ‘low achievers’ deviennent passifs lorsqu’ils/elles sont mis·es avec des ‘high achievers’. Selon Webb (1991, cité par Dillenbourg et al., 1995), plus d’explications sont fournies lorsque le groupe et modérément hétérogène en termes de compétence (ne pas mettre que des ‘fort·e·s’, ni que des ‘faible·s’, si tout mélanger au risque de saper les élèves moyens). La correspondance du niveau des élèves en travail collaboratif est importante.
Conclusion
L’enseignant·e ne devrait donc pas laisser les élèves choisir la version la plus adéquate selon elles/eux mais devra plus guider les élèves estimés comme loin du but d’apprentissage afin d’éviter ce paradoxe de la demande d’aide (Tricot, 2017). Pekrun et al. (2011, cité par Molinari et al., 2017) rejoint ce point en trouvant que l’anxiété est positivement corrélée au besoin de régulation externe par l’enseignant. De plus, Webb (1995, cité par Dillenbourg et al., 1995) préconise de ne pas donner la réponse alors qu’une explication était attendue, cela pourrait conduire à une baisse de motivation pour comprendre la stratégie.
Le groupe aussi peut aussi aider à améliorer l’apprentissage collaboratif, selon Järvenoja et Järvelä (2013, cité par Molinari et al., 2017), six stratégies sont proposées afin de de réguler l’équilibre socio-émotionnel : 1) renforcement social, 2) discussion orienté vers les buts, 3) augmentation de l'intérêt, 4) structuration de la tâche, 5) auto-handicap, 6) gestion du sentiment d'efficacité.
Référence Bibliographiques
Bandura, A., & Walters, R. H. (1977). Social learning theory (Vol. 1). Prentice Hall: Englewood cliffs.
Cosnefroy, L. (2010). L’apprentissage autorégulé: Perspectives en formation d’adultes. Savoirs, 23(2), 9–50. https://doi.org/10.3917/savo.023.0009
Dillenbourg, P., Baker, M. J., Blaye, A., & O’Malley, C. (1995). The evolution of research on collaborative learning. In Spada, E. and Reiman, P. Learning in Humans and Machine: Towards an interdisciplinary learning science (pp.189-211). Elsevier, Oxford.
Doise, W., Mugny, G., James, A. S., Emler, N., & Mackie, D. (2013). The Social Development of the Intellect. Elsevier.
Gray, J. A. (1985). The neuropsychology of anxiety. Issues in Mental Health Nursing, 7(1-4), 201-228.
Larousse. (s. d.) Vicariant. Dans Dictionnaire en ligne. Consulté le 23 octobre 2022 sur https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/vicariant/81817
Molinari, G., Avry, S., & Chanel, G. (2017). Les émotions dans les situations de collaboration et d’apprentissage collaboratif médiatisées par ordinateur. Raisons éducatives, 21(1), 175–190. https://doi.org/10.3917/raised.021.0175
Pekrun, R. (2006). The Control-Value Theory of Achievement Emotions: Assumptions, Corollaries, and Implications for Educational Research and Practice. Educational Psychology Review, 18(4), 315–341. https://doi.org/10.1007/s10648-006-9029-9
Pintrich, P. R. (2000). Chapter 14—The Role of Goal Orientation in Self-Regulated Learning. In M. Boekaerts, P. R. Pintrich, & M. Zeidner (Eds.), Handbook of Self-Regulation (pp. 451–502). Academic Press. https://doi.org/10.1016/B978-012109890-2/50043-3
Roschelle, J., & Teasley, S. D. (1995). The Construction of Shared Knowledge in Collaborative Problem Solving. In C. O’Malley (Ed.), Computer Supported Collaborative Learning (pp. 69–97). Springer. https://doi.org/10.1007/978-3-642-85098-1_5
Sweller, J. (2007). Human Cognitive Architecture. In Handbook of Research on Educational Communications and Technology (3rd ed.). Routledge.
Tricot, A., (2017). Quels apports de la théorie de la charge cognitive à la différenciation pédagogique ? Quelles pistes concrétes proposer pour adapter les situations d'apprentissage. Conférence de consensus "Différenciation pédagogique : comment adapter l'enseignement pour la réussite de tous les élèves ?"
Vienneau, R. (2011). Apprentissage et enseignement: théories et pratiques. Montréal : Gaëtan Morin.
Winne, P. H. (1996). A metacognitive view of individual differences in self-regulated learning. Learning and Individual Differences, 8(4), 327–353. https://doi.org/10.1016/S1041-6080(96)90022-9
Kenneth Rioja (discussion) 23 octobre 2022 à 20:09 (CEST)