Co-Well
Une application pour te/se soutenir
Résumé
Co-Well est une application de soutien collectif qui offre la possibilité aux étudiant-es de demander et d’offrir du soutien à leurs pairs à travers des messages, dans un espace qui permet la création ainsi que le développement d’un sentiment d’entraide.
Objectifs
Les objectifs principaux de l’application Co-Well reposent sur trois axes principaux : offrir des conseils et ressources bienveillants, afin d’améliorer le bien-être de la personne, reconnaître ses besoins et émotions, ainsi qu’offrir des stratégies d’apprentissages quant à la disposition particulière des cours.
Public cible
Le public cible est composé d’étudiant-es du MALTT, afin que ces derniers se sentent plus proches, étant donné qu’ils partagent la même expérience de formation. En effet, l’enseignement hybride ainsi que l’apprentissage par projet requièrent des ressources en matière de temps, compétences organisationnelles et énergie qui diffèrent des cours traditionnels ex cathedra pour d’autres formations. Ainsi, les étudiant-es du MALTT pourraient profiter de l’application pour se soutenir mutuellement lors, par exemple, des consignes des différents livrables et de la période à distance ou en ce qui concerne les dynamiques d’apprentissage spécifiques à chaque cours.
Point de départ
Le bien-être psychologique en formation est une thématique fondamentale de la santé, qui occupe un rôle primordial toujours plus conséquent dans la société actuelle. L'Université de Genève s'engage particulièrement pour soutenir ses étudiant-es, en proposant des aides et des activités, afin de fournir des ressources d'assistance, des interventions et des encouragements en lien avec la santé mentale. En se focalisant sur l'apprentissage, l'UNIGE formule des plans pour aider les étudiant-es dans leur réussite académique et à surmonter des difficultés à travers une formule de cinq services, à savoir : des cours de méthodologie, du soutien individuel, des ateliers de groupe, du tutorat et un espace de travail. Plus en détail dans le domaine de la santé mentale, l’université offre aussi des outils plus ciblés: premièrement, un programme d’étudiant-es sentinelles qui agissent en tant que pair-aidants pour le support psychologique, ainsi que pour l’orientation des les personnes dans le besoin vers les ressources les plus appropriées. En outre, il existe également des applications telles qu’Actidote développée dans le cadre de promotion de la santé et la prévention de la dépression chez les apprenant-es, et se base aussi sur un système d'entraide entre pairs.
En dehors du cadre universitaire, d’autres plateformes plus générales ont été développées dans le domaine de la santé psychologique chez les plus jeunes : l’application TellMi peut être prise en tant que référentiel grâce à son système d’anonymisation, qui permet le soutien mutuel entre pairs, ainsi que des interventions proposées par des conseillers formés en intervention mirée en cas de crise. Disponible chaque jour, elle englobe plus de six-cents spécialistes et ressources locales et nationales, afin d’offrir des solutions en termes de thérapie et orienter les utilisateur-rices vers le meilleur type d’aide. Ainsi, il s’agissait pour nous de prendre en compte l’ensemble de ces offres déjà existantes, afin d’appuyer la conception de notre application.
Les étudiant-es sont confronté-es à différents types de problèmes : qu'il s'agisse de l'organisation de leur vie scolaire, des livrables, de la charge de travail, ainsi que de l'effort cognitif ; la santé mentale de ces derniers est fragilisée, en dépit des nombreuses ressources mises à leur disposition. Ces points de départ ont été la base pour un brainstorming, qui ensuite a été approfondi à travers la recherche de plateformes existantes similaires pour voir ce qui pouvait être amélioré ou ajouté lors de la conception d’une nouvelle application.
Revue de littérature
Pour mieux appréhender les nuances et les spécificités des utilisateur-rices potentiel-les, tout en bénéficiant de données précieuses pour orienter nos choix en matière de fonctionnalités et d'interactions au sein de notre outil numérique, nous avons consulté différentes ressources dont, entre autres, les offres déjà existantes.
Regards croisés avec les services proposés par l’UNIGE pour soutenir le bien-être des étudiant-es et les différentes recherches
Parmi les services proposés par l’UNIGE, le service de soutien psychologique et celui de la santé sont deux ressources importantes pour la prévention et le traitement des problèmes de santé mentale et de bien-être des étudiant-es. Comme évoqué dans le Point de départ, le service de soutien psychologique et santé offre une écoute, un conseil et un accompagnement psychologique et santé à l’instar de PSYLINE ou d’applications comme Actidote ou le service Étudiant-es Relais Santé (ERS). De plus, des offres jouant également un rôle sur la santé mentale et le bien-être des étudiant-es sont mises à disposition par l’UNIGE telles que des activités sportives, culturelles et aides financières.
Afin de mieux connaître les conditions de vie et d’études des étudiant-es, l’Observatoire de la vie étudiante (OVE) a mené deux enquêtes (2021). La première enquête était locale et spécifique à l’UNIGE, tandis que la seconde enquête (Enquête G3) était menée conjointement avec les Universités de Montréal et de Bruxelles. Ces dernières ont permis de recueillir des données sur les aspects sociaux, économiques, sanitaires, culturels et académiques de la vie étudiante, ainsi que sur les attentes et les besoins en matière de services et d’accompagnement.
Malgré la connaissance et la disponibilité de ces services en ce qui concerne le soutien psychologique, seuls très peu d’étudiant-es y ont recours. Selon l’enquête locale de l’OVE, le service de soutien psychologique est connu par 78% des répondant-es, mais seulement 12% d’entre eux/elles ont déjà utilisé ce service – ce qui fait 9% de l’ensemble des répondant-es. Un résultat similaire se retrouve dans le service de santé qui est connu par 68% des répondant-es, mais seulement 6% d’entre eux/elles ont déjà utilisé ce service – ce qui fait 4% de l’ensemble des répondant-es. Ces chiffres sont assez stables par rapport aux enquêtes précédentes, sauf pour le service de santé, dont l’utilisation a augmenté en 2021, probablement en lien avec la crise sanitaire du COVID.
Une autre étude publiée en novembre 2023 et menée par l’OFS (Office fédéral de la statistique) auprès de la population de 15 ans et plus vivant en ménage privé, a démontré que la population la plus sujette à une détresse psychologique moyenne ou élevée sont les 15-24 ans (suivi des 25–44 ans). Selon l’Université de Genève, l’âge moyen d’obtention du bachelor était de 24 ans en 2021. Ainsi, il pourrait être intéressant d’observer que la population la plus sujette à une détresse psychologique est comprise dans la tranche d’âge de la majorité des étudiant-es de l’UNIGE (même constat avec les chiffres de l’OFS situant à 25,9 ans, en 2020).
L’ensemble de ces différentes données suggèrent qu’il existe des freins ou des obstacles à l’utilisation des services de soutien psychologique et de santé, qui peuvent être de nature personnelle, sociale, culturelle ou institutionnelle. Il est donc nécessaire d’identifier ces freins afin d’appréhender l’accès et le recours à ces services, qui peuvent contribuer à améliorer la santé mentale et le bien-être des étudiant-es. Il serait intéressant de co-réfléchir à un complément de ces services, sans toutefois les remplacer, mais plutôt les seconder par d’autres formes de soutien, qui puissent répondre aux besoins spécifiques et aux préférences des étudiant-es, notamment en termes de modalités, de contenus et de formats.
Les études sur le soutien social indiquent également que bénéficier d'un bon soutien est lié à des niveaux réduits de détresse psychologique (Eisenberg et al., 2007; Friedlander et al., 2007; Nerdrum et al., 2006 cités dans Hamel et al., 2021, p.17). C’est à partir de ces constats que nous avons décidé de nous concentrer sur l'entraide entre pairs, au travers d’un soutien émotionnel et social aux autres personnes qui partagent une expérience commune. Pour clarifier notre compréhension du soutien entre pairs, nous adoptons la définition de la psychthérapeute, Nippoda (2021) : "Peer support is a system where people in the same kind of situation get together and share their experience to help each other". En effet, les actions menées par le soutien entre pairs partageant une même expérience contribuent également à rompre l'isolement, fournissant des informations sur la situation vécue par l'individu, tout en offrant des stratégies de coping, c'est-à-dire des méthodes utilisées pour faire face et gérer les situations stressantes (Badger et Royse, 2010). De surcroît, il est établi que cette forme de soutien est bénéfique tant pour les personnes qui le reçoivent que pour celles qui l’offrent (Bandura, 1977; Zimmerman, 1990 cités dans Gardien, 2022). Fournir ce soutien peut également renforcer l'autodétermination et le sentiment d'utilité et de compétence des individu-es, tout en leur permettant d'apprendre des leçons précieuses de leurs interactions avec autrui à travers une meilleure compréhension de son propre vécu et favorise la connexion entre un signifié, un signifiant et une signification (Gardien, 2022).
C’est dans cette perspective que nous avons pensé notre application Co-Well ; un outil numérique qui vise à offrir aux étudiant-es un accompagnement non contraignant, anonyme, bienveillant et, de surcroît, qui se veut simple d’utilisation et familier mettant au centre le soutien, et notamment celui entre pairs, qui bénéficie tant aux autres qu’à soi. Afin de rendre l’application plus ludique et créative, nous avons mis en place un système d’arbre que nous verrons dans la suite de cet article.
Choix et fondement de l’identité de l’application
Le choix de représenter l'identité de l'utilisateur-rice à travers un arbre dans notre application Co-Well ne relève pas simplement d'une décision esthétique, mais d'une réflexion plus profonde sur la nature intrinsèque des relations humaines, et ce, sous trois angles :
- L'Arbre comme Métaphore de la "Symbiose Humaine"
Tout comme les arbres dépendent des réseaux signification complète (par exemple, les mycorhiziens, ces champignons essentiels, pour partager des ressources et soutenir leur croissance), notre application Co-Well aspire à jouer un pseudo-rôle similaire pour les humains. En fournissant un espace où les individus peuvent se connecter, collaborer et s'entraider sans toutefois se voir, Co-Well vise à être cette symbiose qui favorise le bien-être de chacun-e.
- La Forêt comme “Symbole de Communauté et de Soutien"
Lorsqu'un utilisateur-rice interagit avec notre application, il n'est pas seulement un arbre isolé dans une forêt ; il devient une partie intégrante d'un écosystème plus vaste. En visualisant une forêt où chaque arbre représente un-e utilisateur-rice et où les racines colorées symbolisent les interactions et les types de questions posées, nous rappelons à l’utilisateur-rice l'importance de sa place au sein d'une communauté. Chaque racine, qu'elle soit orange pour une question organisationnelle ou d'une autre couleur pour d'autres types de questions, montre la diversité et la richesse des échanges qui se produisent et auxquels on aurait contribué. VOIR CHAPITRE TABLEAU COULEUR !!!!
- Promotion de la Solidarité et la Collaboration
À travers cette représentation visuelle, Co-Well vise à encourager la solidarité, la collaboration et la compréhension mutuelle entre ses utilisateur-rices. L'arbre, avec ses racines et sa forêt environnante, sert de rappel constant que chaque individu-e, bien qu'unique, est intrinsèquement connecté à une communauté plus vaste. Tout comme les arbres dans une forêt se soutiennent mutuellement et s’échangent de ressources, les utilisateur-rices de Co-Well ont la possibilité de s'entraider, de partager leurs expériences et d'apprendre les uns des autres. Ainsi, en utilisant l'arbre comme identité centrale de Co-Well, nous ne faisons pas seulement une référence à la nature; nous établissons une métaphore puissante sur l'importance de la solidarité, de l'interdépendance et de la collaboration dans la construction d'un environnement propice au bien-être et à la croissance personnelle.
Satisfaction des besoins et bienêtre
Le concept de bien-être est généralement perçu comme une facilitation de sa propre croissance, de son intégrité et de son bonheur (Laguardia et Ryan, 2000), mais il existe de nombreuses définitions et de nombreux modèles qui se concentrent sur cette notion dans le domaine de la psychologie. Pour comprendre et situer le bien-être dans la sphère de la conception d'applications, nous pouvons nous appuyer sur l'aide de la théorie de l'auto-détermination, formulée par Deci et Ryan en 1985. Afin d’appréhender les effets de cette théorie, il faut cependant préciser deux courants de pensée importants : le bien-être selon la psychologie hédoniste, par opposition à la psychologie hégémonique. Dans le premier cas, le bien-être peut être considéré comme la recherche du plaisir en tant que principe motivant les activités humaines et basé sur l'affection (hédonisme). Dans le second cas, l'eugénisme apparaît comme un ensemble de dynamiques plus complexes qui façonnent l'existence et conduisent à un sentiment de maîtrise de sa vie (Cowen, 1994) ; donc comme un défi à l'effort. Dans cette perspective, les personnes vivent plus ou moins en accord avec elles-mêmes en essayant de donner une orientation et un sens à leurs actions afin de stimuler leur propre développement (Waterman, 1993), ressentant ainsi le bien-être comme fondamentalement optimal pour leur existence. Selon cette vision, il est possible de comprendre que la motivation joue un rôle particulier dans la régulation du comportement, des représentations et des attitudes par rapport à une activité ou une tâche. Elle se subdivise en motivation intrinsèque, c'est-à-dire en motivation basée sur le plaisir et la satisfaction, qui implique "l'engagement actif d'un sujet dans une tâche qu'il trouve intéressante sans avoir besoin d'une récompense autre que l'activité elle-même" (Laguardia & Ryan, 2000, p. 289). Cependant, la plupart de nos activités sont régies par la motivation extrinsèque, qui pousse à un comportement instrumental visant à "produire un résultat distinct du plaisir de l'action elle-même" (Laguardia & Ryan, 2000, p. 289) pouvant être subdivisée en régulation intégrée, régulation identifiée, régulation introjectée et régulation externe. Ces deux types de motivation dépendent des perceptions personnelles de l'individu et du type de tâche auquel il est confronté. La théorie de l'autodétermination permet de comprendre que pour atteindre le but naturel de la vie et lui donner un sens, tout en percevant un sentiment de plénitude et de bien-être, il est essentiel de satisfaire trois besoins psychologiques fondamentaux qui favorisent la motivation autonome, basée notamment sur la motivation intrinsèque et la régulation intégrée et identifiée (Deci & Ryan, 2008). Ainsi, ces besoins sont distingués en trois catégories. Le besoin d’autonomie qui se traduit par la capacité de prendre des décisions volontaires et de contrôler ses propres actions, sans pression ou contrainte extérieure. Il en est l’agent réalisateur. Le besoin de compétence repose sur un sentiment d’efficacité sur son environnement (Deci, 1975; White, 1959), c’est-à-dire la stimulation d’une curiosité et d’un goût relever des défis en ressentant de la prise en charge personnelle. Enfin, le besoin d’affiliation est lié à la relation à autrui, et se focalise sur le sentiment d’appartenance et d’intégration à une sphère avec des personnes que l’on juge importantes pour soi.
Dans le développement de l’application Co-Well, la satisfaction des trois besoins a été prise en considération.
En ce qui concerne le besoin d’autonomie, l’utilisateur peut fournir et recevoir des stratégies volitionnelles qui lui permettraient de surpasser un obstacle et par conséquent de maintenir l’effort et de soutenir ainsi l’apprentissage (Houart, 2017). La détermination de son propre statut donnerait la possibilité de contrôler les sollicitations de l’application en choisissant quand on est disponible pour aider les autres. Dans la même orientation, la possibilité de swiper et choisir à quel message on se sent le plus apte ou à l’aise à répondre augmenterait le spectre de liberté de choix. De plus, son utilisation n’est jamais imposée, ce qui permettrait aux apprenant-es de choisir sa fréquence d’usage. Le journal des gratitudes fait, quant à lui, appel à la capacité de se concentrer sur les aspects positifs de la vie, pouvant ainsi aider à renforcer la confiance en soi (Emmons & Mishra, 2011) et la capacité de prendre des décisions autonomes. En effet, il offre aux utilisateur-rices un espace personnel où ils peuvent exprimer librement leurs pensées et leurs émotions, sans contrainte ni pression extérieure. Une notion fondamentale qui touche l’ensemble des besoins serait l’altruisme : il y aurait un lien avec la motivation intrinsèque, car il s’agirait d’un comportement désintéressé consistant à aider les autres sans pour autant attendre de récompense en retour. La motivation viendrait plutôt à des sentiments positifs, tels que la satisfaction et la gratitude. Les utilisateur-rices participent donc à leur propre bien-être de façon autonome, selon un système d’aide à la motivation sans contraintes spécifiques.
Le besoin de compétence repose aussi sur l’outil du journal des gratitudes, puisqu’il aiderait à renforcer la persévérance à travers l’écriture de ses propres accomplissements, étant directement liée au sentiment de compétence. Dans cette catégorie, l’altruisme serait perçu comme un renforcement de la satisfaction de ce besoin en donnant l’occasion de mettre les connaissances acquises en pratique pour donner du soutien aux autres. Ainsi, les utilisateur-ricess pourraient se sentir capables d’effectuer un travail aussi introspectif et de gestion émotionnelle, en identifiant leurs propres difficultés, obstacles, réussites et capacités en approfondissant la connaissance de soi à travers le développement de son intelligence émotionnelle.
Enfin, le besoin d’affiliation serait au noyau de Co-Well : l’application fournit l’opportunité de donner du support et d’en recevoir, en se sentant connecté-e aux autres en créant un sentiment d’appartenance et en réduisant, par conséquent, la sensation de solitude. L’altruisme serait orienté pour soutenir l’entraide et l’intégration sociale, par exemple lors des périodes en distanciel ou dans les moments de détresse causée par la charge de travail.
Pour soutenir les trois besoins psychologiques fondamentaux, nous nous sommes appuyés sur le modèle METUX, qui permet d'augmenter la motivation et l’engagement à travers l’amélioration du bien-être des utilisateur-rices.
Démarche de conception
Modèle METUX
Notre démarche de conception pour Co-Well s'est principalement concentrée sur l'intégration des principes du modèle METUX (Modèle d'Expérience Utilisateur Technologie-Émotions) de Peters et al. (2018). Tout d’abord, nous avons initié notre exploration en étudiant en détail les divers aspects de ce modèle, indépendamment de notre projet. Cette étape préliminaire nous a permis de mieux appréhender le fonctionnement et les fondements théoriques du modèle, que nous avons ensuite appliqués entièrement à notre outil numérique. En tant que membres du public cible de Co-Well, cette première phase s'est avérée essentielle, nous offrant une compréhension approfondie des besoins, des préférences et des défis potentiels auxquels les utilisateur-rices pourraient être confronté-es. Notre implication directe en tant que parties prenantes nous a permis d'enrichir nos réflexions et nos prises de décision tout au long du processus de conception. Pour garantir l'alignement avec les principes du modèle METUX, nous avons structuré notre démarche de manière à ce que chaque aspect de Co-Well soit en harmonie avec les fondements théoriques de l'expérience utilisateur, de la technologie et des émotions. Nous avons élaboré un tableau réflexif (voir tableau ci-après) appliquant nos idées aux sphères de METUX et la prise en compte de ses 15 sphères, en reconnaissant l'importance de considérer leurs différences, mais aussi leurs congruences, comme souligné par Peters et collègues (2018). À savoir que les cinq premières sphères d’expérience identifiées par le modèle font référence à des éléments de l’expérience utilisateur individuelle sur lesquels une technologie peut avoir un impact.
Sphères d’expérience | Description | Applications du modèle à CoWell |
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1.Adoption
Adoption de la technologie |
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2.Interface
Interaction avec l’interface |
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3.Tasks
Engagement avec des tâches spécifiques à la technologie |
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4.Behavior
Comportement soutenu par la technologie |
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5.Life
Vie globale de l’individu |
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(6.) Society |
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La consultation approfondie de la littérature scientifique a également joué un rôle crucial, alimentant notre compréhension des besoins et offrant des données précieuses pour orienter nos choix en matière de fonctionnalités et d'interactions au sein de Co-Well. En outre, l'application des fondements du modèle METUX et ses heuristiques dans notre processus de conception nous a aidé à mieux structurer notre outil numérique de manière à répondre aux besoins psychologiques fondamentaux tels que la compétence, l'autonomie et l'affiliation, contribuant ainsi au bien-être global de l'utilisateur-rice. Enfin, des discussions de groupe ont été menées après chaque itération pour évaluer les améliorations nécessaires, tout en gardant une attention particulière sur les objectifs de l'application et les besoins psychologiques fondamentaux du bien-être. Ces échanges ont permis d'assurer une adéquation continue avec les attentes des utilisateur-rices, favorisant ainsi le bien-être, tout en répondant aux exigences du modèle METUX. En tant que concepteurs de Co-Well, cette démarche itérative a été essentielle pour affiner et améliorer notre outil numérique.
Description
Caractéristiques et fonctionnalités
Attardons-nous, à présent, sur les jalons qui constituent cette application. Rappelons que Co-Well est destiné à aider les étudiant-es à exprimer leurs besoins, qu’ils soient d’ordre émotionnel, motivationnel, organisationnel ou intellectuel. Ces besoins sont définis par l’utilisateur-rice en fonction de la nature de sa question et du type de réponse qui est attendu par ce dernier. Ainsi, à priori de l’envoi d’une question, quatre options sont proposées aux étudiant-es, et ce, afin de clarifier l’aide recherchée. Etant donné que notre application se veut user-friendly, il s’agira, pour nous, d’accompagner ces catégories d’emojis pour que l’utilisateur-rice puisse plus facilement saisir celle qui correspond le mieux à sa demande.
En outre, nous avons décidé d’inclure un icône d’aide à côté de chaque catégorie ayant pour but d’expliciter davantage la fonctionnalité de celle-ci. Intégrer des éléments d’aide de ce type offre à l’utilisateur-rice une navigation plus user-friendly, étant donné que l’objectif est de faciliter la compréhension et également d’éviter une surcharge cognitive de ce dernier. En effet, afficher uniquement les informations essentielles et simplifier la compréhension en illustrant certaines données par le biais d’images ou emojis permet de réduire la quantité de données que le cerveau de l’individu doit traiter. À ce propos, l’article de Mohamed (2005), portant sur les méthodes propices à une diminution de la charge cognitive des utilisateur-rices, propose de “présenter seulement un sous-ensemble d’attributs, les mots importants, et laisser l'utilisateur commander en utilisant des boutons par exemple” (p. 6). Ainsi, à travers ces boutons d’aide, nous suivons ces recommandations-là pour proposer une interface davantage intuitive.
Par ailleurs, Co-Well se doit d’être spécifiquement intégrée pour chaque formation. En effet, il en ressort que les utilisateur-rices se sentent davantage inclu-es et compris-es s’ils communiquent avec leurs pair-es (Gardien, 2022). Ces derniers sont ainsi davantage enclins à s’ouvrir avec des gens qui vivent un quotidien similaire et qui, de ce fait, sont considérés comme plus légitimes, compte tenu des similarités qu’ils entretiennent ; plutôt que des inconnus qui pourraient avoir de la peine à saisir leur situation. En résumé, il s’agit, pour les personnes désirant mettre en place l’application Co-Well, de prendre en compte le besoin de se sentir compris des futur-es utilisateur-rices et, dès lors, de considérer le caractère singulier de chaque formation avec les besoins qui en découlent et, en conséquence, de ne regrouper que les étudiant-es appartenant à la même formation eu égard aux points mentionnés plus haut.
Outre l’envoi et la réception de messages, l’application dispose également d’un journal de gratitude permettant de valoriser les petites réussites, pensées positives, fiertés personnelles, etc. De plus, à travers un bouton de disponibilité, il est également possible pour l’étudiant-e de décider si ce dernier désire aider l’un-e de ses pairs. Après avoir succinctement exposé les fonctionnalités dont l’application dispose, il s’agira, à présent, de justifier nos choix quant à ces intégrations.
Comme explicité précédemment, le journal de gratitude vise à faire émerger les pensées positives d’une personne. En effet, en s'auto-administrant une remémoration de ses moments positifs, l’étudiant-e reconditionne son humeur actuelle et tend vers un nouvel état propice au bien-être. L’article de Dickens (2017) expose d’ailleurs que les personnes se rendant compte des bonnes choses qui se passent dans leur vie, deviennent plus enclines à interagir avec autrui et éprouvent plus de joie dans ces interactions. Il en découle d’ailleurs que ces interactions favorisent le sentiment de satisfaction de la personne. Ainsi, en écrivant une partie des choses pour lesquelles l’étudiant-e est reconnaissant, il s’avère que ce dernier renforce son bien-être personnel – étant donné que la tâche d’écriture des moments positifs l’ouvre à de nouvelles interactions. Le journal de gratitude agit ainsi comme un cercle vertueux, car il permet, à travers des mots, de favoriser un comportement social d’ouverture à l’égard des personnes qui, à son tour, alimente un sentiment de bien-être grâce aux interactions qui en découlent, favorisant le recours à cette méthode.
Outre cette ouverture, tenir un journal de gratitude permet également de réduire les symptômes de dépression (Chen et Ishak, 2022). A ce propos, ils expliquent que “students with a higher level of gratitude felt fewer depressive symptoms” (Chen et Ishak, 2022, p. 449). Par conséquent, à travers cette fonctionnalité, les utilisateur-rices ont la possibilité d’améliorer leur niveau de gratitude et, de facto, réduisent leurs symptômes dépressifs.
En plus du journal de gratitude, nous avons décidé de proposer un “bouton de disponibilité” à l’utilisateur-rice, afin qu’ils puissent manifester ou non son désir d’aider les autres. Ce faisant, nous n’astreignons pas l’étudiant-e à effectuer une action qu’il ne désire pas faire et, de facto, renforçons son sentiment d’autonomie.
Bien que l’application tente d’aider les étudiant-es, il arrive que l’aide apportée ne soit pas en mesure de répondre aux besoins de l’étudiant-e. Pour pallier cela, nous avons proposé un onglet recensant les contacts des personnes-ressources et services externes pouvant soutenir, de près ou de loin, les étudiant-es qui en ont besoin. Il s’agit donc d’une aide supplémentaire que l’étudiant retrouve sur l’application et qui lui octroie la possibilité de parler avec des spécialistes de certains sujets particuliers. Cette liste de contacts, qui doit être affinée par le commanditaire souhaitant intégrer l’application dans sa formation, compte tenu des divergences entre les personnes-ressources de chaque établissement, inclura à minima des psychologues, des conseillers et d'autres lignes téléphoniques comme le 147 ou le 143.
Après avoir exposé de manière théorique les fonctionnalités, voici une démarche générique qui peut être entreprise par un-e étudiant-e pour envoyer un message. Dès lors qu’un-e utilisateur-rice pose une question, celle-ci sera ainsi envoyée à d’autres étudiant-es utilisant Co-Well. Par la suite, ces derniers seront en mesure de décider s’ils désirent répondre à celle-ci à travers un système de « swipe », explicité plus haut – qui permet, de facto, de ne pas contraindre les utilisateur-rices à répondre ; s’ils ne se sentent, voire ne s’estiment pas compétents pour y répondre.
Interface et interactions
Le design de cette application a été soigneusement travaillé, afin de mettre en confiance l’utilisateur-rice et de favoriser son bien-être, notamment au travers des points évoqués plus haut. Les éléments de décor sont d’ailleurs pleinement intégrés – c’est-à-dire qu’ils ont tous une fonction et n’ont, dès lors, pas été inclus uniquement pour “habiller” l'interface -, étant donné qu’ils possèdent chacun un rôle précis à jouer. Doter l’interface du nombre nécessaire d’éléments permet de réduire la charge cognitive induite aux utilisateur-rices (Sweller et al., 2011).
On y retrouve au milieu son arbre accompagné de ses racines, représentant le nombre d’interactions avec l’application, qui permet à l’utilisateur de quantifier, de manière abstraite, le nombre de fois où il a interagi avec l’application – que ce soit pour aider ses pair-es, pour être aidé ou bien pour utiliser le journal de gratitude. Chacun avance ainsi à son rythme, au travers d’un arbre qui lui est propre.
En outre, en cliquant sur cet arbre, l’utilisateur voit apparaître une forêt, avec son arbre au milieu, dans laquelle les racines sont visibles et de diverses couleurs. Celles-ci représentent la totalité des utilisateur-rices avec lesquels il a interagi et le type de questions que l’utilisateur-rice a posées. Ainsi, si l’utilisateur-rice a questionné ses pairs sur une question de type organisationnel, il aura une racine – représentée avec la couleur orange – qui sera reliée avec l’arbre de l’utilisateur qui l’a aidé. Cette forêt métaphorique permet à l’individu de lui faire prendre conscience qu’il n'est pas seul.
Données collectées
Compte tenu des fonctionnalités que propose l’application Co-Well, il est indéniable qu’une collecte des données ait lieu. En effet, l’application traite les questions qui sont posées par les étudiant-es pour in fine les distribuer à leurs pair-es. Nous ne pouvons, dès lors, pas nier l’implication inéluctable d’un traitement des données, induit par les spécificités de notre application. Néanmoins, nous tenterons de ne pas stocker ces dernières plus longtemps que nécessaire. Il apparaît évidemment, pour nous, qu’à l’issue d’une conversation entre un-e interlocuteur-rice et un-e locuteur-rice, pour peu que celle-ci ait lieu, toute trace sera effacée ; il en sera de même pour les questions qui ont été résolues. Nous agissons ainsi en qualité de médiateur entre l’information et le récepteur, à l’instar de messageries telles que WhatsApp ou Messenger. Cependant, notre dessein sera exclusivement destiné à transmettre l’information ; il n’y aura pas d’intention commerciale sous-jacente. D’autres données liées aux nombres d’utilisateur-rices sur la plateforme, ainsi qu’aux types d’aide recherchés seront, quant à elles, collectées, afin de fournir des statistiques permettant d’étayer les décisions politiques et institutionnelles prises en matière de soutien. Ces statistiques permettront de dégager les grandes tendances quant aux aides cruciales pouvant être apportées. En outre, ces dernières respectent la sphère privée des utilisateur-rices, étant donné qu’elles reflètent les tendances générales de l’ensemble des utilisateur-rices et ne se focalisent, de facto, pas sur un-e utilisateur-rice précis. Elles seront d’ailleurs destinées, comme évoqué précédemment, à aiguiller les institutions quant à leurs choix en matière de soutien.
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