Les technologies numériques : Synonymes d’innovation pédagogique ?
Résumé
Cet article vise une réflexion et l'apport d'un regard critique sur les usages des diverses technologies numériques dans l’éducation et l’apprentissage en mettant en lumière ses opportunités, mais aussi, ses limites et ses défis. À travers une approche pluridisciplinaire, il croise les regards de chercheurs en sciences de l’éducation, en sciences de l’information et de la communication, en philosophie, en anthropologie et en sociologie. En effet, il s'appuie sur trois concepts sélectionnés et issus de trois articles, différents sertes, mais complémentaires :
- «Le numérique permet-il des apprentissages scolaires moins contraints ? Une revue de la littérature.» (Tricot, 2021)
- «Numérique en formation : des mythes aux approches critiques.» (Fluckiger, 2019)
- «Le dialogue homme-machine: Intelligence artificielle / intelligence humaine : manipulation et évaluation.» (Devillers, 2019)
Mots-clés : innovation pédagogique, contraintes, IA, responsabilité, réflexions, technologie numérique, éducation
Introduction
Dans le contexte contemporain de l’apprentissage, la considération croissante des besoins des apprenants et de leur motivation, longtemps négligée, gagne à être davantage reconnue et acceptée.
Actuellement, le bien-être des apprenants, leurs émotions et le concept de motivation occupent une place centrale et indéniable dans le champ de la psychologie. Divers chercheurs s’accordent sur les effets de ces facteurs, favorisant un engagement soutenu et des processus d’apprentissage optimisés. Dans la lecture sur la Théorie de l’Autodétermination (TAD) fondée sur trois besoins psychologiques fondamentaux, que nous verrons plus tard, il est postulé qu’ «... ils [les trois besoins fondamentaux psychologiques] sont présents chez tous et qu’ils exercent leur action, quels que soient les domaines de l’activité humaine, quelles que soient les cultures et quel que soit aussi le stade du développement psychologique» (Laguardia & Ryan, 2000, p.285).
Parallèlement, le concept d’autorégulation (lié à la lecture d’Houart, 2017) met en lumière la capacité des apprenants à observer et à ajuster leurs propres processus en fonction des exigences de la tâche et du contexte qui l’accompagne. Pour se faire, ce modèle intègre quatre facettes fondamentales de l’apprentissage: la motivation, la volition, la cognition et la métacognition. Ainsi, après avoir défini de manière plus spécifique trois concepts issus des lectures, nous essaierons de faire un lien en transposant la TAD et de bonnes compétences d’autorégulation à un contexte d’apprentissages collaboratif.
Développement
La théorie de l’autodétermination (TAD)
La théorie de l’autodétermination, développée par Deci et Ryan, est un modèle conceptuel qui propose une psychologie sociale du bien-être psychologique (Ryan cité dans LaGuardia & Ryan, 2000). Elle met en lumière l’importance de trois besoins psychologiques fondamentaux que l’être humain tend à satisfaire de manière spontanée:
- l’autonomie
- la compétence
- la relation à autrui.
Selon cette théorie, la satisfaction de ces besoins favorise la motivation intrinsèque autonome, le bien-être psychologique et la croissance personnelle. Elle porte une attention particulière aux types de motivation et promeut celle intrinsèque, où les individus sont guidés par l’intérêt, l’excitation, le plaisir qu’ils trouvent dans l’action sans attente de récompense externe. Son autonomie se manifeste par le fait de se sentir être l’origine ou la source de ses propres comportements.
De même, la théorie met en avant le rôle de la compétence, où son développement et la maîtrise de taches stimulantes font la persistance et l’engagement dans les activités à travers un sentiment de prise en charge personnelle de l’effet à produire. Enfin, la relation sociale satisfaisante est soulignée comme étant essentielle pour promouvoir un sentiment d’appartenance et de connexion à autrui (Baumeister & Leary; Ryan, 1993 cités dans LaGuardia & Ryan, 2000).
L’apprentissage autorégulé par l’action
Ce modèle met l’accent sur la capacité des apprenants à prendre conscience, contrôler et réguler activement leur processus d’apprentissage pour atteindre des objectifs spécifiques. Pour se faire, il prend en compte quatre facettes de l’apprentissage que sont: la motivation, la volition, la cognition et la métacognition.
Ainsi, ce modèle encourage les apprenants à devenir autonomes, réfléchis, et capables de s’adapter aux différentes situations le tout en faisant en sorte qu’ils rentrent dans une tâche et s’y maintiennent (volition). Notons également que les processus d’autorégulation chez l’apprenant s’enrichissent de l’influence des interactions co-régulatrices.
L’apprentissage collaboratif
Du point de vue des modèles cognitifs de l’apprentissage collaboratif, les experts conviennent de décrire la collaboration comme un environnement à double problème (Barron cité dans Molinari et al., 2021), dans lequel les apprenants sont tenus de s’impliquer pour définir une vision commune du problème à résoudre (espace cognitif) et de gérer leurs relations interpersonnelles de manière à maintenir un environnement de travail positif et engageant (espace relationnel).
Au niveau de cet espace cognitif, des tensions peuvent apparaitre. C’est notamment le cas lorsque des divergences de points de vue et des conflits conceptuels apparaissent. Loin d’être négatives, ses tensions avec l’extérieur s’avèrent essentielles, car elles permettent une contribution de développement réciproque afin de trouver une solution commune au problème (Mugny, Doise, & Perret-Clermont cités dans Molinari et al., 2021). Mais, pour se faire, le défi présenté à chaque apprenant du groupe consiste alors à mobiliser des processus de régulation pour rétablir un équilibre cognitif, mais aussi émotionnel au sein du groupe.
Plusieurs processus cruciaux ont été identifiée comme étant des éléments déterminants au succès de l’apprentissage collaboratif dont «des processus associés à la communication, tels que le maintien d’une compréhension mutuelle et la gestion du dialogue, des processus de traitement conjoint de l’information, tels que la mise en commun et la recherche d’un consensus, et des processus de coordination tels que la division de la tâche, la gestion du temps et la coordination technique» (Meier, Rummel & Spada cités dans Molinari et al., 2021, p.6).
Conclusion
En conclusion, dans un contexte d’apprentissage collaboratif et au regard des concepts prédéfinis, nous pouvons observer une synergie entre le modèle de l’apprentissage autorégulé et la TAD qui se complètent mutuellement. Tous deux visent le développement d’apprenants motivés, autonomes et engagés, capables de gérer leurs propres processus d’apprentissage et de cultiver des relations sociales positives. Par exemple, pour répondre au besoin de relations à autrui, l’apprenant devra mettre en place des stratégies autorégulatrices et réfléchir sur ses processus internes, essentiels à une bonne collaboration.
En effet, les bienfaits d’un apprentissage collaboratif demandent des conditions préalables pour arriver à une bonne entente favorisant l’atteinte des objectifs.
Ainsi, dans ce contexte, comprendre et promouvoir ces interconnexions favorise des expériences d’apprentissage innovantes, enrichissantes et plus durables.
Bibliographie
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- Trousse à projets (Réalisateur). (2022, novembre 16). Rediffusion—Conférence n°3 du 21/09/2022. https://www.youtube.com/watch?v=AieP6IUyIpk
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