BASES:Cours BASES 2022-23/Gaëtan Basset
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Auteur : Gaëtan Basset
Introduction
La lecture est une activité complexe et polyvalente qui implique la construction d'une représentation mentale cohérente des informations présentées dans un texte (McNamara & Magliano, 2009). Cette représentation est obtenue par l'intégration et la connexion des idées présentées dans le texte (McNamara & Magliano, 2009 ; van den Broek & Gustafson, 1999 ; Zwaan & Radvansky, 1998, cités par Saux et al., 2021), et l'alignement de l'information avec les connaissances et les croyances préexistantes du lecteur (Black et al., 1986, selon Saux et al., 2021).
Ce court article à pour but de synthétiser plusieurs lectures sur le thème de la compréhension et l’apprentissage par la lecture. Il se concentrera en particulier sur certains facteurs centraux avantageant ou désavantageant l’apprentissage par la lecture et sur le phénomène de compréhension (surtout par les textes), processus cognitif complexe qui est nécessaire à presque toutes les activités cognitives composites, comme par exemple l'apprentissage.
Caractéristiques générale de la compréhension
McNamara & Magliano, (2009) s'interrogent sur la possibilité de proposer un modèle général de la compréhension. Pour ce faire, ils analysent 7 modèles de compréhension existants:
- the Construction–Integration (CI) model (Kintsch, 1988, 1998);
- the Structure-Building model (Gernsbacher, 1997; Gernsbacher, Varner, & Faust, 1990);
- the Landscape model (Linderholm, Virtue, Tzeng, & van den Broek, 2004; Tzeng, van den Broek, Kendeou, & Lee, 2005; van den Broek, Rapp, & Kendeou, 2005; van den Broek, Young, Tzeng, & Linderholm, 1999);
- the Resonance model (Albrecht & Myers, 1995; Myers & O’Brien, 1998; Myers, O’Brien, Albrecht, & Mason, 1994);
- the Event-Indexing model (Zwaan, Langston, & Graesser, 1995);
- the Causal Network model (Langston & Trabasso, 1999; Suh & Trabasso, 1993; Trabasso & Suh, 1993; Trabasso & van den Broek, 1985; Trabasso, van den Broek, & Liu, 1988; Trabasso, van den Broek, & Suh, 1989);
- the Constructionist model (Graesser et al., 1994).
De ces modèles, ils font ressortir huit dimensions qui sont soit importantes, soit centrales dans les modèles de compréhension analysés. Ces dimensions comprennent (les termes ne sont pas traduit afin d’éviter des erreurs d'interprétations):
- Connectionist architecture,
- Spreading activation,
- Automatic unconscious processing,
- Discourse focus, 5)
- Convergence and constraint satisfaction,
- Mapping,
- Text-based inferencing,
- Memory constraints.
(pour un description de ces dimensions voir figure 1.)
En outre, ils ont identifié 29 sous-dimensions qui varient d'un modèle à l'autre et qui ont été regroupées en quatre catégories :
- les caractéristiques du discours,
- les processus de compréhension,
- les produits de la compréhension,
- les dimensions extratextuelles.
Les caractéristiques du discours font référence aux aspects du contenu du discours qui se produisent dans ou à travers les constituants du texte (i.e phrases), et qui fournissent des informations ou des indices aux systèmes cognitifs soutenant la compréhension. (Gernsbacher & Givon, 1995; Graesser et al., 2004; Magliano & Schleich, 2000, cités par McNamara & Magliano, 2009).
Viennent ensuite les processus de compréhension qui opèrent sur les caractéristiques du discours et sont soit des processus continus qui opèrent tout au long du traitement d'un morceau de texte juste après récéption de l’information les soutenant (Just & Carpenter, 1980, selon McNamara & Magliano, 2009), soit des processus tardifs, qui peuvent opérer vers la fin du traitement d'un morceau de texte.
Pour McNamara & Magliano (2009), le spectre des processus de compréhension émerge de trois processus cognitifs de base : “spreading activation” qui fait référence à l'amorçage, la récupération inconsciente par exemple grâce à la mémoire de travail et le traitement conscient comme la résolution de problème ou la mise en place de stratégie. Ces trois processus servent à faire des inférences de liaison, c'est-à-dire l'établissement d'un lien entre la phrase actuelle et la phrase précédente faire ou faire des liens avec des sources extérieures au texte.
Les produits de la compréhension font référence aux représentations mentales résultant des processus de compréhension, et peuvent contenir plusieurs niveaux de signification (Fletcher, 1994 ; Graesser & Clark, 1985 ; Graesser et al., 1997 ; Kintsch, 1988 ; Kintsch & van Dijk, 1978 ; van Dijk & Kintsch, 1983 ; Zimmermann et al. & van Dijk, 1978 ; van Dijk & Kintsch, 1983 ; Zwaan & Radvansky, 1998, cités dans McNamara & Magliano, 2009).
Enfin les dimensions extratextuelles font référence à des processus de relativement haut niveau (comme le raisonnement, la résolution de problème, etc.), et qui se produisent probablement après intégration des produits de la compréhension. Il s'agit de processus plus pragmatiques, qui reflètent des aspects métalinguistiques ou sociaux du lecteur ou du contexte de lecture qui peuvent influencer le traitement et la nature des produits qui en découlent.
Selon McNamara & Magliano (2009), un modèle complet doit encapsuler potentiellement toutes les dimensions citées ci-dessus.
Ils n’arrivent cependant pas à un consensus, mais font quelques remarques intéressantes nous permettant de mieux situer le champ de la compréhension et les caractéristiques qui devraient la constituer. Ils arrivent donc à la conclusion que les modèles actuels de compréhension ne sont pas nécessairement contradictoires, mais couvrent plutôt différents spectres de processus de compréhension et ne rendent pas assez compte de la grande variété des différentes situations de lecture (i.e pour apprendre ou pour se détendre) ainsi que des différents types de lecteurs dans la mesure où il existe des différences conséquentes entre lecteurs.
Par exemple, les lecteurs compétents sont plus à même de générer des inférences qui comblent entre les trous entre les prémisses, les phrases et les paragraphes, alors que les lecteurs moins compétents ont tendance à ignorer ces lacunes ou à ne pas faire les inférences nécessaires pour les combler. Et ceci n’est qu’une des nombreuses différences que l’on peut retrouver entre un bon et un mauvais lecteur et qui impact nécessairement la compréhension. La littérature est édifiante à ce sujet. (e.g., Garnham, Oakhill, & Johnson-Laird, 1982; Long et al., 1994; Magliano & Millis, 2003; Magliano, Wiemer-Hastings, Millis, Mun ̃oz, & McNamara, 2002; Oakhill, 1984; Oakhill & Yuill, 1996; Oakhill, Yuill, & Donaldson, 1990; Whitney et al., 1991; Yuill & Oakhill, 1988; Yuill, Oakhill, & Parkin, 1989, cités par McNamara & Magliano, 2009)
Mais encore, la probabilité qu'un lecteur s'engage dans des processus de compréhension stratégique peut dépendre de son aptitude à la lecture, son aptitude à la compréhension, de sa motivation, de sa capacité d'adaptation, de sa connaissance du domaine, etc.
Sa compréhension dépendra aussi de ses objectifs et des tâches, qui peuvent à leur tour interagir, entre elles et avec les caractéristiques du texte. (Snow, 2002 ; McNamara 2007, cités par McNamara & Magliano, 2009) En effet, L’article de Britt et al. (2022) insiste sur le fait que la lecture et la compréhension qui en suit est fortement liée au contexte de lecture.
Le modèle RESOLV de la lecture volontaire développé par Britt et al. (2018) et Rouet et al. (2017) cherche à comprendre comment les facteurs individuels et situationnels peuvent influencer les buts et les choix de lecture. Selon cette théorie, les lecteurs forment une représentation d'une tâche de lecture appelée modèle contextuel qui comporte des informations sur la demande, le demandeur, le public, les supports et l'identité personnelle. Cette représentation du contexte aide le lecteur à établir un modèle de tâche qui inclut les buts ou objectifs de la demande, la manière de les atteindre et la valeur qu’il attribue à leur réalisation.. La construction du modèle de tâche dépend de plusieurs facteurs tels que les informations fournies par leur représentation de leur tâche de lecture, la compréhension de la demande, les schémas de tâche existants et la valeur personnelle des objectifs. Ce modèle de tâche est dynamique, c’est-à-dire qu’il peut être modifié à mesure de la progression de la tâche de lecture, en fonction de la réalisation des objectifs ou à la confrontation d’obstacles.
Ce modèle postule que la lecture est une tâche qui est toujours située dans un contexte et qui dépend des objectifs des lecteurs. Les lecteurs utilisent toute instruction donnée et son contexte pour construire un modèle de tâche initial. La qualité du modèle de tâche influence directement sur les performances de la tâche et par le même biais, la compréhension des textes lus. (Britt et al. 2022)
Un bon modèle de la compréhension se doit aussi de permettre de rendre compte de la compréhension pour des types de textes bien particuliers. En effet, la facilité de traitement d'un texte peut dépendre de la familiarité des mots, de la complexité du domaine, de la lisibilité du texte, de la cohésion de celui-ci, du domaine ou du genre du texte, et d'une multitude d'autres facteurs pouvant interagir entre eux.
Pour avoir une meilleure vision de ces différences, McNamara & Magliano (2009) proposent de classer sous la forme d’un quadrant ses différentes situations par rapport à la difficulté de traitement d’un texte et les stratégies que lecteurs utilisent pour faire ces lectures. (Figure 2.)
La compréhension de la lecture aura tendance à être meilleure dans le quadrant A, où la facilité de traitement est élevée et où le lecteur est stratégique, et pire dans le quadrant D où la facilité de traitement est faible et le lecteur n'est pas stratégique. Dans le quadrant B, la compréhension aura tendance à être plus superficielle et dans le quadrant C, elle tendra à être limitée à la compréhension basique du texte.
Tout ceci complique évidemment l’élaboration d’un modèle général.
Les sources
faire émerger la cohérence de multiples sources
À cette complexité, nous pouvons encore ajouter la difficulté de comprendre à partir de plusieurs textes, surtout lorsque ceux-ci proposent des points de vue contradictoires. En effet, l'abondance des informations disponibles sur les plateformes numériques a rendu plus difficile pour les lecteurs la construction de représentations mentales cohérentes (Britt et al., 2018 ; WHO, 2020, cités par Saux et al. (2021), car ils doivent naviguer et comparer plusieurs sources pour trouver des informations fiables. Selon McNamara et Magliano (2009), la cohérence, telle qu'elle s'applique à la compréhension de textes, fait largement référence à l'intégration, ou à la représentation cognitive du contenu du texte. La cohérence exige que l'information soit, majoritairement conforme aux connaissances nouvellement acquises lors de la lecture et aux croyances et connaissances préexistantes des lecteurs sur le monde (Black et al., 1986, selon Saux et al. 2021). La cohérence est à la fois une caractéristique inhérente aux textes bien écrits et le résultat de la compréhension active des lecteurs construite grâce à leurs connaissances basiques appropriées à la situation (Gernsbacher, 1990 ; Goldman & Varma, 1995 ; Graesser et al., 1994 ; Kintsch, 1998 ; McKoon & Ratcliff, 1992 ; Myers & O'Brien, 1998 ; O'Brien & Cook, 2016 ; McNamara & Magliano, 2009, cités par Saux et al. 2021).
Les lecteurs font face à plusieurs problèmes lorsqu'il s'agit de comprendre afin de construire une représentation cohérente d’un sujet à partir de plusieurs sources. Saux et al. (2021) font état de quatres difficultés:
Les différences dans le temps, l'espace et la modalité de présentation : Si les textes ont été écrits ou présentés à des moments différents, dans des lieux différents ou dans des formats différents (par exemple, texte, vidéo, audio), (Britt et al., 1999, selon Saux et al., 2021).
Les différences de structure, de genre et de style de langue : Si les textes ont des structures différentes, sont écrits dans des genres différents ou utilisent des styles de langue différents. (Rouet & Britt, 2014, selon Saux et al., 2021).
Les difficultés à identifier les liens entre les textes : lorsque les textes n'utilisent pas de figures (schémas), de graphiques, de vidéos ou de marqueurs de cohésion linguistique pour signaler les liens (Salmerón et al., 2018 ; Stadtler et al., 2018, cités par Saux et al., 2021).
Et les différences de perspective : Si les textes présentent les mêmes informations de différentes manières, il peut y avoir des divergences ou des contradictions entre les textes (Bråten & Braasch, 2018 ; Perfetti et al., 1999, cités par Saux et al., 2021).
Toutes ces situations complique fortement la tâche des lecteurs pour relier les informations et construire une représentation cohérente et lorsqu'elles se cumulent entre elles les chances d’établir de la cohérence diminuent encore.
Malgré ces difficultés, certains lecteurs arrivent plus ou moins bien à faire émerger de la cohérence de leurs lectures. Pour mieux comprendre comment les lecteurs font pour créer un modèle mental cohérent à partir de plusieurs textes pouvant être contradictoires, Le ”document model framework” (DMF) propose une explication (c.f. Figure 3). Lors de la lecture de textes multiples, les lecteurs comprennent non seulement les informations présentées dans les textes, mais aussi les sources et les représentations de ces informations. Le DMF se compose de deux éléments : le modèle mental intégré, qui représente les différentes versions du sujet/thèmes dépeint dans les textes, et le modèle intertexte, qui représente les différentes sources d'où provient l’information. Le modèle intertexte est structuré en nœuds de document, qui représentent les connaissances sur les sources, et de liens intertexte, qui relient les nœuds de source au contenu du texte ainsi que les nœuds de source entre eux. Le DMF suggère que les lecteurs construisent leur modèle en intégrant les informations des textes et des sources, et en établissant des liens entre les sources et les informations qu'elles présentent. Ce processus permet aux lecteurs de comprendre les relations entre les textes et les sources, et de donner un sens aux informations contradictoires ou incohérentes. (Britt & Rouet, 2012 ; Britt et al., 1999 ; Perfetti et al., 1999, cités par Saux et al., 2021) Autrement dit, le modèle stipule que la cohérence émerge lorsqu’il y a établissement d’un schéma retraçant les différentes informations et par qui elles sont dites.
Selon Britt et Rouet (2012), le processus de construction d'un “document model framework” (DMF) comprend les étapes suivantes :
- Lire plusieurs textes et extraire les informations qu'ils contiennent : Il s'agit de traiter et de comprendre activement les informations présentées dans chaque texte.
- Générer un modèle de situation pour chaque texte : Il s'agit de créer une représentation mentale de l'information contenue dans chaque texte, y compris les principaux événements, personnages et relations décrits dans le texte.
- Intégrer les modèles de situation : Il s'agit de combiner les modèles de situation générés pour chaque texte en une représentation unique et cohérente de la situation globale.
- Générer un modèle intertexte : Il s'agit de créer une représentation des sources des textes, y compris des informations sur les auteurs, le contexte de production, le type de document et les intentions de communication du message.
- Connecter le modèle intertexte au modèle mental intégré : Il s'agit de créer des liens entre le modèle intertexte et le modèle mental intégré, notamment des liens entre sources et contenu (reliant les sources aux informations #spécifiques contenues dans les textes) et des liens de sources à sources (reliant les sources entre elles).
Le “document model framework” attache une importance particulière aux sources afin de pouvoir établir de la cohérence entre différents textes. La formation d'une représentation cohérente entre lectures est encore plus difficile pour les lecteurs de textes en ligne (Britt et al., 2018, selon Saux et al., 2021). La manière dont ces sources sont sélectionnées est donc une question cruciale. En effet, l’abondance d'informations disponible sur le web pose des défis aux lecteurs, car ils doivent naviguer parmi de multiples sources, évaluer à quel point les informations sont fiables, puis les comparer afin de construire une représentation intégrée qui donne du sens à ce qu'ils lisent (OMS, 2020, selon Saux et al., 2021).
La navigation est un aspect important de la lecture numérique car elle implique de sélectionner des sources pertinentes et de diviser stratégiquement le processus de lecture. La compréhension et l'intégration de différentes sources d'information ainsi que l'évaluation de la qualité des affirmations faites sur un site web sont également des composantes importantes pour pratiquer une bonne lecture numérique (Afflerbach & Cho, 2010 ; Leu et al., 2015, cités par Salmerón et al., 2018). Selon Afflerbach et Cho (2010, selon Salmerón et al., 2018), la navigation efficace dans les documents hypertextes implique la capacité de prendre des décisions réfléchies et pertinentes sur les sources à lire et sur la façon de diviser le processus de lecture. Cette compétence exige une compréhension de la structure et de l'organisation de l'information numérique, ainsi que la capacité de reconnaître et d'accéder efficacement aux informations pertinentes.
Ce processus implique la spécification d'une problématique initiale, donc d’un objectif (comprendre un sujet, répondre à une question précise). On retrouve ici encore une fois l’importance du contexte de lecture mis en avant par Britt et al. (2022). Établir correctement le contexte est indispensable pour que le lecteur sache ce qui lui manque comme information par rapport à la tâche entreprise et puisse orienter sa navigation en fonction.
La recherche d'informations adéquates sélectionnées grâce à des indices , tels que la position sur le navigateurs, les mots-clés ou les indices de source (i.e. des informations sur le type d'article ou de forum) (Hilligoss & Rieh, 2008 ; Metzger, Flanagin, & Medders, 2010 ; Wirth et al., 2007, cités par Salmerón et al., 2018) est déterminante pour le succès de la tâche visée. Par exemple. il a été démontré que le fait de ne pas utiliser les indices de source dans le processus de navigation entraîne des résultats d'apprentissage inférieurs (Goldman, Braasch, Wiley, Graesser, & Brodowinska, 2012; Wiley et al., 2009, cités par Salmerón et al., 2018)
Une autre pratique à éviter consiste à scanner rapidement les documents lorsqu’il présente des dizaines d'hyperliens. Souvent empreint à une surcharge d’information dans ce genre de cas, les lecteurs ont tendance à faire une inspection rapide des textes, ce qui mène malheureusement souvent à une perte d’information. La compréhension qui en résulte est souvent amoindrie ,voir erronée. (Cromley & Azevedo, 2009; Salmerón, Naomi et al., 2009, cités par Salmerón et al., 2018). Il est donc conseillé de prendre son temps et de faire une lecture plus minutieuse en essayant d’éviter l’effet tape-à-l'œil des nombreux liens hypertextes parsemant les documents.
Lawless et Kulikowich (1996, 1998, selon Salmerón et al., 2018) ont identifié trois groupes principaux de navigation parmi les étudiants : les chercheurs de connaissances (knowledge seekers), les explorateurs de fonctionnalités (feature explorers) et les utilisateurs apathiques de l'hypertexte (apathetic hypertext users) (traduction libre). Il est possible d’en tirer des recommandations quant à la manière de naviguer. Les chercheurs de connaissances qui manifestent de meilleurs résultats au test d’apprentissage par rapport au deux autres groupes (Brodowinska, 2012 ; Wiley et al., 2009, cités par Salmerón et al., 2018), passent la majeure partie de leur temps de lecture sur les documents liés au contenu ou en rapport avec leurs objectifs. Les explorateurs quant à eux, se concentrent sur les caractéristiques non textuelles de l'hypertexte (par exemple, les images, vidéos, diagramme). En ce qui concerne les utilisateurs apathiques, ils passent peu de temps sur les documents liés au contenu et semblent suivre une lecture aléatoire, ce qui impacte nécessairement leur compréhension du sujet.
Le design des navigateurs de recherche a aussi son importance dans la manière de naviguer. Actuellement, la plupart des moteurs de recherche affichent les résultats sous forme de liste, ce qui influence les sélections des lecteurs souvent en faveur des 2-3 premiers résultats (Pan et al., 2007, selon Salmerón et al., 2018). Certaines améliorations pourraient être apportées aux moteurs de recherches pour faciliter la navigation et la compréhension du contenu. Par exemple, un aperçu décrivant la structure du document hypertexte et ses relations (avec d’autre documents) favoriserait la navigation et la compréhension, en particulier ceux qui signalent l'organisation sémantique et suivent une structure hiérarchique versus ceux se concentrant sur des arrangement non sémantique ou en réseau. (Amadieu & Salmerón, 2014, selon Salmerón et al., 2018).
l’évaluation des sources
Outre la navigation, se pose évidemment la question de l’évaluation de ces sources.
De nombreuses études ont démontré les difficultés rencontrées par les collégiens pour évaluer la crédibilité des sources Internet (Hargittai et al., 2010 ; List et al., 2016 ; Lurie & Mustafaraj, 2018 ; Martzoukou et al., 2020 ; McGrew et al., 2018 ; Pan et al., 2007, cités par Breakstone et al., 2021). Une enquête nationale menée en 2019, à laquelle ont participé 3 446 lycéens a également confirmé ces difficultés. Elle a révélé des lacunes importantes dans la capacité des élèves à évaluer la crédibilité et la valeur des sources en ligne (Breakstone et al., 2019 ; Mathews, 2019, cités par Breakstone et al., 2021).
Une étude concluante de Breakstone et al. (2021) visait à déterminer si la mise en œuvre d’une intervention dans le cadre de cours en ligne asynchrone pouvait améliorer la capacité des étudiants à évaluer la crédibilité des sources en ligne. Cette intervention était basée sur des stratégies adoptées par des fact-checkers professionnels provenant d'organisations de vérification de faits et d'importants organes d'information situés à New York et à Washington, DC.
Dans un premier temps ces fact-checkers ont été observés pendant leur évaluation de site Web, puis, leurs approches ont été comparées à celles d'étudiants de premier cycle d'une université d'élite et de professeurs d'histoire de cinq institutions différentes (Wineburg & McGrew, 2019, selon Breakstone et al., 2021). Leurs résultats indiquent que lorsque les étudiants de premier cycle et les universitaires rencontrent une source inconnue, ils ont tendance à la lire verticalement, en allant du haut vers le bas et en examinant l'URL, la prose et les liens internes. On pourrait penser que c’est une bonne pratique. Or, l’approche des vérificateurs de faits est complètement différente. Lorsqu'ils arrivaient sur un site inconnu ou dont ils doutaient de la véracité, ils le quittaient immédiatement et ouvraient de nouveaux onglets sur leur navigateur, puis ils procédaient directement à des recherches guidées par deux questions : (1) Quelles sont les preuves ? (2) Que disent les autres sources ? (McGrew et al., 2018, selon Breakstone et al., 2021). Ils appellent cette pratique: “la lecture latérale”.
Les interventions mise en place lors de cours en ligne asynchrone basées sur cette stratégie des fact-checkers ont donné des résultats prometteurs dans une large tranche d'âge, notamment au collège (Kohnen et al., 2020, selon Breakstone et al., 2021), au lycée (McGrew, 2020 ; Wineburg et al., 2019, cités par Breakstone et al., 2021) et au collège (Brodsky et al., 2019 ; Fielding, 2019 ; McGrew et al., 2019 ; Supiano, 2019, cités par Breakstone et al., 2021). L’enseignement et la mise en place de ces stratégies auraient donc le potentiel d'améliorer la capacité des élèves à évaluer la crédibilité des sources en ligne.
Discussion
Résumez (10-15 lignes) votre contribution en ouvrant sur la partie 2 du travail, c'est-à-dire en expliquant comment les résultats des recherches décrites ici peuvent être utilisés pour construire des dispositifs numériques qui peuvent favoriser l'apprentissage à partir de textes.
Références
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