« Collaborative design et design thinking » : différence entre les versions
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Brown, T. (2008). ''Design Thinking''. https://hbr.org/2008/06/design-thinking | |||
Brown, T. ''(2009) Change by Design: How Design Thinking Transforms Organizations and Inspires Innovation'', New York: HarperBusiness. | Brown, T. ''(2009) Change by Design: How Design Thinking Transforms Organizations and Inspires Innovation'', New York: HarperBusiness. | ||
Brown, T., & Wyatt, J. (2012). Design Thinking for Social Innovation. ''<nowiki>Http://Dx.Doi.Org/10.1596/1020-797X_12_1_29</nowiki>'', ''12''(1), 29–43. https://doi.org/10.1596/1020-797X_12_1_29 | Brown, T., & Wyatt, J. (2012). Design Thinking for Social Innovation. ''<nowiki>Http://Dx.Doi.Org/10.1596/1020-797X_12_1_29</nowiki>'', ''12''(1), 29–43. https://doi.org/10.1596/1020-797X_12_1_29 |
Version du 8 décembre 2021 à 17:23
Collaborative Design
Définition
Chui (2002) définit le concept de Collaborative Design, (ou conception collaborative en français) comme :
Le processus dans lequel des acteurs de différentes disciplines partagent leurs connaissances tant sur le processus que sur le contenu de la conception. Ils le font afin de créer une compréhension commune de ces deux aspects, d'être en mesure d'intégrer et d'explorer leurs connaissances et d'atteindre un objectif commun plus large afin de créer un nouveau produit.
L'image ci-dessous montre les différents acteurs du processus de conception collaborative discutant d'un thème unique mais chacun avec sa vision particulière, c'est le moment de l'interaction divergente.
Le collaborative design possède différentes caractéristiques :
- La création de connaissances
- Un processus de communication
- Une compréhension commune
Nous allons par la suite décrire ces 3 spécificités de collaborative design.
Le collaborative Design pour la création de connaissances et intégration entre différentes disciplines
Selon Sonnenwald (1996), le collaborative design est une activité de création (activité divergente entre les collaborateurs) et d'intégration de connaissances (activité convergente entre les collaborateurs), elles sont toutes deux nécessaires et complémentaires à la définition de ce concept.
En effet, les acteurs du Collaborative Design doivent être en mesure de développer un nouveau produit, en s’appuyant sur leurs bases de connaissances initiales, leurs nouvelles connaissances, et cela malgré des points de vue divergents sur la conception.
Exemple :
Bucciarelli (1984), au début des années 1980, a participé à des projets de conception collaborative dans la pratique, non seulement en tant que chercheur mais aussi en tant que concepteur. L'objectif de ses recherches était de mieux comprendre le processus de conception. Les individus participant à ce processus social ont dû développer une perspective commune afin de permettre un accord sur les questions les plus importantes, ainsi que de former un consensus sur ce qu'il faut faire ensuite. Grâce au partage d'idées par la communication, les différents sujets ont utilisé des langages de conception et des représentations variés, car ils avaient des intérêts et des responsabilités différents.
Pour pouvoir expliquer les difficultés d'intégration des connaissances entre les individus, Bucciarelli a introduit le concept de monde objet :
Un monde objet contient les croyances, les intérêts, les connaissances et les expériences individuelles d'un acteur, ainsi que les méthodes et les techniques qu'il est capable d'utiliser. Les mondes d'objets peuvent avoir un effet positif et négatif sur l'exploration et/ou l'intégration des connaissances.
Toutefois, les études de Sonnenwald (1996) et de Dougherty (1992), qui analysent des aspects, tels que la diversité et les rôles de l'équipe, liés aux performances de l'équipe, concluent que la diversité du groupe diminue la capacité d'innovation des produits et les performances de l'équipe.
Selon Sonnenwald (1996), il est difficile pour les individus d'explorer des idées ensemble car ils ont tous des expériences antérieures uniques, un langage de travail spécialisé, des modèles de travail différents, des perceptions différentes de la qualité, des priorités organisationnelles et des contraintes techniques différentes qui peuvent conduire à des conflits et avoir un impact négatif sur la qualité du processus de conception et des résultats. De façon contradictoire, la littérature sur la créativité et les processus organisationnels considère que les équipes diversifiées sont plus innovantes que les équipes homogènes.
La plupart des auteurs affirment toutefois qu'un équilibre entre diversité et homogénéité est la meilleure option. L'argument de Postrel (2002) correspond à l'opinion d'autres chercheurs qui suggèrent que la redondance des connaissances est une condition favorable à la création de connaissances.
Les auteurs affirment que les différences entre les disciplines peuvent conduire à la créativité dans les phases divergentes du processus d'innovation. Ils appellent les différences entre les disciplines des conflits intellectuels. Ils affirment que les conflits intellectuels peuvent mener à des idées créatives parce que : ils offrent aux acteurs plus d'options, ce qui augmente les changements pour une option qui brise le cadre ; les acteurs impliqués dans un conflit intellectuel chercheront au-delà de la solution évidente ; et la diversité de l'information améliore la performance de la créativité.
Le collaborative design en tant que processus de communication
Selon Kleinsmann (2006), « la communication est une condition préalable à la collaboration », parce qu’elle permet le partage de connaissances entre les acteurs d’un projet de collaborative design.
Selon une expérience faite par Chui (2002) dans un laboratoire, la communication est un élément vital pour les acteurs, parce que les acteurs de cette expérience ont consacré une grande partie du temps (entre 40 et 50 %) à cet aspect et cela montre son importance.
Le sujet de la communication durant le collaborative design a été étudié selon divers niveaux de détail. Ces niveaux sont liés à la vision que les chercheurs ont de la collaboration entre les acteurs.
La figure suivante (étant basée sur le cadre de Kahn, 1996), révèle les différentes perspectives des chercheurs (l’interaction, la collaboration et l’intégration interdépartementale) et leurs thématiques de recherche correspondantes.
La recherche sur la communication du contenu du design
- Recherche sur la thématique de conversation : Différentes études (Olson et al, 1992; Chui, 2002; Stempfle and Badke Schaub, 2002) affirment que la thématique la plus importante des conversations des acteurs est le contenu du design
- Recherche sur les processus de communication des acteurs : Il existe différentes études sur la qualité de la communication de l’équipe qui montrent l’importance de la négociation et de la synchronisation d’idées dans la communication sur le contenu du design. Ces études utilisent différents paradigmes dans le but de préciser le processus de communication des acteurs.
- Recherche sur les méthodes de communication utilisées : Les acteurs dans un projet de collaborative design utilisent différentes méthodes de communication en même temps, car celles-ci peuvent être complémentaires et facilitent le partage de connaissances.
Une compréhension commune dans les projets de collaborative design
Selon Kleinsmann (2006), il est très important que les acteurs d’un projet de collaborative design aient une compréhension commune de ce qu’ils font, même si une partie de leurs connaissances reste différente pour chaque acteur.
La compréhension commune (shared understanding en anglais) peut être définie comme : « une similitude dans les perceptions individuelles des acteurs sur la façon dont le contenu du design est conceptualisé (contenu) ou sur la façon dont le système de mémoire transactive fonctionne (processus) » (Kleinsmann, 2006).
* La mémoire transactive est, selon Wegner (1987), « l’ensemble de systèmes de mémoire individuels, qui combine les connaissances traitées par des acteurs particuliers avec une conscience commune de qui sait quoi ».
Du collaborative design au design thinking
Au cours du processus de collaborative design, les concepteurs utilisent souvent des documents techniques pour échanger leur conception, tels que des dessins, des rapports de développement et des modèles de formes tridimensionnelles. Cependant, ces documents ne peuvent que décrire ce qu'est la conception, mais ne reflètent pas explicitement comment et pourquoi la conception est faite de cette manière, c’est ici la place du processus de design thinking. (Liu et Sun, 2008).
Design thinking
Origine
Le design thinking peut être traduit de deux manières en français : pensée créative ou réflexion sur la conception. Cette traduction nous permet de comprendre vers quelle idée nous amène la société américaine IDEO .
En effet, lors de sa création en 1982, cette société avait pour mission de créer pour ses clients des produits de conception traditionnelle : chaises, brosse à dent,...
Puis à partir de 2001, les dirigeants, David Kelley (enseignant à l’Université de Stanford), Bill Moggridge et Mike Nuttall, ont eu des demandes de conception orientées autour de l’expérience de consommation des utilisateurs.
Autrement dit, la demande de conception avait pour objectif de mieux comprendre les besoins des clients, pour ainsi créer un produit qui puisse y répondre au mieux.
Naissance du concept
Selon Brown et Wyatt (2010), les dirigeants d’IDEO ont nommé ce nouveau concept : design “avec un petit d”. Puis David Kelley s’est aperçu que lorsqu’il expliquait cette méthode de conception, le mot “thinking” (ou réflexion en français) revenait à chaque fois, aussi le terme design thinking est apparu.
Utilité du concept
Isabelle Gautheron (2015) explique que le design thinking est une méthode de management adaptée à la conception de produits, d’organisations ou de services innovants, dont l’origine est attribuée à Tim Brown et David M. Kelley, enseignants à l’Université de Stanford.
Selon Tim Brown, le design thinking est aussi un état d’esprit qui « utilise la sensibilité, les outils et les méthodes des designers pour permettre à des équipes multidisciplinaires d’innover en mettant en correspondance les attentes des utilisateurs, la faisabilité des projets et leur viabilité économique ».
Description du concept
Le Design thinking est une manière de concevoir des produits en se centrant sur les besoins humains. Cette démarche se veut centrée sur l’humain, du point de vue de l’objectif à atteindre, mais aussi dans les étapes de réalisation.
Ainsi le Design thinking demande aux professionnels d’utiliser leur imagination, leur intuition, leur émotionnel lors des étapes de réflexion et de création d’un produit.
Tim Brown décrit 3 étapes pour réaliser la méthode Design thinking. Elles s'entremêlent, s’empiètent les unes aux autres :
Inspiration
Cette étape est la première prise en compte par les concepteurs. Les deux autres peuvent être réalisées de manière non linéaire.
L’inspiration est la question de départ : Que devons-nous chercher ensemble?
Cette partie se réalise au travers d’un résumé, d’un exposé des contraintes mentales auxquelles l’équipe de projet est soumise : attentes, limites,…
Tous ces éléments permettent à l’équipe de conception de se projeter en fonction du cadre de départ et de percevoir les progrès à accomplir. Mais aussi les objectifs à atteindre (prix, technologie disponible et le marché du produit).
Le résumé ou briefing de l’équipe de conception
Dans le contexte du Design thinking, le résumé ou brief en anglais, est une étape bien préparée par les organisateurs, les responsables. Car plus il sera construit, plus les personnes qui l'écoutent auront la possibilité d’être créatifs dans leurs propositions.
Tim Brown souligne qu’un brief trop abstrait créait de l’incertitude dans l’équipe, tout comme des contraintes importantes amènent l’équipe à créer un projet médiocre.
Ainsi nous percevons l’importance du message véhiculé dans le briefing pour permettre aux professionnels d’être créatifs.
Les besoins des usagers
Cette étape consiste à se rendre sur le terrain et d’être dans une observation active de l’expérience réelle des usagers. Cette technique est favorisée par un questionnaire où les usagers ne connaissent pas souvent leurs réels besoins.
Henry Ford l'a bien compris lorsqu'il a déclaré : "Si j'avais demandé à mes clients ce qu'ils voulaient, ils auraient répondu "un cheval plus rapide"".
Durant cette observation il est important que les concepteurs puissent être en lien avec des communautés, des partenaires locaux dans l’objectif de traduire les observations de manière crédible et compréhensible, toujours dans l’idée de concevoir un produit répondant aux besoins des usagers.
Par exemple: Pour identifier les besoins des utilisateurs il est possible d’utiliser la technique Persona et la carte d'expérience de cette façon on aura des informations concrètes liées aux besoins réels.
Idéation
Suite à l’étape d'inspiration dans le design Thinking, il y a l’étape d’idéation. Cette dernière permet de développer les solutions possibles suite aux besoins identifiés, lors des observations des comportements des usagers dans leur quotidien.
Ces observations dans le champ d’étude ou contexte doivent être triés, ce qui peut être réalisé par exemple avec un brainstorming. Dans lequel une équipe de professionnels interdisciplinaires partagent leurs compétences, savoir-être et savoir-faire dans l'objectif de créer de nouvelles idées.
Autrement dit, c'est un temps de collaboration pour concevoir des solutions aux besoins identifiés en lien avec le terrain et les observations des comportements des futures utilisateurs ou usagers.
Lors des débats sur les idées, les professionnels peuvent utiliser par exemple :
- Des post-its en papier et de couleurs
- Le logiciel collaboratif Miro, https://miro.com/fr/, en ligne
De plus, pour favoriser la créativité de toute l’équipe il faut se doter de certains outils de dynamique de groupe, comme par exemple:
- le zéro draft : c’est l’idée de poser sur papier nos idées avant ou au début de la réunion.
- le brainwriting : un professionnel écrit une idée sur un papier, puis il le passe à son voisin qui va en prendre connaissance et écrire sa propre idée. L’étape se répète ensuite jusqu’à ce que tous les acteurs aient pu collaborer.
- les jeux de rôles : pour une approche plus ludique, on peut demander aux participants d’incarner leur héros préféré pour répondre à la problématique.
- le souhait : cette technique, surtout utile pour réinventer une solution, est très simple. On part du principe que tout est possible ! Et on partage ses idées les plus folles (Guillouche, 2020).
Implémentation
Dans cette étape, les meilleures idées de la phase d'idéation sont sélectionnées dans le but de créer un prototype.
C'est-à-dire que c’est le moment de négocier entre les professionnels du projet pour choisir l'idée la plus pertinente en relation avec la demande initiale ou les besoins identifiés dans les étapes précédentes.
La conception des prototypes ou maquettes sont conçues par des activités dynamiques et organisées de façon à favoriser la collaboration interdisciplinaire des acteurs. Notamment par des ateliers ou des hackathons.
Pour créer une dynamique du groupe qui favorise la négociation entre les acteurs il est nécessaire d’avoir bien défini auparavant les rôles des acteurs.
Mais aussi d’avoir identifié une personne dans le groupe qui peut jouer le rôle de brokering ou négociant. Cet individu doit avoir une expérience de terrain et de connaissance de la théorie dans l'objectif de favoriser la communication.
Par exemple, si deux personnes de l’équipe n’arrivent pas à se mettre en accord sur un sujet, le brokering va mettre en place des outils de communication pour que ni l’un ni l'autre ne se sente lésé dans l’échange.
A la suite de la conception des prototypes, ils doivent être testés afin d'établir des préconisations d'améliorations à effectuer. “Ces tests doivent être rigoureux, ils permettent d’identifier le ou les problèmes et de les résoudre avant le déploiement à plus grande échelle”.https://nell-associes.com/blog/quelles-sont-les-5-etapes-dans-le-processus-de-design-thinking-2/
Les solutions systémiques
Le design thinking est utilisé aujourd'hui par de nombreuses entreprises car il permet d'identifier les erreurs en amont de la mise en œuvre d’une solution et ainsi diminuer les échecs du produit conceptualisé.
Prenons l’exemple de l'implémentation d’un nouvel outil numérique pour évaluer les étudiants de l’université de Genève. Il est plus favorable pour la conceptualisation du produit d’effectuer des recherches, des observations auprès des besoins réels des étudiants et des enseignants, afin que le produit final corresponde au mieux aux besoins.
C’est pour cette raison que l’approche design thinking fait partie des matières centrées sur l’humain, tout comme l'ergonomie ou le design UX.
Le design thinking est cyclique, c'est-à-dire itératif, non linéaire dans ces phases de réalisation. Il peut être effectué en boucle car suite à chaque test utilisateur il est possible de faire des améliorations sur les prototypes, et ainsi de suite.
C’est pour cette raison qu'il est nécessaire de connaître les limites budgétaires, temporelles du projet dans la phase d’inspiration.
Bibliographie
Brown, T. (2008). Design Thinking. https://hbr.org/2008/06/design-thinking
Brown, T. (2009) Change by Design: How Design Thinking Transforms Organizations and Inspires Innovation, New York: HarperBusiness.
Brown, T., & Wyatt, J. (2012). Design Thinking for Social Innovation. Http://Dx.Doi.Org/10.1596/1020-797X_12_1_29, 12(1), 29–43. https://doi.org/10.1596/1020-797X_12_1_29
Gautheron, I. (2015). Le « design thinking » : une démarche collaborative et innovante. I2D - Information, données & documents, 52, 37-38. https://doi.org/10.3917/i2d.154.0037
Kleinsmann, M. S. (2006). Understanding collaborative design.
Liu, J., & Sun, Z. (2008). Representing design intents for design thinking process modeling. In Global design to gain a competitive edge (pp. 187-197). Springer, London.