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Les théories de l'apprentissage présentées ici ont en commun l'idée que la connaissance est une construction. Bien que Piaget soit l'un des pères du constructivisme, il n'est pas le seul. Aussi, nous avons choisi de présenter sa théorie séparément du constructivisme. Pour Piaget, l'enfant construit sa connaissance. Néanmoins, contrairement aux socioconstructivistes, il insiste peu sur les aspects sociaux de la contruction de la connaissance. Vigotsky, quant à lui, le premier a souligné l'importance de l'interaction sociale dans le développement de la connaissance chez les enfants. Ainsi, la construction d'un savoir bien que personnelle s'effectue dans un cadre social. Les informations sont en lien avec le milieu social, le contexte et proviennent à la fois de ce que l'on pense et de ce que les autres apportent comme interactions. Enfin, la théorie de la cognition distribuée pousse cette conception à l'extrême en affirmant que la cognition est de nature exclusivement sociale.
Les théories de l'apprentissage présentées ici ont en commun l'idée que la connaissance est une construction. Bien que Piaget soit l'un des pères du constructivisme, il n'est pas le seul. Aussi, nous avons choisi de présenter sa théorie séparément du constructivisme. Pour Piaget, l'enfant construit sa connaissance. Néanmoins, contrairement aux socioconstructivistes, il insiste peu sur les aspects sociaux de la contruction de la connaissance. Vigotsky, quant à lui, le premier a souligné l'importance de l'interaction sociale dans le développement de la connaissance chez les enfants. Ainsi, la construction d'un savoir bien que personnelle s'effectue dans un cadre social. Les informations sont en lien avec le milieu social, le contexte et proviennent à la fois de ce que l'on pense et de ce que les autres apportent comme interactions. Enfin, la théorie de la cognition distribuée pousse cette conception à l'extrême en affirmant que la connaissance est de nature exclusivement sociale, le groupe étant lui-même vu comme un système cognitif complexe.


=Constructivisme=
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Version du 29 août 2013 à 09:20

Les théories de l'apprentissage présentées ici ont en commun l'idée que la connaissance est une construction. Bien que Piaget soit l'un des pères du constructivisme, il n'est pas le seul. Aussi, nous avons choisi de présenter sa théorie séparément du constructivisme. Pour Piaget, l'enfant construit sa connaissance. Néanmoins, contrairement aux socioconstructivistes, il insiste peu sur les aspects sociaux de la contruction de la connaissance. Vigotsky, quant à lui, le premier a souligné l'importance de l'interaction sociale dans le développement de la connaissance chez les enfants. Ainsi, la construction d'un savoir bien que personnelle s'effectue dans un cadre social. Les informations sont en lien avec le milieu social, le contexte et proviennent à la fois de ce que l'on pense et de ce que les autres apportent comme interactions. Enfin, la théorie de la cognition distribuée pousse cette conception à l'extrême en affirmant que la connaissance est de nature exclusivement sociale, le groupe étant lui-même vu comme un système cognitif complexe.

Constructivisme

Définition

Le constructivisme est une théorie de l'apprentissage fondée sur l'idée que la connaissance est construite par l'apprenant sur la base d'une activité mentale. Les étudiants sont considérés comme des organismes actifs cherchant du sens, des significations. Le constructivisme est basé sur l'hypothèse que, en réfléchissant sur nos expériences, nous construisons notre propre vision du monde dans lequel nous vivons. Chacun de nous produit ses propres « règles » et « modèles mentaux », que nous utilisons pour donner un sens à nos expériences. Apprendre est donc simplement un processus d'ajustement de nos modèles mentaux pour s'adapter à de nouvelles expériences. Les constructions du sens peuvent au début ne soutenir que peu le rapport avec la réalité (comme dans les théories naïves des enfants), mais elles deviendront de plus en plus complexes, différenciées et réalistes au fil du temps.

Historique

Le constructivisme est issu, entre autres, des travaux de Jean Piaget (1964) qui émet la théorie qu’un individu confronté à une situation donnée va mobiliser un certain nombre de structures cognitives, qu’il nomme schèmes opératoires.

Principes de base du constructivisme

  1. Apprendre est une recherche de sens. Par conséquent, apprendre doit commencer par les questions autour desquelles les étudiants essaient activement de construire le sens.
  2. Comprendre le sens exige de comprendre le tout comme ses parties. Parties qui doivent être comprises dans le contexte du tout. Par conséquent, l'apprentissage se concentre sur des concepts primaires, non sur des faits isolés.
  3. Pour enseigner correctement, il faut comprendre les modèles mentaux que les étudiants utilisent pour percevoir le monde et les hypotèses qu'ils font pour soutenir ces modèles.
  4. Le but de l'apprentissage est, pour un individu, de construire sa propre signification, et pas simplement d'apprendre par coeur les « bonnes » réponses pour recracher le sens à d'autres. Depuis que l'éducation est en soi interdisciplinaire, la seule manière valable de mesurer l'apprentissage est d'en faire l'évaluation, fournissant ainsi aux étudiants de l'information sur la qualité de leur apprentissage.

Comment le constructivisme produit un effet sur l'apprentissage

L'enseignement constructiviste est fondé sur la croyance que les étudiants apprennent mieux quand ils s'approprient la connaissance par l'exploration et l'apprentissage actifs. Les mises en pratique remplacent les manuels, et les étudiants sont encouragés à penser et à expliquer leur raisonnement au lieu d'apprendre par coeur et d'exposer des faits. L'éducation est centrée sur des thèmes, des concepts et leurs liens, plutôt que sur de l'information isolée.

Instruction : A partir de la théorie constructiviste, les enseignants se concentrent sur l'établissement de rapports entre les faits et favorisent les nouvelles compréhensions des étudiants. Ils adaptent leur enseignement aux réponses des étudiants et les encouragent à analyser, interpréter et prévoir l'information. Les professeurs s'appuient également fortement sur des questions ouvertes et favorisent le dialogue entre les étudiants.

Evaluation : Le constructivisme tend à l'élimination des catégories et des tests standardisés. Au lieu de cela, l'évaluation devient partie prenante de l'apprentissage de sorte que les étudiants jouent un plus grand rôle en jugeant leurs propres progrès.

Conclusions

Le constructivisme est une manière de penser le savoir, une référence pour construire des modèles de l'enseignement, de l'apprentissage et des programmes d'études. Dans ce sens, c'est une philosophie.

Le constructivisme peut également être utilisé pour fonder une théorie de la communication. Quand vous envoyez un message en disant quelque chose ou en fournissant des informations, et que vous n'avez aucune connaissance du récepteur, alors vous n'avez aucune idée de la manière dont le message a été reçu, et vous ne pouvez pas clairement interpréter la réponse.

Dans cette perspective, l'enseignement devient l'établissement et le maintien d'une langue et de moyens de communication entre le professeur et les apprenants, aussi bien qu'entre les apprenants eux-mêmes. Présenter simplement le matériel, énoncer les problèmes et recevoir des réponses n'est pas un processus de communication assez raffiné pour un apprentissage efficace.

Certains principes du constructivisme en termes pédagogiques :

  • Les étudiants viennent en classe avec une expérience du monde et un apprentissage antérieur long de plusieurs années.
  • Même pendant qu'il évolue, un apprenant filtre toutes ses expériences à travers sa conception du monde et cela affecte l'interprétation de ses observations.
  • Changer leur vision du monde exige des apprenants un travail important.
  • Les étudiants apprennent les uns des autres aussi bien que de l'enseignant.
  • Les étudiants apprennent mieux en faisant.
  • Permettre et créer pour tous des occasions de se faire entendre favorise la construction de nouvelles idées.

Dans une perspective constructiviste, les étudiants sont actifs dans la recherche du sens. L'enseignement cherche ce que les étudiants peuvent analyser, étudier, et comment ils peuvent collaborer, partager, construire et générer du sens sur la base de ce qu'ils savent déjà, plutôt que quels faits, qualifications ou processus ils peuvent singer. Pour y parvenir efficacement, un enseignant doit être un étudiant et un chercheur. Il doit essayer d'obtenir une plus grande conscience des environnements et des participants dans une situation d'enseignement donnée. Ainsi, pour engager les étudiants dans l'apprentissage, il devra s'ajuster continuellement à leurs actions et s'appuyer sur le constructivisme comme une référence.

Piaget

Pour Piaget, c’est en agissant sur son environnement que l'enfant construit ses premiers raisonnements. Ses structures cognitives (Piaget parle aussi de schèmes de pensée), au départ complètement différentes de celles de l’adulte, s'intériorisent progressivement pour devenir de plus en plus abstraites.

La théorie piagétienne du développement distingue quatre structures cognitives primaires qui correspondent à autant de stades de développement, lesquels se subdivisent ensuite en périodes distinctes où émergent des capacités cognitives particulières.

Stade sensorimoteur

Le premier stade, qui s’étend de la naissance à environ 2 ans, est le stade sensorimoteur. Durant cette période, le contact qu’entretient l’enfant avec le monde qui l’entoure dépend entièrement des mouvements qu’il fait et des sensations qu’il éprouve. Chaque nouvel objet est brassé, lancé, mis dans la bouche pour en comprendre progressivement les caractéristiques par essais et erreurs. C’est au milieu de ce stade, vers la fin de sa première année, que l’enfant saisit la notion de permanence de l’objet, c’est-à-dire le fait que les objets continuent d’exister quand ils sortent de son champ de vision.

Période pré-opératoire

Le deuxième stade est celui de la période pré-opératoire qui débute vers 2 ans et se termine vers 6 - 7 ans. Durant cette période qui se caractérise entre autres par l’avènement du langage, l’enfant devient capable de penser en terme symbolique, de se représenter des choses à partir de mots ou de symboles. L’enfant saisit aussi des notions de quantité, d'espace ainsi que la distinction entre passé et futur. Mais il demeure très orienté vers le présent et les situations physiques concrètes, ayant de la difficulté à manipuler des concepts abstraits. Sa pensée est aussi très égocentrique en ce sens qu’il suppose que les autres voient les situations de son point de vue à lui.

Opérations concrètes

Entre 6 - 7 ans et 11-12 ans, c’est le stade des opérations concrètes. Avec l’expérience du monde qu'il accumule, l’enfant devient capable d’envisager des événements qui surviennent en dehors de sa propre vie. Il commence aussi à conceptualiser et à créer des raisonnements logiques qui nécessitent cependant encore un rapport direct au concret. Un certain degré d’abstraction permet aussi d’aborder des disciplines comme les mathématiques où il devient possible pour l’enfant de résoudre des problèmes avec des nombres, de coordonner des opérations dans le sens de la réversibilité, mais toujours au sujet de phénomènes observables. Résoudre des problèmes à plusieurs variables en le décortiquant de façon systématique demeure exceptionnel à ce stade.

Opérations formelles

Finalement, à partir de 11-12 ans se développe ce que Piaget a appelé les opérations formelles. Les nouvelles capacités de ce stade, comme celle de faire des raisonnements hypothético-déductifs et d’établir des relations abstraites, sont généralement maîtrisées autour de l’âge de 15 ans. À la fin de ce stade, l’adolescent peut donc, comme l’adulte, utiliser une logique formelle et abstraite. Il peut aussi se mettre à réfléchir sur des probabilités et sur des questions morales comme la justice.

L'apprentissage pour Piaget

L’apprentissage consiste en une adaptation de nos schèmes de pensée à de nouvelles données du réel. Pour Piaget, cette adaptation peut se faire de deux façons : par assimilation ou par accommodation.

L’assimilation consiste à interpréter les nouveaux événements à la lumière des schèmes de pensée déjà existants. Par exemple un enfant en bas âge sait comment saisir son hochet préféré avec les doigts d’une main et le lancer pour qu’il fasse du bruit. Quand il tombe sur un nouvel objet, comme la fragile montre de son père, il transfère sans problème ce schéma moteur connu au nouvel objet et l’envoie rebondir sur le plancher.

L’accommodation est le processus inverse, c’est-à-dire changer sa structure cognitive pour intégrer un nouvel objet ou un nouveau phénomène. Si le même enfant tombe maintenant sur un ballon de plage, il va essayer de le saisir comme il le fait pour son hochet avec une seule main. Mais très vite, il va se rendre compte que ça ne fonctionne pas et découvrira éventuellement comment tenir le ballon entre ses deux mains.

Pour Piaget, on passe constamment de l’assimilation et l’accommodation durant les processus de compréhension du monde qui nous entoure. Durant certaines périodes du développement, l’une des deux peut toutefois être temporairement plus utilisée que l’autre.

apprentissage=assimilation + accommodation


Zone proximale de développement

Ce concept central dans les travaux de Vygotsky exprime la différence entre ce que l'enfant apprendra s'il est seul, et ce qu'il peut potentiellement apprendre si on lui fournit une aide.

La ZPD est donc la distance (différence) entre le niveau de développement actuel, déterminé par les capacités de l'enfant à résoudre seul un problème, et le niveau de développement potentiel, déterminé à travers la résolution de problème par cet enfant, lorsqu'il est aidé par des adultes ou collabore avec des pairs de niveau plus avancé.

A l'origine, ce concept fut introduit en tant qu'argument contre la mesure statique de l'intelligence : Vygotsky estimait qu'il était préférable d'évaluer ce que l'enfant était capable de faire seul, et accompagné par une personne plus compétente, plutôt que d'évaluer ses acquis dans l'idée d'en tirer une "mesure" de son intelligence.

Dans la théorie de Vygotsky, la ZPD représente avant tout ce que l'apprenant n'est capable de réaliser qu'avec l'aide d'une personne plus compétente. Deux sortes d'apprentissages peuvent y être distingués :

  • les apprentissages faisant partie du cursus de développement normal, lesquels, de toute façon, seront développés par l'enfant : l'aide d'un expert permet alors de faciliter et d'accélérer l'apprentissage. Le rôle de l'éducateur sera alors de s'assurer que les acquis fondamentaux sont présents et permettront à l'enfant de discuter avec ses pairs en vue de construire collectivement de nouvelles connaissances.
  • les apprentissages sociaux tirés de la collaboration avec autrui, exclusivement relatifs à la gestion de l'environnement social.

Ces deux types d'apprentissage découlent d'une construction sociale des connaissances, ils apportent donc à la fois des apprentissages cognitifs et sociaux utiles pour l'enfant, soit pour lui faire acquérir des compétences cognitives plus rapidement, soit pour développer le lien social.

ZPD et pédagogie

Pour faciliter l'apprentissage selon cette conception, il est nécessaire d'inciter le travail en équipe, et supervisé, dans lequel chaque participant explicite sa démarche et permet ainsi à l'enfant de construire de nouvelles connaissances. Cette démarche s'inscrit également dans la volonté d'utiliser les acquis individuels et collectifs pour faciliter l'élaboration de nouvelles connaissances.

L'intérêt de cette approche réside également dans la possibilité d'évaluer les développements proches (à venir) afin de les faciliter en fonction des acquis. Ainsi, l'enfant est évalué non plus selon ses acquis mais également selon son potentiel. L'accent pédagogique est donc mis sur l'apprentissage des connaissance les plus « proches ».

Conflit sociocognitif

Doise et Mugny prolongent les travaux de Piaget et Vygotsky. Ils présentent les interactions entre pairs comme source de développement cognitif à condition qu'elles suscitent des conflits sociocognitifs. Selon ces deux auteurs, l'interaction sociale est constructive dans la mesure où elle introduit une confrontation entre les conceptions divergentes. Au cours d'une interaction au sein d'un groupe, un premier déséquilibre interindividuel apparaît puisque chaque élève est confronté à des points de vue divergents. Il prend ainsi conscience de sa propre pensée en relation à celle des autres. Ce qui provoque un deuxième déséquilibre de nature intra-individuelle : l'apprenant est amené à reconsidérer, simultanément, ses propres représentations et celles des autres pour reconstruire un nouveau savoir. Le narratif devient, dans cette perspective, un moyen de "penser notre propre pensée" (Bruner, 1995) et renvoie à la compréhension de sa propre pensée ainsi qu'à celle d'autrui.

La métacognition

La métacognition désigne l'analyse que l'apprenant fait de son propre fonctionnement intellectuel. Savoir que l'on a des difficultés avec les fractions, que l'on comprend mieux un problème si l'on fait un schéma, sont des connaissances métacognitives. La métacognition renvoie aux activités mises en oeuvre pour exécuter une tâche et à l'ajustement de ces activités (gestion de l'activité mentale). La métacognition est la compétence de se poser des questions pour planifier, s'évaluer avant, pendant et après une tâche pour se réajuster au besoin. Il s'agit de prendre conscience de ses méthodes de pensée et de réguler ses propres processus de pensée.

métacognition, conflit socio-cognitif et enseignement

Apprendre, c'est élaborer soi-même ses connaissances en passant nécessairement par une phase d'interaction, voire de conflit socio-cognitif avec autrui, et cela à tout âge. Cette phase déterminante des interactions cognitives est d'autant plus efficace que l'enseignant est capable d'organiser et d'animer cette situation d'échanges dans les meilleures conditions... et que les individus en interaction développent leurs capacités à échanger à propos des stratégies utilisées par chacun pour réaliser une tâche.

Celle-ci permet à chacun de passer d'un niveau interpersonnel à un niveau intrapersonnel : alors, la phase d'appropriation individuel de la tâche, du savoir ... se réalise d'autant mieux qu'elle a dû permettre à chacun d'élaborer un langage intériorisé.

Cognition située

A différence de la théorie socio-constructivisme qui se focalise sur les processus cognitifs indépendants de l’environnement d’apprentissage, la théorie de la cognition située et distribuée se concentre plutôt sur l’environnement dans lequel l’apprentissage intervient. L’environnement est constitué par deux contextes:

  • le contexte social (l’environnement, le lieu) et
  • le contexte physique (interaction entre les individus).

En fait, le socio-constructivisme se concentrait seulement sur le contexte physique (la présence simultanée de plusieurs membres pour collaborer) pour étudier l’apprentissage. C’est la théorie de la cognition située qui étudie maintenant le groupe lui même qui est vu comme un seul système cognitif complexe. Ce système englobe les apprenants et l’enseignant en les plaçant dans les contextes (social et physique) où les interactions se développent. A partir de ce moment, les propriétés du groupe ne peuvent plus être expliquées par une addition des systèmes cognitifs distincts des individus qui le composent.
Ce champ de recherche est apparu dans les années 80, sous l'éclairage conjoint des travaux de Vygotsky "Mind in Society" et de Minsky "La société de l'Esprit" ; le champ de l'Intelligence Artificielle Distribuée a connu un essor grandissant depuis cette date.

Cognition distribuée

La cognition est ici abordée comme un processus distribué, dont les dimensions sont : physiques, mentales et aussi sociales.
Jermann, P (1996) nous informe que le courant de la cognition distribuée s'intéresse à la structure des connaissances (aux représentations) et à leur transformation.
Les approches de la cognition distribuée (angl. Distributed cognition) (Hutchins 1995) se démarquent des approches traditionnelles issues des sciences cognitives en ce que la cognition n'est plus réduite à un processus local de traitement de l'information, elle est envisagée au contraire comme mettant en cause des processus de coopération et de collaboration entre l'humain et son environnement physique et social.
Les recherches sur la cognition distribuée supposent que les phénomènes cognitifs dépassent le traitement individuel de l’information pour intégrer les interactions entre individus (environnement humain et social) et les ressources matérielles y compris les technologies de l’information (environnement physique) (Hollan, Hutchins et Kirsh, 2002).
Une distribution temporelle est en outre considérée, selon laquelle les éléments issus d'événements antérieurs sont susceptibles d'influencer les événements ultérieurs.

La personne-plus

Adhérant au cadre de référence de la cognition distribuée, Perkins (1995) développe une série de concepts afin de rendre compte de la pensée et de l'apprentissage, comme étant des phénomènes impliquant étroitement l'individu et son milieu. Il résume sa position en deux points:

  1. Les environnements physiques et sociaux participent à la cognition en tant que véhicules de la pensée, et pas uniquement comme source d'information ou comme supports matériels des productions d'un individu.
  2. Les choses apprises ne résident pas que dans la tête d'un individu, mais elles influencent aussi sous la forme de modification de l'environnement.

Imaginons par exemple, un étudiant prenant ses notes de cours dans un cahier. Le cahier lui sert de brouillon pour la pensée pendant qu'il travaille la matière, ainsi que de support matériel des conclusions qu'il a tirées. La personne plus l'environnement, en l'occurrence son carnet de notes, forme un système cognitif que Perkins nomme la personne-plus (en angl. 'person-plus') en opposition à personne-solo, i.e. l'individu seul. Dans ce système, peu importe que la connaissance soit dans la tête de l'étudiant ou dans le carnet de note. Ce qui compte c'est l'accès aux connaissances par l'étudiant, et le fait que la personne-plus ait pu développer des connaissances, qu'une personne-solo n'aurait pas pu développer.
Perkins (1995) précise encore que l’étudiant peut être considéré comme l’égal d’un expert lorsque ce dernier est confronté à une tâche d’envergure. Car, l’expert n’agit pas seul : «c’est entouré de tous ses outils que l’individu-plus affronte la situation et résout le problème» (p.58)

La cognition distribuée – l’apprentissage et - le développement professionnel des enseignants

Dillenbourg et al. (2003) nous montrent à travers un exemple, l’application de la notion de cognition distribuée dans une communauté. A l’instar, ils nous rappellent de l’exemple de Orr (1991 cité en Dillenbourg et al., 2003). Ce dernier a observé comment les techniciens de photocopieuses transmettaient leur connaissance à la communauté. Dans ce contexte, ils racontaient de façon narrative et informelle, les problèmes qu’ils avaient résolus lors de leur activité professionnelle. La transmission de ces expériences individuelles permettait aux autres membres de la communauté de comprendre la profession et de développer des approches variées aux problèmes que chacun d’eux rencontrait dans leur travail quotidien.
A travers cet exemple, ces chercheurs nous montrent que le processus d’apprentissage au sein d’une communauté est un processus d’enculturation du groupe et que l’authenticité du contexte (social et matériel) influence le processus de collaboration et donc d’apprentissage (cognition distribuée).
Les recherches sur l’impact de différents systèmes de représentation sur la résolution de problèmes montrent que l’information imbriquée dans les artefacts manipulés (photocopieuses) est aussi importante que l’information représentée par l’agent humain (narrative et informelle) qui utilise ces artefacts et que ces derniers déterminent, en grande partie, les processus de résolution de problèmes. (Zang et Norman, 1994)
Ces chercheurs nous font comprendre que la cognition distribuée intègre l’apprentissage comme un processus d’entrée dans une communauté de pratiques, donc une culture professionnelle. A ce propos, Dillenbourg et al., (2003) avouent :

Pour être honnête, cette pertinence [ce nouveau modèle d’apprentissage] est assez évidente dans le contexte du développement professionnel [enseignants] mais reste difficile à intégrer dans un contexte scolaire qui est plutôt formel et régulé. La participation à une communauté constitue une forme d’apprentissage libre, informelle, collaborative et contextualisée, guidée par des experts praticiens. Dans une communauté, le savoir se transmet dans toute sa richesse, signification et pertinence sociale et culturelle, ce qui n’est pas le cas dans les programmes scolaires traditionnels. (Wertsch, 1984 cité en Dillenbourg et al., 2003)(p. 23)

D’ailleurs, Émond, B., et Barfurth, M., (2003) sont de l’avis que les environnements virtuels de formation professionnelle devraient soutenir la communication et la collaboration des enseignants afin de développer chez eux, le processus systématique de réflexion sur leurs apprentissages et leurs pratiques pédagogiques. Or, ils proposent qu’un tel environnement soit caractérisé par :

  • Des modèles de développement de pratique réflexive
  • Des outils de technologies de communication adéquates aux processus de développement professionnel (réflexion, recherche, collaboration).
  • Une interface-usager pertinente pour organiser les différentes informations partagées et personnelles.

Références

Dillenbourg, P., Poirier, C. & Carles, L. (2003). Communautés virtuelles d’apprentissage : e-jargon ou nouveau paradigme ? In A. Taurisson et A. Sentini. Pédagogies.Net. L’essor des communautés virtuelles d’apprentissage Montréal, Presses. (p. 9-47)

Émond, B., et Barfurth, M. (2003). Soutien cognitif aux communautés virtuelles de développement professionnel d’enseignants par les technologies de l’information et de la communication In Taurisson, A., et Senteni, A. Pédagogies.Net. L’essor des communautés virtuelles d’apprentissage Montréal, Presses. (p. 245-262)

Hollan, J., Hutchins, E., et Kirsh, D. (2002). Distributed cognition: toward a new foundation for human-computer interaction research, dans J.M. Carroll (dir.), Human-Computer Interaction in the New Millennium New York, Addison-Wesley, p. 75-94.

Hutchins, E. (1995). Cognition in the Wild, Cambridge,MA, MIT Press.

Jermann, P. (1996) Cognition Distribuée in Conception et analyse d’une interface semi-structurée dédiée à la co-résolution de problème. Conception et analyse d'une interface semi-structurée dédiée à la co-résolution de problème.

Ott, David J-P (2000) La personne plus in Collaboration dans un environnement virtuel 3D : influence de la distance à l’objet référencé et du « view awareness » sur la résolution d’une tâche de « grounding ». Collaboration dans un environnement virtuel 3D : influence de la distance à l'objet référencé et du 'view awareness' sur la résolution d'une tâche de 'grounding'

Perkins, D. N. (1995). L’individu-plus. Une vision distribuée de la pensée et de l’apprentissage in Revue Française de Pédagogie, 111 (avril-mai), p. 56-71.

Zang, J., et Norman, D.A. (1994). Representations in distributed cognitive tasks, Cognitive Science, 18, p. 87-122.

Voir aussi en:Situated cognition

Conclusion

Bien que le socioconstructivisme se base sur les travaux de Vigotsky, il ne peut s'y réduire exclusivement. En effet, selon Vigotsky, la zone de développement proximal dépend de l'interaction avec des pairs de meilleur niveau. Selon cette conception, le pair de meilleur niveau conserve d'une certaine manière le rôle de l'enseignant qui instruit les élèves (ou tout du moins qui les guide dans leurs apprentissages). Au contraire, dans le socioconstructivisme, c'est le conflit socio-cognitif avec des pairs de même niveau qui permet la construction de nouvelles connaissances. Ainsi, il n'est nul besoin de faire appel à l'expertise de qui que ce soit. La connaissance est en quelque sorte préexistante dans le groupe de pairs et ne demande qu'à être découverte grâce à la construction des points de vue.

Références

Anzani, A. (2002) Apprendre à naviquer et naviguer pour apprendre. Le cas du Learning Navigator (LENA). Mémoire en vue de l'obtention du DESS en Sciences et Technologies de l'Apprentissage et de la Formation - TECFA, pp 43-44. Cadillo

Cobb, P. (1994) Where is the mind? Constructivist and Sociocultural Perspectives on Mathematical Development, Educational Researcher, 23(7), pp 13-20

Cobb, P. (1998) Analyzing the mathematical learning of the classroom community: the case of statistical data analysis, In: Proceedings of the 22nd Conference of the International Group for the Psychology of Mathematics Education 1, pp 33-48, University of Stellenbosch, South Africa

Dougiamas, M. (1998). A journey into Constructivism, http://dougiamas.com/writing/constructivism.html

Hickey, D.T. Motivation and Contemporary Socio-Constructivist Instructional Perspectives Vanderbilt University http://www.questia.com/PM.qst?a=o&d=80937209

Salomon, G. and Perkins, D. (1998) Individual and Social Aspects of Learning, In: P. Pearson and A. Iran-Nejad (Eds) Review of Research in Education 23, pp 1-24, American Educational Research Association, Washington, DC

Theoretical Corner-Stones and Applications of Socio-Constructivism in Virtual Learning. http://www.esscs.org/workshop/freiburg2003.html

Vygotsky, L. S. (1978). Mind in society. Cambridge, MA: Harvard University Press.

Wood, T., Cobb, P. & Yackel, E. (1995). Reflections on learning and teaching mathematics in elementary school. In L. P. Steffe & J.Gale (Eds) Constructivism in education (pp 401-422). Hillsdale, New Jersey: Lawrence Erlbaum.

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