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Les années 1995 à 2010 font basculer la conjoncture de l’évaluation par principe de fidélité à la tradition (Crahay, 2010). Les premiers résultats PISA de l’année 2000 sont publiés en 2002-2003. Ce sont eux qui ont influencé le retour vers la note. Ces résultats font remettre en question le système éducatif. Une polémique démarre quand un romand de Finkielkraut affirme que selon les critères de PISA la compréhension de lecture est insuffisante chez quatre élèves sur cinq (Bugnard, 2015). | Les années 1995 à 2010 font basculer la conjoncture de l’évaluation par principe de fidélité à la tradition (Crahay, 2010). Les premiers résultats PISA de l’année 2000 sont publiés en 2002-2003. Ce sont eux qui ont influencé le retour vers la note. Ces résultats font remettre en question le système éducatif. Une polémique démarre quand un romand de Finkielkraut affirme que selon les critères de PISA la compréhension de lecture est insuffisante chez quatre élèves sur cinq (Bugnard, 2015). | ||
==L’évaluation et le filtre imaginaire== | |||
Lors d’une évaluation de l’apprenant, l’enseignant passe un filtre imaginaire qui se trouve entre la relation pédagogique et le dispositif d’évaluation à mettre en place. Ce filtre imaginaire influence la fonction de l’évaluation pour l’enseignant (Jorro 2003, cité par Mercier-Brunel, 2015). | Lors d’une évaluation de l’apprenant, l’enseignant passe un filtre imaginaire qui se trouve entre la relation pédagogique et le dispositif d’évaluation à mettre en place. Ce filtre imaginaire influence la fonction de l’évaluation pour l’enseignant (Jorro 2003, cité par Mercier-Brunel, 2015). |
Version du 29 avril 2020 à 17:53
L'évaluation
L'évaluation sommative, appelée aussi évaluation certificative quand il y a à la clé délivrance d'un diplôme, est une forme d’évaluation des acquis se déroulant après l’action de formation et visant à vérifier que « les acquisitions visées par la formation ont été faites1 ».
C'est une évaluation dont la fonction est de certifier que les apprenants maîtrisent les objectifs définis par le système, et qui débouche sur une décision d'acceptation ou de refus dans un niveau supérieur, ou sur une décision de classement.
L’évaluation certificative peut prendre deux grandes formes : l’une est liée à la notion d’examen, de l’ordre du bilan : l’évaluateur doit, au terme d’un apprentissage, certifier la maîtrise des connaissances et/ou des compétences en vue de prendre la décision de réussite ou d’échec et, éventuellement, la décision relative à un classement des apprenants sur la base de leur niveau de performance ; l’autre est liée à la notion de concours, de l’ordre de la sélection : à la jonction de deux cycles d’apprentissage (l’un entièrement terminé, l’autre susceptible de s’ouvrir), l’évaluateur peut avoir à sélectionner un certain nombre de personnes pour une nouvelle filière de formation.
Une évaluation certificative vise avant tout à déterminer les acquis de l’apprenant tant d’un point de vue qualitatif que quantitatif. Autrement dit, l’objet premier d’une évaluation certificative est ce qu’il réussit. Elle a une fonction administrative et sociale, au contraire de l'évaluation formative qui a une fonction pédagogique.$
Evaluation formative
L'évaluation formative est une évaluation qui a pour fonction d’améliorer l’apprentissage en cours en détectant les difficultés de l’apprenant (diagnostic) afin de lui venir en aide (remédiation), en modifiant la situation d’apprentissage ou le rythme de cette progression, pour apporter (s’il y a lieu) des améliorations ou des correctifs appropriés.
L'évaluation formative fait partie intégrante de l’instruction pour informer et guider les enseignants de telle sorte qu’ils prennent de bonnes décisions. L’objet premier d’une évaluation formative est les erreurs commises par l’élève et les difficultés qu’il rencontre.
Au contraire de l'évaluation certificative, qui a une fonction administrative et sociale, l'évaluation formative a une fonction pédagogique.
Les implications pour l’enseignant sont nombreuses, dans la mesure où la mise en œuvre de l’évaluation formative nécessite un changement d’attitude de la part de l’enseignant : une modification des attitudes d’évaluation, du statut de l’erreur, de l’implication de l’apprenant dans la mise en œuvre des décisions pédagogiques et des évaluations1.
Selon Linda Allal2, l’évaluation formative peut être
- rétroactive sur la base d’un contrôle ou d’une interrogation
- interactive par une observation des comportements, des interactions orales, un regard rapide sur les productions individuelles ou en sous-groupes
- proactive lors d’un recueil d’indices susceptibles de guider des apprentissages ultérieurs.
L’évaluation formatrice (Nunziati, 19903) est de l’autoévaluation formative, qui implique les apprenants dans le processus d’évaluation formative, en les amenant à s’approprier les critères d’évaluation, et en les responsabilisant face aux processus de gestion des erreurs. Les travaux de l’université de Aix Marseille ont montré que les performances des apprenants augmentent de façon significative lorsque ces derniers se sont approprié les critères d’évaluation. L'évaluation formatrice s'inscrit dans une approche constructiviste de l'apprentissage. Elle s'apparente à un processus d'accompagnement qui rend lisible les variables en jeu dans l'apprentissage.
Ce mode d'évaluation repose sur différents outils pédagogiques :
- la mise en œuvre de critères d'évaluation par une démarche de contractualisation ou de négociation : l'apprenant peut mesurer le chemin parcouru et celui restant à parcourir. Ces critères permettent une décentration de l'apprenant en même temps qu'ils favorisent sa centration sur la tâche à réaliser ;
- le concept de l'erreur formative : l'erreur est positive, elle fait partie de l'acte d'apprendre, elle doit être analysée et traitée dans une approche différenciée ;
- les entretiens d'évaluation : ils visent à permettre à l'apprenant à prendre conscience des stratégies qu'il utilise, à porter une réflexion critique sur son activité. C'est aussi un temps de mise en confiance de l'apprenant.
L'évaluation formative, y compris l'évaluation formatrice, coupent court à tout fatalisme et permettent à l'apprenant de piloter son propre processus d'apprentissage.
Histoire de l’évaluation
Les temps modernes et leur influence sur l’évaluation
Au début des temps modernes il existait deux écoles. Celle du maître d’école étant indépendant et les collèges Jésuites. Le maître d’école offrait ses services et précisait ces conditions. L’apprentissage était décomposé en étapes. Par exemple pour la lecture, les étapes étaient :
- Apprendre les lettres
- Apprendre à lire des mots
- Apprendre à lire des phrases
Les étapes étaient contrôlées régulièrement, l’élève devait se présenter et le maître contrôlait si l’élève avait atteint les « objectifs ». Si l’élève ne réussissait pas il risquait d’être battu. L’enjeu pour le maître d’école était de perdre ses clients. (Cardinet, 1991) La stratégie des Jésuites était de sélectionner dès le départ les meilleurs pour ensuite les former à atteindre les postes d’influence et ainsi christianiser le monde. Ils s’efforçaient à classer les élèves en six groupes, des meilleurs à ceux qui devaient être rejetés. L’Allemagne et la Suisse ont conservé cette échelle avec les notes allant de 1 à 6. (Cardinet, 1991) Quand l’école obligatoire à été créée, il y avait le choix entre ces deux systèmes. Celui des petites écoles centrées sur les objectifs pédagogiques ou celui des Jésuites centré sur le classement des élèves. Le système compétitif a été choisi sous l’influence de la France. (Cardinet, 1991)
De la note à l'évaluation : l’histoire du XXsiècle à aujourd’hui
L’évaluation est liée à un évènement : mettre une note. Cet évènement se passe quotidiennement, à chaque fois qu’un élève reçoit sa copie. Nous allons nous pencher sur l’histoire de cet évènement en remontant le temps.
Dans les années 1920 – 1930 aux USA et en Europe des enquêtes sur la fiabilité de la note scolaire ont été conduites. Ces enquêtes ont démontré, contre toute attentes, que l’évaluation est une opération arbitraire qui possède des biais innombrables sans prendre en compte la progression. La note n’est plus vue en tant que donnée précise, fiable et objective (Bugnard, 2015).
Le « contrôle continu » est donc mis en place. La notation chiffrée normative passe à l’évaluation formatrice. L’évaluation formatrice prend en compte la progression de l’élève. A partir des années 1980, « la suppression des notes » dans la partie de l’Europe protestante vers une démarche socioconstructiviste. Le cursus de l’école obligatoire jusqu’à l’entrée universitaire renonce à la notation normative. La notation tente de basculer vers l’évaluation (Bugnard, 2015).
Cardinet (1991) énonce que la pédagogique du futur devra « se centrer sur les comportements de l’élève, les objectifs pédagogiques précisant ce qu’il doit savoir faire. Il faudra, pour que tous les élèves atteignent ces objectifs, que l’enseignement soit différencié. On devra, pour certains élèves employer telle pédagogie pour d’autre telle autre pédagogie (Cardinet, 1991, p.4)». Finalement, il dit que ce qui semble futuriste est en soi un retour à la situation du maître qui prenait en charge l’apprentissage de l’élève. Les deux étaient intéressés à leur réussite. Continuer à se lier au notes avec une logique purement comparative n’a pas de sens, si l’objectif est la réussite de tout le monde. Les systèmes d’évaluations plus cohérents correspondant aux exigences de la société devraient être utilisés. (Cardinet, 1991)
Les années 1995 à 2010 font basculer la conjoncture de l’évaluation par principe de fidélité à la tradition (Crahay, 2010). Les premiers résultats PISA de l’année 2000 sont publiés en 2002-2003. Ce sont eux qui ont influencé le retour vers la note. Ces résultats font remettre en question le système éducatif. Une polémique démarre quand un romand de Finkielkraut affirme que selon les critères de PISA la compréhension de lecture est insuffisante chez quatre élèves sur cinq (Bugnard, 2015).
L’évaluation et le filtre imaginaire
Lors d’une évaluation de l’apprenant, l’enseignant passe un filtre imaginaire qui se trouve entre la relation pédagogique et le dispositif d’évaluation à mettre en place. Ce filtre imaginaire influence la fonction de l’évaluation pour l’enseignant (Jorro 2003, cité par Mercier-Brunel, 2015).
Au niveau du résultat l’enseignant cherche soit à évaluer la performance ou la maitrise de la matière. Ces deux niveaux se différencient, car l’enseignant se focalise sur deux objectifs différents. S’il souhaite évaluer la maitrise, il est centré sur les savoirs – l’enseignant mettra en place une évaluation adaptée pour mesurer le savoir. Tandis que s’il souhaite évaluer la performance, il se voit plutôt comme entraîneur – l’enseignant cherche à concrétiser le potentiel de l’élève et de l’amener le plus loin possible dans son parcours. (Jorro 2003, cité par Mercier-Brunel, 2015).
L’élève aura différentes approches d’apprentissages, selon le type d’enseignement. Si l’enseignant se concentre sur l’acquisition des savoirs, il favorisera un aménagement du dispositif. Il adaptera la didactique de son enseignement pour permettre à l’élève de construire son savoir s (Vygotski, 1998 ; Brousseau, 1998 ; cité par Mercier-Brunel, 2015). Cependant, si l’enseignant se concentre sur la compréhension, il co-construit le savoir en interrogeant le sens que l’élève donne à la tâche et les stratégies qu’il utilise (Jorro 2003, cité par Mercier-Brunel, 2015).
Ressources bibliographiques
Bugnard, P.-P. (2015). L’(auto)évaluation dans l’espace historique de deux maîtresses infidèles : la note dans la classe. In P.-F. Coen et al, Evaluation et autoévaluation (13 – 35). Paris : De Boeck Supérieur.
Cardinet, J. (1991) . L'histoire de l'évaluation scolaire : des origines à demain. Objectifs et évaluations dans l'enseignement. Colloques de Strasbourg, 2 et 3 février 1990.
Crahay, M. (2010). Les réformes pédagogiques échouent et pourtant l’école change ! In P. Gilliéron Giroud & L. Ntamakiliro (dir.), Réformer l’évaluation scolaire. Mission impossible ? (231-264). Berne : Peter Lang.
Mercier-Brunel, Y. (2015). Intérêts et limites de la formation à l’évaluation pour les futurs professeurs du second degré en France. In P.-F. Coen et al, Evaluation et autoévaluation (13 – 35). Paris : De Boeck Supérieur.