« Recommandations en création de vidéos pédagogiques » : différence entre les versions
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Clark et Mayer (2008) en parle dans leur '''principe de cohérence'''dans lequel ils préconisent d’éviter le matériel pédagogique qui, même s’il est intéressant, n’est pas essentiel pour la leçon en cours (“Adding interesting material can hurt learning”). | Clark et Mayer (2008) en parle dans leur '''principe de cohérence''' dans lequel ils préconisent d’éviter le matériel pédagogique qui, même s’il est intéressant, n’est pas essentiel pour la leçon en cours (“Adding interesting material can hurt learning”). | ||
Ainsi, ils proposent d’éviter d’ajouter des '''sons'''et des '''musiques inutiles'''qui pourrait attirer l’attention de l’apprenant et entrer en compétition dans le canal auditif (du modèle cognitif de l’apprentissage multimédia). | Ainsi, ils proposent d’éviter d’ajouter des '''sons''' et des '''musiques inutiles''' qui pourrait attirer l’attention de l’apprenant et entrer en compétition dans le canal auditif (du modèle cognitif de l’apprentissage multimédia). | ||
Clark et Mayer (2008) proposent également d’éviter les'''images sans utilité'''qui peuvent interférer de 3 manières : | Clark et Mayer (2008) proposent également d’éviter les '''images sans utilité''' qui peuvent interférer de 3 manières : | ||
# Distraction : l’image inutile attire l’attention de l’apprenant loin du matériel pédagogique à étudier | |||
# Perturbation : l’image inutile empêche l’apprenant de construire des liens appropriés dans le matériel pédagogique car l’image non pertinente perturbe le traitement des informations. | |||
# Séduction : l’image amorce des connaissances non pertinentes qui sont ensuite intégrées sans raisons dans le matériel d’apprentissage | |||
Finalement, dans la même logique, Clark et Mayer (2008) suggèrent d’éviter l’ajout de '''textes inutiles''' qui ont pour but d’éveiller l’intérêt de l’apprenant sans participer à l’apprentissage. | |||
Finalement, dans la même logique, Clark et Mayer (2008) suggèrent d’éviter l’ajout de '''textes inutiles'''qui ont pour but d’éveiller l’intérêt de l’apprenant sans participer à l’apprentissage. | |||
Thiery (2014) propose des recommandations similaires qu’elle résume par « '''rester sobre''' ». En effet, elle explique que l’on a tendance à vouloir faire de magnifiques dessins et graphiques, mais ceux-ci noient le cerveau. Ainsi, il faut rester sobre et proposer des dessins qui servent uniquement aux explications. Elle suggère également de rester synthétique et concis dans ses explications, d’éviter les messages superflus, ainsi que les musiques qui ne servent à rien. | Thiery (2014) propose des recommandations similaires qu’elle résume par « '''rester sobre''' ». En effet, elle explique que l’on a tendance à vouloir faire de magnifiques dessins et graphiques, mais ceux-ci noient le cerveau. Ainsi, il faut rester sobre et proposer des dessins qui servent uniquement aux explications. Elle suggère également de rester synthétique et concis dans ses explications, d’éviter les messages superflus, ainsi que les musiques qui ne servent à rien. |
Version du 8 octobre 2019 à 12:06
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En principe, le ou les auteurs en question devraient bientôt présenter une meilleure version.
Introduction
Dans une époque où les méthodes pédagogiques se multiplient, la vidéo pédagogique s’intègre de plus en plus dans les enseignements, que ce soit pour de jeunes enfants ou pour des adultes, et ce sous différents format ; des dessins animés ou films d’animations pour les plus jeunes (par ex, il était une fois… la vie), des scénettes de la vie réelle (par exemple, vidéos de situations routières avec QCM pour apprendre le code de la route) ou encore des rediffusions de cours ou de conférence, etc.
La vidéo pédagogique est un format de transmission de connaissance qui existe depuis des dizaines d’années et qui ne se limite pas aux cours dans le cadre d’une école ou d’une formation. Il existe des centaines voire des milliers de vidéos pédagogiques diffusées à la télévision ou en accès libre ou pas, sur internet, notamment sur Youtube. La vidéo pédagogique est particulièrement appréciée du public car le format de la vidéo peut susciter l’intérêt et la motivation des élèves (Awad, Brouillette, Cormier, Turcotte, 2017). Pour s’en rendre compte, il suffit de regarder la popularité du dessin animé Dora l’exploratrice qui a pour but d’initier les jeunes enfants aux langues (anglais, français ou espagnol) ou de l’émission C’est pas sorcier dont les deux protagonistes principaux, Frédéric Courant et Jamy Gourmaud, ont reçu un doctorat honoris causa pour leur travail dans cette émission.
La vidéo pédagogique est également très régulièrement utilisée en cours présentiels pour illustrer la matière enseignée, mais également dans des formats moins conventionnels de cours tels que la classe inversée. Dans ce format d’enseignement, les cours en présentiel sont réservés aux activités de mise en pratiques et aux exercices. L’apprentissage des connaissances plus théoriques, les leçons magistrales se font à la maison, en apprentissage autonome. Dans ce format-ci, les vidéos sont particulièrement pratiques pour donner un support d’apprentissage aux élèves lorsqu’ils apprennent à la maison.
Ainsi les vidéos pédagogiques sont de plus en plus populaires et utilisées dans différents cadres d’enseignement. Toutefois, créer une vidéo pédagogique, c’est-à-dire une vidéo qui enseigne un concept et de laquelle l’apprenant retient le message principal, n’est pas chose facile.
Voici donc dans cette page, une série de recommandations pour aider à la création d’une vidéo pédagogique. Ces recommandations ont pour but de d’aider à cadrer la création de la vidéo afin la rendre cette dernière le plus efficace possible en termes d’apprentissage.
Ainsi, pour créer une vidéo pédagogique adaptée aux capacités et besoins des apprenants, trois éléments reviennent couramment dans la littérature scientifique pour favoriser et promouvoir l’apprentissage : la charge cognitive, l’engagement de l’étudiant.e et l’apprentissage actif. Nous détaillerons ces trois aspects dans les prochains paragraphes.
Ensuite, vous trouverez, dans la partie 2, des propositions de classifications des contenus pédagogiques et des objectifs retrouvés en e-learning. Ceci a pour but de vous aider à définir votre contenu, mais surtout à adapter le format de votre vidéo à ce contenu et à votre objectif.
Toutes les recommandations en termes de création de vidéos pédagogiques se trouvent dans les paragraphes 3, 4 et 5. Nous avons choisi de présenter les recommandations selon l’ordre chronologique selon un ordre chronologique qui correspond à celui du processus de conception. Ainsi, nous imaginons que vous commencerez par préparer le contenu, le matériel pédagogique que vous présenterez dans votre vidéo, puis que vous vous attaquerez à la création de votre vidéo en commençant par travailler sa scénarisation, puis vous la réaliserez. Finalement, vous la diffuserez auprès de vos apprenant.e.s.
Petit avertissement : le thème de la vidéo pédagogique regroupant une diversité de types de vidéos, les recommandations prodiguées ici tentent de s’adapter au plus grand nombre. Toutefois certaines recommandations peuvent ne pas s’appliquer au type de vidéos que vous prévoyez de créer. Par exemple, si vous créez une vidéo entièrement constituée d’animations ou d’une suite de diapositives, la recommandation « varier les angles de caméra » ne vous sera pas très utile.
Charge cognitive
Deux théories du traitement cognitif des informations lors d’un apprentissage sont régulièrement utilisées dans la littérature scientifique : la théorie de la charge cognitive de Sweller et collègues (1988, 1989, 1994 cités dans Brame 2016), et la théorie cognitive de l’apprentissage multimédia (Clark et Mayer, 2008).
Théorie de la charge cognitive
Nous vous invitons à consulter la page consacrée à la théorie de la charge cognitive si celle-ci vous intéresse.
La théorie cognitive de l’apprentissage multimédia
Pour résumer le fonctionnement de la mémoire de travail selon le modèle cognitif de l’apprentissage multimédia, les mots et les images arrivent aux oreilles ou aux yeux de l’apprenant selon leur modalité sensorielle (auditive ou visuelle). L’attention de l’apprenant sélectionne alors des mots et des images qui forment alors des sons et des images en mémoire de travail. Ces mots et images sont alors organisés pour former des modèles verbaux et picturales qui font sens et qui sont finalement intégrés en mémoire à long-terme avec l’aide des connaissances préalables de l’apprenant.
Ce système de traitement des informations peut être surchargé. C’est pourquoi on définit 3 types de traitement cognitifs d’informations. Premièrement, le traitement essentiel est le traitement cognitif inhérent à chaque tâche d’apprentissage. C’est le traitement minimal requis pour comprendre les informations. Ces informations peuvent être plus ou moins complexes, ce qui fait que ce traitement essentiel peut être plus loin élevé.
Ensuite, le traitement inutile correspond à toute la charge cognitive qui n’est pas utile à l’apprentissage (par exemple : traiter une voix-off enregistrée avec un mauvais micro demande plus de concentration, tout comme ignorer une musique de fond trop forte). Ce traitement est en général créé par un mauvais design d’apprentissage et doit être diminué le plus possible.
Finalement, le traitement génératif fait références aux processus cognitifs nécessaire pour faire sens des informations présentées. Il est influencé par la motivation de l’apprenant et doit être favorisé au maximum.
Ainsi, bien que chaque canal auditif et pictural ait une capacité limitée et puisse être surchargé, il est possible d’utiliser les deux canaux simultanément pour faciliter l’intégration de nouvelles informations. En effet, en utilisant les deux canaux, la capacité de la mémoire de travail est maximisée. Concevoir les tâches d’apprentissage de façon à gérer la charge cognitive dans les deux canaux permet de favoriser l’apprentissage.
Nous vous invitons également à consulter la page consacrée à la théorie cognitive de l’apprentissage multimédia si vous souhaitez en savoir plus.
En plus de la charge cognitive, deux autres éléments, que nous avons déjà abordés, sont reconnus pour promouvoir et favoriser un apprentissage efficace chez les apprenants : l’engagement de l’étudiant et l’activité dans l’apprentissage (vs passivité).
Engagement de l’étudiant
Pour Brame (2016), le principe est très simple : « si l’apprenant ne regarde pas les vidéos, il ne peut rien en apprendre ». C’est la raison pour laquelle promouvoir l’engagement des élèves est une composante essentielle de tout enseignement, en particulier dans des situations d’apprentissage peu ou non supervisées tel que pourrait être le visionnement d’une vidéo pédagogique. L’engagement est ici entendu non seulement comme le temps passé à regarder une vidéo (engagement visuel) mais également comme la participation des étudiant.e.s aux activités proposées qui sont en lien avec le contenu de la vidéo (par exemple, répondre à un quizz) (Guo, Kim, & Rubin, 2014). Réfléchir sur la façon de maintenir l’attention des apprenant.e.s pendant le visionnement des vidéos ou sur la façon d’amener les apprenant.e.s à traiter activement et utiliser les informations véhiculées par les vidéos sont deux points importants lorsque l’objectif est de promouvoir l’engagement.
Apprentissage actif
Regarder une vidéo peut être une activité très passive, tout comme la lecture (Brame 2016). Or, il existe de nombreuses études qui ont montré qu’un apprentissage est meilleur en termes de compréhension et de rétention lorsqu’il est actif. Knight et Wood (2005) ont observé de meilleures performances d’apprentissage lors de leçons qui favorisaient l’apprentissage actif via la résolution de problèmes et de travail coopératif en comparaison à des leçons classiques ex-cathedra. Une méta-analyse de Freeman, Eddy, McDonough, Smith, Okoroafor, Jordt et Wenderoth, (2014) confirme que l’apprentissage actif résulte en de meilleures performances aux différents tests effectués.
Ainsi, il est important de créer des systèmes d’apprentissage actif qui promeuvent l’engagement des étudiants et gèrent les charges cognitives de manière adaptée. Les recommandations qui se trouvent ci-dessous ont donc pour but de proposer des conseils pour réaliser des vidéos pédagogiques en suivant ces trois principes de charge et de traitement cognitif, d’engagement de l’étudiant et d’apprentissage actif.
Définir le contenu de sa leçon
Avant de construire toute leçon ou des vidéos dans notre cas, il parait important de définir correctement une leçon autant en termes de contenu qu’en termes d’objectifs. En effet, le type de contenu enseigné et son objectif vont influencer la manière de l’enseigner. Il convient donc de définir l’objectif instructionnel (Mayer, 2010) de votre vidéo. L’objectif instructionnel est une définition claire des connaissances qui doivent être apprises, avec le degré auquel elles doivent être maîtrisées et de comment l’apprentissage va être évalué. Voici donc, tirés de Clark et Mayer (2008), 5 termes qui permettent de définir des types de contenus pédagogiques et deux types d’objectifs rencontrés dans le domaine de l’e-learning qui vont vous aider à définir les contenus et objectifs de vos vidéos.
5 types de contenus en e-learning (Clark et Mayer, 2008)
Clark et Mayer (2008) divisent les contenus pédagogiques en 5 catégories : les faits, les concepts, les processus, les procédures et les principes stratégiques.
Les faits, les concepts et les processus sont considérés comme des connaissances alors que les procédures et les principes stratégiques sont considérés comme des compétences (Clark & Kwinn, 2007).
Premièrement, les faits sont des informations spécifiques et uniques nécessaires pour réaliser une tâche (Clark & Kwinn, 2007). Par exemple, les noms des différents composants d’un ordinateur sont des faits.
Les concepts correspondent à des catégories d’objets ou de faits (Clark & Kwinn, 2007) ou à la connaissance de modèles, principes, catégories ou schémas (Mayer, 2010). Par exemple, la catégorie ‘’personnages historiques’’ est un concept. Louis XIV est un fait. La connaissance du fonctionnement du cœur est un concept (Mayer, 2010).
Un processus est un ensemble d’événements ou d’activités qui impliquent différentes personnes, éléments, équipements. Par exemple, le processus de recrutement d’un employé demande la participation d’employés des ressources humaines qui vont distribuer l’offre d’emploi, et des superviseurs qui vont faire des entretiens avec les postulants et embaucher l’un d’entre eux (Clark & Kwinn, 2007).
Une procédure est un ensemble d’actions qui s’effectuent pas à pas et qui permettent la réalisation d’une tâche (Clark et Mayer, 2008). Par exemple, insérer une image dans un document Word est une procédure qui suit un ensemble d’actions qui sont toujours les mêmes peu importe le jour et l’heure.
Un principe stratégique permet la réalisation d’une tâche à l’aide de lignes directrices (Clark & Mayer, 2008). Par exemple, une classe d’élèves à qui on aura demandé de créer un site internet recevra les mêmes lignes directrices, mais ne réalisera pas le site de la même manière et n’arrivera pas au même résultat.
Type de contenu | Définition | Exemple |
Fait | Donnée ou exemple spécifique et unique | Symboles d’opérateurs pour les formules Excel |
Concept | Catégorie qui contient plusieurs exemples | Formules Excel |
Processus | Flux d’événements ou d’activités | Comment les feuilles de calculs fonctionnent |
Procédure | Tâche réalisée avec des actions pas-à-pas | Comment entrer une formule dans une feuille de calcul |
Principe stratégique | Tâche réalisée en proposant des lignes directrices | Comment faire une projection financière avec une feuille de calcul |
2 objectifs en e-learning (Clark et Mayer, 2008)
Selon Clark et Mayer (2008), les leçons e-learning servent en général deux objectifs : informer (‘’inform’’) et exécuter (‘’perform’’).
Le premier objectif, informer, a pour but la transmission d’informations, l’acquisition de nouvelles connaissances pour l’apprenant. Par exemple, un élève à l’école primaire suit un cours d’Histoire sur la révolution industrielle française. Il acquiert de nouvelles connaissances sur ce sujet.
Le deuxième objectif, exécuter, se décline en deux sous-objectifs : exécuter une procédure et exécuter un principe.
Lors de l’exécution d’une procédure, l’objectif est de travailler des compétences procédurales, c’est-à-dire des compétences pour la réalisation de procédures. Ce sous-objectif est assimilé à ce que l’on appelle le « transfert proche », c’est-à-dire que la procédure enseignée doit être très proche, voire identique, à la procédure que doit réaliser l’apprenant. Par exemple, un apprenant doit savoir changer une police d’écriture dans Microsoft Word, ainsi l’enseignant lui montre pas à pas toutes les manipulations qu’il doit réaliser dans le logiciel pour y arriver.
Le deuxième sous-objectif, exécuter un principe vise à travailler des compétences stratégiques. Ceci est également appelé « transfert lointain ». Les compétences enseignées n’ont ainsi pas une seule procédure correcte, mais plusieurs procédures possibles qui doivent être flexibles. Ainsi, un apprenant peut apprendre une technique de vente, mais devra l’adapter en fonction du client qu’il a en face de lui.
Objectifs | Définition | Exemple |
Informer | Leçon qui transmet de l’information |
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Exécuter une procédure | Leçon qui travaille des compétences procédurales (= transfert proche) |
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Exécuter un principe | Leçon qui travaille les compétences stratégiques (= transfert lointain) |
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Recommandations sur le contenu
Maintenant que vous avez défini l’objectif pédagogique de votre vidéo, vous pouvez choisir et préparer le contenu de votre vidéo. Voici donc une série de conseils retrouvés dans la littérature scientifique en e-learning et en vidéo pédagogique pour vous aider dans cette tâche.
Choix des contenus
Avant même de choisir votre contenu, il y a deux points importants à définir car ils vont orienter le contenu de votre vidéo et sa forme. Ainsi, il vous faut commencer par définir votre public cible. Il est certain que vous n’expliquerez pas le système nerveux humain de la même manière à des enfants de 10 ans qu’à des futurs bacheliers. Vous devez adapter vos explications et votre vocabulaire à votre public cible et à ses connaissances préalables (Thiery, 2004).
Ensuite, il vous faut choisir le cadre dans lequel vous prévoyez de diffuser votre vidéo. La regarderez-vous en classe avec vos élèves à l’aide d’un projecteur ? La laisserez-vous en libre accès sur une plateforme de distribution ? Est-ce que vous créez une vidéo pour une formation e-learning ? Un MOOC ?
Une fois que vous avez bien défini les conditions d’utilisation de votre vidéo, vous pouvez enfin sélectionner les contenus que vous souhaitez enseigner à travers votre vidéo. Choisissez donc votre thématique et les concepts à enseigner.
Si vous prévoyez d’utiliser la vidéo dans le cadre d’une classe traditionnelle ou une classe inversée, Awad, Brouillette, Cormier et Turcotte (2017) proposent d’utiliser les vidéos plutôt pour des contenus d’introduction à un concept ou pour présenter des procédures, des graphiques, des calculs. Dans le cadre de leurs classes inversées, ces enseignants préfèrent garder les concepts les plus complexes pour les cours en présentiel. Il est également possible d’utiliser la vidéo comme résumé ou conclusion d’un cours, pour répondre aux dernières questions d’un cours ou ouvrir vers le prochain sujet (Awad, Brouillette, Cormier et Turcotte, 2017).
Pour récapituler :
- Définir votre public cible
- Définir le cadre d’utilisation de votre vidéo
Préparation des contenus
Passons maintenant à la préparation des contenus. A cette étape, vous pouvez préparer l’ensemble des concepts, explications, schémas, graphiques, calculs, procédure, expériences scientifiques etc. dont vous aurez besoin pour produire une vidéo explicative la plus efficace possible.
Awad, Brouillette, Cormier et Turcotte (2017) expliquent qu’une bonne préparation des contenus permet d’éviter des répétitions inutiles dans la vidéo. Ce point est particulièrement important car cela permet de réaliser des vidéos plus courtes.
Thiery (2014) propose également de faire relire ses explications à un proche ou un collègue pour s’assurer de la clarté de ses explications. Globalement, vous pouvez discuter et faire lire la scénarisation de votre vidéo pour vous donner un point de vue externe et vous assurer de la qualité de votre vidéo.
Voici donc, dans les paragraphes suivants, une série de recommandations. Une partie de ces recommandations a été émise à partir de principes créés par Clark et Mayer (2008), dont le but initial est de fournir un support pour la création de cours e-learning. Nous avons repris ces principes et les avons adaptés à la création de vidéos.
Illustration de cette recommandation en vidéo :http://vizia.co/videos/71f0267db00526d706a5bd/share
Utiliser des mots et des images, mais pas n’importe quelles images
La première recommandation tirée du principe multimédiade Clark et Mayer (2008) est que vous devez préparer votre contenu sous forme de matériel verbal (écrit ou oral) et de matériel visuel (images, illustrations, schémas, graphiques, animations, etc.). Pour ces deux auteurs, toute leçon e-learning doit contenir à la fois des mots et des images, plutôt qu’uniquement des mots.
Nous parlons ici de vidéos, imaginez une vidéo contenant uniquement du texte écrit ou du texte oral. Cette vidéo ne serait pas très engageante. C’est pourquoi il est important pour vous de préparer un matériel pédagogique multimédia (mots et images).
Le raisonnement derrière cette recommandation est que les apprenants sont plus à même de s’engager dans un apprentissage actif lorsque le matériel à apprendre est présenté sous forme multimédia (texte et image) (Clark et Mayer, 2011). Une part importante du traitement actif est de construire mentalement des représentations verbales et picturales du matériel et de les connecter. Ceci est plus facile à atteindre lorsque le matériel est présenté à la fois verbalement et picturalement, avec des images et des textes qui expliquent le même contenu (Clark et Mayer, 2011).
McCrudden, Schraw et Lehman, (2009) ont constasté dans leur étude que les apprenants qui avaient étudié un texte accompagné d’un diagramme ou d’une liste d’étapes avaient de meilleures performances aux tests de rappels et de transfert que les apprenants qui avaient étudié uniquement le texte plusieurs fois.
Toutefois, autant Clark et Mayer (2008) recommandent l’utilisation de certains types de supports picturaux, autant ils déconseillent l’utilisation d’images purement décoratives et représentatives. Le tableau ci-dessous décrit les différents types d’images identifiés par Clark et Mayer (2008) et indique les recommandations associées à ces types d’images.
Type de graphique | Description | Exemple | Recommandations et utilité |
Décoratif | Images ajoutées pour des raisons esthétiques ou humoristiques | Image d’une personne sur un vélo dans une leçon sur comment changer une chambre à air | À minimiser |
Représentatif | Images qui illustrent l’apparence d’un objet unique | Une photo d’un équipement
Une capture d’écran d’un logiciel |
À minimiser |
Organisationnel | Images qui montrent les relations qualitatives entre les contenus | Une matrice/tableau
Une carte conceptuelle |
À intégrer
Aide à organiser le matériel |
Relationnel | Images qui résument les relations quantitatives | Un graphique en barres
Une carte avec des cercles de différentes tailles représentations des tremblements de terre |
À intégrer
Aide à comprendre/organiser le matériel |
Transformationnel | Images qui illustrent les changements dans le temps ou l’espace | Une animation montrant une procédure informatique
Une vidéo de l’éruption d’un volcan |
À intégrer
Aide à comprendre le matériel |
Interprétatif | Images qui rendent des phénomènes intangibles visibles et concrets | Dessins de structures moléculaires. | À intégrer
Aide à comprendre le matériel |
Clark et Mayer (2008) font également des propositions de types de graphiques à utiliser en fonction du type de contenu (décrit dans le tableau ci-dessous).
Type de contenu | Description | Recommandation de type de graphique | Exemple |
Fait | Information unique et isolée telle que des écrans de logiciels, des formulaires, des données | Représentatif
Organisationnel |
Capture d’écran d’un formulaire Excel |
Concept | Groupes d’objets, événements ou symboles désignés par un seul nom | Représentatif
Organisationnel Interprétatif |
Diagramme d’une base de données |
Processus | La description de comment fonctionne quelque chose | Transformationnel
Interprétatif Relationnel |
Animation du fonctionnement du cœur |
Procédure | Une série d’actions résultant en la complétion d’une tâche | Transformationnel | Animation sur comment utiliser une feuille Excel |
Principes | Lignes directrices qui résulte en la complétion d’une tâche ; relations cause-effets | Transformationnel
Interprétatif |
Vidéo de deux techniques de vente commerciale |
L’idée de ce principe multimédia est de privilégier un matériel pédagogique multimédia, en mots et en images, tout en vérifiant que les images sélectionnées participent à l’apprentissage et ne soient pas juste de la décoration.
Sélectionner uniquement du matériel utile pour l’apprentissage
Une deuxième recommandation est celle de sélectionner uniquement du matériel qui est utile pour la compréhension et l’apprentissage.
Clark et Mayer (2008) en parle dans leur principe de cohérence dans lequel ils préconisent d’éviter le matériel pédagogique qui, même s’il est intéressant, n’est pas essentiel pour la leçon en cours (“Adding interesting material can hurt learning”).
Ainsi, ils proposent d’éviter d’ajouter des sons et des musiques inutiles qui pourrait attirer l’attention de l’apprenant et entrer en compétition dans le canal auditif (du modèle cognitif de l’apprentissage multimédia).
Clark et Mayer (2008) proposent également d’éviter les images sans utilité qui peuvent interférer de 3 manières :
- Distraction : l’image inutile attire l’attention de l’apprenant loin du matériel pédagogique à étudier
- Perturbation : l’image inutile empêche l’apprenant de construire des liens appropriés dans le matériel pédagogique car l’image non pertinente perturbe le traitement des informations.
- Séduction : l’image amorce des connaissances non pertinentes qui sont ensuite intégrées sans raisons dans le matériel d’apprentissage
Finalement, dans la même logique, Clark et Mayer (2008) suggèrent d’éviter l’ajout de textes inutiles qui ont pour but d’éveiller l’intérêt de l’apprenant sans participer à l’apprentissage.
Thiery (2014) propose des recommandations similaires qu’elle résume par « rester sobre ». En effet, elle explique que l’on a tendance à vouloir faire de magnifiques dessins et graphiques, mais ceux-ci noient le cerveau. Ainsi, il faut rester sobre et proposer des dessins qui servent uniquement aux explications. Elle suggère également de rester synthétique et concis dans ses explications, d’éviter les messages superflus, ainsi que les musiques qui ne servent à rien.
Illustration de cette recommandation en vidéo :http://vizia.co/videos/ff17c3efd223c969a44876/share
Inclure des exemples et exercices
Pour finir avec la préparation du contenu de votre vidéo, n’hésitez pas à ajouter des exemples et des exercices pratiques.
En effet, plusieurs études ont montré l’utilité des exemples dans un apprentissage. Zhu et Simon (1987) ont montré que des élèves arrivaient à comprendre, mémoriser et tirer des règles et procédures mathématiques à partir d’exemple travaillés sans avoir reçu de leçon théorique au préalable. De plus, LeFevre et Dixon (1986) ont montré que des apprenants privilégient les exemples pour apprendre lorsqu’ils ont des instructions écrites et des exemples à disposition.
C’est pourquoi Clark et Mayer (2008) proposent d’intégrer des exemples travaillés dans les cours e-learning. Les exemples travaillés sont des démonstrations qui indiquent pas à pas toutes les étapes d’une procédure pour réaliser une tâche ou résoudre un problème. Vous pouvez placer des questions de réflexion dans vos exemples pour stimuler la réflexion de vos apprenants. De plus, il est important d’inclure des explications à vos exemples.
Comme Clark et Mayer (2008) l’expliquent, vous pouvez progressivement transiter des exemples travaillés vers des exercices en diminuant la quantité d’explications accompagnant l’exemple et en proposant à l’apprenant à réaliser petit à petit des tâches.
Figure 1Schéma de la progression entre un exemple travaillé et un exercice (repris et adapté de Clark et Mayer (2008)
Pour Van de Meij et Van de Meij (2013), les exercices et la pratique sont particulièrement importants pour consolider et améliorer l’apprentissage. Dans leur domaine de création de vidéos pédagogiques pour l’apprentissage de logiciels informatiques, il leur est important de proposer des exercices pratiques avec des conditions de début et des objectifs de fin clairs.
Recommandations pour la création de la vidéo
Après avoir sélectionné et préparé les contenus de votre vidéo, vous pouvez maintenant vous attaquer à sa création. Avant de vous lancer dans le tournage et le montage, il vous est indispensable de scénariser votre vidéo, c’est-à-dire, réfléchir à l’ordre dans lequel vous allez montrer vos contenus, comment, avec quel style de vidéo, quels effets et ainsi de suite. Voici donc les recommandations trouvées dans la littérature à la fois sur la scénarisation d’une vidéo et sur sa réalisation.
Quelques conseils généraux
Pour commencer, voici quelques recommandations d’ordre général, à garder en tête lors de vos réflexions sur la création de votre vidéo. Ceux-ci ont pour but de vous aider à vous orienter dans la scénarisation globale de votre vidéo.
Pour commencer, n’hésitez pas à réfléchir à un scénario un peu moins traditionnel qui puisse surprendre vos spectateurs. Thiery (2014) propose cette recommandation du scénario surprenant dans le but de stimuler la curiosité des apprenants. Par exemple, imaginez faire de la prévention contre les Accidents Vasculaires Cérébraux en chanson comme dans cette vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=MDyTqlvbnQI
Les vidéos doivent durer environ 5 minutes.
Un des premiers points à considérer lors de la création de la vidéo est sa longueur. Plus une vidéo est longue, moins les apprenants vont la regarder, moins longtemps et avec de moins en moins d’attention. Awad, Brouillette, Cormier et Turcotte (2017) préconisent de faire des vidéos de 5 minutes, maximum 10 minutes pour les sujets les plus complexes. Il ne faut pas hésiter à faire plusieurs vidéos si votre contenu dépasse ces 10 minutes.
Guo, Kim et Rubin (2014) confirment cette recommandation. Dans leur étude, ils ont remarqué que plus la vidéo était longue, moins le temps de visionnement des apprenants est long. Ils préconisent une durée 6 à 9 minutes maximum pour les vidéos pédagogiques.
Plusieurs styles de vidéos possibles
Il existe une diversité de styles pour présenter une information en vidéo. Ce style dépend essentiellement de vos envies, du contenu enseigné et des moyens à votre disposition. Awad, Brouillette, Cormier et Turcotte (2017) recommandent de varier les styles. N’hésitez donc pas à sélectionner le style qui vous parait le plus adapté à l’information que vous voulez enseigner et à varier le style au sein de la même vidéo. Gardez toujours en tête qu’il est important de créer la vidéo pour correspondre au contexte dans lequel elle sera visionnée (Brame, 2016).
Voici quelques types de vidéos possibles accompagnés d’exemples (inspiré de Awad, Brouillette, Cormier, & Turcotte, 2017) :
Nom | Description | Exemple |
Capture d’écran avec voix-off | Il s’agit de capturer l’écran de votre ordinateur, puis d’enregistrer votre voix en train d’expliquer ce qui s’affiche à l’écran | Tutoriel d’utilisation d’un logiciel informatique |
Présentation à diapositives | Il s’agit d’enregistrer vos explications et vos diapositives. | Présentation Powerpoint sur l’origine de la psychanalyse |
Animation type Khan Academy | Il s’agit d’enregistrer la numérisation en direct d’une écriture manuelle.
Selon Guo, Kim et Rubin (2014), ce style Khan Academy est très utile pour les résolutions de problème, il est plus engageant que le style PowerPoint. |
La Khan academy est spécialiste dans ce style de vidéos. |
« Le bras devant le tableau blanc » | Il s’agit de placer la caméra de façon à filmer ses mains et une feuille/ardoise/tableau en train de réaliser des animations/dessins/écrits manuscrits qui illustrent les explications orales. | Cours sur la couleur : Comment fabriquer des Violets |
Se filmer devant le tableau blanc | Il s’agit de filmer un ou plusieurs enseignants debout en train de donner des explications sur un tableau. | La quantité de matière en mole - Les Bons Profs |
Se filmer en laboratoire | Ce style plutôt pour les thématiques scientifiques consiste à filmer des expériences chimiques, physiques etc en laboratoire. | Chimie amusante : Expérience du dentifrice de l'éléphant |
Filmer des enseignants donner un cours | Il s’agit de filmer un enseignant en train de donner un cours devant un auditoire. La vidéo sera alors une rediffusion du cours.
Selon Brame (2015), ce style de vidéo est assez peu engageant, surtout lorsqu’un tel cours est repris et découpé pour correspondre à des vidéos pour un MOOC. |
Rediffusion d’une conférence : Apprendre à gérer les conflits par Katia Casteil |
Animation | Il s’agit de créer avec ses moyens et connaissances une animation correspondant aux explications orales.
Brame (2015) préconise, lorsqu’il y a un récit, de montrer des animations correspondant au récit. |
L’exemple montré ici présente une animation réalisée avec des moyens et certainement un travail professionnel. |
Finalement, Guo, Kim et Rubin (2014) suggèrent que l’idée est qu’une vidéo est plus engageante lorsqu’il y a un flot continu de mouvement à l’écran. Prenez l’exemple cité auparavant de la musique de prévention contre les AVC dans laquelle il y a constamment du mouvement à l’écran.
Varier les angles de caméra
Insérer des extraits vidéos de différents angles de vue peut favoriser un apprentissage plus profond.
En effet, Boucheix, Gauthier, Fontaine et Jaffeux (2018) ont montré grâce à leur étude qu’une procédure médicale enseignée à l’aide d’une vidéo utilisant des angles de caméra mixtes est mieux maîtrisée que lorsqu’elle est enseignée à l’aide d’une vidéo n’utilisant qu’un seul angle de caméra (angle « face à face »/vue à la 3e personne ou angle « par-dessus l’épaule »/vue à la première personne). Ils ont toutefois constaté que l’angle de vue à la première personne (« par-dessus l’épaule ») est particulièrement adaptée à l’enseignement d’actions ou de gestes qui demande un point de vue focal et immobile sur une partie de l’action.
Ainsi, il vous est recommandé de varier les angles de vue en particulier lorsque vous enseignez une procédure. Privilégiez toutefois l’angle de vue à la première personne lorsque le geste que vous montrez demande plus particulièrement d’attention.
Dans leur cadre de l’enseignement de l’utilisation de logiciel informatiques, Van der Meij et Van der Meij (2013) recommandent de privilégier la vue sur ce que l’apprenant va voir lorsqu’il réalisera la tâche enseignée dans la vidéo. Ainsi, Van der Meij et Van der Meij (2013) recommandent de faire la démonstration de la tâche directement sur l’interface que les apprenants utiliseront.
Proposer des questions de guidage
Proposer des questions de guidage aux apprenants en accompagnement des vidéos promeut l’apprentissage actif. Il s’agit de fournir des questions qui guident les apprenants lors du visionnement de la vidéo pour les aider à traiter les informations et à contrôler leur compréhension.
Lawson, Bolde, Houlette et Haubner (2006, cités dans Brame, 2016) ont montré dans leur étude que les étudiants qui avaient reçu et tenté de répondre à des questions de guidage durant le visionnement d’une vidéo pédagogique démontraient de meilleures performances que ceux qui ont visionné la vidéo sans questions de guidage.
Ces questions peuvent servir de moyen implicite pour partager les objectifs d’apprentissage avec les étudiants et ainsi augmenter le traitement cognitif génératif et diminuer le traitement inutile en aidant les étudiants à se focaliser sur les éléments importants de la vidéo (Brame, 2016).
Intégrer des questions interactives
Brame (2016) recommande d’intégrer des questions interactives au sein des vidéos. Il s’agit de proposer des questions ou petites tâches durant, après ou entre des vidéos. Celles-ci ont pour but d’optimiser le traitement cognitif en diminuant la charge cognitive inutile et en améliorant la charge générative (Brame, 2016).
Szpunar et Schacter (2013) ont montré que le simple fait d’ajouter des petits tests de mémorisation entre des leçons vidéo permet de réduire les errances mentales (‘’mind wandering’’), favorise la prise de notes et améliore l’apprentissage.
Par ailleurs, Vural (2013) a montré que les étudiants ayant visionné des vidéos intégrant des questions à choix multiples ont de meilleures performances aux tests d’évaluation que les étudiants n’ayant visionné que les vidéos sans les questions. Ainsi les questions intégrées à la vidéo favorisent l’apprentissage.
Voici quelques plateformes qui permettent actuellement d’intégrer facilement des questions durant les vidéos.
- Vizia (gratuit)
- H5p (payant, 30 jours d’essais)
- Moocnotes
- HapYak
- iVideo.education
- Etc.
Scénarisation de la vidéo
Il est important de construire le scénario de votre vidéo, par ex, avec un storyboard. Certes, cela prend du temps, mais c’est du temps qui est gagné lors du tournage et du montage de votre vidéo (Awad,Brouillette, Cormier, & Turcotte, 2017).
Voici donc quelques recommandations à garder à l’esprit lors de la scénarisation de votre vidéo.
Segmenter une leçon complexe en morceaux plus abordables
Cette recommandation est basée sur le principe de segmentationintroduit par Clark et Mayer (2008). Ce principe consiste à réduire la difficulté d’une leçon en morcelant le contenu à enseigner. Par exemple, il est possible de réduire une grosse procédure en morceaux de 2-3 étapes plus simples à aborder (Clark & Mayer, 2008). Dans le cas de la création de vidéos, il s’agit de créer plusieurs vidéos abordant chacune un aspect du concept abordé ou plusieurs vidéos présentant des étapes ou des ensembles d’étapes d’une longue procédure.
Le raisonnement derrière cette recommandation est qu’une présentation continue d’un ensemble de concepts inter-reliés peut surcharger le système cognitif d’un apprenant car cela demande beaucoup de traitement cognitif essentiel. Segmenter le contenu d’une leçon permet alors de diminuer la charge cognitive globale et de laisser le rythme d’apprentissage plus libre (Clark & Mayer, 2008). L’apprenant a alors plus de contrôle sur le déroulement de la leçon car il peut s’assurer d’avoir entièrement compris un segment avant de passer au suivant (Fiorella & Mayer, 2018). L’apprenant peut ainsi contrôler sa charge cognitive intrinsèque et augmenter sa charge générative en considérant la structure des informations (Brame, 2016).
Mayer, Dow et Mayer (2003, cité dans Clark et Mayer (2008) ont remarqué que des apprenants avaient des meilleures performances sur des tests de transfert en visionnant une animation, sur le fonctionnement d’un moteur électrique, segmentée en plusieurs parties que en visionnant la même animation en continu.
S’assurer que les apprenants connaissent les concepts-clés du thème de la vidéo
Cette recommandation se base sur le principe de pré-entrainementde Clark et Mayer (2008). Ce principe consiste à apporter des connaissances de base en lien avec la vidéo d’apprentissage. Il s’agit de s’assurer au préalable que l’apprenant.e connaisse les noms et les caractéristiques des concepts-clés indispensables pour comprendre la leçon. Pour cela, il suffit de fournir un « pré-entrainement » sur le thème de la leçon (Clark & Mayer, 2008). Par exemple, avant de suivre une leçon sur le fonctionnement du système digestif, il est possible de fournir un pré-entraînement en rappelant le nom des organes impliqués et leur localisation.
Dans notre cas, il pourrait s’agir par exemple d’ajouter en introduction de la vidéo un schéma sur les organes du système digestif, ou une frise chronologique des moments clés du développement d’un enfant lors d’une leçon sur la théorie du développement psychosocial d’Erikson.
Le raisonnement derrière ce principe de pré-entraînement est similaire à celui du principe de segmentation. Un apprenant peut être surchargé cognitivement par la quantité d’informations à assimiler dans une leçon. Ainsi, dans les situations complexes, il est intéressant d’anticiper une partie du traitement cognitif en amorçant certains concepts à l’aide du pré-entrainement. Ceci aide l’apprenant à gérer son traitement cognitif essentiel.
Humaniser le discours en personnalisant la narration et en rendant le narrateur visible
Cette recommandation d’humaniser le discours est tirée principalement du principe de personnalisationde Clark et Mayer (2008). Ce principe se décompose en 3 points :
- Utiliser un style conversationnel plutôt qu’un style formel
- Utiliser des agents pédagogiques à l’écran pour promouvoir l’apprentissage
- Rendre l’auteur visible pour promouvoir l’apprentissage
Nous nous intéressons ici au premier et au dernier point. Nous reviendrons au 2e point dans une autre recommandation sur la réalisation de la vidéo.
Premièrement, Clark et Mayer (2008) recommandent d’utiliser un style conversationnel plutôt qu’un style formelpour toutes les explications de votre leçon (ici une vidéo). Un style conversationnel pour les textes écrits et oraux promeut l’apprentissage mieux qu’un style formel. Il ne faut donc pas hésiter à utiliser la première et la deuxième personne dans les textes oraux et écrits. Il est toutefois important de rester poli en évitant les ordres directs et faisant plutôt des propositions (par exemple : dire « vous pourriez utiliser la formule quadratique » plutôt que « utilisez la formule quadratique pour résoudre cette équation ») (Clark et Mayer, 2011).
Le raisonnement derrière ce point est qu’un apprenant va travailler plus dur pour apprendre s’il a l’impression d’être dans une conversation avec un.e partenaire que s’il reçoit simplement des informations (Clark et Mayer 2008).
Kartel (2010) confirme ce principe avec son étude durant laquelle il a constaté que des apprenants trouvaient le contenu informel plus intéressant, moins difficile à appréhender et sympathique que le contenu formel.
Il faut toutefois être attentif de ne pas surfaire la personnalisation du matériel. En effet, un excès de personnalisation peut distraire l’apprenant et donner un mauvais ton à l’apprentissage. Ainsi il faut personnaliser de façon à ce que l’apprenant ait l’impression d’interagir avec un partenaire de conversation, mais pas de manière trop informelle et que l’apprenant soit distrait (Clark et Mayer 2008).
Voici un exemple de discours formel et un exemple de discours informel (tiré et traduit de Clark et Mayer, 2008) :
Discours formel | Discours informel |
Les intérêts sont composés ou ajoutés mensuellement au solde de caisse existant. Pour divulgation sur les déclarations des clients, le rendement annuel en pourcentage est calculé comme suit. | Les clients vont régulièrement vous demander de leur expliquer comment le Pourcentage Annuel de Rendement (« Annual Percentage Yield ») a été calculé. Cela peut être compliqué, alors utilisons un exemple. |
Secondairement, Clark et Mayer (2008) recommandent de rendre l’auteur visible dans les textespour promouvoir l’apprentissage. Un auteur visible est un auteur qui révèle des informations à son propos et qui souligne ses points de vue à l’inverse d’un auteur invisible.
Rendre l’auteur visible a pour but de promouvoir la motivation de l’apprenant car il pourrait voir l’auteur comme un guide personnel. Cela promeut une relation « humain à humain » entre narrateur et apprenant. Cela amorce un sentiment de présence sociale, d’être dans une conversation avec le narrateur. Ceci encourage l’apprenant à s’engager dans un processus cognitif plus profond, et donc un meilleur apprentissage (Clark et Mayer 2008).
Paxton (2002) a montré que des apprenants qui ont lu le texte avec un auteur visible ont rédigé des textes plus longs, avec plus de sensibilité à l’audience et plus d’avis personnels que les apprenants qui ont lu le texte avec un auteur invisible.
De nouveau, il est important de doser les révélations et remarques de l’auteur car un excès pourrait contredire le principe de cohérence, séduire et distraire l’apprenant (Clark et Mayer 2008).
Voici un exemple de discours dans lequel l’auteur est visible (tiré et traduit de Clark et Mayer, 2008) :
''Dans le cadre d’une leçon de statistiques sur les corrélations :
« Les corrélations ne sont pas une méthode magique pour identifier sans ambiguïté des causes. Considérons la relation entre mon âge et le prix de l’essence durant ces dix dernières années. La corrélation est presque parfaite, pourtant personne ne suggérerait la moindre causalité entre ces deux éléments. »''
Thiery (2014) parle d’humaniser le discours, notamment en racontant des histoires et en personnifiant les propos, par exemple en utilisant des petits personnages comme narrateurs.
Privilégier l’oral plutôt que l’écrit pour toutes vos explications
Cette recommandation se base sur le principe de modalité de Clark et Mayer (2008). D’après leurs recherches et la théorie cognitive de l’apprentissage multimédia, ils recommandent d’utiliser la modalité auditive pour tous les textes plutôt que de les afficher à l’écran, en particulier lorsqu’il y a une image et qu’elle est le sujet des textes. En simple, si vous voulez expliquer une image (photographie, graphique, schéma, animation etc.) à l’aide de mots, faites-en sorte de donner ces explications à l’oral (avec une voix-off dans le cas d’une vidéo) plutôt qu’à l’écrit.
Le raisonnement de ce principe est que, si vous présentez simultanément une image et ses explications à l’écrit, le canal visuel/pictural des apprenants va être surchargé par le traitement cognitif que demande à la fois l’image et les explications écrites. Ceci va être particulièrement problématique si la leçon ou la vidéo suit un rythme rapide. L’image et le texte écrit vont entrer en compétition pour les ressources limitées du canal visuel. De plus, selon Brame (2016), utiliser le canal approprié au type d’information à transmettre peut améliorer la charge cognitive générative.
Il existe bien entendu des exceptions à ce principe. Il ne faut pas hésiter à afficher le texte à l’écrit par exemple lorsqu’il y a du vocabulaire technique, inhabituel, lorsque vous expliquez une formule mathématique ou chimique. Vous pouvez également afficher les mots clés des étapes d’une procédure ou les consignes d’un exercice (Clark & Mayer, 2011).
Harskamp, Mayer et Suhre (2007) ont constaté dans une de leurs études que les élèves qui avaient étudié une leçon multimédia image+narration orale avaient de meilleures performances à un test de rétention que les élèves qui avaient étudié une leçon multimédia image+texte écrit.
Pour récapituler ce principe de modalité :
- Utiliser les deux canaux, auditif et visuel, pour transmettre du matériel pédagogique.
- Éviter de transmettre deux informations via le même canal (ex : texte écrit et image)
- Privilégier la transmission orale (voix-off) du matériel verbal
Expliquer vos images soit à l’oral, soit à l’écrit, mais pas les deux
Cette recommandation se base sur le principe de redondance de Clark et Mayer (2011). Ce principe qui se résume par « expliquez vos images soit à l’oral, soit à l’écrit, mais pas les deux » se décompose en deux points principaux :
- Ne pas ajouter de texte écrit au matériel visuel narré (images, graphiques etc.)
- N’utiliser du texte écrit pour compléter la voix-off que dans des situations spéciales (= quand il n’y a pas d’images)
Premièrement, évitez d’ajouter au texte écrit à des images narrées, c’est-à-dire à des images expliquées oralement. En effet, les apprenants pourraient avoir tendance à se concentrer sur le texte écrit au détriment du matériel visuel ou ils pourraient vouloir comparer le texte écrit aux explications orales entendues ce qui provoquerait du traitement cognitif inutile (Clark & Mayer, 2011).
Jamet et Le Bohec (2007) ont remarqué dans leur étude que l’étude de diagrammes accompagnés d’explications orales sans texte redondant écrit entraîne de meilleures performances que l’étude des mêmes diagrammes avec explications orales et présentation séquentielle ou simultanée de textes redondants avec les explications orales.
Secondairement, Clark et Mayer (2011) conseillent de n’ajouter du texte écrit à des narrations/voix-off que dans des situations particulières :
- Lorsqu’il n’y a pas de matériel pictural (images, graphiques, schémas etc.)
- Lorsqu’il y a largement l’opportunité de traiter le matériel pictural, par exemple lorsque le texte et l’image ne sont pas présentés simultanément ou que le rythme de présentation est suffisamment lent
- Lorsque l’apprenant doit faire plus d’efforts pour comprendre la narration orale que pour lire un texte (par exemple, des apprenants de langue maternelle étrangère, avec des troubles de l’apprentissage ou lorsque les explications contiennent du vocabulaire spécifique et complexe, non habituel)
- Lorsque vous ne présentez que quelques mots-clés à côté d’un matériel pictural (ceci revient au principe de signalement qui est présenté dans la prochaine recommandation)
Globalement, il ne faut mettre le texte écrit en plus de la narration orale que lorsque ce texte écrit ne surcharge pas la mémoire de travail ou lorsqu’il peut diminuer la charge cognitive.
Cette recommandation d’ajouter du texte uniquement dans des situations particulières a été ajoutée par Clark et Mayer (2011) suite à une étude Mayer et Johnson (2008) durant laquelle ils ont comparé les performances de deux groupes d’élèves. Le premier groupe a étudié une présentation sur la formation des éclairs sans texte écrit et avec des explications orales (groupe non-redondant) et le deuxième groupe a étudié la même présentation, mais avec quelques mots écrits identiques à ceux de la narration orale (groupe redondant). Il se trouve que le deuxième groupe (redondant) a eu de meilleures performances que le premier groupe (non-redondant) aux tests de rétention.
Réalisation de la vidéo
Mettre en évidence les éléments importants
Cette recommandation est plus généralement appelée « principe de signalement » (Mayer, 2010). L’idée est que les spectateurs apprennent mieux lorsque le matériel essentiel est mis en évidence, par exemple en l’entourant, en mettant des titres, des adverbes de liaison, des couleurs et ainsi de suite (Mayer, 2010). Brame (2016) propose par exemple d’afficher deux ou trois mots-clés, de changer une couleur ou un contraste, d’ajouter un symbole qui attire l’attention dans un coin de l’écran pour mettre en évidence les éléments importants.
Van der Meij et Van der Meij (2013) suggèrent, par exemple, de signaler le curseur de la souris, ajouter des cercles autour des éléments importants et mettre en lumière des caractéristiques.
Le raisonnement derrière cette recommandation est de réduire la charge cognitive inutile en aidant les apprenants novices à déterminer quels éléments d’un concept complexe sont importants et d’augmenter la charge cognitive générative en mettant l’accent sur l’organisation et les liens entre les informations.
Une méta-analyse de 103 études menée par Scheider, Beege, Nebel et Rey (2018) supporte le principe de signalement en constatant ses effets positifs sur la motivation et le temps d’apprentissage et une réduction de la charge cognitive.
Ozcelik, Karakus, Kursun et Cagiltay (2009) ont constaté dans leur étude que le codage en couleur de leçon multimédia améliore les performances de rétention et de transfert. Ils ont remarqué que l’amélioration de l’apprentissage grâce au codage couleur est lié à une meilleure efficacité dans la localisation des informations correspondantes entre illustration et texte. De plus, le codage couleur attire l’attention des apprenants vers les informations sallientes perceptuellement.
Figure 2 Schéma de neurotransmission contenant un codage couleur (tiré de Ozcelik, Karakus, Kursun & Cagiltay, 2009)
Vous pouvez donc utiliser de la couleur par exemple dans vos schémas pour mettre en évidence des éléments et leurs liens.
N’hésitez pas non plus à mettre en avant les relations dynamiques entre les différents éléments d’un schéma visuel, par exemple avec des flèches et des animations.
Thiery (2014) suggère d’ancrer les visuels, c’est-à-dire, de ne pas retirer de l’écran les éléments-clés qui permettent de faire des liens entre les différentes informations données. Elle justifie cette recommandations en explicant que le cerveau a une capacité limitée et oublie au fur et à mesure. Ainsi, avoir constament un rappel des éléments principaux permet de se situer dans la leçon et de faire des liens entre les différents éléments appris. Par exemple, si vous expliquez une procédure dans un ordre chronologique, n’hésitez pas à laiser dans un coin de l’écran de le nom de l’étape actuelle et pourquoi pas une petite frise chronologique avec les étapes précédentes et suivantes.
Illustration de cette recommandation en vidéo : http://vizia.co/videos/1401c35d1786260dba4a4a/share
Placer les mots près des images correspondantes
Cette recommandation est inspirée du principe de contiguïté de Clark et Mayer (2011). Ils recommandent en effet, de toujours placer les mots près des images correspondantes, contiguës spatialement. Ainsi, les mots doivent être placés à côté des parties d’une image ou d’une représentation picturale qu’ils désignent.
Par exemple, si vous réalisez un graphique, placez donc les étiquettes des différents secteurs à côté des secteurs qu’ils désignent plutôt que dans une légende en bas du graphique. Voyez les figures ci-dessous.
Figure 3Graphique ne suivant pas le principe de contiguïté spatiale
Figure 4Graphique suivant le principe de contiguïté spatiale
Ce principe consiste également à garder le plus possible les informations qui vont ensemble sur le même écran. Par exemple, évitez d’afficher une réponse sur un nouveau plan, sans afficher la question elle-même (Clark & Mayer, 2011).
Si vous souhaitez afficher du texte en même temps qu’une animation (bien que cela soit déconseillé), faites-en sorte que l’animation de l’affichage du texte soit finie et le texte lu avant que l’animation se mette en route. L’apprenant ne peut pas regarder le texte et l’animation en même temps (Clark & Mayer, 2011).
Le principe de contiguïté spatiale a pour but de diminuer le plus possible le traitement cognitif inutile qui pourrait être engendré par la distance entre l’image et le texte (Clark & Mayer, 2011). En effet, si les informations picturales et verbales sont éloignées les unes des autres, l’apprenant doit utiliser plus de ressources cognitives pour les intégrer ensemble. Lorsqu’elles sont contiguës spatialement, l’effort d’intégration est moins demandant en ressources cognitives et laisse des ressources cognitives pour la création de sens et de liens significatifs qui sont la base d’un apprentissage significatif.
Des études utilisant un eye-tracker (ou oculomètre permettant la mesure des mouvements occulaires sur un écran) ont montré que les apprenants ont tendance à lire une partie de texte, puis à chercher dans le diagramme l’objet décrit dans le texte, puis à retourner lire le texte, puis à retourner chercher dans le diagramme le deuxième objet décrit dans le texte et ainsi de suite (Hegarty, Carpenter, & Just, 1996; Schmidt-Weigand, Kohnert, & Glowalla, 2010, cités dans Clark & Mayer, 2011). Il semble ainsi logique de diminuer ce processus en morcelant le texte et en plaçant chaque segment près de la partie correspondante dans le graphique.
Synchroniser les explications orales avec les images
Cette recommandation est également issue du principe de contiguïté de Clark et Mayer (2011). Ils recommandent de synchroniser les explications orales avec le matériel pictural correspondant. Ainsi, il faut présenter les explications et les images/graphiques/etc. en même temps.
Par exemple, si vous présentez une procédure, il est important de diffuser l’explication de l’étape x en même temps que l’animation de l’étape x.
Le raisonnement de ce principe de contiguïté temporelle est que si vous présentez par exemple des explications avant de monter le graphique, l’apprenant doit maintenir en mémoire de travail les explications le temps de voir de voir le graphique, ce qui crée une forme de traitement cognitive inutile. Lorsque explication et animation sont synchronisées, l’apprenant peut se former des connexions mentales entre explications et images plus facilement (Clark & Mayer, 2011).
Cette recommandation est également proposée par Van der Meij et Van der Meij (2013) dans leur cadre de vidéos tutoriels pour l’utilisation de logiciels informatiques.
Une méta-analyse de Ginns (2006) confirme les bénéfices de la contiguïté temporelle et de la contiguïté spatiale sur l’apprentissage.
Parler normalement et avec enthousiasme, dans un environnement informel
Par rapport à la voix-off de votre vidéo, Clark et Mayer (2011) recommandent d’utiliser une voix humaine plutôt qu’une voix synthétisée par une machine. C’est ce que Mayer (2010) appelle le principe de la voix. Cette recommandation est appuyée par plusieurs études dont celle de Atkinson, Mayer et Merrill (2005) qui ont constaté que des apprenants étudiant une leçon narrée par un perroquet avec une voix humaine ont de meilleures performances à des tests de rétention et de transfer que des apprenants étudiant la même leçon narrée par le même perroquet mais avec une voix créée par ordinateur.
Concernant le narrateur de votre vidéo, Guo, Kim et Rubin (2014) recommandent de parler normalement, avec son rythme habituel tout en faisant ressortir son enthousiasme et de ne surtout pas se forcer à ralentir son débit de parole pour la vidéo. En effet, ils ont remarqué dans leur étude (2014) que les vidéos dans lesquelles les instructeurs parlent relativement rapidement et avec enthousiasme sont plus engageantes pour les apprenants.
Guo, Kim et Rubin (2014) ont également constaté que l’affichage régulier du visage de l’orateur ou du narrateur avaient tendance à améliorer l’engagement des apprenants dans la vidéo. Ainsi, ils recommandent d’afficher de temps en temps, à des moments que vous jugerez opportuns, le visage de l’instructeur à l’écran. Les producteurs de vidéos pour la plateforme Edx avec lesquels Guo, Kim et Rubin (2014) ont discuté, expliquent notamment qu’ils ont l’impression qu’afficher le visage de l’instructeur donne un sentiment plus personnel et intime au spectateur et que cela casse la monotonie des présentations de diapositives ou des captures d’écran.
Par ailleurs, Guo, Kim et Rubin (2014) ont remarqué que les vidéos filmées dans des endroits informels, plus personnels étaient plus engageantes pour les apprenants que les vidéos filmées dans des studios professionnels. Les enseignants dans leur milieu habituel informel avaient l’air plus à l’aise et faisaient plus de contacts visuels avec la caméra que les enseignants dans le studio professionnel. Ainsi, si vous décidez de vous filmer, Guo, Kim et Rubin (2014) vous recommandent de vous placer dans un milieu familier et informel.
Si vous ne souhaitez pas apparaitre sur votre vidéo, vous pouvez simplement ne pas vous filmer et ne rien mettre à la place ou vous pouvez utiliser un agent pédagogique à l’écran. Les agents pédagogiques sont les petits personnages qui s’affichent à l’écran et dont le but est de guider l’apprenant durant une leçon. Cela peut être des personnages humains, des personnages de cartoon voire des avatars en réalité virtuelle. Clark et Mayer (2011) recommandent l’utilisation d’agents pédagogiques (humains ou pas) dont les paroles orales (plutôt que écrites à l’écran) sont d’un ton conversationnel (plutôt que formel) avec une voix humaine et des gestes humanoïdes. Vous pouvez utiliser cet agent pédagogique pour transmettre des indices, des consignes, des exercices, des démonstrations. Attention toutefois à ne pas surfaire cet agent pédagogique car il pourrait rentrer en contradiction avec le principe de cohérence de Clark et Mayer (2008) qui préconise de ne présenter que le matériel utile à l’apprentissage. Ceci résume le point que nous n’avions pas abordé du principe de personnalisation de Clark et Mayer (2011).
Pour récapituler :
- Pour faire la narration orale, utiliser une voix humaine plutôt qu’une voix synthétisée par ordinateur
- Parler normalement et avec enthousiasme, sans ralentir volontairement le débit de parole
- Afficher, si possible et à des moments opportuns, le visage du narrateur
- Filmer le narrateur dans un cadre informel et plus personnel
- Sinon, utiliser un agent pédagogique, un personnage, pour remplacer le narrateur, tout en suivant tous les recommandations données au narrateurs
Tournage/montage de la vidéo
Voici maintenant quelques liens qui pourraient vous être utiles lors du tournage et du montage de votre vidéo.
Quelques sites pour créer des vidéos animées facilement :
Recommandations pour la diffusion de la vidéo
Maintenant que votre vidéo est prête, il est temps de la mettre à disposition de vos élèves ou vos apprenants. Voici quelques recommandations sur la diffusion de votre vidéo.
Laisser le contrôle de la vidéo aux apprenants
Premièrement, il est indispensable d’utiliser une plateforme qui laisse la liberté à vos apprenants de manipuler la vidéo, c’est ce que l’on appelle le ‘’user control’’ en anglais . Il est important de leur laisser la possibilité de mettre la vidéo sur pause, de revenir en arrière ou d’accélérer la vidéo. L’idéal serait que les apprenants puissent également faire des annotations sur les vidéos.
Certains auteurs suggèrent même d’utiliser un système qui permet la création de chapitre (tel que HapYak, https://corp.hapyak.com) dans votre vidéo (Zhang et al., 2015 cités dans Brame 2015). Ceci permet de structurer votre vidéo et de permettre un accès rapide à des parties de votre vidéo que vos apprenants pourraient vouloir revoir.
Choix du titre
Ensuite, Thiery (2014) propose de stimuler la curiosité de vos apprenants en donnant à votre vidéo un titre particulier, qui intrigue. Pour cela, elle propose la technique du vidéaste Vsauce qui nomme régulièrement ses vidéos, postées sur Youtube, par des questions surprenantes, par exemple, « de quelle couleur est un miroir ? ».
A l’inverse, Van der Meij et Van der Meij (2013) préconisent de donner un titre précis à votre vidéo, un titre qui désigne concrètement ce qui est enseigné, avec un verbe et un sujet. Le jargon spécifique devrait être évité le plus possible dans le titre. La recommandation de Van der Meij et Van der Meij (2013) s’intègre dans une recommandation plus large de fournir un accès simple à la vidéo, de la rendre facile à trouver.
Au final, le choix du titre doit se faire en fonction de vos préférences personnelles, de votre public cible et du contenu de votre vidéo. Si vous placez votre vidéo en libre accès sur internet, un titre précis aidera des utilisateurs à trouver votre vidéo et à savoir si votre vidéo correspond à leur attentes. Si vous destinez votre vidéo à des apprenants que vous savez peu motivés, un titre surprenant pourrait les intriguer et les stimuler.
Contextualiser la vidéo
Cette dernière recommandation dépend beaucoup du cadre dans lequel vous comptez diffuser votre vidéo. Si votre vidéo rentre dans le cadre d’un cours que vous la diffusez par exemple durant une leçon ou que vous demandez à vos élèves de la visionner à distance, il est important de contextualiser la vidéo et de souligner sa pertinence au regard de la leçon dans laquelle elle s’intègre. Pour cela, n’hésitez pas à faire un petit discours ou un paragraphe d’introduction à lire avant de visionner la vidéo. Ceci est d’autant plus vrai si vous reprenez une vidéo qui avait été conçue pour un autre cours ou un autre contexte. Ceci va donner l’impression aux apprenants que la vidéo leur est précisément destinée et ceci devrait améliorer leur engagement (Brame, 2016).
Pour récapituler :
- Choisir une plateforme de distribution de vidéo qui permet aux apprenants de manipuler la vidéo
- Donner un titre stimulant à votre vidéo ou un titre précis selon le contexte de votre vidéo et vos préférences personnelles
- Contextualiser la vidéo au regard de la leçon dans laquelle elle s’intègre
Exemple de la réalisation d’une vidéo
L’ensemble du processus de scénarisation et de création de cette vidéo d’illustration du principe multimédia a été documenté dans cette page.
Checklist
Une checklist a été rédigée pour vous guider durant la réalisation de vos vidéos. N’hésitez pas à vous en servir pour vérifier si vous avez suivi les recommandations présentées ci-dessus.
Bibliographie
Atkinson, R. K., Mayer, R. E., & Merrill, M. M. (2005). Fostering social agency in multimedia learning: Examining the impact of an animated agent's voice. Contemporary Educational Psychology, 30, 117–139.
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Boucheix, J.-M., Gauthier, P., Fontaine, J.-B., & Jaffeux, S. (2018). Mixed camera viewpoints improve learning medical hand procedure from video in nurse training? Computers in Human Behavior, 89, 418-429.
Boucheix, J.-M., Lowe, R. K., Putri, D. K., & Groff, J. (2013). Cueing animations: Dynamics signaling aids information extraction and comprehension. Learning and Instruction, 25, 71-84.
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