« Jugement et prise de décision » : différence entre les versions
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Version du 3 juillet 2013 à 15:29
Introduction
Dans notre vie quotidienne, nous sommes amenés à porter des jugements et, éventuellement, à prendre des décisions. Comme nous allons le voir, le jugement est rarement porté de manière rationnelle. La prise de décision qui découle du jugement, non plus. Cette dernière se différencie du jugement dans la mesure où elle implique une action consécutive à un jugement. Les modèles existants concernant la prise de décison sont relativement peu nombreux et, à notre sens, encore insuffisamment développés. Ainsi, le modèle de la prise de décision basée sur l’utilité, en provenance directe de l’économie, doit être considéré avec précaution. en effet, ce modèle part du principe que rationalité et quantité d’argent reçue sont une seule et même chose ce qui paraît difficilement justifiable d’un point de vue psychologique. Néanmoins, ce modèle, que nous verrons plus loin, comporte certains aspects intéressants qui méritent d’être connus.
Jugement
Heuristiques
Les heuristiques de jugement, sont des opérations mentales automatiques, intuitives et rapides pouvant être statistiques ou non statistiques. Ces raccourcis cognitifs sont utilisés par les individus afin de simplifier leurs opérations mentales dans le but de répondre aux exigences de l’environnement. Les heuristiques peuvent apparaître quotidiennement et par habitude dans la prise de décision, le jugement, l’estimation de probabilité et la prédiction de valeurs. Les heuristiques permettent aux individus un gain de temps car, en les utilisant, ils ne tiennent pas compte de toute la complexité des informations pertinentes à la situation. Cependant, elles mènent parfois à des biais et à des erreurs dans le jugement et la prise de décision. Les plus développées dans la littérature sont les heuristiques de représentativité, de disponibilité, d’ancrage et d’ajustement. Ces dernières ont été mises en évidence par Amos Tversky et Daniel Kahneman en 1974. Les interprétations résultant des heuristiques selon Tversky et Kahneman ne font cependant pas l’unanimité auprès de la communauté scientifique. En effet, selon eux, les heuristiques mènent à des raisonnements de qualité tandis que pour d’autres auteurs, ils aboutissent à de mauvaises réflexions. Les heuristiques sont appliquées dans de nombreux autres domaines, notamment dans le marketing, la santé publique, la politique et la justice.
Herbert Simon est le premier à avoir introduit la notion d'heuristique dans un article intitulé A behavioural model of rational choice publié dans le Quarterly Journal of Economics en 1951. Simon y propose la notion de rationalité limitée pour modéliser le comportement des humains et suggère que les individus utilisent des règles approximatives pour prendre des décisions plutôt que de considérer tous les paramètres d'un problème. Pour Simon, les heuristiques sont des règles rationnelles approximatives fournissant des réponses satisfaisantes, sans être optimales. En 1967, Harold Kelley prolonge les travaux d'Herbert Simon en développant la théorie de la covariation aussi appelée théorie de l'attribution causale. À partir des années 1970, la notion d'heuristique change avec Amos Tversky et Daniel Kahneman qui en 19744 développent l’idée que les individus ne prennent pas toujours leurs décisions de manière rationnelle. Ils seraient soumis à des biais et peuvent commettre des erreurs. Leurs ressources cognitives ne leur permettant pas d’utiliser des règles rationnelles, les individus recourraient à des raccourcis cognitifs : les heuristiques, qui sont des opérations mentales « intuitives, rapides et automatiques ». Tversky et Kahneman sont les auteurs principaux ayant étudié et développé le concept d'heuristique de jugement. Ils sont par exemple à l'origine des heuristiques de représentativité, de disponibilité et d'ancrage et d'ajustement.
Rôle et utilisation des heuristiques dans le jugement
Dans la prise de décision et le jugement, les heuristiques permettent d'effectuer plus simplement des jugements, de faire face à l’incertitude, de préserver les efforts des acteurs et de leur faire gagner du temps. Elles servent également à généraliser et à porter des jugements abstraits. Exemples Il existe de nombreuses variantes dans les heuristiques. Nous nous contenterons ici d’en donner les principales et d’offrir quelques exemples.
Heuristique de représentativité et biais associés
Tversky et Kahneman ont observé le phénomène suivant : plus une chose est typique d'une catégorie, plus les individus la classent dans cette catégorie. L’heuristique de représentativité est une règle qui «consiste à estimer la probabilité d’appartenance d’un objet à une classe d’objets à partir de sa ressemblance avec un cas prototypique de cette classe». Selon Tversky et Kahneman, cette règle est utilisée pour répondre à des questions de probabilité comme : « Quelle est la probabilité qu'A appartienne à la classe B ? ». Si A est très représentatif de B, l’individu jugera qu'A a une forte probabilité d’appartenir à B. Ils développent l’idée que l’heuristique de représentativité est aussi utilisée pour catégoriser socialement les individus en fonction de leur ressemblance avec les stéréotypes caractérisant ces catégories. Cette règle peut expliquer certains biais de jugement.
Ignorance des probabilités a priori (ignorance du taux de base)
Un premier biais expliqué par l’heuristique de représentativité consiste à ignorer les probabilités a priori (ignorance du taux de base). En 1973 Tversky et Kahneman ont étudié ce phénomène en demandant à des sujets de lire une brève description d’un individu pris d’un groupe de 100 personnes. La moitié des sujets étaient informés que le groupe de 100 personnes était composé de 30 % d’avocats et 70 % d’ingénieurs (le taux de base) et l’autre moitié que la composition du groupe était de 70 % d’avocats et de 30 % d’ingénieurs. La description lue par les sujets correspondait au stéréotype de l’ingénieur. La tâche des participants était d’estimer la probabilité de cet individu d’être un ingénieur plutôt qu’un avocat. Quel que soit le taux de base fourni aux sujets, ceux-ci ont estimé que l’individu décrit avait une grande probabilité d’être ingénieur : il n’y avait donc pas de différence significative entre les deux groupes de participants. Par contre, lorsque les sujets n'avaient pas de description à leur disposition, ils tenaient effectivement compte du taux de base. Tversky et Kahneman en ont conclu que, lorsque les sujets disposaient d'une description de l'individu, ils avaient utilisé l’heuristique de représentativité en ignorant le taux de base fourni.
Lorsque les individus doivent estimer la probabilité d’obtenir un résultat particulier dans un échantillon, leur réponse est donc affectée par le fait qu’ils ne tiennent pas correctement compte de la taille de cet échantillon et de leur mauvaise compréhension du hasard.
Heuristique de disponibilité et biais associés
Selon les observations de Tversky et Kahneman, plus il est facile de se souvenir d’un événement, plus celui-ci est considéré comme fréquent et inversement. L’heuristique de disponibilité « consiste à juger la fréquence ou la probabilité d’un événement en fonction de la facilité avec laquelle on peut se remémorer des exemples de cet événement ». Ce phénomène est expliqué par le fait que les individus se rappellent mieux des exemples d’événements très fréquents que des exemples d’événements peu fréquents. Cette heuristique peut toutefois mener à plusieurs biais.
La facilité de rappel des souvenirs
Un des biais énoncé par Tversky et Kahneman est dû à la facilité de rappel des souvenirs. Il arrive que la facilité d’accès en mémoire d’un événement ne reflète pas sa fréquence exacte d’apparition. Par exemple, les individus de l’étude de Slovic, Fischoff et Liechtenstein croyaient que mourir d’un homicide était plus fréquent que mourir d’un cancer de l’estomac. Or le décès par cancer de l’estomac est dix-sept fois plus fréquent que l’homicide. Cependant, les cas de meurtre sont plus facilement accessibles en mémoire grâce, entre autres, aux médias.
Heuristique d’ancrage et d’ajustement et biais associés
Afin d’estimer la grandeur (fréquence, probabilité…) d’un nouvel évènement, les individus ont tendance à utiliser l’heuristique d’ancrage et d’ajustement. Pour ce faire, aussi bien les enfants que les adultes se basent sur une quantité ou une information qui peuvent être pertinentes ou non (ancre). Par la suite, ils l'ajusteront en considérant les particularités de ce nouvel évènement. Cependant, l’ajustement est en général insuffisant comme le prouve l’étude initiale de Tversky et Kahneman de 1974. Dans celle-ci, les sujets devaient tout d’abord tourner une roue de la fortune truquée. Ils recevaient alors un pourcentage qui était soit 10 % soit 65 %. Ensuite, ils devaient évaluer si le pourcentage était inférieur ou supérieur à celui du nombre de pays africains représentés aux Nations unies. Enfin, ils devaient en estimer le pourcentage exact. Les résultats montrent que l’estimation est influencée par le pourcentage fournie par la roue de la fortune. Les gens se sont donc basés sur celui-ci : ce nombre a été l’ancre de leur estimation. L’estimation de ceux dont l’ancre était de 10 % tournait autour de 25 % tandis que l’estimation de ceux qui avaient reçu 65 % était aux alentours de 45 %. L’effet d’ancrage apparaît dans de nombreux types de phénomènes tels que l’attribution causale ou encore la prédiction de la probabilité d’un évènement futur. Dans les situations sociales, les individus utilisent leurs propres points de références comme point d’ancrage sauf quand ceux-ci sont ambigus. Ils se baseraient alors sur les comportements et attributs des autres ou sur des détails non pertinents de la situation. De nombreux facteurs humains régulent l’influence des ancres comme l’humeur, la personnalité, l’expertise dans le sujet concerné et les habilités cognitives des personnes.
Decision making (Prise de décision)
Choosing Among Alternatives
The psychological process of decision making constantly goes along with situations in daily life, like deciding between packing more blue or more green shirts for vacation (which would only have minor consequences) but also about applying a specific job or having children (which would have relevant influence on important circumstances of future life). The mentioned examples are both characterized by personal decisions, whereas professional decisions, dealing for example with economic or political issues, are just as important.
The Utility Approach
Utility: outcomes that are desirable because they are in the person‘s best interest
There are three different ways to analyse decision making. The normative approach assumes a rational decision-maker with well-defined preferences. While the rational choice theory is based on a priori considerations, the descriptive approach is based on empirical observation and on experimental studies of choice behavior. The prescriptive enterprise develops methods in order to improve decision making. According to Manktelow and Reber´s definition, “utility refers to outcomes that are desirable because they are in the person’s best interest”. This normative/descriptive approach characterizes optimal decision making by the maximum expected utility in terms of monetary value. This approach can be helpful in gambling theories, but simultaneously includes several disadvantages. People do not necessarily focus on the monetary payoff, since they find value in things other than money, such as fun, free time, family, health and others. But that is not a big problem, because it rather is necessarily possible to apply the following graph, which shows the relation between (monetary) gains/losses and their subjective value (which is equal to utility), to all the valuable things mentioned above. Therefore not choosing the maximal monetary value does not automatically describe an irrational decision process.
Misleading Effects
But even respecting the considerations above there might still be problems to make the “right” decision because of different misleading effects, which mainly arise because of the constraints of inductive reasoning. In general this means that our model of a situation/problem might not be ideal to solve it in an optimal way. The following three points are typical examples for such effects.
Situation Models
It is about the problem that models which people create might be misleading, since they rely on subjective speculations. An example could be deciding where to move for vacation by considering typical prejudices of the countries (e.g. always good pizza, nice weather and a relaxed life-style in Italy in contrast to some kind of boring food and steady rain in Great Britain). The predicted events are not equal to the events occurring indeed.
Focusing Illusion
Another misleading effect is the so-called focusing illusion. By considering only the most obvious aspects in order to make a certain decision (e.g. the weather) people often neglect various really important outcomes (e.g. circumstances at work). This effect occurs more often, if people judge about others compared with judgments about their own living.
Framing Effect
A problem can be described in different ways and therefore evoke different decision strategies. If a problem is specified in terms of gains, people tend to use a risk-aversion strategy, while a problem description in terms of losses leads to apply a risk-taking strategy. An example of the same problem and predictably different choices is the following experiment: A group of people asked to imagine themselves $300 richer than they are, is confronted with the choice of a sure gain of $100 or an equal chance to gain $200 or nothing. Most people avoid the risk and take the sure gain, which means they take the risk-aversion strategy. Alternatively if people are asked to assume themselves to be $500 richer than in reality, given the options of a sure loss of $100 or an equal chance to lose $200 or nothing, the majority opts for the risk of losing $200 by taking the risk seeking or risk-taking strategy.
Justification in Decision Making
Decision making often includes the need to assign a reason for the decision and therefore justify it. This factor is illustrated by an experiment by A. Tversky and E. Shafir (1992): A very attractive vacation package has been offered to a group of students who have just passed an exam and to another group of students who have just failed the exam and have the chance to rewrite it after the holidays coming up. All students have the options to buy the ticket straight away, to stay at home, or to pay $5 for keeping the option open to buy it later. At this point, there is no difference between the two groups, since the number of students who passed the exam and decided to book the flight (with the justification of a deserving a reward), is the same as the number of students who failed and booked the flight (justified as consolation and having time for reoccupation). A third group of students who were informed to receive their results in two more days was confronted with the same problem. The majority decided to pay $5 and keep the option open until they would get their results. The conclusion now is that even though the actual exam result does not influence the decision, it is required in order to provide a rationale.