Émotion et capacité de la mémoire de travail dans la création de dispositif d’enseignement

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Résumé

Cette fiche a été créée dans le cadre du cours ADID. Elle vise à explorer les interrelations entre trois concepts clés que j’ai trouvé pertinents, à savoir la mémoire, les émotions et l’apprentissage collaboratif. J’ai alors décidé de réfléchir à leur impact sur les apprentissages scolaires.

Introduction

L’apprentissage est un processus complexe qui sollicite différents mécanismes et ressources. Cet article vise à mettre en lumière certaines connaissances tirées d’articles scientifiques sur les émotions, la mémoire de travail et l’apprentissage collaboratif afin de mieux comprendre l’importance de considérer les émotions (tant dans les apprentissages individuels que collectifs) et les contraintes imposées par la capacité de la mémoire de travail dans les apprentissages ainsi que la nécessité d’en tenir compte lors de la création de dispositifs d’apprentissage.

Développement

Émotions et implication dans les apprentissages scolaires

Les émotions jouent un rôle central dans l’apprentissage. Elles y occupent en effet une place importante et influent tant sur l’apprentissage individuel de l’apprenant que sur l’apprentissage collaboratif.

Il existe une dimension subjective aux émotions qu’il est important de prendre en compte quand l’on considère l’apprentissage. Dans son article sur l’étude des émotions déclarées, Cuisinier (2018) nous apprend que les émotions se caractérisent, en partie, par leur valence. Cette dernière correspondant au caractère plaisant ou déplaisant de l’émotion ressentie, ce qui implique une composante d’évaluation subjective de l’émotion. Si l’on considère en outre que « l’évaluation de « ce qui est bon ou mauvais pour moi » provoque une tendance à s’approcher ou à s’éloigner de la chose ainsi évaluée » (Arnold, 1972), certaines émotions à valences trop négatives peuvent amener jusqu’au retrait, à l’évitement ou même à l’interruption de la tâche (Cuisinier, 2008). Ainsi, l’évaluation subjective des émotions ressenties par l’élève face à une tâche donnée influencera son implication dans celle-ci en fonction de la valence qu’il leur attribue. Un élève ressentant de la joie, de la fierté ou de l’espoir aura ainsi plus de facilité à s’engager activement dans une tâche que celui pour qui elle provoquera des émotions à valence négative telles que l’anxiété, la colère ou la honte. Il est donc important de tenir compte des émotions des élèves dans les apprentissages, le but étant de favoriser les émotions à valence positives qui impactent favorablement la réussite (Cuisinier, 2008).

Si les émotions ont une place importante dans les apprentissages individuels, cela est également le cas pour l’apprentissage collaboratif. En effet, selon Molinari et al. (2021), certains chercheurs de l’approche cognitive sur l’apprentissage collaboratif définissent la collaboration comme un espace où les apprenants s’engagent mutuellement sur le problème à résoudre afin d’en construire une représentation partagée, ainsi qu’à maintenir un climat de travail positif en gérant leurs relations interpersonnelles. Molinari et al. (2021) affirment qu’ « une telle définition laisse entrevoir l’importance des émotions et de leur gestion au cours de l’interaction ». Selon cette approche les émotions sont décrites comme résultant d’un processus individuel d’évaluation cognitive de la situation de collaboration (Molinari et al., 2021). On peut retrouver dans cette définition la dimension d’évaluation subjective de ce que nous fait ressentir l’émotion comme dans le l’article de Cuisinier (2008). Les interactions collaboratives peuvent provoquer chez l’apprend différents types d’émotions influençant différemment les performances du groupe. En effet si ces interactions mènent un ou des apprenants à ressentir des émotions négatives comme de la colère ou de la frustration, la performance collective sera altérée. Au contraire, des émotions positives telles que la joie ou le soulagement peuvent briser le cycle des émotions négatives et donc leurs impacts négatifs sur la collaboration (Molinari et al., 2021). Certaines études de l’approche cognitive ont ainsi démontré « l’importance de considérer les émotions […][dans la conception d’] environnements numériques dédiés à l’apprentissage collaboratif » (Molinari et al., 2013). L’approche socioculturelle accorde elle aussi une place centrale aux émotions dans l’apprentissage. Toujours selon Molinari et al., elles interviendraient à plusieurs endroits : entre les interlocuteurs avec par exemple, les conduites non verbales, entre l’enseignant et les élèves ainsi que dans les groupes, entre paires. Afin de travailler correctement en groupe, il est important de savoir gérer les relations interpersonnelles, dont par exemple les désaccords et donc également ses propres émotions. Les savoirs scolaires peuvent également être objets d’émotions et ces dernières ainsi « mobilisées comme de véritables ressources pour l’apprentissage collaboratif » (Molinari et al., 2021).

Mémoire de travail et apprentissage scolaire

Puma et Tricot (2021) nous expliquent que la théorie de la charge cognitive décrite de Sweller en 1988 divise l'investissement des ressources cognitives en MdT lors de l'apprentissage en trois catégories. Premièrement, la charge cognitive intrinsèque est inévitable et nécessaire, puisqu’elle correspond aux informations et traitements pertinents et nécessaires à l’apprentissage. Deuxièmement, la charge cognitive intrinsèque désigne tout traitement cognitif et ressource investis dans une activité n’étant pas directement nécessaire pour les apprentissages. Enfin, la charge utile correspond aux ressources cognitives utilisées non pas dans la réalisation dans la tâche d’apprentissage, mais afin de transférer en MLT les informations maintenues en MdT. Cette dernière charge permet d’expliquer qu’un apprenant réussisse à résoudre une tâche sans rien apprendre. Il est important de relever que ces trois types de chargent se cumulent. Ainsi, « si les charges intrinsèques et extrinsèques consomment trop de ressources, il n’en restera plus à consacrer à la charge utile » (Puma et Tricot, 2021). Ce n’est qu’en ayant encore des ressources disponibles pouvant être attribuées à la charge utile que l’apprentissage pourra avoir lieu. De plus, la capacité de cette charge cognitive varie au cours du temps (Puma et Tricot, 2021). Nous pouvons donc relever ici l’importance de tenir compte des capacités de la MdT ainsi que de ses limites dans la conception de dispositifs d’apprentissage si l’on veut que les apprenants puissent en tirer bénéfice.

Conclusion

Pour conclure, l’influence des émotions et de la capacité limitée de la mémoire de travail sur les apprentissages sont non négligeables. En effet, que ce soit pour l’approche cognitive ou socioculturelle, les émotions et leur gestion sont primordiales dans l’apprentissage collaboratif, tout comme elles le sont dans les apprentissages individuels. La gestion des ressources cognitives l’est tout autant, puisque pour apprendre il est important de tenir compte de la capacité de notre MdT. Il est donc primordial d’en tenir compte lors de la création de dispositifs d’enseignement et d’apprentissage.

Références bibliographiques

Arnold, M. B. (1972). Feelings and emotions: the Loyola Symposium. New York : Academic Press.

Cuisinier, F. (2018). Émotions et apprentissages scolaires : que nous apprend l’étude des émotions déclarées ?. Approche neuropsychologique des apprentissages chez l’enfant, 155, 05-51. https://emotischool.com/Cuisinier(2018)_Anaé_fichier_auteure.pdf

Molinari, G., Chanel, G., Bétrancourt, M., Pun, T., & Bozelle, C. (2013). Emotion feedback during computer-mediated collaboration: Effects on self-reported emotions and perceived interaction. CSCL 2013, 1, 336-343. https://repository.isls.org/bitstream/1/1895/1/336-343.pdf

Molinari, G., Muller Mirza, N., & Tartas, V. (2021). Regards croisés des approches cognitives et socioculturelles sur l’apprentissage collaboratif : Quelles contributions dans le domaine de l’éducation ? Raisons éducatives, 25(1), 41-64. https://doi.org/10.3917/raised.025.0041

Puma, S., & Tricot, A. (2021). Prendre en compte la mémoire de travail lors de la conception de situations d’apprentissages scolaires. Approche neuropsychologique des apprentissages chez l’enfant, 33(171), 217-225. https://tecfalms.unige.ch/moodle/pluginfile.php/43313/mod_folder/content/0/Mémoire/ADID1_PUMA%20%20TRICOT_Prendre%20en%20compte%20les%20limites%20de%20la%20mémoire%20lors%20de%20la%20conception.pdf

Liens

Cette page fait référence à la page ADID1, les productions des étudiant.es


Page rédigée par Julie Grunder, volée Drakkar, le 28.10.2023.