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Mercredi 31 octobre dan le bureau d'Alain Dupont
Mercredi 31 octobre dans le bureau d'Alain Dupont
Retranscription
Retranscription
Perrine
Myriam
 
Perrine  
Au bureau de M. Dupont, le 31.10.2012 (Deuxième partie de l’entretien. Enregistrer à partir de la 45ème minute).
Cette personne aveugle ne parlait pas, simplement elle avait trouvé des moyens de s’occuper,  parfois l’automutilation c’est aussi ça. Ce n’est pas simplement que dans la tête, faut bien que je m’occupe. Vous savez, être dans un lit 24h/24h ce n’est pas très drôle. Moi j’avais découvert cette femme, tout à fait par hasard, et puis grâce à une autre femme, qui était là avec moi quand je faisais la rencontre de cet avion ( ? ), j’enseignais l’observation et puis les gens me disaient : tu es un peu secoué avec ce que tu nous dis. Viens voir la clientèle, il ne savait pas mon histoire et puis que j’en connaissais un petit bout. Simplement en faisant le tour, je vais l’appeler Marie, quand on est allé lui dire “bonjour“, elle a eu des mimiques sur son visage. Deux choses : tiens, il y a eu une nouveauté, ce n’est plus le même son de voix, et ma collègue avait un parfum, je ne sais plus lequel, et elle, elle avait perçu cela, à partir de cet élément là, vous pouvez construire un projet de vie. Et cette personne a le droit d’avoir un appartement ici, et d’avoir son projet de vie, et évidemment, dans sa situation, avec un accompagnement pour toutes les choses où elle a besoin d’être accompagnée. Mais il y a des choses je vais vous dire, je vais simplement prendre l’odorat parce que moi j’ai découvert cela avec les personnes comme Roland, aller faire le marché de Plainpalais ou faire le marché de Provence ou aller à la criée à Cherbourg, vous n’avez pas les mêmes odeurs, pas les mêmes bruits, les mêmes environnements, ça change tout. Et votre vie après, vous devez faire des choix, elle, avec le développement de son odorat, elle s’est mit à faire de la cuisine parce qu’elle est gourmande… et c’est ce que je disais, le découpage, tout ces gens me l’ont appris mais vous verrez que pour la psychiatrie, c’était extrêmement important. Le découpage c’était de dire, vous savez sur cette terre il y a un millier de sorte de pommes, elles n’ont pas toutes le même goût. Chez nous, il n’y en a pas beaucoup, c’est 5 ou 10 sortes. Vous verrez quand psychiatrie j’ai monté une petite entreprise avec le QUATRE, où on travaillait il y avait mille pommiers, et il y a une personne comme cela qui a travaillé là, je vous expliquerai cela parce que c’était aussi  avec la notion du travail. Mais en même temps, Marie nous apprend qu’elle est capable de choisir ses pommes, vous allez au marché, si vous ne la mettez pas en situation,  moi, c’est ce que j’ai appris, c’est l’expérience, c’est leur donner la possibilité de vivre des expériences pour que ces personnes puissent prendre leur responsabilité et faire leur choix. Les pommes il y en a plusieurs sortes et bien, elle peut les sentir, mais ensuite vous savez, même pour éplucher les pommes, ça existe depuis des dizaines d’années, ce petit appareil, comme elle avait la mobilité au niveau de ses membres pas de souci, elle pouvait éplucher les pommes et quand vous cuisez une tarte aux pommes chez vous, vous faites pas ça chez vous ? si… ça a une odeur… et Marie elle peut partager sa tarte aux pommes. Elle apporte quelques chose à la communauté, elle peut recevoir les membres de sa famille et puis avoir fait une tarte aux pommes, même si ma fois, elle n’a pas la motricité avec ses jambes, c’est pas bien grave cela, c’est même jamais grave.
 
Avant d’arriver au sujet concret du QUATRE, vous parlez des sorties au Bastion, au marché et les personnes avec qui vous partez en campagne, toute votre vie vous avez œuvré pour une certaine catégorie de personnes, à savoir les personnes dite déficiente, physique, mentale, psychiatrique et autre et je me posais la question, à savoir quels sont les liens que vous avez tissé avec ces personnes quand elles vous ont appris des choses, vous disiez justement, elles vous ont permis de voir les choses différemment,  de passer de la théorie à la pratique et vous absorber de ces personnes, et qu’elles ont été les apports de ces rencontres et à quel niveau ? Est-ce que c’était plus personnel, plus dans les recherches à venir comme vous étiez en train de faire avec M. Eisenring en parallèle ? Ou est-ce que c’était au niveau humain que vous avez appris des choses sur vous ou sur les autres de manière général ? Plus se situer sur ces personnes et qu’est-ce qu’elles vous ont apporté ? Et peut-être même au final, vous ont aidé à construire le QUATRE ?
 
Le QUATRE, ce que je fais aujourd’hui ce que je suis aujourd’hui. Merci de votre question parce que je crois qu’elle est importante. Moi je crois que pour pouvoir travailler, mais rencontrer ces personnes j’ai dû m’ouvrir à moi-même. Je pense que ça, ça a été un point extrêmement important, c’est-à-dire m’interroger sur moi, sur qu’est la vie, sur c’est quoi mes valeurs, et je pense que ça c’est un point important qu’elle m’ont apporté parce que.. vous savez, moi j’avais appris qu’il y avait le bien et le mal, vous savez ces choses là. J’ai eu une éducation religieuse, catholique, qui fait qu’il y a le bien le mal, et puis le pêché véniel et mortel, je crois que je les ai pratiquement tous fait à part tuer du monde, parce que c’est bon la transgression, et puis ces personnes m’ont appris la transgression, m’ont appris l’humain, mais m’ont appris le fait que, là attend, Alain tu es qui dans cette situation pour te permettre de juger, et pourtant, c’est important de porter des jugements, parce qu’il y a que comme cela qu’on peut construire aussi des relations. Enfin quand je vous vois, et c’est la même chose pour vous, simplement vous portez un jugement sur qui je suis, moi sur vous, mais simplement parce que je vous vois, je vous regarde et autre, par ce que je suis, et quand je vous vois, je me vois, vous êtes un miroir et les personnes, c’est d’accepter que ces personnes déficientes étaient un miroir pour moi. Donc est-ce que j’ose prendre le risque de m’interroger et d’oser prendre le risque qu’elles ont quelque chose à m’apprendre. C’est quelques chose qui m’est resté, donc oui j’ai rencontré des personnes, il y a des personnes avec qui je suis toujours en lien là aujourd’hui. Il y a des personnes que je n’ai jamais quitté comme relation, certaines oui, ça a disparu comme beaucoup de relations. Dans ma vie j’ai croisé des centaines, miliers de personnes, de part mon activité et puis certaines sont devenues des amis, et puis chez ces personnes, la même chose, simplement on partage pas toujours comme… je vous en parlerai quand on parlera d’ici et maintenant, moi j’ai des amis qui étaient là hier, je veux dire avec qui on partage le quotidien mais ces personnes… votre question est intéressante car il ne suffit pas comme professionnel de dire aux autres, rencontré ces personnes, partager des moments, soyez des amis. Il faut, c’est ce que j’ai appris et continue à mettre en place, balaye devant ta porte, mais en même temps faisant l’expérience avant de dire à d’autres de la faire comme professionnel parce qu’il ne suffit pas d’être dans un bureau, il faut oser partager un repas et boire un verre avec mon ami Juan, qui habite juste en face et puis aller chez Servette, là à côté, et puis boire un verre avec lui et partager son quotidien, ou avec Patrick, même si ces personnes, parce que la vie est faite comme cela, les systèmes sont fait comme ça… Là, aujourd’hui, on retourne à l’enfermement et ces personnes, aujourd’hui se retrouvent en institution, c’est triste au possible, mais impuissant face au système, et je pense que c’est important de le savoir.
Avec le professeur Eisenring, on proposait logement, habitat, loisirs et autres. Il y a des choses qui continuent comme ceci mais on a créé des grandes institutions toutes ces dernières années. Et je pense que c’est quand même important de le savoir, oui c’est beau, à Genève on a énormément d’argent mais moi ce que je vous dis je l’ai réalisé, je l’ai proposé à des amis. Ils ont découvert au travers du club du mercredi, des vacances, il y a eu des rencontres, des vraies rencontres dans la vraie vie, comme ça peut se passer avec vous, des personnes de votre entourage, de votre quartier, ou comme ça, dans un tram, vous croisez un regard et vous tomber amoureuse, et puis à partir de là, moi j’ai des personnes aujourd’hui, vous imaginez, des années après, continue à se voir, sont devenues des amis parce qu’ils partagent des repas une fois par semaine en famille, parce que la personne handicapée était pendant des années seule et autre, ça fait des années que cela dure, mais tiens, j’aimerai me trouver un logement, la personne fait marcher son réseau et autre, et je pense à une personne Patrick, il était en institution et ensuite en foyer et ensuite en logement, il a voulu déménager, il a fait marcher son réseau, c’est-à-dire les amis, comme vous et moi. S’il va se présenter dans une régis vous oubliez… on lui ferme la porte sur le champ. Et là je ne parle même pas de personne psychiatrisée, mais avec sa dégaine un peu tordue quand il marche sur le trottoir, c’est un homme extraordinaire, vous pouvez le rencontrer il prend son café le matin au début de la rue de Carouge. On se croise, on discute et autre, pas de souci. Oui des rencontres réeles, sur le plan humain, de personne à personne, c’est à dire que l’on a des choses à partager en terme d’émotions, de sentiments, des choses de la vie, moi je crois que c’est ce qui me permet de réussir ma vie, c’est la rencontre avec autrui, parce que autrui vient m’interroger. Est-ce que je suis capable de m’interroger par des personnes qui apparamment sont, peu ou gravement touchées.  Si je me laisse touché par ça oui, pas de souci.
 
Pourrions nous revenir sur le QUATRE ?
 
Ça me semblait important les prémisses, vous comprenez, parce que la psychiatrie, vous savez, c’est un monstre… avec des professeurs, des docteurs, des médecins-chefs, des chefs de clinique, des infirmiers, des concepts, des DSMIII, IV, je crois qu’on est au V là maintenant qui augmente chaque fois parce qu’on définit les maladies, et puis il y a les malades et nous ! et avec Jean Jacques Eisenring on était au CPSU, Centre Psychosocial Universitaire de la Jonction, c’est intéressant en terme de désinstitutioNnalisation parce que psychothérapie institutionnel, la biologie, et puis là on reparlera du professeur Tissot à qui on a confié ce secteur là, même quand il y a eu l’affaire d’Alain Urban, toute la structuration, je l’ai ici dans un texte. On lui confie après toute la chair de biologie et puis Birensdean ( ? ), tout ces gens qui avaient d’autres visions. Et avec Eisenring on a donné des journées d’études, on a présenté nos expériences avec les personnes handicapées mentales et le professeur Garonne, qui était en charge du CPSU. Il y avait deux personnes, le professeur Enal, il était plus branché sur psychanalyse, et puis le professeur Garonne sur tout ce qui était psychatrie sociale. Ils étaient là les deux lorsque nous avions fait cette journée d’étude en 1975 et puis, Garonne, quand il a entendu ça, c’est un homme extraordinaire, en politique et autre… misère pourquoi pas faire ceci avec des personnes dites chroniques de Bel-Air ? Moi j’ai reçu un coup de téléphone, il y avait Jean-Claude Drauss, qui était le directeur administratif du centre psychosocial. Là même chose qu’avec Einsenring, on s’est rencontré, on est allé manger ensemble… Est-ce que tu serais prêt à mettre en place la même chose que vous faites, on parlait du club du mercredi avec des personnes venant de la psychiatrie adulte dite chronique ? J’en connaissais un petit bout, là j’ai parlé des vacances et autres ,mais un champ que j’avais développé, ça va un petit bout sur le champ de ma formation artistique, j’avais développé tout le côté artistique des personnes handicapées mentales, à l’époque, et entre autre avec une artiste Françoise Regamet et on avait mis en place des ateliers, et quand j’étais à Bel-Air en sociothérapie, mais psychiatrique, pas avec les personnes déficientes intellectuelles, j’avais travaillé a Chouni, il y avait un pavillon en dehors de la clinique, tenez vous bien… vous allez comprendre, ça va rejoindre le QUATRE, on avait exclu les personnes dites chroniques à l’extérieur de la clinique, on les avait mis dans un pavillon a Chouni, vous savez le village… et il y avait une très belle maison de maitre. On était denouveau dans les soins et autres, et moi j’avais travaillé avec eux, avec ce que l’on trouvait à l’époque, j’avais trouvé de la peinture, et autres, toutes sortes de choses et autres, des dessins, on avait même fait une exposition pour dire venez voir ! Je crois que nous avons eu une personne quand même, c’était sympa…qui était venue de Bel-Air. Mais bref, nous nous avions eu notre plaisir et Garonne dit : Avec toutes ces personnes et les pavillons de Bel-Air, est-ce que nous pourrions mettre quelque chose en place d’eux-même ? Vous savez moi je suis plutôt un homme spontané pur, qui aime un peu l’aventure, je sais que j’avais dit oui, mais sur le champ, un peu inconscient quand même. Alors on va réfléchir ensemble et c’est comme ça que dans les années 75-76, une réflexion s’est mise en place, eux savaient aussi que je continuai de travailler à Caritas, j’étais formateur, professeur à l’institut d’études sociales et puis, à ce moment, on s’est dit mettre en place un lieu d’accueil, on a appelé ça comme ça, mais on voulait un lieu démédicalisé et dépsychiatrisé.
Garonne voulait un lieu démédicalisé, hors des soins, c’était sa vision même comme psychiatre, la psychiatrie sociale appartient aussi à d’autres personnes qu’au médecin psychiatre et aux infirmiers, je pense que là, ça me convenait, et on ne mettera pas cela en place, comme il existait à Bel-Air la sociothérapie au pavillon des Lilas, on mettera cela en place à l’extérieur. Comme j’avais le club du mercredi qui se passait au Pâquis, j’ai essayé de négocier avec Caritas, et les personnes qui étaient là à l’époque pour dire, est-ce que vous seriez d’accord ? les locaux qu’on utilise peu, c’était des locaux vétustes quand on les a pris, qui appartenaient à la paroisse Notre Dame mais qui étaient inutilisés depuis des années. Et puis, on a écrit, on a essayé de vendre notre histoire en disant on a besoin de vous Caritas, ce n’était pas l’aspect catholique, c’était simplement parce que l’expérience avait déjà été faite avec les personnes handicapées mentales eux ont été d’accord pour une année, et le centre psychosocial louerait les locaux, 5000 frs par an et puis, était d’accord que à l’intérieur il y ait le club du mercredi qui n’avait rien à voir avec le QUATRE. Ok ! On a mis cela en place pour les personnes, et le même mécanisme s’est fait, les personnes venaient de Bel-Air mais on avait cette idée dans ce que nous avions imaginé de faire venir les gens du quartier, c’était dans les objectifs. Ce n’est pas quelque chose qui s’est produit au départ. D’abord un, je pense que cela c’était une erreur, de faire rentrer les gens du quartier dans une institution plutôt que nous d’aller vers l’extérieur. Et le lieu d’accueil du QUATRE, nous avions aussi imaginé les permanences, en dehors, et volontairement, ce n’était pas toute la journée. Vous savez, la psychiatrie de secteur avait mis en place des ateliers protégés, des centres de jour, des centres d’occupation sociale, le COS, et même après il y a eu une plateforme, et à partir de là, on fait une permanence le midi de 11hoo à 14hoo et le soir dès 17hoo. Pourquoi on avait déjà cette idée, on ne veut pas que cela empiète sur les heures d’ateliers ou de travail, c’est des rencontres, un moment de partage avec d’autres personnes, et voilà comment est né  le QUATRE, à partir d’un exposé qu’on avait pu faire et d’un travail  et d’un intérêt et ce qui est intéressant, qui va bien avec les universitaires et les politiques justement.
Ok, on met ceci en place, pour une année après on verra, c’est génial, je saute sur l’occasion. Comme j’étais à l’IES, j’avais une équipe d’étudiants de travailleurs sociaux, un peu bouillonant, qui faisait la révolution à l’institut , moi j’étais là comme enseignant, et l’école d’assisants sociaux, m’a demandé de faire avec eux, car j’ai une formation dans ce domaine, de regarder la dynamite de groupe,  et de faire l’enseignement et à un moment donné j’ai donné l’idée à cette classe, que j’allais ouvrir un lieu et que si des étudiants voulaient faire un stage, pas de souci. Je me suis organisé avec l’institut, j’étais leur praticien formateur. Il y a 6 personnes qui ont décidé de faire leur stage, et le 4 janvier 1977, on a ouvert ça au 4 rue des Pâquis, voilà pourquoi, c’est aussi simple que ça, on n’a pas chercher midi à 14hoo. L’immeuble où on a commencé à été détruit puis reconstruit, et simplement on a entamé avec nos permanences, et quelques personnes ont commencé à venir, et souvent on les descendait de Bel-Air, il y avait un service de transports, avec l’écriteau sur le côté comme ça on sait qui c’est qui vient. En terme d’image c’est assez intéressant. Et c’est extraordinaire ce qui s’est passé à ce moment parce qu’on se retrouve avec des personnes, ça n’a plus rien avoir avec la déficience intellectuelle, on a des gens brillants qui ont fait des études, des apprentissages, il y en a qui sont institutionnalisés ou qui sont à l’hôpital depuis 10-20 ans, il y a une personne ici, j’ai son dossier complet, et ceci rejoindra votre question, par ce que c’est elle qui m’a appris mon métier. Avec des gens, sous médication, avec des gens qui là, viennent voir, et on les rencontre, on s’assoit, partage un repas, on s’était installé un petit bout de cuisine, c’était modeste mais ça a eu un impact assez important au niveau des personnes mais aussi au niveau infirmier et médical. On s’était fixé une règle, il ne venait pas mettre les pieds dans ce lieu, car ce n’était pas un lieu de soins. Je crois que cela était important. Et là très rapidement ces personnes ont exprimé des désirs, besoins, et qui étaient par mon ami J-P : Ecoute Alain, toi tu as des amis, un appart, un job, moi j’aimerai vivre comme toi, quand on vous dit… Moi j’ai honte, je lui ai dit, mais soigne toi, quand ça ira mieux on verra ! J’ai honte… Vous savez ce qui m’a répondu ? Alain, ça fait 35 ans que j’essaye de me soigner ou que je me soigne, et vous êtes mal avec ça. C’est là qu’on vous renvoit des questions. C’est vrai mais est-ce qu’on peut se soigner à l’hôpital et vivre à l’hôpital ? là dessus il avait raison, c’est tout d’un coup il vous renvoit des choses de la vrai vie, c’est-à-dire ce que vous vivez. Mais vous, comme on est dans la psychiatrie, et je vais parler des peurs avec les personnes déficientes, là vous avez encore les chocottes, parce que des crises il y en a eu. Des gens qui ont tout cassé, des gens qui vous agressent, et ça c’est nos mots, ce que l’on s’apperçoit, c’est que nous étions pas capable d’être à l’écoute réellement de ces personnes et de leurs besoins, il ne suffit pas de les nourrir et d’avoir un toit.
Alors, avec l’équipe du QUATRE, c’était extraordinaire, on faisait un point systématiquement. Mais tous les jours étaient notés les informations, j’aimerai remettre la main dessus. Il y a des observations de toutes les personnes et une fois par semaine, on s’arrêtait un après-midi pour remettre toutes ces choses, et pour savoir où on allait. Et en même temps comme c’était un stage, ils avaient des comptes à rendre à leur école. Une des choses qui avait été dit à la direction administrative, au CPSU et à Bel-Air,  si l’expérience est positive, on continue. En juin, on fait le point, un rapport avec tous le monde, la direction administrative mais en 6 mois, vous ne pouvez pas changer quelque chose qui a pris 35 ans, une personne a pris 35 ans pour essayer de dire que effectivement elle est une personne et pas uniquement une malade, qui pousse des cris pour pouvoir s’en sortir et se faire entendre, mais plus elle poussait des cris, plus elle voulait se faire entendre, et plus on médicalise parce que vous voyez bien, elle est en crise. On a vécu toutes ces choses là, et pourtant il y a eu une évolution, on est parti en vacances, je vous dis pas, j’avais entrainer cette équipe à partir en vacances, à Rochefort du Gard. On arrive à Rochefort du Gard avec toute l’équipe du QUATRE, et une dizaine de personnes dites malades mentales, on avait loué là-bas une petite maison. La personne vient nous ouvrir, à la personne décrite comme la plus folle ! Bonjour, parfait, vous êtes arrivés, entrez, je vais vous montrer que vous puissiez installer les personnes. On a commencé comme ça, c’était la personne la plus touchée, elle avait vu que du feu, elle ne devait pas savoir qui était qui, ça devait être la responsable, on s’est regardé, comme ça, c’est ça les apprentissages, vous êtes là et vous vous dites là il se passe quelques chose. Je reviens… la direction administrative nous dit on arrête là, il n’y a pas d’argent. Alors là, pour ceux qui me connaissent je monte les tours, je deviens un peu mauvais, vous nous faites faire cette expérience, c’est pour quoi, écrire un article ?  Parce que là vous nous dites, il n’y a pas d’argent, d’abord un, vous le saviez avant, vous nous avez promis quelque chose là vous n’avez pas le droit de… Je veux dire c’était assez virulant, on s’est réunis à notre retour de vacances, on est en 77, fin juillet 77, on se retrouve toute l’équipe chez un des membres, on travaille toute la journée on fait quoi ? On va vous cherchez du travail, moi je dis, je poursuis qui poursuis ? Sans argent … tout le monde était partant, un engagement de ces gens là , pas dans la semaine des 35 hrs, on décide de poursuivre, à partir de là, on a annoncé à Bel-Air et au Centre Psychosocial qu’on poursuit. On poursuit jusqu’à décembre, et puis les gens non non, ont continue. On a mis tellement les gens mal à l’aise que l’expérience était en train de grandir que 6 mois plus tard, on essaye de faire les fonds de tiroirs. Très bien, nous on est d’accord de vous payer de 6 mois en 6 mois. Les gens ont été d’accord d’avoir des contrats de 6 mois en 6 mois, et puis d’année en année, jamais de contrat fixe, c’était renouveler tout le temps. Tellement mal à l’aise et au vue de la progression, voyant les résultats que les personnes pouvaient obtenir pour elle même, ils ont même décidé de payer le rétroactif. À partir de là, c’était important qur des gens puissent s’engager. Le lieu d’accueil s’est mis à vivre, s’est mis à être à l’écoute, de pouvoir rencontrer des personnes dites malades chroniques, c’était pour des incurables vous comprenez, parce que vous vous appercevez que personne n’y croit que ces personnes ont un potentiel, des capacités, peuvent modifier quelques chose dans leur vie. Mais il n’y a pas que les soins, il y a aussi les aspects psychosociaux, et il peut y avoir un partenariat qui se met en place sans créer la confusion… Mais vous y connaissez rien M. Dupont, vous n’êtes pas psychiatre, vous ne pouvez pas savoir le nombre de fois que je l’ai entendu, vous, les personnes la maladie mentale, stop, je veux dire, même si j’avais suivi les cours de Dachoriagera ( ? ), Garonne, au même titre que font les personnes psychiatres en dehors de la médecine avant, je veux dire, je peux vous conter quelques anecdotes, on a rencontré des personnes, je pourrai vous citer des parcours de vie mais on voulait que le QUATRE puisse vivre, tout en faisant partie, mais en étant à l’extérieur,  du centre psychosocial, et on verra qu’il y a toute la naissance de TRAJET mais grâce aux personnes, nous ont aimerait bien avoir des activités et c’est comme cela que le potager de la Vendée à été mis en place au QUATRE, on en parlera la prochaine fois mais c’est le point de départ, mais c’est identique aux personnes handicapées mentales, là c’était des personnes dites chroniques où le lieu démédicalisé, je veux dire est de pouvoir tenir compte, vous savez aussi des réseaux naturels qui existe au sein d’un quartier, au sein de la vie en général, voilà en deux mots.
 
 


Myriam


Mercredi 7 novembre Hôtel pension Silva
Mercredi 7 novembre Hôtel pension Silva

Version du 18 novembre 2012 à 15:12

Mercredi 31 octobre dans le bureau d'Alain Dupont Retranscription Myriam

Perrine Au bureau de M. Dupont, le 31.10.2012 (Deuxième partie de l’entretien. Enregistrer à partir de la 45ème minute). Cette personne aveugle ne parlait pas, simplement elle avait trouvé des moyens de s’occuper, parfois l’automutilation c’est aussi ça. Ce n’est pas simplement que dans la tête, faut bien que je m’occupe. Vous savez, être dans un lit 24h/24h ce n’est pas très drôle. Moi j’avais découvert cette femme, tout à fait par hasard, et puis grâce à une autre femme, qui était là avec moi quand je faisais la rencontre de cet avion ( ? ), j’enseignais l’observation et puis les gens me disaient : tu es un peu secoué avec ce que tu nous dis. Viens voir la clientèle, il ne savait pas mon histoire et puis que j’en connaissais un petit bout. Simplement en faisant le tour, je vais l’appeler Marie, quand on est allé lui dire “bonjour“, elle a eu des mimiques sur son visage. Deux choses : tiens, il y a eu une nouveauté, ce n’est plus le même son de voix, et ma collègue avait un parfum, je ne sais plus lequel, et elle, elle avait perçu cela, à partir de cet élément là, vous pouvez construire un projet de vie. Et cette personne a le droit d’avoir un appartement ici, et d’avoir son projet de vie, et évidemment, dans sa situation, avec un accompagnement pour toutes les choses où elle a besoin d’être accompagnée. Mais il y a des choses je vais vous dire, je vais simplement prendre l’odorat parce que moi j’ai découvert cela avec les personnes comme Roland, aller faire le marché de Plainpalais ou faire le marché de Provence ou aller à la criée à Cherbourg, vous n’avez pas les mêmes odeurs, pas les mêmes bruits, les mêmes environnements, ça change tout. Et votre vie après, vous devez faire des choix, elle, avec le développement de son odorat, elle s’est mit à faire de la cuisine parce qu’elle est gourmande… et c’est ce que je disais, le découpage, tout ces gens me l’ont appris mais vous verrez que pour la psychiatrie, c’était extrêmement important. Le découpage c’était de dire, vous savez sur cette terre il y a un millier de sorte de pommes, elles n’ont pas toutes le même goût. Chez nous, il n’y en a pas beaucoup, c’est 5 ou 10 sortes. Vous verrez quand psychiatrie j’ai monté une petite entreprise avec le QUATRE, où on travaillait il y avait mille pommiers, et il y a une personne comme cela qui a travaillé là, je vous expliquerai cela parce que c’était aussi avec la notion du travail. Mais en même temps, Marie nous apprend qu’elle est capable de choisir ses pommes, vous allez au marché, si vous ne la mettez pas en situation, moi, c’est ce que j’ai appris, c’est l’expérience, c’est leur donner la possibilité de vivre des expériences pour que ces personnes puissent prendre leur responsabilité et faire leur choix. Les pommes il y en a plusieurs sortes et bien, elle peut les sentir, mais ensuite vous savez, même pour éplucher les pommes, ça existe depuis des dizaines d’années, ce petit appareil, comme elle avait la mobilité au niveau de ses membres pas de souci, elle pouvait éplucher les pommes et quand vous cuisez une tarte aux pommes chez vous, vous faites pas ça chez vous ? si… ça a une odeur… et Marie elle peut partager sa tarte aux pommes. Elle apporte quelques chose à la communauté, elle peut recevoir les membres de sa famille et puis avoir fait une tarte aux pommes, même si ma fois, elle n’a pas la motricité avec ses jambes, c’est pas bien grave cela, c’est même jamais grave.

Avant d’arriver au sujet concret du QUATRE, vous parlez des sorties au Bastion, au marché et les personnes avec qui vous partez en campagne, toute votre vie vous avez œuvré pour une certaine catégorie de personnes, à savoir les personnes dite déficiente, physique, mentale, psychiatrique et autre et je me posais la question, à savoir quels sont les liens que vous avez tissé avec ces personnes quand elles vous ont appris des choses, vous disiez justement, elles vous ont permis de voir les choses différemment, de passer de la théorie à la pratique et vous absorber de ces personnes, et qu’elles ont été les apports de ces rencontres et à quel niveau ? Est-ce que c’était plus personnel, plus dans les recherches à venir comme vous étiez en train de faire avec M. Eisenring en parallèle ? Ou est-ce que c’était au niveau humain que vous avez appris des choses sur vous ou sur les autres de manière général ? Plus se situer sur ces personnes et qu’est-ce qu’elles vous ont apporté ? Et peut-être même au final, vous ont aidé à construire le QUATRE ?

Le QUATRE, ce que je fais aujourd’hui ce que je suis aujourd’hui. Merci de votre question parce que je crois qu’elle est importante. Moi je crois que pour pouvoir travailler, mais rencontrer ces personnes j’ai dû m’ouvrir à moi-même. Je pense que ça, ça a été un point extrêmement important, c’est-à-dire m’interroger sur moi, sur qu’est la vie, sur c’est quoi mes valeurs, et je pense que ça c’est un point important qu’elle m’ont apporté parce que.. vous savez, moi j’avais appris qu’il y avait le bien et le mal, vous savez ces choses là. J’ai eu une éducation religieuse, catholique, qui fait qu’il y a le bien le mal, et puis le pêché véniel et mortel, je crois que je les ai pratiquement tous fait à part tuer du monde, parce que c’est bon la transgression, et puis ces personnes m’ont appris la transgression, m’ont appris l’humain, mais m’ont appris le fait que, là attend, Alain tu es qui dans cette situation pour te permettre de juger, et pourtant, c’est important de porter des jugements, parce qu’il y a que comme cela qu’on peut construire aussi des relations. Enfin quand je vous vois, et c’est la même chose pour vous, simplement vous portez un jugement sur qui je suis, moi sur vous, mais simplement parce que je vous vois, je vous regarde et autre, par ce que je suis, et quand je vous vois, je me vois, vous êtes un miroir et les personnes, c’est d’accepter que ces personnes déficientes étaient un miroir pour moi. Donc est-ce que j’ose prendre le risque de m’interroger et d’oser prendre le risque qu’elles ont quelque chose à m’apprendre. C’est quelques chose qui m’est resté, donc oui j’ai rencontré des personnes, il y a des personnes avec qui je suis toujours en lien là aujourd’hui. Il y a des personnes que je n’ai jamais quitté comme relation, certaines oui, ça a disparu comme beaucoup de relations. Dans ma vie j’ai croisé des centaines, miliers de personnes, de part mon activité et puis certaines sont devenues des amis, et puis chez ces personnes, la même chose, simplement on partage pas toujours comme… je vous en parlerai quand on parlera d’ici et maintenant, moi j’ai des amis qui étaient là hier, je veux dire avec qui on partage le quotidien mais ces personnes… votre question est intéressante car il ne suffit pas comme professionnel de dire aux autres, rencontré ces personnes, partager des moments, soyez des amis. Il faut, c’est ce que j’ai appris et continue à mettre en place, balaye devant ta porte, mais en même temps faisant l’expérience avant de dire à d’autres de la faire comme professionnel parce qu’il ne suffit pas d’être dans un bureau, il faut oser partager un repas et boire un verre avec mon ami Juan, qui habite juste en face et puis aller chez Servette, là à côté, et puis boire un verre avec lui et partager son quotidien, ou avec Patrick, même si ces personnes, parce que la vie est faite comme cela, les systèmes sont fait comme ça… Là, aujourd’hui, on retourne à l’enfermement et ces personnes, aujourd’hui se retrouvent en institution, c’est triste au possible, mais impuissant face au système, et je pense que c’est important de le savoir. Avec le professeur Eisenring, on proposait logement, habitat, loisirs et autres. Il y a des choses qui continuent comme ceci mais on a créé des grandes institutions toutes ces dernières années. Et je pense que c’est quand même important de le savoir, oui c’est beau, à Genève on a énormément d’argent mais moi ce que je vous dis je l’ai réalisé, je l’ai proposé à des amis. Ils ont découvert au travers du club du mercredi, des vacances, il y a eu des rencontres, des vraies rencontres dans la vraie vie, comme ça peut se passer avec vous, des personnes de votre entourage, de votre quartier, ou comme ça, dans un tram, vous croisez un regard et vous tomber amoureuse, et puis à partir de là, moi j’ai des personnes aujourd’hui, vous imaginez, des années après, continue à se voir, sont devenues des amis parce qu’ils partagent des repas une fois par semaine en famille, parce que la personne handicapée était pendant des années seule et autre, ça fait des années que cela dure, mais tiens, j’aimerai me trouver un logement, la personne fait marcher son réseau et autre, et je pense à une personne Patrick, il était en institution et ensuite en foyer et ensuite en logement, il a voulu déménager, il a fait marcher son réseau, c’est-à-dire les amis, comme vous et moi. S’il va se présenter dans une régis vous oubliez… on lui ferme la porte sur le champ. Et là je ne parle même pas de personne psychiatrisée, mais avec sa dégaine un peu tordue quand il marche sur le trottoir, c’est un homme extraordinaire, vous pouvez le rencontrer il prend son café le matin au début de la rue de Carouge. On se croise, on discute et autre, pas de souci. Oui des rencontres réeles, sur le plan humain, de personne à personne, c’est à dire que l’on a des choses à partager en terme d’émotions, de sentiments, des choses de la vie, moi je crois que c’est ce qui me permet de réussir ma vie, c’est la rencontre avec autrui, parce que autrui vient m’interroger. Est-ce que je suis capable de m’interroger par des personnes qui apparamment sont, peu ou gravement touchées. Si je me laisse touché par ça oui, pas de souci.

Pourrions nous revenir sur le QUATRE ?

Ça me semblait important les prémisses, vous comprenez, parce que la psychiatrie, vous savez, c’est un monstre… avec des professeurs, des docteurs, des médecins-chefs, des chefs de clinique, des infirmiers, des concepts, des DSMIII, IV, je crois qu’on est au V là maintenant qui augmente chaque fois parce qu’on définit les maladies, et puis il y a les malades et nous ! et avec Jean Jacques Eisenring on était au CPSU, Centre Psychosocial Universitaire de la Jonction, c’est intéressant en terme de désinstitutioNnalisation parce que psychothérapie institutionnel, la biologie, et puis là on reparlera du professeur Tissot à qui on a confié ce secteur là, même quand il y a eu l’affaire d’Alain Urban, toute la structuration, je l’ai ici dans un texte. On lui confie après toute la chair de biologie et puis Birensdean ( ? ), tout ces gens qui avaient d’autres visions. Et avec Eisenring on a donné des journées d’études, on a présenté nos expériences avec les personnes handicapées mentales et le professeur Garonne, qui était en charge du CPSU. Il y avait deux personnes, le professeur Enal, il était plus branché sur psychanalyse, et puis le professeur Garonne sur tout ce qui était psychatrie sociale. Ils étaient là les deux lorsque nous avions fait cette journée d’étude en 1975 et puis, Garonne, quand il a entendu ça, c’est un homme extraordinaire, en politique et autre… misère pourquoi pas faire ceci avec des personnes dites chroniques de Bel-Air ? Moi j’ai reçu un coup de téléphone, il y avait Jean-Claude Drauss, qui était le directeur administratif du centre psychosocial. Là même chose qu’avec Einsenring, on s’est rencontré, on est allé manger ensemble… Est-ce que tu serais prêt à mettre en place la même chose que vous faites, on parlait du club du mercredi avec des personnes venant de la psychiatrie adulte dite chronique ? J’en connaissais un petit bout, là j’ai parlé des vacances et autres ,mais un champ que j’avais développé, ça va un petit bout sur le champ de ma formation artistique, j’avais développé tout le côté artistique des personnes handicapées mentales, à l’époque, et entre autre avec une artiste Françoise Regamet et on avait mis en place des ateliers, et quand j’étais à Bel-Air en sociothérapie, mais psychiatrique, pas avec les personnes déficientes intellectuelles, j’avais travaillé a Chouni, il y avait un pavillon en dehors de la clinique, tenez vous bien… vous allez comprendre, ça va rejoindre le QUATRE, on avait exclu les personnes dites chroniques à l’extérieur de la clinique, on les avait mis dans un pavillon a Chouni, vous savez le village… et il y avait une très belle maison de maitre. On était denouveau dans les soins et autres, et moi j’avais travaillé avec eux, avec ce que l’on trouvait à l’époque, j’avais trouvé de la peinture, et autres, toutes sortes de choses et autres, des dessins, on avait même fait une exposition pour dire venez voir ! Je crois que nous avons eu une personne quand même, c’était sympa…qui était venue de Bel-Air. Mais bref, nous nous avions eu notre plaisir et Garonne dit : Avec toutes ces personnes et les pavillons de Bel-Air, est-ce que nous pourrions mettre quelque chose en place d’eux-même ? Vous savez moi je suis plutôt un homme spontané pur, qui aime un peu l’aventure, je sais que j’avais dit oui, mais sur le champ, un peu inconscient quand même. Alors on va réfléchir ensemble et c’est comme ça que dans les années 75-76, une réflexion s’est mise en place, eux savaient aussi que je continuai de travailler à Caritas, j’étais formateur, professeur à l’institut d’études sociales et puis, à ce moment, on s’est dit mettre en place un lieu d’accueil, on a appelé ça comme ça, mais on voulait un lieu démédicalisé et dépsychiatrisé. Garonne voulait un lieu démédicalisé, hors des soins, c’était sa vision même comme psychiatre, la psychiatrie sociale appartient aussi à d’autres personnes qu’au médecin psychiatre et aux infirmiers, je pense que là, ça me convenait, et on ne mettera pas cela en place, comme il existait à Bel-Air la sociothérapie au pavillon des Lilas, on mettera cela en place à l’extérieur. Comme j’avais le club du mercredi qui se passait au Pâquis, j’ai essayé de négocier avec Caritas, et les personnes qui étaient là à l’époque pour dire, est-ce que vous seriez d’accord ? les locaux qu’on utilise peu, c’était des locaux vétustes quand on les a pris, qui appartenaient à la paroisse Notre Dame mais qui étaient inutilisés depuis des années. Et puis, on a écrit, on a essayé de vendre notre histoire en disant on a besoin de vous Caritas, ce n’était pas l’aspect catholique, c’était simplement parce que l’expérience avait déjà été faite avec les personnes handicapées mentales eux ont été d’accord pour une année, et le centre psychosocial louerait les locaux, 5000 frs par an et puis, était d’accord que à l’intérieur il y ait le club du mercredi qui n’avait rien à voir avec le QUATRE. Ok ! On a mis cela en place pour les personnes, et le même mécanisme s’est fait, les personnes venaient de Bel-Air mais on avait cette idée dans ce que nous avions imaginé de faire venir les gens du quartier, c’était dans les objectifs. Ce n’est pas quelque chose qui s’est produit au départ. D’abord un, je pense que cela c’était une erreur, de faire rentrer les gens du quartier dans une institution plutôt que nous d’aller vers l’extérieur. Et le lieu d’accueil du QUATRE, nous avions aussi imaginé les permanences, en dehors, et volontairement, ce n’était pas toute la journée. Vous savez, la psychiatrie de secteur avait mis en place des ateliers protégés, des centres de jour, des centres d’occupation sociale, le COS, et même après il y a eu une plateforme, et à partir de là, on fait une permanence le midi de 11hoo à 14hoo et le soir dès 17hoo. Pourquoi on avait déjà cette idée, on ne veut pas que cela empiète sur les heures d’ateliers ou de travail, c’est des rencontres, un moment de partage avec d’autres personnes, et voilà comment est né le QUATRE, à partir d’un exposé qu’on avait pu faire et d’un travail et d’un intérêt et ce qui est intéressant, qui va bien avec les universitaires et les politiques justement. Ok, on met ceci en place, pour une année après on verra, c’est génial, je saute sur l’occasion. Comme j’étais à l’IES, j’avais une équipe d’étudiants de travailleurs sociaux, un peu bouillonant, qui faisait la révolution à l’institut , moi j’étais là comme enseignant, et l’école d’assisants sociaux, m’a demandé de faire avec eux, car j’ai une formation dans ce domaine, de regarder la dynamite de groupe, et de faire l’enseignement et à un moment donné j’ai donné l’idée à cette classe, que j’allais ouvrir un lieu et que si des étudiants voulaient faire un stage, pas de souci. Je me suis organisé avec l’institut, j’étais leur praticien formateur. Il y a 6 personnes qui ont décidé de faire leur stage, et le 4 janvier 1977, on a ouvert ça au 4 rue des Pâquis, voilà pourquoi, c’est aussi simple que ça, on n’a pas chercher midi à 14hoo. L’immeuble où on a commencé à été détruit puis reconstruit, et simplement on a entamé avec nos permanences, et quelques personnes ont commencé à venir, et souvent on les descendait de Bel-Air, il y avait un service de transports, avec l’écriteau sur le côté comme ça on sait qui c’est qui vient. En terme d’image c’est assez intéressant. Et c’est extraordinaire ce qui s’est passé à ce moment parce qu’on se retrouve avec des personnes, ça n’a plus rien avoir avec la déficience intellectuelle, on a des gens brillants qui ont fait des études, des apprentissages, il y en a qui sont institutionnalisés ou qui sont à l’hôpital depuis 10-20 ans, il y a une personne ici, j’ai son dossier complet, et ceci rejoindra votre question, par ce que c’est elle qui m’a appris mon métier. Avec des gens, sous médication, avec des gens qui là, viennent voir, et on les rencontre, on s’assoit, partage un repas, on s’était installé un petit bout de cuisine, c’était modeste mais ça a eu un impact assez important au niveau des personnes mais aussi au niveau infirmier et médical. On s’était fixé une règle, il ne venait pas mettre les pieds dans ce lieu, car ce n’était pas un lieu de soins. Je crois que cela était important. Et là très rapidement ces personnes ont exprimé des désirs, besoins, et qui étaient par mon ami J-P : Ecoute Alain, toi tu as des amis, un appart, un job, moi j’aimerai vivre comme toi, quand on vous dit… Moi j’ai honte, je lui ai dit, mais soigne toi, quand ça ira mieux on verra ! J’ai honte… Vous savez ce qui m’a répondu ? Alain, ça fait 35 ans que j’essaye de me soigner ou que je me soigne, et vous êtes mal avec ça. C’est là qu’on vous renvoit des questions. C’est vrai mais est-ce qu’on peut se soigner à l’hôpital et vivre à l’hôpital ? là dessus il avait raison, c’est tout d’un coup il vous renvoit des choses de la vrai vie, c’est-à-dire ce que vous vivez. Mais vous, comme on est dans la psychiatrie, et je vais parler des peurs avec les personnes déficientes, là vous avez encore les chocottes, parce que des crises il y en a eu. Des gens qui ont tout cassé, des gens qui vous agressent, et ça c’est nos mots, ce que l’on s’apperçoit, c’est que nous étions pas capable d’être à l’écoute réellement de ces personnes et de leurs besoins, il ne suffit pas de les nourrir et d’avoir un toit. Alors, avec l’équipe du QUATRE, c’était extraordinaire, on faisait un point systématiquement. Mais tous les jours étaient notés les informations, j’aimerai remettre la main dessus. Il y a des observations de toutes les personnes et une fois par semaine, on s’arrêtait un après-midi pour remettre toutes ces choses, et pour savoir où on allait. Et en même temps comme c’était un stage, ils avaient des comptes à rendre à leur école. Une des choses qui avait été dit à la direction administrative, au CPSU et à Bel-Air, si l’expérience est positive, on continue. En juin, on fait le point, un rapport avec tous le monde, la direction administrative mais en 6 mois, vous ne pouvez pas changer quelque chose qui a pris 35 ans, une personne a pris 35 ans pour essayer de dire que effectivement elle est une personne et pas uniquement une malade, qui pousse des cris pour pouvoir s’en sortir et se faire entendre, mais plus elle poussait des cris, plus elle voulait se faire entendre, et plus on médicalise parce que vous voyez bien, elle est en crise. On a vécu toutes ces choses là, et pourtant il y a eu une évolution, on est parti en vacances, je vous dis pas, j’avais entrainer cette équipe à partir en vacances, à Rochefort du Gard. On arrive à Rochefort du Gard avec toute l’équipe du QUATRE, et une dizaine de personnes dites malades mentales, on avait loué là-bas une petite maison. La personne vient nous ouvrir, à la personne décrite comme la plus folle ! Bonjour, parfait, vous êtes arrivés, entrez, je vais vous montrer que vous puissiez installer les personnes. On a commencé comme ça, c’était la personne la plus touchée, elle avait vu que du feu, elle ne devait pas savoir qui était qui, ça devait être la responsable, on s’est regardé, comme ça, c’est ça les apprentissages, vous êtes là et vous vous dites là il se passe quelques chose. Je reviens… la direction administrative nous dit on arrête là, il n’y a pas d’argent. Alors là, pour ceux qui me connaissent je monte les tours, je deviens un peu mauvais, vous nous faites faire cette expérience, c’est pour quoi, écrire un article ? Parce que là vous nous dites, il n’y a pas d’argent, d’abord un, vous le saviez avant, vous nous avez promis quelque chose là vous n’avez pas le droit de… Je veux dire c’était assez virulant, on s’est réunis à notre retour de vacances, on est en 77, fin juillet 77, on se retrouve toute l’équipe chez un des membres, on travaille toute la journée on fait quoi ? On va vous cherchez du travail, moi je dis, je poursuis qui poursuis ? Sans argent … tout le monde était partant, un engagement de ces gens là , pas dans la semaine des 35 hrs, on décide de poursuivre, à partir de là, on a annoncé à Bel-Air et au Centre Psychosocial qu’on poursuit. On poursuit jusqu’à décembre, et puis les gens non non, ont continue. On a mis tellement les gens mal à l’aise que l’expérience était en train de grandir que 6 mois plus tard, on essaye de faire les fonds de tiroirs. Très bien, nous on est d’accord de vous payer de 6 mois en 6 mois. Les gens ont été d’accord d’avoir des contrats de 6 mois en 6 mois, et puis d’année en année, jamais de contrat fixe, c’était renouveler tout le temps. Tellement mal à l’aise et au vue de la progression, voyant les résultats que les personnes pouvaient obtenir pour elle même, ils ont même décidé de payer le rétroactif. À partir de là, c’était important qur des gens puissent s’engager. Le lieu d’accueil s’est mis à vivre, s’est mis à être à l’écoute, de pouvoir rencontrer des personnes dites malades chroniques, c’était pour des incurables vous comprenez, parce que vous vous appercevez que personne n’y croit que ces personnes ont un potentiel, des capacités, peuvent modifier quelques chose dans leur vie. Mais il n’y a pas que les soins, il y a aussi les aspects psychosociaux, et il peut y avoir un partenariat qui se met en place sans créer la confusion… Mais vous y connaissez rien M. Dupont, vous n’êtes pas psychiatre, vous ne pouvez pas savoir le nombre de fois que je l’ai entendu, vous, les personnes la maladie mentale, stop, je veux dire, même si j’avais suivi les cours de Dachoriagera ( ? ), Garonne, au même titre que font les personnes psychiatres en dehors de la médecine avant, je veux dire, je peux vous conter quelques anecdotes, on a rencontré des personnes, je pourrai vous citer des parcours de vie mais on voulait que le QUATRE puisse vivre, tout en faisant partie, mais en étant à l’extérieur, du centre psychosocial, et on verra qu’il y a toute la naissance de TRAJET mais grâce aux personnes, nous ont aimerait bien avoir des activités et c’est comme cela que le potager de la Vendée à été mis en place au QUATRE, on en parlera la prochaine fois mais c’est le point de départ, mais c’est identique aux personnes handicapées mentales, là c’était des personnes dites chroniques où le lieu démédicalisé, je veux dire est de pouvoir tenir compte, vous savez aussi des réseaux naturels qui existe au sein d’un quartier, au sein de la vie en général, voilà en deux mots.



Mercredi 7 novembre Hôtel pension Silva

Diona : Je ferai la retranscription jusqu'à la 35 ème minute : jusqu'à la fameuse phrase «dès 1981 parce que le quatre continuait à vivre…».

Sandra: "Dès 1981 parce que le quatre continuait à vivre et à Organiser l’asssociation, c’est que c’était quelque chose qui était devenu important parce que ça se chiffrait quand meme à des dizaines de personnes au niveau de quand on regarde les statistiques de la fréquentation. Et il y avait des listes " (environ 35 ème minute) Sandra.