Notes sur journal Tout va bien

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Note de lecture à partir de la revue contestataire Tout Va Bien

La Revue « Tout va bien », (TVB) a été créée en 1972. Elle était tout d’abord un mensuel, jusqu’en 1978 (50 numéros), puis elle est devenue un hebdomadaire avant de disparaître le 8 avril 1983. Cette revue comporte plus de 240 numéros. Je suis allée les consulter, d’abord aux Archives Contestataires, puis à la Bibliothèque de Genève, et j’ai pu en extraire de nombreux articles traitant du mouvement anti-psychiatrique et des différentes tentatives de recherche d’alternatives : Plusieurs numéros de TVB témoignent de ce mouvement réactionnaire, cette volonté de faire « sauter les murs », de supprimer les rapports hiérarchiques, de changer de regard, dans le domaine carcéral (voir numéros sept-oct 75 « Prison : contre l’isolement », n°108, 175-176 ), dans le monde de l’éducation (voir le numéro de janvier-février 1973 à propos de « la communauté d’enfants de Lannaz/Evolène », le numéro de mars-avril-avril 76 sur « L’Ecole de Bouleyres », le numéro 181 du 4 février 83 « A l’écoute des enfants autistes » ), et dans la prise en charge de la toxicomanie (voir numéro « La vie au grand air », à propos de Toulourenc, Genève).

Dès 1973, TVB a consacré plusieurs pages aux remous qui concernent les institutions psychiatriques, surtout dans ses numéros parus dans les années 79-80 ; elle a même consacré un numéro entier le 17 octobre 1980. (N°80). Dans ses pages, on y apprend qu’en 1973, un groupe d’enquête, un collectif, s’est constitué pour dénoncer une certaine violence et certains abus de pouvoir au sein des asiles psychiatriques. Ils sont allés rencontrer, de manière informelle, les spécialistes de la Clinique de Bel Air. L’intention de ce groupe d’enquête était de déterritorialiser la psychiatrie. « La psychiatrie, c’est l’affaire de tout le monde ». Ils voulaient faire exploser la loi du silence qui régnait dans ces lieux. Ils ont écouté ces « malades » leur parler de politique, de travail, de famille, de désir. Ils parlent de l’impossibilité de parler, d’écrire, de lire. Dans cet asile, personne n’a le droit de parler. Ni les malades, ni les soignants. On retrouve dans cet asile le système hiérarchique que le malade retrouvera à la sortie de l’hôpital : soumission du malade à l’infirmier, soumission de l’infirmier au médecin, soumission du médecin aux pouvoirs de l’administrateur bailleur de fonds. Cette hiérarchie se veut rassurante et protectrice, mais elle est castratrice. Selon ce collectif , la psychiatrie , par la médicalisation du malade, cherche à rendre plus supportable les structures oppressives de la société, ses contradictions engendrées par le système capitaliste d’exploitation de l’homme. Elle cherche à rendre supportable ce qui ne peut pas l’être, elle cherche à rendre conforme aux normes répressives. Selon eux, l’institution psychiatrique est une institution de la violence.

Un article de TVB, paru en mars-avril 1976, écrit par un certain Pierre, nous renseigne largement sur ce mouvement anti-psychiatrique qui serait né au début des années 60: nous lisons que Bel Air, créé en 1900, a commencé à créer des pavillons ouverts avec l’arrivée de son nouveau directeur en 1959, Julian Ajuriaguerra. Son intention était de favoriser le retour de l’interné au plus vite dans leur milieu naturel, grâce à une hospitalisation de courte durée. Depuis 1963, le travail psychiatrique est sectorisé. On commence à organiser les soins dans des centres de consultation de quartier. Des premières tentatives alternatives apparaissent. Des travailleurs sociaux poursuivent une critique des institutions et contribuent à la création et au fonctionnement de centres (qui se différencient des institutions récupératrices) qui ont pour but de venir en aide à toute personne en crise. Exemple : le centre Liotard à Genève, créé par le réseau d’alternative à la psychiatrie de Suisse romande dont il sera question ci-dessous. En janvier 1975 se tient le premier congrès d’alternative à la psychiatrie de secteur (Congrès de Bruxelles). Il se veut être un partage d’expériences autour des alternatives au secteur. C’est en Italie surtout que l’on peut voir apparaître des alternatives possibles, grâce à des municipalités de gauche qui laissent davantage de possibilités de mettre en place des alternatives, des pratiques différentes. (A Reggio Emilia, on assiste à une dépsychiatrisationglobale). Un groupe de Genève a assisté à ce congrès et s’en est inspiré pour animer des débats au centre Liotard : recherche d’alternatives concrètes répondant aux besoins des malades (lieux de vie qui n’excluent pas les rapports humains véritables, activités répondant aux désirs de chacun).A Lausanne, le 24 janvier 1976, est créé un réseau alternatif à la psychiatrie pour la Suisse romande, dont l’un des actifs s’appelle Alain Riesen, du Centre Liotard. Une commission formée aussi bien de psychiatrisés que de soignants s’est formées. Elle a remis en question le pouvoir des soignants. Selon cette commission, le but d’une alternative au secteur doit être la prise en main progressive par le malade de ses propres difficultés. Dans cette vision, le soignant devient un simple « technicien » collaborateur du soigné. L’auteur de cet écrit nous renseigne encore sur l’évolution de ce mouvement, sur l’essor que prenait le courant critique : un deuxième congrès d’alternative à la psychiatrie a eu lieu à Paris du 5 au 7 mars 1976. Les expériences ont évolué, en lien avec le développement de la crise économique régnant à ce moment-là. Le réseau d’alternative à la pschiatrie de la Suisse romande s’est réuni ensuite deux fois depuis ce congrès auquel avaient participé un grand nombre de personnes de la Suisse romande. On apprend encore par le même auteur qu’à Bel Air, à la suite du scandale de la tentative d’internement d’une commerçante le 26 mars 1976, une circulaire a été distribuée : elle protestait contre les abus du pouvoir psychiatrique, et démontrait comment les mécanismes de la répression pouvaient conduire à l’asile. « Dans tous les pavillons, le tract a été diffusé, jouant le rôle de révélateur pour les centaines de cas passés sous silence ». (Article de Pierre dans le TVB de mars-avril 76). Selon lui encore, toute personne est concernée par ce débat, ce mouvement. Car nous avons tous, selon ses partisans, tendance à rejeter celui qui se comporte différemment, de peur de nous découvrir nous aussi différents... Le pouvoir psychiatrique « exclut », en vertu d’une prétendue normalité, les personnes qui se sont comportées autrement à un certain moment. Il cherche à les « normaliser », « le rendre docile aux exigences d’une société basée sur la consommation et le profit ». Le psychiatrisé est, de cette manière, « exclut » du système.

Pendant trois ans, entre avril 76 et septembre 79, TVB n'a plus publié, d'après mes recherches, d'articles sur le sujet de l'anti-psychiatrie. Un numéro ultérieur de TVB (5 décembre 80), relate cependant une expérience qui a eu lieu en automne 78 à Zürich, qui a rencontré beaucoup de succès et qui a consisté à la mise en place d’une permanence juridico-médicale « afin de mesurer sur le terrain l’utilité d’une institution neutre qui aide les patients à se débrouiller lors de conflits avec la toute-puissante machinerie médicale ». Suite à cela est née l’association Patientenstelle (endroit pour les patients). Son but : « Renforcer par l’information, le conseil et la communication mutuelle la position du patient dans le système sanitaire ».

Cela démontre qu'un mouvement réactionnaire se produit, témoignant d'une prise de conscience: le patient ne veut plus être manipulé, il ne veut plus être le cobaye, il ne veut plus être muselé par le pouvoir du médecin. Il veut choisir son mode de guérison, il veut être actif dans le processus de guérison.

C’est dans le numéro du 3 septembre 1979 qu’il est à nouveau question d’alternative à la psychiatrie: Une certaine Mireille Valette y relate son expérience vécue lors du « Congrès européen de psychologie humaniste » qui s’est déroulé à Genève fin juillet 1979. Elle exprime ici son désarroi face à une prolifération de nouvelles thérapies, face à des approches humanistes. Dans ces nouvelles thérapies, on abandonne le verbal, c’est donc la fin du règne de la psychanalyse et des psychothérapies longues. Maintenant, c’est l’approche par le corps qui y est prôné, et l’expression des émotions. C’est l’introspection, l’aventure intérieure. On s’inspire de la philosophie orientale, on parle de parapsychologie, de bio-énergie, et même d’astrologie… Ce témoin se disait convaincu de l’intérêt de nouvelles approches, mais s’est senti perplexe face à certaines orientations plutôt inquiétantes… Dans la même mouvance, Marie Bonnard, (TVB n°37, octobre 1979) pointe du doigt un hôpital psychiatrique « hypertrophié », celui de Marsens (Fribourg). « Marsens-prison », « « Marsens-dépotoir », et même Marsens-ghetto », lit-on dans ses lignes. On y a régulièrement fait peau neuve (de « maison de fous » il est devenu « asile », puis « hôpital »). On y a construits de nouveaux pavillons de soins. Mais selon l’auteur, il ne s’agissait que de « raccommodages », pour faire croire que l’institution bouge… Selon elle, il manquait une conception globale du développement de l’hôpital, et même une conception globale des soins psychiatriques dispensés dans le canton. Il fallait prendre en main le dossier de « Marsens-malade », mais aussi « s’attaquer à l’ensemble du problème de la santé publique à Fribourg ». D’ailleurs, l’Institut suisse des hôpitaux venait de rédiger un premier rapport critique envers le mode de traitement psychiatrique traditionnel utilisé à Marsens. Son directeur, le Dr Rémy, ne semblait pas prêt à faire éclater les murs institutionnels, à décentraliser, à faire de la prévention…

En décembre 79, dans un autre numéro de TVB, sort à nouveau un article consacré à l’hôpital psychiatrique de Marsens. On y parle de « névrose institutionnelle », de départs massifs chez le personnel médical et soignant qui aurait commencé trois ou quatre ans auparavant. Ils « fuiraient » Marsens, « pour d’autres lieux plus tolérables ». C’est surtout les pavillons fermées 4 et 5, qui enfermaient les personnes les plus « dangereuses », qui est critiqué : « On a fourré pêle-mêle alcooliques, oligophrènes, toxicomanes, vieillards agités, débiles profonds »… « Ils sont gardés, plutôt que soignés »… « Des lieux à l’abandon pour des malades à l’abandon », lit-on dans cet article choc. Ces pavillons sont marqués par le concept de traitement psychiatrique qui était utilisé depuis leur construction. « C’est un lourd héritage que ni la direction ni les autorités politiques n’ont pu et voulu remettre en question » TVB 3 décembre 79). Quatre mois plus tard, un article paraît dans le TVB d’avril-mai 80 au sujet des tentatives du nouveau directeur de la clinique psychiatrique de Bellelay (Jura bernois), d’y changer les pratiques en vigueur. Le Dr Harutyun Van s’est battu pendant des années contre les hospitalisations avant de se retrouver à la tête de cette clinique psychiatrique. Selon lui, ces murs, ces constructions, sont totalement inadaptées aux nouvelles approches psychiatriques, malgré les changements qu’il y a apportés à son arrivée. Il a « ouvert » les murs de la clinique, en mettant à disposition des appartements protégés, ou des maisons de vacances. Mais son souhait est que la clinique soit située plutôt à l’intérieur d’une ville, « afin que les malades puissent le plus possible avoir des contacts humains et une vie « normale » (…) Il faudrait s’inspirer de la notion de liberté et non d’enfermement » (Propos recueillis par M. Vallette, TVB avril-mai 80).

Des articles parus dans les numéros 76 et 77 (été 80) font réaction à l’événement atroce du 29 juin 80 : la mort d’Alain Urban pendant une cure de sommeil non consentie. Les langues commencent à se délier à propos des faits graves qui se passent à la Clinique psychiatrique genevoise de Bel-Air… Un numéro du TVB (10 octobre 80) est consacré à Franco Basaglia, mort le 29 août de cette année. Le titre de l’article est évocateur : « Abattre les murs de l’asile ! ». Il relate le parcours de Basaglia, qui s’est appuyé entre autres sur les modèles de l’anti-psychiatrie anglaise et française (Cooper, Lang, Foucault, Caxtel) pour mener sa lutte. Il s’en est surtout pris aux conditions de vie moyenâgeuses réservées aux malades mentaux. « En quelques années, il démantèle l’asile et expérimente les premiers éléments de sa conception territoriale (et non plus institutionnelle) de la folie :le malade est soigné dans son milieu social » (TVB 10 octobre 80). On apprend, dans ce même numéro, par un certain A.H., que le Conseiller d’Etat chargé de la santé publique a annoncé la constitution d’une commission d’enquête « sur les conditions d’accueil des patients à Bel-Air, sur la nature et la valeur des thérapeutiques appliquées, sur le poids de la recherche et son influence sur le bien-être et le respect des malades ». (TVB n°79, 10 oct 80). L’ADUPSY et l’Association des médecins progressistes ont interpellé la presse « pour rendre publics un dossier circonstancié sur la mort d’Alain (…) et surtout un dossier important sur les recherches poursuivies presque à huis clos depuis plus de dix ans par le directeur médical de Bel-Air, René Tissot ». Ils rappellent aussi qu’en 1974 déjà, les médecins assistants et les chefs de clinique « s’étaient vivement élevés contre les conditions dans lesquelles la recherche était menée par René Tissot , sans autre résultat que le déplacement de l’un d’eux ». On peut lire, dans ce même article, la « lettre ouverte au Conseil d’Etat », écrite par l’Association des Médecins Progressistes (AMP). Leur lettre est composée de questions, qui pointent du doigt les pratiques douteuses du Professeur Tissot, et aussi de revendications : suppression des isolements, priorité aux instruments de soin ambulatoire, augmentation des effectifs globaux du personnel soignant, etc. Ils expriment également leur soutien aux revendications concernant le droit des patients : « Le consentement du patient ou de son entou-rage immédiat doit toujours être recherché, dans la thérapeutique comme dans le recherche ».

Un numéro complet (n°80) paru le 17 octobre 1980, se penchent sur « l’affaire Bel-Air » et a pour titre « Psychiatrie : Les cobayes du professeur ». TVB entame ce numéro en exprimant son indignation vis-à-vis du manque d’information relayée par la presse au sujet des « remous qui secouent les institutions psychiatriques genevoises » (TVB, 17 oct 80). Aucun journal de presse genevois n’a daigné s’exprimer au sujet de l’important dossier élaboré par l’ADUPSY et sur les infamies qui se pratiquent à Bel-Air ! « Une fois de plus, la folie est rejetée dans son ghetto ». L’ADUPSY a été nommée « coupable de troubler l’ordre public dans le domaine de la santé ». (TVB n°120). Un certain Jean Steinauer, journaliste, relate dans ce numéro les différentes étapes de l’affaire Bel-Air. Il détaille également la manière dont se font les expérimentations du Professeur Tissot et du Dr Dick, leurs recherches sur la « consommation cérébrale » du triptophane radioactif… Les questions posées sont cruciales : Faut-il ou non faire de la recherche fondamentale, hors de toute perspective thérapeutique immédiate ou à court terme, en utilisant les malades comme sujets d’expérimentation ? Il y a conflit entre les besoins du patient lui-même et les besoins du chercheur… Ce qu’on lit encore ici, c’est que le Pr Tissot s’est déclaré « pas du tout prêt à attendre que les gens soient d’accord pour les soigner comme il croit en conscience devoir le faire ». (Jean Steinauer, TVB 17 octobre 80). L’auteur de ces lignes avance également que ces recherches étaient certainement discrètement financées via un certain laboratoire pharmaceutique connus…

Dans au moins 7 numéros suivants (N°120 18 sept 81, n°121 25 sept 81, n°148 2 avril 82, n°160 25 juin 82, n°163 1er octobre 82, n°166 22 oct 82, ainsi que le n° 171 du 26 nov 82 « Toute la vérité sur Bel-Air »), la psychiatrie genevoise est en ligne de mire: Jean Steinauer relate tous les rebondissements liés au rapport de la commission d’enquête sur les Institutions universitaires psychiatriques genvoises » (IUPG) : Bel-Air ne serait pas seule en cause, ce serait tous les IUPG qui seraient malades… Des organisations telles que l’ADUPSY ou l’AMP ont pu attester que le malaise psychiatrique genevois n’est pas lié uniquement aux expériences contraires à l’éthique de Tissot mais qu’il est bien antérieur au départ du directeur précédent Ajuriaguerra. Comment aménager désormais les institutions psychiatriques ? Il faudrait consolider le pouvoir infirmier face au pouvoir médical, et il faudrait consolider le pouvoir de l’usager face au pouvoir de l’institution. « On ne fera pas une psychiatrie progressiste à l’intérieur d’une médecine autoritaire dans un Etat conservateur » (TVB n°121) Et il est urgent d’augmenter les effectifs côté infirmier. Une autre question importante : comment assurer les droits du patient ? Selon l’AMP, il faudrait ériger une loi, et non plus simplement des règles éthiques. La même question revient depuis les années 70 ! Deux ans après la mort d’Alain Urban, qu’est-ce qui a bougé ? L’ADUPSY est en colère, car rien ne s’est fait quant à leurs revendications de base. Le souci des postes à repourvoir (rois, vice-roi et barons de la psychiatrie genevoise) semble avoir pris le pas sur la nécessité de réorganiser les IUPG. Pourquoi n’a-t-on pas démoli les cellules d’isolement ? A-t-on interdit les traitements de choc ? Pris des précautions éthiques quant aux traitements à hauts risques ? Réduits les internements forcés ? L’ADUPSY est en colère contre les lenteurs de la procédure pénale ouverte après la mort d’Alain. « Le Conseil d’Etat n’a pas eu le courage de tirer les conséquences évidentes des résultats de l’enquête qu’il avait lui-même commanditée » (TVB n°160). Il n’a proposé qu’un compromis qui règle le partage des pouvoirs, mais n’a rien proposé pour la protection des patients. Dès le 1er octobre 1982, un nouvel organigramme des IUP est mis en œuvre. Il s’agit d’une organisation intra et extra hospitalière de trois secteurs de la psychiatrie adulte (Jonction, Pâquis, Eaux-Vives). L’accent est mis sur les soins ambulatoires, on crée des centres de thérapies brèves, fonctionnant comme alternative à l’hospitalisation. On voir alors apparaître une « contre-attaque des tenants d’une psychiatrie où l’hôpital garderait toute son importance comme symbole et garantie de l’ordre public » (TVB n°163). Le Groupe VPOD de Bel-Air réagit : Cette réforme veut casser l’hôpital-bunker, mais elle conserve un côté hiérarchique ( chefs, sous-chefs, cheffaillons) ; d’un côté on veut faire sortir la psychiatrie de l’hôpital, et d’un autre on réorganise tout sur un mode hospitalier, le mode hiérarchique !

Pour son dixième anniversaire, TVB sort, le 26 novembre 82, en collaboration avec l’ADUPSY, un livre écrit par Jean Steinauer, « Le Fou du Rhône. Documents sur la crise psychiatrique genevoise » Selon cet auteur encore, la crise des institutions psychiatriques ne changera pas grand-chose. Car la Santé est liée à la Justice, et au Pouvoir. « La crise de la psychiatrie genevoise (…) est celle d’un pouvoir littéralement devenu fou (…). Un pouvoir fou, parce que ses mécanismes de surveillance sont débranchés de fait depuis belle lurette, et que nul contre-pouvoir ne l’équilibre : ni du côté des travailleurs de la santé mentale, ni surtout du côté des patients, des usagers » (TVB n°171). Pour ces auteurs, ce n’est pas les restructurations, les organigrammes qui changeront quoi que ce soit ; ce sont les exigences posées quant aux « droits des malades ». Une initiative populaire est lancée.

Une des interventions nécessaires ne consiste-t-elle pas en un changement d’attitude au niveau de la population, du voisinage, de la famille, face au malade ? Sa pathologie n’est-elle pas qu’une réaction à des rapports sociaux et familiaux difficiles ?