Entretien Rina Nissim

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Retranscription : Entretien avec Rina Nissm


R: Alors est ce que vous avez réussie à lire les témoignages

J : Oui, sauf pour la deuxième partie de Emma parce que depuis notre domicile, c’ est impossible de l’ avoir, elle est pas en ligne.

R: Non mais attendez, c’ est déjà un miracle, il est sorti à une époque où cela n’existait pas

H : En plus on a pu voir la vidéo Debout

R : Bravo ça c’est parfait: Parce que vous comprenez la spontanéité pour raconter un truc qu’ on a déjà raconté plusieurs fois, c’est un peu dure. Depuis les années 90 que je raconte donc bon voilà. Au moins vous avez quelque chose sur laquelle vous pouvez revenir.

H: Depuis quand et avec qui vous vous êtes engagés dans la lutte pour les droits de la femme et quel était à ce moment votre statut (ou fonction)? Dans quel contexte s'est inséré cette démarche ?

R : on avait toutes le même statut ca on pouvait pas en inventer un autre. Il n’ y a jamais eu de présidente, ni de trésorière ni rien du tout. Donc ça vous pouvez déjà l’oublier. C’est une organisation horizontale. Moi je suis rentré au MLF après mon interruption de grossesse, donc a 19 ans et j’ ai trouvé un tract qui trainait dans un local anarchiste je ne sais plus ou à la pénisserie et je me suis dit : tiens tiens très intéressant il y a un MLF qui débute donc je vais aller voir. J’étais parmi les plus jeunes de la bande.

J : Vous raconter justement dans Emma que c’est une amie qui vous a conseillé un gynécologue pour avorter

R : oui mais hors du MLF

J : oui voila

R: oui une copine de classe.

J: c’était un avortement clandestin ?

R: non non, rassurez-vous ! A Genève l’avortement, en suisse l’avortement était illégale mais chaque canton avait le droit de faire sa sauce puisque c’était les privilèges du fédéralisme. Donc le canton de Genève, la phrase c’était si la santé de la mère était en danger, Genève a décidé d’adapter la phrase, sa compréhension de la phrase au sens de l’Oms qui disait aussi que la santé c’était aussi au sens psychosociale dont cela permettait d’apporter des informations psychosociale. Donc détresse. Donc en effet, il fallait aller voir le gynéco et pleurer sa larme en disant mon Jules m’ a quitté. Cela ne va pas du tout, Il fallait voir un expert. Mais néanmoins c’était accessible. Donc quand on était un brin organiser on y arrivait. Il n’ y avait plus des avortements clandestins à Genève. Il y avait des avortements clandestins dans le canton du valais, dans le canton de Fribourg qui ne faisait pas cette interprétation de la loi. Il y en avait en France voisine, mais aucune de mes copines de ma génération n’a posé une sonde ou une aiguille à tricoter. Par contre, il y en avait, dans notre entourage pas lointain, mais pas à Genève parce qu’on avait accès à une filière meilleure..

J : Mais c’était dit, par exemple dans les cabinets des gynécologues ?

R : Mais bien sûr, mais oui puisque je vous répète que le canton de Genève interprétait la lois de manière progressiste. C’était légale à Genève. La procédure était que le canton doit nommer des experts qui doivent évaluer en quoi la santé de la mère est en danger, de la future mère. Donc expert par spécialité. Si diabète décompenser, on allait voir un expert qui était endocrinologue. Pour toute la partie psychosociale qui était bien sur la partie le plus importante, on allait voir un expert qui était psy. Les experts étaient nommé par l’état et les gynécologues savaient envoyer la nana chez l’expert pour avoir un avis conforme, pour qu’elle ne se fasse pas envoyer sur les roses.

V : Par contre ce n'est qu'à partir de 2002, qu'on ne demande plus l'avis d'un deuxième médecin ?

R : Bah oui parce que la loi a finalement changé en 2002. Mais maintenant les étrangères et on le raconte dans le bouquin, les étrangères avaient une autre filière. Elle devait passer devant une commission, donc des gens physiquement , elle devait se justifier et là il y avait pas mal de refus, c'était assez glauque mais ça on a fait tombé déjà avec le MLF dans les années 1970.Non, non ce n'était pas des avortements clandestins !Oh non! Vous n'inventez pas un truc des plus romantiques ou plus dégueu. Mais par contre j'ai eu plein de témoignages de femmes qui ont fait des avortements clandestins, mais alors c'était plutôt rural quoi. France voisine, rural faisait des avortements elles même. J'ai une dame elle se faisait des avortements elle-même. Mais il fallait être rural, et voila quoi pas avoir accès. Parce que chaque fois qu'on a accès à un truc médicalisé ben on préfère les trucs médicalisés c'est clair quoi. On n'est quand même pas... Enfin je ne vous souhaite de ne pas y retourner, parce que si cela passe le 9 février, vous êtes dans la merde les filles, hein ?!

H : C'est sûr !

R : Alors continuons.

V : Alors, Il y a-t-il un événement originel? Pourriez vous nous raconter un ou des événements marquant que vous avez mené ou qui vous ont frappé dans cette période en faveur de ces droits ?

R : Ben le plus important c'était l'avortement libre et gratuit, c'était l'accès à la contraception. Donc la pilule est apparue dans les années 60 mais beaucoup de gynécologue était contre la prescrire. Donc il fallait, l’accessibilité était problématique. Donc on avait déjà obtenu un planning familial, donc ca c'était déjà un progrès. Celui de Genèvé était un des premiers en Suisse. Donc ca c'était déjà une grande innovation si vous voulez, mais les mentalités y était pas encore si vous voulez. Donc il y avait des gynéco, il valait mieux ne pas trop aller chez eux parce que c'était clair qu'il n'allait pas vous l'a donner. Donc on faisait un espèce de listing, c'est une des choses qu'on avait fait avec le MLF, on faisait une espèce de liste pour savoir qui fait quoi ? Qui parle quelle langue ? Qui est paterno ? Qui est collaborant ? Vous voyez ce que je veux dire, enfin c'est pour gagner du temps, parce que sinon si on prends sur la liste du téléphone, en regardant ah celui ci il est dans mon quartier ! Vous voyez on peut perdre un temps fou parce qu'on ne va peut être pas tomber sur le bon. Donc oui les premières luttes du début du MLF des années 70, c'était l'accès à la contraception; l'avortement libre et gratuit, on ne va pas sans défaire puisqu'on recommence encore aujourd'hui. Donc c'est un truc visiblement profond. Par rapport à l'autonomie d'une créature c'est de mener les grossesses qu'elle désire et pas celle qu'elle ne désire pas, c'est quand même la base de l'autonomie. Je veux dire... Sinon on est cloué à la maison avec 11 grossesses dont 6 qui survives et puis beaucoup de travail ménager. C'est dur pour l'autonomie, hein ?

J : Est- ce que dans l’événement originel que vous avez eu ?

R : Ce n'était pas un événement originel, c'était les causes pour lesquels on luttait.

J : Le groupe Help-Self

R : Comment ?

J : Self-Help pardon !

R : Self-Help !!

J : Est-ce que vous pourriez nous en dire un peu plus ?

R : Alors, dans le MLF, il y avait des groupes de conscience. Donc la base du MLF, c'était des nanas qui se retrouvaient entre elle et qui se racontaient, ce que je vous recommande de faire toujours encore aujourd'hui, cela reste un truc valable. Ou je me tiens, ou j'en suis, et qui m'enmerde ? Est ce que mon père me laisse faire ce que je veux ? Mon père ? Mon médecin, mon curé ? Mon amant ? Et ce que je sais moi ? Non, qui sont les gens qui dans ma vie m'opprime, me limites mes choix ? Et en faisant ces groupes de conscience, en se racontant nos problèmes, on réalisait assez vite, c'est que ce n'est pas des problèmes privés, ce sont des problèmes qui sont communs. Parce que chacune quant elle à un problème, elle a un frère dominant, ou un père dominant ou est ce que je sais moi ? Enfin quelqu'un qui essaye de mettre la coupe quoi ? Elle peut croire qu'elle est la seule dans cette situation et que toutes les filles de sa classe sont certainement émancipées et heureuse et puis qu'il n'y a qu'elle qui est dans la merde. Donc vous voyez ce que je veux dire ! Donc à partir du moment ou on en discute et ben on réalise que non ce n'est pas un problème privé. Donc le personnel est politique. Déclaration fondamentale des bases du MLF, de réaliser que ce n'est pas un problème personnel mais un problème collectif.Le jour ou on le prends en main de manière collective, c'est là qu'on a quelque chance d'avancer quoi. Déjà par rapport à son image de soi-même et de la problématique et après pour des actions éventuelles. Vous voyez l'idée ? Donc ça ce sont les bases du MLF, ce sont des groupes de conscience. Après il y avait les groupes d'actions qui s'engageaient sur des sujets particuliers donc : avortement, contraception. Il y avait des mères, un groupe sur la folie. Donc des groupes comme ça. Mais c'était des groupes d'actions sur lesquelles on t travaillait sur des problématiques précises. Et puis le groupe self-help c'est le groupe qui est entre deux ci vous voulez. C'est à la fois un groupe de conscience et à la fois un groupe d'action. Donc ou on avait des travaux pratiques. On a appris à faire des l'auto examen, les spéculum, les mirroirs. Tout cela vous l'avez dans les témoignages. Alors là on faisait une partie travaux pratiques et puis une partie mise en commun de notre vécu. Donc si vous voulez, c'était un groupe mixte entre groupe de conscience et groupe d'action qui était pour moi particulièrement séduisant quoi. Et c'est de ce groupe là qu'est née; ah ba c'est avec ce groupe là qu'on est allé au ..lac à Annecy. Et ben oui c'était plutôt ce groupe là. Et c'est avec ce groupe là qu'on est allé les aider. Qu'on a acheté du matériel. C'est avec ce groupe là qu'on a. Bon on était très proche du groupe avortement évidemment. Il y avait un peu les mêmes filles mais le groupe avortement était beaucoup plus grand et le groupe self help était beaucoup plus petit. Parce que pour faire un groupe de conscience, faut pas être 40 sinon cela ne marche pas. Au niveau e la dynamique de groupe il faut plutôt être 6 ou 8, c'est un peu les bons nombre pour ce type d'interaction. Le groupe avortement était beaucoup plus grand bien sûr. Il y avait toutes les filles qui était d'accord d'acompagner des femmes chez les gynéco par exemple. justement pour ne pas perdre du temps et pour ne pas se tromper de porte et pour ne pas sonner à la fausse porte. La plus forte raison c'est si on vient de France voisine ou si on vient du fin fond du valais ou d'ailleurs. Faut gagner du temps parce que déjà qu'on en a perdu beaucoup à arriver jusque là, alors si on en perd davantage euh...On risque de dépasser les délais. Donc voila

V : Et est ce que la création du dispensaire a été un élément important pour vous ?

R : Oui bien sur, mais là c'est beaucoup plus tard. Ca c'est 1978, et là on parlait des années 70. Donc hein ? Donc après moi je suis partie, quand j'ai fini mon école d'infirmière, je suis partie aux E-U. j'ai visité des groupes : Feminism women sense center, womens help clinics, womens help services, Emma goal, des différents. Il y en avait beaucoup à l'époque. Il y en a encore mais beaucoup moins. Elles subissent d'ailleurs une répression violente de la part des Anti- avortement. Il y a eu des assassinats de gynéco, donc c'est vraiment très très tendue. Donc je suis aller les voir et puis en revenant je me suis dit, ça c'est le projet de l'avenir quoi, c'est ca qu'il faut faire plutôt que de travailler à l'hôpital et de se disputer sur tout ce qui ne nous plaît pas, donc on était quand même nombreuses à être en rupture avec nos professions, quelles quelles soient. Donc j'ai rassemblé les femmes du groupe Self-Help, et puis celle que je connaissais qui était en rupture avec leur profession qui était de gauche ou qui était féministe ou qui était démarqué, médecin, infirmière, sage-femme, et puis qui avait envie de faire autrement. plutôt que de toujours critiquer le système comme il est et puis de dire à il ne me plaît pas le système c'est une honte, il devrait être comme çi, il devrait être comme ça. Ce qui est utile aussi. Mais non on s'est dit ben nous une fois, on montre ce que nous on entend par un autre système. Ca c'était 76, on a mis deux ans à se préparer. Et on ouvre en mai 78, soit exactement 10 après mais 68.

V : Et ce que vous revendiquez aussi c'était la médecine douce à travers la naturopathie ?

R : Non, on ne renvidiquait pas la naturopathie à cette époque, on revendiquait une médecine humaniste, féministe et puis ne pas coller trop de médicament quand ce n'est pas nécessaire. On avait très peu de naturopathie. On avait le traitement des vaginites. Ca on avait beaucoup expérimenté dans les groupes Self-Help, ça on connaissait bien : l'ail, le citron, le bicarbonate de soude, tout ce que je raconte dans le mamamélis. Ca on savait faire mais pour des infections plus graves on n'avait pas de traitement naturopathique. Donc ça, ça c'est fait au dispensaire des femmes, avec des vraies situations, des vraies femmes. Donc quand elles avaiaent une vaginite. On leur disait bon et bien voilà, vous avez une vaginite a trichomonas, le traitement c'est le flagile mais c'est une belle merde, ca vous enfonce le fois parce que et d'ailleurs c'est marqué dessus qu'il faut pas boire d'alcool tellement c'est mauvais pour le fois. En alternative, vous auriez l'ail mais avantage et inconvénient, le traitement allopathique il prend deux trois jours. Le traitement naturopathie, il prend 10 jours à trois semaines/ Est ce que le partenaire, il sera d'accord d'attendre tout ce temps ? Ou est ce qu'il faudra lui remettre un présé en attendant parce que vous vous n'auriez pas fini le traitement et que lui aurait pris le flagil ? Alors qu'est ce que vous préférez ? Et puis la nana, elle disait ah ouais, ah bon mais alors qu'est ce que vous croyez qui est mieux pour moi ? Alors là, NON NOn, non. On recommence à zéro. Avantage et inconvénient Et vous, vous vous tenez ou dans cette posture et puis alors là quand on a fait ça pendant pas mal de temps, un moment elle nous on dit ouais mais alors là je ne comprends pas cette année je viens pour l'autre infection et puis là vous me dites de prendre le traitement allopathique parce qu'il n'y a que ça ! L'autre fois, vous m'aviez dit vous avez le choix entre un traitement allopathique et un traitement naturopathique alors comment cela se fait que cette fois vous ne me donner pas le choix ? Donc on a du bosser. On a du ouvrir des bouquins, on a trouvé des vieilles références en phytothérapie, ... ah bon bah d’accord. On a cherché, on a bossé. Cela s’est construit au dispensaire des femmes, ca c’est pas construit avant. Donc Mamamélis ça sort en 84 donc vous voyez il faut quand même quelques années quoi, pour mettre tout ça en place, d’expérimenter, voir si c’est plausible, si ça marche. J : Quels ont été les changements les plus importants auxquelles vous ayez assisté ? R : alors ça je regrette c’est une question bateau, … c’est vraiment difficile. Pfff. On a assisté à la libération des femmes ! Qui ont pris leurs mains en vie, qui ont décidé d’être elle-même, d’être un vrai sujet dans leur vie, dans leur sexualité, dans leur contraception, dans leur choix professionnel, relationnel, … je sais pas quoi. On a assisté au droit du divorce. On a assisté au droit pour l’avortement. Enfin déjà au remboursement par les caisses maladies en 81. Ce serait quand même une honte de supprimer cela aujourd’hui. Alors que c’est un acquis qui date même avant la légalisation de l’avortement, donc c’est quand même un peu fort le café. On a assisté à beaucoup de changement de cet ordre là, et cela fait depuis un moment que l’on est en total régression. J’ai la mauvaise nouvelle de vous annoncez que l’on est en train de perdre nos droits. Et si vos ainées on pu se reposer sur leur laurier en se disant « bon bah ce coup là c’est acquis, c’est bon je m’assoie dessus et je fais ma petite vie peinard ». Et bien votre génération c’est foutu ! Parce que là ça fait un moment que l’on régresse déjà ! Donc en raison de la crise, on voit un appauvrissement. Donc on voit un écart qui augmente entre les riches et les pauvres donc celles qui sont le plus vite touchée se sont les femmes seules à plus forte raison avec enfant qui en prennent plein la poire. Et on voit le naturel revenir au galop. Après 20ans de MLF, les mouvements sociaux ça va par vague. Donc après une vingtaine d’années du MLF, c’était pas très à la mode d’être un macho. Donc les mecs ils essayaient plutôt … voilà, d’avoir des cheveux long. De reconnaitre qu’ils avaient un féminin en eux. Que cela était une qualité aussi, éventuellement. Et les nouveaux pères qui savaient s’occuper eux-mêmes des bébés, les langer, … et maintenant on est en recul. Maintenant c’est de nouveau à la mode d’être un macho. Et puis avec la montée de l’extrême droite, en France, comme chez nous, c’est de nouveau autorisé de dire des choses que l’on osait plus dire. Il y a un certain nombre de jeune qui ont jamais changé d’avis au sujet de leur misogynie, ou de leur homophobie, ou de leur racisme… ou qu’est ce que je sais moi ? Mais ils fermaient leur gueule parce que socialement il y avait toujours quelqu’un qui leur bouclait le … en disant « enfin faut pas déconnes, arrête, … » et puis maintenant avec la montée de la droite ils sont désinhibés. Donc ceux qui la fermaient ils la rouvrent. Donc ils s’autorisent de dire des choses homophobes, raciste, misogyne ,… ce n’est pas encore perdu si vous voulez, parce que c’est un rapport de force. Mais quand même la pente elle est savoneuse donc on a vu la votation de ce weekend. L’UDC voulait renvoyer les femmes à la maison en disant que cela ferait un retour d’argent qui revienne aux familles. La femme s’occuperait de l’enfant à la maison. Et puis il y a eut un mouvement contre en disant « cela va pas ! cela va donner de l’argent à ceux qui n’ont pas de dépense, et cela ne va pas donner d’argent à ceux qui ont des dépenses et qui sont obligés d’être les deux à travailler ». Donc on favorise une famille au dépend d’une autre, ce qui n’est pas acceptable. On a vu les femmes de l’UDC, contré leur mec, … vous avez vu ? c’était grandiose ! Les mecs du pdc étaient pour, les femmes étaient contre et elles ont réussi à faire passer la voix de leur coté. Et elles ont réussi à l’emporter. Donc les femmes du PDC sont vachement à l’aise pour la votation du 9 février cela nous arrange. Elles vont certainement refaire le coup. Donc il y a une résistance de la part de la société mais quand même il y a une désinhibition d’avoir le droit d’être mysogine, homophobe, et raciste. Et ça c’est pas bon, ça c’est pas bon !


V : Est-ce que vous pensez que le mouvement Menfen ? … Femen ?

R : Femen ! C’est marrant vous êtes dyslexique toutes les deux, tiens.

V : est ce que …

R : Alors le Femen c’est comme nous au tout début. Le problème c’est que ce n’est pas un mouvement. C’est un groupuscule. Vous êtes étudiantes en quoi ?

V : En Sciences de l’éducation.

R : Ah… vous êtes en sciences de l’éducation, d’accord. Un mouvement, ce n’est pas un mouvement, c’est un groupuscule. Un mouvement c’est quand y a des milliers de gens dans la rue. On est d’accord, hei ? ça c’est un mouvement. Là ce n’est pas un mouvement, c’est des groupuscules. Là elles cherchent des actions que l’on peut faire à peu et qui soit frappantes. La barbe. Vous connaissez la barbe ?

V : Oui.

R : Bon bah c’est pareil. C’est des actions que l’on peut faire à peu. Donc c’est des actions pour rendre les autres attentifs à quelque chose qui ne va pas. N’est ce pas ? Mais ce n’est pas un mouvement. Pour qu’il y ait un mouvement il faut que la mayonnaise prenne. Et puis il faut qu’il y ait des milliers de gens qui soient d’accords et qui se bougent. Donc la on n’est pas dans une situation de mouvement, on est dans une situation où il y a des petits groupuscules qui font des choses bonnards. Mais ce n’est pas vraiment un mouvement. Alors on va voir si c’est un mouvement, il va falloir le prouver. Mais en France il y a eut pleins de planning familiaux qui ont été fermé y a le NFPS qui a envoyé des lettres, mais y a pas eu de manifestations dans les rues. Ce n’est pas bon. Du coup les autres ils peuvent croire qu’ils peuvent continuer à en fermer ! Vous voyez le problème ? et cela ne va pas du tout. S’ils en ferment il va y avoir pleins de nanas enceintes à l’adolescence. Parce que dans leur région ils auront plus accès à la contraception. Et puis elles vont voir le premier copain du coin qui leur dira « non mais avec moi la tirette ça marche, t’inquiète pas, moi je sais faire, tu peux me faire confiance je suis très expérimenté ».

H : Y a-t-il eu des valeurs que vous avez eu le sentiment d’avoir porter en avant et si oui lesquels ?

R : Ca c’est aussi bateau … pitié. Bah oui le féminisme, l’humanisme, le socialisme, l’anarchisme, … oui y a toutes sortes de valeurs que l’on a porté avec joie et fierté.

J : Nous sommes allées aux Archives contestataires à Carouge. Et dans les documents dont l’un s’appelait « Assez, de se taire » il y a des mots frappants comme la « réappropriation du corps ».

R : Bah oui cela nous ramène au groupe Self Help. C’est ça.

J : Donc est ce que vous pouvez le considéré comme l’un des droits ou l’une des valeurs pour lequel vous vous défendiez ?

R : bah oui certainement. L’autonomie des femmes disons le comme ça. c’est plus général. La réappropriation du corps fait partie de l’autonomie. C’est là où l’on se remet en sujet pas aux filles de, femmes de, … je veux dire. Ce changement de posture est fondamental jusqu’au fin fond de sa chair. Mais ça ce n’est pas un acquis. Ce n’est pas un acquis parce que … vous quand vous allez chez le gynéco, je suis pas sure que vous êtes sujet. C’est lui qui décide pour vous. « C’est mieux pour toi, prend ça. Comment ? tu l’as pas pris, mais enfin c’est une honte ». donc ce n’est pas un acquis ça. ça malheureusement c’est un truc qu’il faut recommencer à chaque fois à zéro. Et il faudra beaucoup de temps pour que cela soit un acquis. Est-ce que cela ne le sera jamais ?

(Pause : va chercher de l’eau et propose quelque chose à boire).

J : Vous en avez un peu parlé, mais qu’en est-il aujourd’hui de cette lutte et des acquis et des risques de retour en arrière ?

R : bah voilà, … on est en plein retour en arrière. Sur le droit à l’avortement, les Oui à la vie sont toutes très bien placé au niveau international. Y a un article que je vous recommande, de Jacqueline Heinen, qui est prof de sociologie, elle milite et elle écrit plusieurs articles et bouquins là-dessus : « L’agressivité des courants contre le droit de choisir panorama de la remontrance continentale ». C’est assez fâcheux comme chose. Avant elle a travaillé beaucoup sur la Pologne. Mais là c’est sur … Je vous laisse prendre la référence. On est en plein recul. Donc y a un ou deux pays qui ont avancé pour l’instant y en a douze qui ont régressé. Donc cela ne va pas du tout cette affaire, on a une très mauvaise posture. On est en mauvaise posture, donc sur ce plan là on est en recul. Et le problème c’est qu’il y a toute une génération qui croit que c’est ok. En réalité c’est pas ok du tout, c’est l’objet d’une tension. Il faut que cela soit très visible. Il faut vraiment que la bagarre soit visible pour que tout le monde réalise que ce n’est pas un acquis quoi. Malheureusement dans la société c’est comme ça, il faut tout le temps se battre. Ça c’est un point sur lequel on est en recul. Sur l’accès au monde du travail, l’accès à l’université, ça on l’a conquit. Il en reste pas moins que vous êtes plus nombreuses. Les filles sont un petit peu plus meilleur à l’école que les garçons. Dans pas mal de fac elles sont très présentes, voir parfois plus nombreuses. Mais alors dans les postes à responsabilité elles disparaissent. Donc là on est en recul. On est en recul, on est pas entrain d’augmenter mais bien de reculer. Dans le parlement on est en train de reculer. Donc y a moins de femmes députées, moins de femmes conseillères d’état. Donc on est en train de reculer. Donc c’est pas parce que l’on a Doris Leuthard et Eveline Widmer-Schlumpf … enfin on est en train de reculer sur ce point là. Et puis le plafond de verre, cela s’améliore pas non plus.