Utilisation des EIAH dans l'enseignement : Un meilleur apprentissage ?

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Résumé

Véritable boom suite à la crise sanitaire de la Covid-19, le numérique est en plein essor. Pourtant, Genève traîne la patte en ce qui concerne la transition numérique en milieu scolaire. « Pour la troisième fois en trois ans, un projet de numérisation à l’école primaire genevoise » (Gorbunova, 2022) a été refusé. « L’investissement dans le numérique n’offre pas de plus-value éducative au primaire ! » peut-on lire dans l’article de Gorbunova (2022). Qu’en est-il réellement ? L’utilisation d’EIAH n’offre-t-elle pas certains avantages ?

Introduction

L’essor du numérique a permis d’entrevoir une nouvelle manière d’enseigner, et surtout d’apprendre. Pour Mayer (2010), « apprendre par la technologie signifie utiliser des moyens technologiques dans le but de favoriser l’apprentissage » (p.192). Dans cette optique, les EIAH pourraient alors sembler être la solution. Un EIAH est un environnement informatique pour l’apprentissage humain dont la finalité est de susciter ou d’accompagner un apprentissage. Plus précisément, Tchounikine (2002, cité par Tchounikine & Tricot, 2011) définit un EIAH comme « un environnement intégrant des agents humains (apprenant ou enseignant) et artificiels (informatiques) et leur offrant des conditions d’interactions – localement ou à travers les réseaux informatiques – ou encore des conditions d’accès à des ressources formatives – humaines et/ou médiatisées – locales ou distribuées » (p.169).

Développement

Avantages et inconvénients d'un EIAH

Tricot (2021) a mis en évidence quatre contraintes à l’apprentissage, celles « [du] temps, [du] lieu, des savoirs à apprendre et de la manière de les apprendre » (p. 38).

Certains de ces aspects sont améliorés par l’utilisation des environnements informatiques comme le fait de pouvoir apprendre n’importe où et n’importe quand. A tout moment, une personne peut apprendre ce dont elle a besoin au moment T. Le numérique permet donc aux personnes de développer leur côté autodidacte. Par rapport à la contrainte de la manière d’apprendre, le numérique permet d’avoir une plus grande diversité des activités et des outils et ainsi proposer de nouvelles mises en œuvre des enseignements.

Qu’en est-il vraiment de la qualité de ces apprentissages ? Malgré le fait que l’apprenant puisse apprendre en tout temps, des études ont montré peu de différences concernant l’efficacité des apprentissages (Tricot, 2021, p.40). Prenons l’exemple de l’Université de Genève qui propose l’enregistrement de certains cours magistraux. Si cela peut sembler bénéfique de pouvoir regarder/écouter la vidéo selon son propre rythme, il semble que cela crée une surcharge cognitive car cela demande à l’apprenant de décider de faire des pauses et/ ou d’effectuer des retours en arrière (Roussel, 2020 cité par Tricot, 2021, p. 43). De plus, il est démontré par Edwards et Clinton (2019, cité par Tricot, 2021, p. 44) que lorsque la vidéo est disponible, les apprenants se rendent moins souvent en cours ce qui implique l’obtention de moins bon résultat que ceux qui continuent de suivre les cours en présentiel. Toutefois, il est important de noter que certains des étudiants de l’étude se rendaient en cours et visionnaient les vidéos de cours. Ces « apprenants qui s’engagent le plus dans la consultation de contenus additionnels sont ceux qui réussissent » (Tricot, 2021, p. 44). Cette disponibilité de visionnage spatio-temporelle satisfait majoritairement les apprenants, toutefois elles leur demandent des compétences de gestion du temps, ce qui peut être difficile pour certains.

On peut noter que les EIAH permettent un allègement de certaines des contraintes sur l’apprentissage, mais sans montrer un réel effet positif sur l’apprentissage lui-même. De plus, des études montrent que les EIAH ne sont pas bénéfiques pour tous les profils d’apprenants. Ils « peuvent pénaliser les élèves les plus fragiles, les moins compétents pour gérer eux-mêmes leur temps, leur lieu et leur manière d’apprendre » (Tricot, 2021, p. 52).

La clé pour un apprentissage de qualité

La clé d’un EIAH efficace, c’est à dire permettant un apprentissage, réside-t-elle dans l’étape de conception de l’EIAH ? Tout d’abord, il est important de définir le but final de l’EIAH. Va-t-il être utilisé pour améliorer les performances d’apprentissage ? Ou la motivation des apprenants ? Est-ce pour faciliter à l’enseignant d’assurer un suivi et une individualisation ? (Lavoué, 2018). Ensuite vient la question de la méthode pédagogique qu’il est important de définir car c’est celle-ci qui « permet l’apprentissage » (Mayer, 2010, p. 202).

Une fois l’EIAH conçu et implémenté auprès des apprenants/utilisateurs, les informations relatives à l’activité vont être collectées dans le but d’avoir un retour sur l’activité (Caron, 2018). Ce retour est essentiel afin de savoir par exemple si l’activité s’est bien passé (Caron, 2018). Ces données sont collectées grâce à l’observation de ce que font les utilisateurs et également grâce à des enquêtes et des entretiens afin d’analyser ce que les utilisateurs déclarent faire. En d’autres termes, on observe et analyse les usages. Cette récolte de données permet de mesurer l’appropriation (Michel, 2018). Celle-ci est défini par Carroll et al. (2003, cité dans Michel, 2018) comme « la manière dont les usagers évaluent et adoptent, adaptent et intègrent une technologie dans les pratiques quotidiennes ». L’appropriation est le dernier moment clé du cycle des usages de Carroll (2004 citée par Michel, 2018). Le premier étant l’adoption (l’utilisateur choisit ou non d’utiliser le système) et le deuxième l’utilisation (l’utilisateur découvre et adapte les fonctionnalités de l’environnement numérique à ses besoins d’utilisation) (Michel ,2018).

En résumé, si l’utilisateur s’approprie le système, c’est que celui-ci correspond à ses besoins, il peut adapter le système à ses besoins et le système s’adapte à ses évolutions (Michel, 2018).

Conclusion

Il n’est pas si aisé d’affirmer qu’un EIAH permet un meilleur apprentissage. Certes ils ont certains avantages comme d’améliorer la satisfaction des apprenants ou leur permettre d’apprendre n’importe où et n’importe quand, mais malgré cela, les études semblent ne pas montrer une réelle amélioration de l’apprentissage.

Cela peut s’expliquer par le fait qu’il existe différents types d’apprenants. Certains vont par exemple préférer regarder le cours à travers un ordinateur alors que d’autres préfèrent être assis dans une classe. On peut donc se poser la question de la personnalisation d’un EIAH. La solution à un apprentissage de qualité ne résiderait-elle pas dans la personnalisation de l’EIAH ? Ne devrait-il pas être personnalisable à chaque apprenant afin qu’il soit adapté aux besoins de chacun ? Dans ce cas, n’importe quel apprenant, peu importe le niveau d’enseignement, que ce soit du primaire jusqu’au tertiaire, pourrait en bénéficier.

Outre la personnalisation, il y a d’autres facteurs qui entrent en jeu comme la motivation de l’apprenant ou encore sa capacité à s’organiser et à gérer son temps. Ces éléments doivent également être pris en compte car ils contribuent à l’adoption de l’environnement informatique par l’apprenant.

Il est donc important que les recherches dans ce domaine continuent afin qu’elles puissent nous apporter davantage de réponses quant aux facteurs qui contribuent à la création d’EIAH permettant un réel apprentissage afin qu’il soit efficace et de qualité.

Références bibliographiques

ATIEF, Caron T. (2018, décembre 18). Analyse de Traces : Objectifs de traçage. Capsule vidéo du MOOC d’introduction à la recherche sur les EIAH. Youtube. https://www.youtube.com/watch?v=aQMnhcq4HBM

ATIEF, Lavoué E. (2018, décembre 14). Introduction à la conception des EIAH. Capsule vidéo du MOOC d’introduction à la recherche sur les EIAH. Youtube. https://www.youtube.com/watch?v=mZe0bRwrRzs

ATIEF, Michel C. (2018, décembre 15). Adaptation : Analyser l'appropriation pour analyser l'adaptation. Capsule vidéo du MOOC d’introduction à la recherche sur les EIAH. Youtube. https://www.youtube.com/watch?v=9soVe48UClo

Gorbunova, D. (2022, 14 mai). Transition numérique à l'école: pourquoi Genève traîne la patte. Blick. Consulté le 7 décembre 2022 sur https://www.blick.ch/fr/news/suisse/toujours-a-lage-de-pierre-transition-numerique-a-lecole-pourquoi-geneve-tra-ne-la-patte-id17487173.html

Mayer, R. E. (2010). Apprentissage et technologie. In H. Dumont, D. Istance, & F. Benavides (Éds.), Comment apprend-on ? (p. 191‑211). OECD. https://doi.org/10.1787/9789264086944-10-fr

Tchounikine, P., & Tricot, A. (2011). Environnements informatiques et apprentissages humains. In C. Garbay & D. Kayser (Éds.), Informatique et sciences cognitives (p. 153‑186). Éditions de la Maison des sciences de l’homme. https://doi.org/10.4000/books.editionsmsh.13926

Tricot, A. (2021). Le numérique permet-il des apprentissages scolaires moins contraints ? Une revue de la littérature: Éducation et sociétés, n° 45(1), 37‑56. https://doi.org/10.3917/es.045.0037



Auteure : Celina Marques Teixeira - Volée Baldur