Les différences et les imilitudes entre l'image statique et l'animation quant à l'apprentissage

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Resumé - Abstract


Le web regorge actuellement d’une multitude d’animations. Elles sont produites dans un but d’amusement, d’esthétisme ou d’instruction. De nombreux pédagogues préfèrent d’ailleurs ces dernières aux images statiques, qui sont toutefois couramment utilisées dans les manuels scolaires. Mais les avis sont partagés, car de nombreux chercheurs n’ont pas constaté une supériorité instructionnelle de l’animation sur l’image statique. Relativement à ceci, l’objectif du présent rapport est justement de décrire dans leur essence ces deux formats d’enseignement, pour pouvoir les comparer, donc examiner leurs différences et similitudes ; et entre autres discuter si les premières sont plus efficaces pédagogiquement que les secondes.

Mots-clés : animation, images statiques, graphiques statiques, interactivité, contrôle, efficacité, surcharge cognitive.

INTRODUCTION

Le web regorge actuellement d’une multitude d’animations. Elles sont produites dans un but d’amusement, d’esthétisme ou d’instruction. De nombreux pédagogues préfèrent d’ailleurs ces dernières aux images statiques, qui sont toutefois couramment utilisées dans les manuels scolaires. Mais les avis sont partagés, car de nombreux chercheurs n’ont pas constaté une supériorité instructionnelle de l’animation sur l’image statique. Relativement à ceci, l’objectif du présent rapport est justement de décrire dans leur essence ces deux formats d’enseignement, pour pouvoir les comparer, donc examiner leurs différences et similitudes ; et entre autres discuter si les premières sont plus efficaces pédagogiquement que les secondes.


HISTOIRE ET CONTEXTE

Dès les débuts de l’humanité, des dessins, des peintures, des motifs gravés ou taillés constituaient les premiers moyens de la communication humaine. Ils sont considérés comme des images puisqu’ils schématisaient ou illustraient des personnes et des objets du monde réel. A cette époque extrêmement lointaine, les messages sur pierre étaient toutefois difficiles à transmettre à distance de personne à personne. Bien des siècles après, l’avènement de l’imprimerie a permis que cela se fasse pour un grand nombre d’hommes. Au XXIème siècle, les images statiques se sont banalisées dans les écoles, en tant qu’illustrations pédagogiques. L’informatique a même permis au plus grand nombre d’utilisateurs d’en produire eux-mêmes à la maison et de se les échanger en un instant à l’autre bout du monde par l’intermédiaire du Web.

Quant aux animations, leurs débuts ne datent pas également d’hier. En effet, leur origine débute au XIXème siècle avec notamment l’invention du cinéma. Le principe est de présenter aux sujets des suites d’images statiques sur écran, pour leur donner l’impression que les objets représentés et perçus se transforment ou se meuvent naturellement dans le temps. Au XXIème siècle, la révolution numérique a amplifié exponentiellement la consommation domestique d’animations : téléchargements et échanges à grande échelle d’animations ou de vidéo, par exemple sur www.youtube.com, arrivée du cinéma virtuel en 3D par images de synthèses très réalistes, utilisation de simulations interactives sur PC, etc..

Pourtant, au niveau de l’enseignement, les animations ne se sont pas encore banalisées ; malgré le fait qu’un grand nombre de pédagogues croie à la supériorité de l’animation sur l’image statique, pour améliorer la compréhension de processus scientifiques (ex. la naissance et le développement d’une cellule). Au contraire, bien des pédagogues privilégient l’image statique pour la compréhension et la mémorisation d’informations, car elle génère moins de surcharge cognitive, que l’animation. De plus, elle n’implique pas l’emploi de moyens audiovisuels ou informatiques, contrairement à l’animation. Les avis sont donc partagés, d’où la pertinence de comparer ces deux formats d’enseignements.

DEFINITIONS ET CONCEPTS

L'image statique

Il est pertinent et nécessaire de commencer par une parenthèse, pour définir le terme. Dans ce rapport, le terme « graphique » est quelque fois utilisé à la place du terme « image » pour des raisons de renvoi fidèle à quelques articles scientifiques. Une telle substitution n’est pas erronée, dans la mesure où le premier terme est inclut dans le second, si l’on se réfère à Duval et Peraya (p. 1), qui considèrent génériquement "l’image" comme : "la gamme de toutes les représentations que l’on peut opposer au langage, ou que l’on met en parallèle avec un texte ou une autre explication verbale".

D’un point de vue sémiotique, ces auteurs observent cette classification d’images relative à leur degré d'iconicité et aux moyens qui ont permis de les crées :

  • les « images enregistrées », qui sont de nature iconique. Elles ressemblent donc à l’objet représenté. En outre, leur production dépend essentiellement d’instruments techniques (ex. une photographie prise par le biais d’un appareil photo).
  • Les « images dessinées », qui sont de nature iconique également. Par contre, leur production ne dépend pas essentiellement de techniques (ex. vidéo), mais de règles de composition sémiotique : illustrations, caricatures, épures, croquis, bandes dessinées, etc..
  • Les « images construites » de nature non iconiques, mais qui dépendent comme les précédentes de règles de composition sémiotique : graphes, graphiques cartésiens, schémas, figures géométriques, etc..

D'un point de vue plus ergonomique, en mettant l'accent sur les relations spatiales et utilisant le terme "graphique statique" Betrancourt, Bauer-Morrison & Tversky (2001) en dénotent deux types :

  • "les graphiques représentationnels" qui permettent à l’utilisateur de visualiser spatialement des objets concrets.
  • "les graphiques non représentationnels" qui permettent de visualiser de l’abstrait. Ces derniers peuvent toutefois utiliser des métaphores spatiales et la métonymie pour représenter un concept abstrait ou des liens entre concepts abstraits. Ainsi par exemple, la proximité spatiale entre un concept A et un concept B reliés par une droite peut être employée dans un graphique non-représentationnel pour communiquer un lien de causalité entre ceux-ci.

L'animation

Classification de différents d'animation en fonction des différents types d'images statiques qui les composent

Pour Duval et Peraya, l'animation consiste à présenter à l’utilisateur une suite d'images statiques, pour lui donner l'illusion d'un objet ou d'un système d'objets en mouvement. C'est donc la transformation d'objets ou d'images séquencées qui la caractérise. Puisque les images statiques les composent, les animations ont donc communs avec ces premières les mêmes caractérstiques sémiotiques. Les auteurs font d'ailleurs une classification qui part de cette misen en commun sémiotique, comme schématiser à droite :

  • tout d’abord, il y a des animations composées de séquences d’images, à caractère discret et non continu. Ces images sont soit illustrées, donc de nature iconique; ou alors construites, donc à caractère non-iconique.
  • D’autre part, il y a les animations par flux d’images continu. Une première sous-catégorie est celle des animations produites par le bais de montages. Dans ce cas, elles sont composées d’images enregistrées ou d’images dessinées. Sinon, deuxièmement, on trouve la sous-catégorie des animations distribuées en synchronie et composées d’images enregistrées sans interruption. Enfin, troisièmement, il y a la catégories d'animations composées d’images construites, c’est-à-dire produites uniquement par logiciel.

En outre, d'un point de vue ergonomique, pour Betrancourt, Bauer-Morrison & Tversky (2001, p. 152) : "l’animation est séduisante" et "sur le fond, l’animation devrait être le moyen le plus naturel pour communiquer le concept de changement dans le temps, de même que l’espace dans les graphiques est le moyen le plus naturel de transmettre des relations spatiales ". Dans cet ordre, on trouve par exemple des phénomènes météorologiques, des circuits électriques, des systèmes biologiques ou des dispositifs mécaniques. Enfin, l’animation paraît également être un moyen efficace pour communiquer des relations abstraites, comme par exemple la circulation des informations dans une organisation. Les auteurs en dénotent quatre types d’usage :

  • attirer l’attention, notamment par l’illusion de mouvement (ex. animation dans un site Web)
  • représenter dynamiquement le déroulement d’un processus
  • tout comme les graphiques statiques, aider à la communication dans un but instructionnel
  • l'intégration de l’animation dans une pratique interactive, comme par exemple la simulation où l’animation change en fonction des entrées de l’utilisateur. On entend en fait par " interactivité", la possibilité de contrôle du déroulement de l’animation : accélérer ou décélérer l’image, aller en avant ou en arrière, faire des poses, etc..

Enfin, il existe différentes formes d’animations qui peuvent se juxtaposer les unes sur les autres :

  • l’animation qui représente un mouvement sur la base d’une trajectoire,
  • l’animation qui représente la vitesse,
  • l’animation qui représente le mouvement des éléments d’un système les uns par rapport aux autres,
  • l’animation en 2D,
  • l’animation en 3D.

ENJEUX

L’enjeu est donc à l’avenir d’offrir aux apprenants des environnements technologiques qui permettent de se rapprocher au plus près des communications face à face. Ceci, pour les tâches d’apprentissage qui le nécessitent; et tout en gardant les avantages de l’outil et du traitement informatique, la flexibilité, ainsi que la distance entre les acteurs. Le but est en ce qui concerne notre thème de permettre une expression suffisamment intense des émotions. La visioconférence répond à ces objectifs, mais on pourrait l'améliorer technologiquement. A l'avenir il faudra en tenir compte, notamment au niveau pédagogique, comme l'explique si bien Guichon (2009).

Au niveau technique, l’enjeu est justement d’ajouter à la visioconférence d’autres sens comme le toucher, l’odorat, mais aussi l’orientation, la perception et l’audition dans l’espace. Ceci pour permettre une expression encore plus intense des émotions et motiver l'utilisateur. Enfin, comme on le voit sur le schéma de la communication par visioconférence, il faudrait que la technologie puisse immerger complètement les acteurs dans une réalité commune. Le but est que la prise de sens (y compris les émotions) puisse avoir lieu plus profondemment. On pourrait imaginer ainsi dans le futur, une sorte de réalité virtuelle partagée à distance, multimodalement, synchroniquement; se rapprochant au plus près des situations réelles de la vie.


EXEMPLES

Develotte, Guichon, Kern (2008) nous présentent dans tous les témoignages personnels d'apprenants qui suivent, une série d’exemples tirés de leur recherche de terrain à propos d'une situation particulière d'apprentissage des langues par visioconférence. Ci-dessous, le passage suivant illustre bien l’angoisse des premiers temps décrite auparavant :


" T 7 : le premier cours, […] c'était un peu du n'importe quoi. On a parlé tous les deux en même temps, on écrivait plus ou moins en même temps. […]. Et puis y a eu un blocage et on a eu… et puis y a eu un p'tit, euh, un p'tit, un p'tit, un p'tit creux au niveau de l'activité pédagogique donc sur le premier cours. […] Moi j'ai eu la montée du stress tout de suite avant et j'ai dit vas y commence !

T 1 : j'avais à chaque fois une sorte de stress et puis je n’avais pas envie, c'était c'est terrible, et dès que j'y étais, il y avait une énergie qui fait que les séances, elles passent très vite en général, ça se passe bien, enfin on ressort, c'est bien quoi."

Voici d’autres témoignages qui illustrent la détente des acteurs au fil des séances d’apprentissage par visioconférence :

"T 6 : au début, c'était plus, on va dire formel la façon de parler ou la façon de taper, d'être même devant la caméra et, au fur et à mesure, on se détendait ou on faisait un peu les fous fous devant la caméra ou on envoyait plus de smileys plus interactifs au fur et à mesure et, à la fin, c'est elles-mêmes qui ont demandé les adresses Internet".

Cette décontraction menant à un sentiment de présence sociale des acteurs :

" E 6 : they were our tutors and they were here to help us get our French better. "

On voit également dans ce passage la décontraction des apprenants au fur et à mesure de leur apprentissage :

" E 3 : what I really got from it [the videoconference] was that I always forget that when I'm speaking I don't need to be so concerned about being accurate, that when you speak and just kind of get in the mindset of the language, that the words are intended to just come up because that's, those are the words you're supposed to use, like the way I'm speaking right now. So when I'm in a classroom I find myself preparing a sentence ahead of time, but with that [videoconference] I was reacting on the spot, so I think it just developed an immediacy in terms of the way I spoke."

Progressivement on s’approche ainsi d’une situation réelle de communication face à face. Develotte, Guichon, Kern(2008) observent que les apprenants se lâchent à exprimer leurs émotions étant moins anxieux :

"E 3 : it seemed very level, like we were all on even footing, and it seemed like they [the tutors] were interested in what we were saying."

Le texte, c’est-à-dire la communication verbale vient également compléter leurs émotions positives. Par exemple, des apprenants n’étaient pas satisfaits de tout simplement « dire au revoir ». Ils tenaient également parfois à ce qu'on écrive une confirmation par écrit :

"T10 : à la fin d'une conversation, on est obligé de passer par l'écrit c'est bizarre parce qu'on est quand même encore en face […] mais… pour que ce soit vraiment au revoir […] on est obligé de l'écrire pour leur dire […] en fait c'est une transition ça veut dire […] on s'parle plus on l'écrit et après on se casse […] on fait coucou au revoir mais en fait au bout d'un moment il faut s'arrêter de parler et on écrit la même chose que ce qu'on dit finalement."

La vidéo sert également aussi bien aux apprenants qu’au tuteur à vérifier la compréhension commune des messages transmis :

" E 8 : I could tell when they understood that I was kidding by their faces and so on. So that would have been hard without the video."

Les étudiants étaient contents et curieux de pouvoir enfin observer les interactions physiques (gestes, expressions faciales) :

"E 6 : and like when they spoke they were really close to one another. I don't know if that's just a cultural thing but when E5 and I were talking to them we were approximately the space that we are right now [±50 centimetres], but they were like shoulder to shoulder. And they also laughed and giggled a lot with each other and said things like "Nous sommes fous!"

Un autre étudiant avertit ici des limites de la visioconférence comparée aux communications face à face :

"E 8 : I think the choppiness of the video… there was no real sense of the fluid motion—it was a slideshow. And so if you pay too much attention to gestures then it actually gets, I think you get an incorrect impression about how people are moving."

Cet autre étudiant a joué les limites de la technologie en surjouant lui-même parfois des grimaces ou en lançant des provocations. Par exemple, il proclamait être pour le réchauffement climatique en adoptant une attitude sérieuse, ce qui était absolument faux, ceci pour tester la capacité régulatrice de la tutrice. Ainsi des gestes peuvent être cachés par l’émetteur, alors qu’ils viennent contredire ses communications à l’écran.

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