La place de l'apprenant dans la conception d'un EIAH

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Franck Grisard - Volée Aegir

Résumé

Dans cet article, je tente de me pencher sur le rôle qu’occupe l’apprenant, activement ou passivement, dans la conception d’EIAH. La théorie de l’apprentissage et les différents modèles de conception d’outils pédagogiques viennent illustrer mes propos.

Introduction

Avec les environnements informatiques pour l’apprentissage humain (EIAH), on retrouve un moyen d’adapter au mieux les objets d’apprentissages à chaque apprenant. Leroux et al. (2017) présentent les technologies éducatives comme de « nouveaux espoirs pour individualiser et diversifier les enseignements » (p.433). Quelle place occupe l’apprenant dans le déploiement de telles technologies ? Comment contribue-t-il, activement ou passivement, à leur bon fonctionnement ? La littérature scientifique apporte quelques réponses à ces questions.

Développement

Penchons-nous d’abord sur des aspects plus théoriques des processus d’apprentissage qui, même dans le cadre des technologies, réserve une place prépondérante à l’apprenant. Selon Mayer (2010), il existe deux approches de l’apprentissage par la technologie. La première place la technologie au centre de la démarche. Il s’agit d’une approche qui faisait encore sens à la fin du XXe siècle, période durant laquelle les technologies venaient d’apparaître dans le paysage pédagogique et, parce qu’elles n’arrêtaient pas de se renouveler, exigeaient de ses utilisateurs qu’ils s’adaptent en permanence à la nouveauté. Aujourd’hui, la course à l’innovation s’est calmée et nos sociétés savent mieux utiliser les outils numériques qu’auparavant, donnant plus de sens à la seconde approche, celle qui nous intéresse. Elle donne le rôle principal à l’apprenant. On s’intéresse dans un premier temps aux mécanismes d’apprentissage de l’apprenant à qui l’on souhaite proposer une technologie pédagogique, pour ensuite l’adapter autour des besoins de l’utilisateur. Parmi ces mécanismes, Mayer fait appel à la théorie pour en énoncer un certain nombre :

  • Trois mécanismes d’apprentissage généraux, indépendants du support d’enseignement :
    • Le renforcement, issu courant psychologique behavioriste, qui récompense ou punit les réponses de l’apprenant en vue de renforcer ou de diminuer son association avec la situation.
    • L’acquisition d’informations, qui considère l’apprenant comme un simple récepteur passif de savoirs qui enregistre le contenu des enseignements et les garde en mémoire.
    • La construction des savoirs, qui place l’apprenant dans une posture active dans laquelle il doit comprendre et donner du sens aux savoirs.
  • Trois mécanismes d’apprentissage par la technologie :
    • Le double canal, qui stipule qu’un individu traite les informations verbales et visuelles distinctement.
    • La capacité limitée du cerveau humain pour traiter de l’information.
    • Le traitement actif des informations par l’apprenant à l’aide de processus cognitifs appropriés.

Cette théorie nous aide donc à mieux cerner la place et l’importance de l’apprenant dans les processus d’apprentissage et nous permet de mieux comprendre comment concevoir des outils pédagogiques, technologiques ou non, autour de cet acteur.

Dans la conception d’un EIAH, l’apprenant, qui dans ce cadre porte aussi le nom d’utilisateur, joue évidemment un rôle important parce que le produit est conçu pour lui. De ce fait, les technopédagogues emploient très souvent la conception centrée sur l’utilisateur, impliquant l’apprenant de nombreuses manières. Sanchez (2018) présente plusieurs de ces étapes en commençant par la persona ; on imagine un utilisateur fictif qui répond à toutes les caractéristiques de l’apprenant pour qui on conçoit l’EIAH. Plus tard dans la conception, on présente un prototype à de potentiels utilisateurs puis on recueille, en condition écologique, des données de leurs utilisations pour les analyser et déterminer ce qui fonctionne ou non dans son produit.

Le traçage de l’activité est aussi une étape du cycle de conception dans laquelle l’apprenant est à l’honneur. Caron (2018) revient sur trois méthodes reconnues pour récolter des traces d’activité auprès d’utilisateurs : les observations in situ, les entretiens et les questionnaires. Chacune d’elle présente ses avantages.

Enfin, il convient d’observer l’appropriation des EIAH par des utilisateurs pour voir s’il s’agit d’un système adapté, adaptable ou adaptatif. Michel (2018) propose de se pencher sur des facteurs contextuels. L’utilisateur représente les facteurs intrinsèques des usages d’un EIAH et donne des informations notamment sur la satisfaction qu’apporte le produit ou sur la facilité d’utilisation perçue. Ici aussi, un traçage de l’activité s’opère et permet une analyse approfondie des usages. Leroux et al. (2017) relèvent aussi que la durée des usages influent sur l’apprentissage :

« L’efficacité des dispositifs numériques pédagogiques doit également être étudiée au regard de la durée et de l’intensité des usages. De nombreuses méta-analyses mettent en évidence, parmi les modérateurs, l’influence de la durée des usages étudiés sur les gains d’apprentissage observés. » (p.442)

Conclusion

On peut donc s’apercevoir que l’apprenant occupe bel et bien une place importante dans la conception d’un EIAH, et intervient bien avant que le produit ne soit terminé. Il joue d’abord un rôle dans la théorie employée par les pédagogues qui doivent construire autour de ses besoins. Puis il participe activement à la conception en servant de cobaye, offrant des traces d’activité sur un prototype ou un produit quasi-fini pour pouvoir le peaufiner encore. Selon Sanchez (2018), il pourrait même à certaines occasions intégrer une équipe de concepteurs pour lui-même participer à la construction de l’EIAH.

Références bibliographiques

ATIEF : Ressources sur les EIAH (2018, 18 décembre), Analyse des traces : Objectifs de traçage [vidéo]. YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=aQMnhcq4HBM

ATIEF : Ressources sur les EIAH (2018, 15 décembre), Adaptation : Analyser l'appropriation pour analyser l'adaptation [vidéo]. YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=9soVe48UClo

ATIEF : Ressources sur les EIAH (2018, 14 décembre), Méthodes de conceptions : Recherche orientée par la conception [vidéo]. YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=iiN3Axy5a9c&feature=emb_logo

Leroux, G., Monteil, J.,Huguet, P. (2017). Apprentissages scolaires et technologies numériques : une revue critique des méta-analyses. In L’année psychologique, 117(4), 422-465

Mayer R. (2010). Chapitre 8 : Apprentissage et technologie. In Comment apprend-on ? La recherche au service de la pratique, 191-211. Santa Barbara: Université de Californie.