Impulsivité

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Qu’est-ce que l’impulsivité ?

Modélisation résumée de l'impulsivité
Modélisation résumée de l'impulsivité

L'impulsivité peut être définie comme un comportement sans réflexion adaptée, caractérisé par une tendance à agir avec peu de prévoyance, ou une prédisposition à des réactions rapides et imprévues à des stimuli internes ou externes sans tenir compte des conséquences négatives (Miller et al., 2022).

Ce construit psychologique fait donc référence d’une part à un ensemble de comportement incluant notamment la préférence pour la récompense immédiate et l’aversion aux délais, comme avancé par Steel et Konig en 2006 dans leur modèle de la motivation : la Temporal Motivation Theory. D’autre part, l’impulsivité fait également référence à la tendance à prendre des décisions (reflection-impulsivity) et à adopter des comportements (motor-impulsivity) prématurés (Caswell et al., 2015).

L'impulsivité est impliquée dans un certain nombre de troubles psychiatriques, particulièrement la manie, les troubles de la personnalité et les troubles liés à l'utilisation de substances. Mais intervient bien évidemment dans bons nombres de comportements beaucoup plus communs que l’on retrouve tout un chacun au quotidien, telle, entre autres manifestations, la procrastination (Steel et Ferrari, 2013).

L’intensité des comportements impulsifs pouvant évoluer sur un spectre de l’impulsivité selon des facteurs personnels et environnementaux, tout individu expérimente à son échelle des comportements impulsifs plus ou moins incidents sur une ou plusieurs sphères de sa vie : professionnelle, académique, sociale…

Le concept de l'impulsivité décrit donc aussi bien un trait stable de la personnalité ou un marqueur comportemental des actions et de la prise de décision (Herman et Duka, 2019).

Il existe cependant encore un désaccord important entre les chercheurs et les cliniciens concernant la définition exacte de l'impulsivité et la manière dont elle doit être mesurée.

L’impulsivité pourrait en revanche faire référence à un comportement adopté relevant de réactions rapides et imprévues à des stimuli internes ou externes à l’individu sans anticipation des conséquences négatives possibles.

Caractéristiques fondamentales de l’impulsivité

Sur la base de ces précédentes définitions, l’impulsivité semble reposer sur plusieurs facettes différentes et serait ainsi multidimensionnelle, où l’on retrouverait ces trois comportements distincts assez généraux :

  • Prise de risque
  • Manque de planification mentale
  • Prise de décision rapide

L’impulsivité selon l’échelle UPPS-P

L’échelle UPPS-P (Urgency, Premeditation (lack of), Perseverance (lack of), Sensation Seeking, Positive Urgency, Impulsive Behavior Scale) repose sur son modèle éponyme, et propose une définition de l’impulsivité comme un construit à plusieurs dimensions, comprenant cinq traits décrivant l’impulsivité.

L’échelle UPPS-P a été initialement développée par Whiteside et Lynam en 2001 afin de proposer un consensus sur les traits fondamentaux constitutifs de l’impulsivité, sur la base de plusieurs échelles de mesures préexistantes.

Le modèle UPPS-P indique que l’impulsivité peut être caractérisée et mesurée sur la base des 4 traits suivants :

  • Manque de persévérance
  • Absence de préméditation ou d’anticipation
  • Recherche de sensations
  • Urgence face aux émotions
    • Sensibilité aux émotions positives
    • Sensibilité aux émotions négatives

Le manque de persévérance représentant l’incapacité d’un individu à maintenir un effort dans le temps ou à se concentrer sur une tâche en réponse à des stimuli internes ou externes à l’individu.

L’absence de préméditation ou d’anticipation se définit comme l’incapacité à visualiser les conséquences positives ou négatives résultantes de leurs comportements.

La recherche de sensation pouvant elle être interprétée par la recherche de sensations nouvelles et excitantes.

Enfin, l’urgence face aux émotions peut être caractérisée comme l’impossibilité de résister à adopter un comportement, réaliser une action, dans des contextes induisant une réponse émotionnelle forte, qu’elle soit positive ou négative.

L’impulsivité selon l’échelle BIS

Barratt, E.S. (1994). Impulsiveness and Aggression. In Monahan, J. and H. J. Steadman (Eds.), Violence and Mental Disorder: Developments in Risk Assessment (pp. 61-79). University of Chicago Press, Chicago, IL.
Barratt, E.S. (1994). Impulsiveness and Aggression. In Monahan, J. and H. J. Steadman (Eds.), Violence and Mental Disorder: Developments in Risk Assessment (pp. 61-79). University of Chicago Press, Chicago, IL.

L’échelle BIS (Barratt Impulsiveness Scale, BIS-11; Patton et al., 1995) décrit l’impulsivité comme un construit à multiple facette, comme le fait le modèle UPPS-P. Selon l’échelle BIS, les traits diffèrent cependant, où six facteurs “de premier ordre” peuvent être regroupé en trois facteurs “de second ordre”, comme le montre le tableau ci-contre.

Emotions et impulsivité (Miller et al., 2022)

De récents travaux tentent d’apporter des éclaircissements sur les mécanismes (et non plus seulement les causes) à l’origine de comportements impulsifs. Les facteurs situationnels donnant naissance à des comportements impulsifs commencent à être étudiés afin de cadrer et de cibler les conditions d’apparition et de maintien de l’impulsivité.

Les émotions font partie de ces facteurs situationnels étudiés notamment dans le cadre de l’utilisation de substances, de drogue ou d’alcool (Herman et Duka, 2019); Wit, 2009). En effet les parties du cerveau impliquées dans la gestion et le vécu émotionnel se superposent avec celles impliquées dans l’adoption de comportements impulsifs (Phan et al., 2004).

Certaines personnes peuvent en effet manifester d’autant plus de comportements impulsifs lorsqu'elles ressentent des émotions négatives ou positives. L’état affectif dans lequel se trouve un individu va avoir une influence sur l’adoption ou non de comportements impulsifs, c’est ce que décrit le modèle UPPS-P dans la facette “Urgence face aux émotions” :

  • Les états émotionnels négatifs amenant un individu impulsif à adopter des comportements d’évitement vis-à-vis de ce qui les provoque, poursuivi par la recherche de sensations plaisantes de substitution.
  • Les états émotionnels positifs amenant un individu impulsif à adopter des comportements d’approche et de maintien “à tout prix” des sensations plaisantes procurées par la situation ou l’objet.

Miller et al., en 2022, nous indiquent également qu’un manque de clarté émotionnelle (capacité à identifier, cibler et différencier des états émotionnels (Lane et Smith, 2021)) prédit une grande partie des comportements impulsifs. La non-acceptation des émotions et les difficultés à atteindre des buts ou des objectifs sont par ailleurs reliés à de nombreux comportements impulsifs. En effet, d’après leurs travaux, certaines difficultés liées à la régulation des émotions, notamment une faible clarté émotionnelle, peut découler sur des comportements impulsifs inadaptés.

Ainsi, prévoir et proposer des outils ou des stratégies de régulations et d’awareness (conscience en français) émotionnelle aux personnes expérimentant des comportements impulsifs répétés et problématiques. Ceci leur permettrait de les aider à y faire face, voire à réduire la quantité ou l’intensité de leurs comportements impulsifs.

Références

Aremu, A., Williams, T., & Adesina, F. (2011). Influence of academic procrastination and personality types on academic achievement and efficacy of in-school adolescents in Ibadan. IFE PsychologIA, 19. https://doi.org/10.4314/ifep.v19i1.64591

Caswell, A. J., Bond, R., Duka, T., & Morgan, M. J. (2015). Further evidence of the heterogeneous nature of impulsivity. Personality and Individual Differences, 76, 68‑74. https://doi.org/10.1016/j.paid.2014.11.059

Herman, A. M., & Duka, T. (2019). Facets of impulsivity and alcohol use : What role do emotions play? Neuroscience & Biobehavioral Reviews, 106, 202‑216. https://doi.org/10.1016/j.neubiorev.2018.08.011

Lane, R. D., & Smith, R. (2021). Levels of Emotional Awareness : Theory and Measurement of a Socio-Emotional Skill. Journal of Intelligence, 9(3), Art. 3. https://doi.org/10.3390/jintelligence9030042

Miller, A. E., & Racine, S. E. (2022). Emotion regulation difficulties as common and unique predictors of impulsive behaviors in university students. Journal of American College Health, 70(5), 1387‑1395. https://doi.org/10.1080/07448481.2020.1799804

Phan, K. L., Wager, T. D., Taylor, S. F., & Liberzon, I. (2004). Functional neuroimaging studies of human emotions. CNS Spectrums, 9(4), 258‑266. https://doi.org/10.1017/s1092852900009196

Stanford, M. S., Mathias, C. W., Dougherty, D. M., Lake, S. L., Anderson, N. E., & Patton, J. H. (2009). Fifty years of the Barratt Impulsiveness Scale : An update and review. Personality and Individual Differences, 47(5), 385‑395. https://doi.org/10.1016/j.paid.2009.04.008

Steel, P., & Ferrari, J. (2013). Sex, Education and procrastination : An epidemiological study of procrastinators’ characteristics from a global sample. European Journal of Personality, 27, 51‑58. https://doi.org/10.1002/per.1851

Wit, H. (2009). Impulsivity as a determinant and consequence of drug use : A review of underlying processes. Addiction Biology, 14(1), 22‑31. https://doi.org/10.1111/j.1369-1600.2008.00129.x