Les cahiers médico-sociaux

De DeWiki
Aller à la navigation Aller à la recherche

Présentation

A Genève, il est possible de consulter la plus grande source d’ archives des cahiers médico-sociaux (CMS) à la Haute Ecole de Travail Social. Le premier numéro des CMS est paru en 1956 aux éditions Médecine et hygiène à Genève. De 1956 à 1998, il a été édité entre 2 et 4 numéros par année. Depuis lors les CMS sont édités sous forme de série. Comme le relève le site www.socialeinfo.ch De tradition, les CMS se veut être une revue objective concernant la santé publique et les questions médico-sociales actuelles. Elle couvre ainsi le domaine de la santé publique et sa politique en ayant pour cible divers professionnels tels que les médecins, infirmiers, enseignants, éducateurs, psychologues, sociologues, administrateurs ou encore les juristes. C’est donc d’un point de vue « mesuré » que cette revue nous indique de façon précieuse quelles étaient les dispositions prises au niveau des politiques sociales (Assurances Invalidité, lois) et du traitement médical ou thérapeutique (services, institutions, approches thérapeutiques, relation praticien-patient) de l’époque qui nous intéresse (les années 1960 à 1980).

Hygiène mentale

Dès les premiers numéros la question de l’hygiène mentale est abordée avec le plus grand soin qu’il s’agisse des enfants ou des adultes . Lors des journées médico-sociales romandes de 1996 sur le thème de l’actualité de l’hygiène mentale (CMS, 1966, n°2, 10ème année) parmi d’autre professionnels, le Docteur Garrone souligne dans son discours l’ambiguïté actuelle autour du concept. Il commence par définir l’hygiène mentale par ce quelle n’est pas, c'est-à-dire qu’elle n’est pas [responsable de l’humanité toute entière et de ses problèmes d’ordre intérieur, social et économique ]. Selon lui, « Le psychiatre roi n’est pas pour demain». Il définit l’hygiène mentale ou « la prévention de la santé mentale » selon l’appellation de l’OMS, comme « l’ensemble des activités exercées, sur la base de connaissances scientifiques, pour favoriser, protéger, maintenir et rétablir la santé mentale chez l’être humain» Cela sous-entend :

1. de définir ce qu’est « l’état de santé » ou « de maladie »

2. de définir les facteurs susceptibles de provoquer des troubles de la santé mentale

Dans le premier cas le Dr Garrone souligne l’idée que la santé mentale ne peut être définie en fonction de la norme (c'est-à-dire , l’état partagé par le plus grand nombre dans une culture donnée) et que la normalité n’équivaut pas à la perfection ou au bien-être: « Un individu imparfait peut utiliser ses potentiels de façon adéquate et adaptée à la société où il vit .» Ou « un individu peut se sentir dans un état de parfaite santé ou de parfait bien-être alors qu’il a perdu tout contact avec la réalité et se comporter de manière tout à fait inadéquate. » Il insiste sur le fait qu’« il est impossible de définir le normal par rapport à des critères restreints tels que la norme, l’adaptation sociale, la statistique, la perfection, ou le sentiment subjectif de bien-être. » Il détermine qu’« un homme normal se définit par son ajustement au milieu, par l’unité de sa personnalité et par sa perception correcte de la réalité ». Dans le 2ème cas, il souligne que le psychiatre a pour mission de chercher les causes de « rendre compte du pourquoi » de la maladie mais que « c’est la société qui désigne les malades à soigner. » Rechercher les causes signifie donc de prendre en compte tous les facteurs (organique, psychologique ou social) qui peuvent entrer en compte dans l’explication de la maladie.

Ainsi pour le Docteur Garonne, l’hygiène mentale doit s’arrêter au rôle de l’hygiène mentale primaire ou prévention primaire qui « commence lorsque les causes pathogènes ont été reconnues comme telles et qu’il il s’agit de les supprimer ou du moins de les contrôler (essentiellement à travers la prévention).] L’aspect de dépistage des maladies mentales au sein de la population et le traitement thérapeutique psychiatrique (qui consiste donc à traiter les maladies mentales manifestes) appartiennent , pour lui, à l’hygiène mentale secondaire et tertiaire.

Psychothérapie et Hygiène mentale

Pour les années qui concerne notre article, la question touchant à l’étiologie reste en effet primordiale. La prévention devrait alors se faire à l’aide de plusieurs corps de métiers (médecins, travailleurs sociaux, psychiatres) et se prolonger à travers le dépistage et le traitement (CMS, 1969, n°4, 13ème année). Les numéros qui suivront porteront aussi bien sur l’explication des causes que sur la prévention et sur le traitement de la maladie mentale.

Concernant les thérapies, la revue témoigne du mouvement qui s’opère notamment en ayant pour volonté de relever les aspects positifs ou négatifs des nouvelles prises en charge qui doivent nécessairement prendre en compte les divers facteurs entrant en compte dans les causes et manifestations de la maladie et de l’indispensabilité d’avoir en face un patient volontaire et motivé. (CMS, 1970, n°1, 14ème année)

Psychiatrie et Anti-psychiatrie

Dès les années 1970 l’idée d’une alternative même au monde strictement hospitalier émerge clairement. Dans la volonté de mettre en avant le rôle primordial de la prévention et des divers facteurs entrant ligne de compte dans la maladie mentale, le professeur Garonne reprend les arguments du mouvement dit anti-psychiatrique « Il a bien prouvée, en effet, qu’il ne sert a rien d’appliquer aux malades psychiatriques les traitements les plus sophistiqués, si c’est pour les replonger ensuite ces même patients dans un milieu social qui s’est montré, à leur égard, singulièrement pathogène. » (CMS, 1973, n°1, 17ème année).

C’est aussi lors de la 11ème édition des journées médico-sociales ayant pour thème « Les portes de l’hôpital » qu’Armand Descloux, Médecin-directeur du Centre psycho social de Fribourg, pose la question suivante «  Les patients veulent-ils toujours être soignés comme le veulent les médecins ? » Il parle alors des hôpitaux psychiatriques comme « ayant cessé d’être le lieu privilégié du traitement des malades psychiques » (CMS, 1974, n°3, 18ème année). Et il témoigne ici d’un projet d’institution psychiatrique extra-hospitalière.

L’article d’Alain Riesen en 1981 (CMS, 981, n°2, 25 année) s’inscrit alors dans cette volonté de démontrer les alternatives possibles aux pratiques ségrégationnistes à « haut-risques » et à l’hospitalisation forcée à travers l'histoire de la naissance de l’institution pour "aliéné" à Genève au 19ème siècle et la problématique de l'internement.