« Groupe 1 4BIOS02 Gds Singes » : différence entre les versions
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La notion de culture est un concept créé par et pour l’Homme. La culture a toujours été considérée propre à ce dernier. Elle est souvent évoquée pour distinguer l’Homme des animaux. Depuis des millénaires, les scientifiques ainsi que les philosophes et les religieux sont partagés entre deux visions. Certains prônent une approche cartésienne: l’Homme est placé seul à l’écart du reste du règne animal. Ses facultés intellectuelles sont ce qui le différencie qualitativement des autres animaux. D’autres prônent une approche évolutive: l’Homme a hérité ses facultés intellectuelles et les partage donc avec d’autres espèces du règne animal. | |||
De nombreux scientifiques ont une certaine réticence à accepter la théorie de l’évolution darwinienne en ce qui concerne nos facultés intellectuelles, bien qu’elle soit largement acceptée en ce qui concerne notre morphologie et nos capacités physiques et physiologiques. Nous avons de nombreux à priori sur nous mêmes et une certaine difficulté à être impartial quand nous sommes en même temps juge et partie. | |||
La première observation de culture chez les animaux s’est produite chez des macaques au Japon. Une jeune femelle juvénile appelée Imo a eu l’idée de laver des patates douces dans de l’eau de mer afin de s’éviter le retrait du sable à la main avant de les manger. Le comportement a ensuite été adopté par les autres macaques du groupe. Cela constitue la première démonstration d’une propagation culturelle à l’intérieur d’un groupe de singes. | |||
A travers des observations supplémentaires sur d’autres espèces de singes, il a ensuite été montré que le phénomène de culture n’est pas propre aux macaques. La vraie question est donc: quels aspects du phénomène culturel sont particuliers aux humains? | |||
Plusieurs équipes suivent en parallèle neuf populations différentes de chimpanzés, nos plus proches parents biologiques. Cette situation de luxe permet de constater une très grande diversité comportementale au sein des populations. Chez les chimpanzés, lorsqu’il s’agit de s’adapter à des environnements différents, cette variabilité s’explique très facilement. En revanche, lorsque les comportements ne peuvent pas être liés à des caractéristiques environnementales, ils ne peuvent être que culturels. Cela signifie que les chimpanzés les ont appris en imitant les membres de leur groupe. | |||
La pêche aux fourmis magnans est un de ces comportements. Afin d’éviter les morsures des soldats qui protègent l’entrée des fourmilières, les chimpanzés utilisent des baguettes pour pêcher les soldats qui montent sur la celle-ci. Toutefois, après cette première étape, les comportements des populations diffèrent lorsqu’il s’agit de manger les fourmis. Les diverses techniques observées qui ne sont pas en lien avec l’habitat des chimpanzés sont un exemple de différences culturelles où l’apprentissage social domine. | |||
Deux aspects de la culture ont récemment été proposés comme étant uniques à l’Homme: la culture cumulative et la culture symbolique. | |||
Pourtant, on a également observé une forme de culture cumulative chez le chimpanzé. L’extraction de la nourriture dans des trous de natures différentes en est un exemple. Les formes d’extraction les simples sont communes à un plus grand nombre de populations de chimpanzés que les formes spécialisées. Cette caractéristique est en accord avec un processus d’accumulation. De plus, la récurrence à chaque génération des différentes techniques d’extraction illustrent un processus social d’accumulation progressive, et non le fruit de l’innovation d’un seul individu. | |||
De même que pour la culture cumulative, il semble que la culture symbolique ne soit finalement pas propre à l’Homme. Par exemple, le déchirement de feuilles pour produire un son a été observé dans trois populations distinctes de singes et a une signification différente pour chacune bien que l’action soit identique. | |||
Il semble alors que nous devons revoir notre perception souvent très simpliste des animaux. Les découvertes effectuées sur les chimpanzés ont révélé une espèce aux comportements incroyablement variés et qui possède une faculté d’adaptation culturelle ignorée jusque-là. Si nous voulons comprendre ce qui nous différencie mais aussi ce que nous avons en commun avec ces primates il nous faut conduire des études beaucoup plus complètes sur les chimpanzés sauvages. | |||
Version du 18 mars 2018 à 11:37
Résumé de l'article
La notion de culture est un concept créé par et pour l’Homme. La culture a toujours été considérée propre à ce dernier. Elle est souvent évoquée pour distinguer l’Homme des animaux. Depuis des millénaires, les scientifiques ainsi que les philosophes et les religieux sont partagés entre deux visions. Certains prônent une approche cartésienne: l’Homme est placé seul à l’écart du reste du règne animal. Ses facultés intellectuelles sont ce qui le différencie qualitativement des autres animaux. D’autres prônent une approche évolutive: l’Homme a hérité ses facultés intellectuelles et les partage donc avec d’autres espèces du règne animal. De nombreux scientifiques ont une certaine réticence à accepter la théorie de l’évolution darwinienne en ce qui concerne nos facultés intellectuelles, bien qu’elle soit largement acceptée en ce qui concerne notre morphologie et nos capacités physiques et physiologiques. Nous avons de nombreux à priori sur nous mêmes et une certaine difficulté à être impartial quand nous sommes en même temps juge et partie.
La première observation de culture chez les animaux s’est produite chez des macaques au Japon. Une jeune femelle juvénile appelée Imo a eu l’idée de laver des patates douces dans de l’eau de mer afin de s’éviter le retrait du sable à la main avant de les manger. Le comportement a ensuite été adopté par les autres macaques du groupe. Cela constitue la première démonstration d’une propagation culturelle à l’intérieur d’un groupe de singes.
A travers des observations supplémentaires sur d’autres espèces de singes, il a ensuite été montré que le phénomène de culture n’est pas propre aux macaques. La vraie question est donc: quels aspects du phénomène culturel sont particuliers aux humains? Plusieurs équipes suivent en parallèle neuf populations différentes de chimpanzés, nos plus proches parents biologiques. Cette situation de luxe permet de constater une très grande diversité comportementale au sein des populations. Chez les chimpanzés, lorsqu’il s’agit de s’adapter à des environnements différents, cette variabilité s’explique très facilement. En revanche, lorsque les comportements ne peuvent pas être liés à des caractéristiques environnementales, ils ne peuvent être que culturels. Cela signifie que les chimpanzés les ont appris en imitant les membres de leur groupe. La pêche aux fourmis magnans est un de ces comportements. Afin d’éviter les morsures des soldats qui protègent l’entrée des fourmilières, les chimpanzés utilisent des baguettes pour pêcher les soldats qui montent sur la celle-ci. Toutefois, après cette première étape, les comportements des populations diffèrent lorsqu’il s’agit de manger les fourmis. Les diverses techniques observées qui ne sont pas en lien avec l’habitat des chimpanzés sont un exemple de différences culturelles où l’apprentissage social domine.
Deux aspects de la culture ont récemment été proposés comme étant uniques à l’Homme: la culture cumulative et la culture symbolique. Pourtant, on a également observé une forme de culture cumulative chez le chimpanzé. L’extraction de la nourriture dans des trous de natures différentes en est un exemple. Les formes d’extraction les simples sont communes à un plus grand nombre de populations de chimpanzés que les formes spécialisées. Cette caractéristique est en accord avec un processus d’accumulation. De plus, la récurrence à chaque génération des différentes techniques d’extraction illustrent un processus social d’accumulation progressive, et non le fruit de l’innovation d’un seul individu. De même que pour la culture cumulative, il semble que la culture symbolique ne soit finalement pas propre à l’Homme. Par exemple, le déchirement de feuilles pour produire un son a été observé dans trois populations distinctes de singes et a une signification différente pour chacune bien que l’action soit identique.
Il semble alors que nous devons revoir notre perception souvent très simpliste des animaux. Les découvertes effectuées sur les chimpanzés ont révélé une espèce aux comportements incroyablement variés et qui possède une faculté d’adaptation culturelle ignorée jusque-là. Si nous voulons comprendre ce qui nous différencie mais aussi ce que nous avons en commun avec ces primates il nous faut conduire des études beaucoup plus complètes sur les chimpanzés sauvages.