Résumés des articles de Thérapie Familiale

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  • Thérapie familiale 1995, vol.XVI, no 3, pp.293-302 (Céline)

Couple et violence par M. Silvestre, J.-P.Heim et M.Christen , thérapeutes de famille

Les auteurs sont membres de l'Association Vivre Sans Violence, issue d'observations de professionnels travaillant avec des femmes victimes. Autour de 1985 il y eut de nombreuses interrogations sur les pratiques, mettant en avant les limites de la prise en charge: les femmes retournaient le plus souvent au domicile conjugal, où les violences reprenaient. De plus, peu de femmes se sentaient prêtes à faire un travail de réflexion sur les événements de violence vécus. Par la suite les professionnels se sont inspirés du modèle québécquois de prise en charge des hommes violents de Robert Philippe. En effet, la conscience de la nécessité de s'intéresser également aux agresseurs a émergé.

Représentation du fonctionnement des couples dans lesquels la violence joue un rôle

Les auteurs réfutent l'idée traditionnelle considérant un couple violent comme dysfonctionnel. Pour eux, le fait que ces couples ont beaucoup de difficulté à se séparer en est une des preuves. Ils soulignent l'échec du mouvement féministe sur ce sujet. Pour eux, la violence et certaines rétroactions à la violence sont des comportements à visée fonctionnelle. Ils font référence à Watzlawick et à sa théorie de la communication, envisageant ainsi la violence comme un acte de communication tout comme les comportements réactifs telle la passivité. Ainsi, la victime également communique quelque chose à son agresseur. La violence est un mode d'échange qui a été appris, et n'est donc pas inné.La violence serait une tentative de solution, qui se mue en problème en soi.

Les auteurs présentent la notion de fusion, inspirée de la mécanique. Le rapport des forces antagonistes ont pour résultat un mouvement. Dans la fusion, la relation et l'échange ne sont pas possibles, puisqu'il n'y a plus deux individus. L'homme frapperait seulement "pour que cette entité fusionnelle perdure", et la femme resterait dans le même objectif de fusion( "l'amour sera plus fort que cet accident"). D'ailleurs, la première formulation de la demande au professionnel refuse la séparation (ex. "aidez mon mari à changer"; "faites que ma femme revienne").

système d'intervention

Le but visé est de modifier les patterns d'interaction. En effet, les leçons tirées des premières interventions ont indiqué qu'une modification du contexte de vie(par ex. séparation)n'est jamais suffisante. Ainsi les échanges interpersonnels sont travaillés en entretiens individuels, en couple et en famille. Le travail s'effectue en réseau avec les partenaires sociaux, scolaires et associatifs. Tous ensemble, ils ont entamé un "travail sur les représentations différentes que l' homme et la femme se donnent et nous donnent, de leur vécu de la violence." (c.f. Congrès des psychologues, Montpellier, 1994)

En 1995, il n'y a pas d'injonction thérapeutique pour les auteurs de violence dans le couple, les consultations sont donc uniquement volontaires pour les agresseurs. Les auteurs font un lien entre les comportements des personnes usant de violence et les personnes toxico-dépendantes: déni; refus de sa responsabilité; difficultés à s'arrêter; nombreuses rechutes; augmentation en quantité et en fréquence en fonction de la durée, etc. De plus, ces comportements ont les mêmes conséquences au niveau de la famille: ils l'isolent socialement.

Centre d'accueil pour hommes

Silvestre, Heim et Christen s'opposent à un aspect de l'intervention en cas de violence conjugale: le départ de la victime du foyer, et non de l'agresseur. Ils soulignent que cela constitue une violence supplémentaire envers la femme, et même une contradiction entre l'énoncé de la loi et sa mise en oeuvre.Du côté de l'agresseur, cela signifie qu'il est laissé seul" dans un état de dangerosité contre lequel nul, même pas la loi, ne peut le protéger". Les auteurs trouvent donc bien plus pertinent que ce soient les auteurs de violence qui quittent le domicile , pour se rendre dans une structure d'accueil spécifique. Pour conclure, il est rappelé que le secret qui entoure cette "pathologie de la violence" participe au maintien de celle-ci."Introduire un tiers, c'est interrompre la dynamique de fermeture, c'est le début du changement."



  • Thérapie familiale 1999, vol.XX, no 4 (Céline)

Ce numéro est consacré au thème "des violences". Dans une revue telle que Thérapie Familiale, on pourrait s'attendre à ce que sujet des violences conjugales soit fortement présent. En réalité, l'éditorial aborde le sujet de manière intéressante, et un seul article y dédie ses pages. Il s'agit de "Du traitement des violences conjugales", écrit par les mêmes auteurs que dans le numéro de 1995 résumé ci-dessus.

Editorial " Quelques réflexions à propos de la violence conjugale au début du troisième millénaire

La violence familiale reste l'un des problémes les plus importants à résoudre pour les thérapeutes de famille. Au niveau anthropologique, "celui qui exerce la violence ne reconnaît pas l'autre comme un être humain. cela signifie qu'il croit disposer du pouvoir de définir l'action, et qu'il n'est pas en mesure de réfléchir sur elle. Il est incapable de voir qu'il commet un abus, au contraire, il pense que ses actes sont parfaitement légitimes." L'auteur présentent le dilemme des professionnels, ayant longtemps considéré la famille comme une institution sociale de protection, et non de souffrance. Néanmoins, il relève que cela n'est pas si étonnant, étant donné que la famille est un lieu hiérarchisé sur le mode du genre et des générations. Il rappelle que les thérapeutes féministes se sont tout d'abord heurtées aux propositions systémiques, avant l'intégration réciproque qui est pratiquée actuellement. Les contextes favorisant la violence sont: l'impunité, la justification, la discrimination et l'inégalité du processus de socialisation selon le genre.

Les thèmes-clés sont: le concept de genre, la formation des intervenants sur la communication dans ces familles; la formation des intervenants pour remobiliser les émotions anesthésiées.

"Du traitement des violences conjugales"par M. Silvestre, J.-P.Heim et M.Christen , thérapeutes de famille Résumé: traiter, c'est agir sur trois niveaux logiques: l'individu , la relation, le contexte socio-culturel et penser sur deux niveaux: linéaire(agresseur/victime) et circulaire(force de la relation)

Les bases théoriques des auteurs se situent dans la théorie de l'information, et celle de l'interaction. Leurs définitions de la violence précisent que: -elle n'est pas constitutive de la nature humaine, ou tout autant que la non-violence -c'est un mode de communication appris -dans notre société l'acte violent a deux registres de référence: la loi et l'affect.

L'évolution des auteurs ils sont revenus sur leur idée de co-responsabilité, de relation complémentaire. Actuellement(en 1999) ils différencient les actes violents en deux catégories: le comportement interactifs vs délits/crimes. Les deux acteurs participent à l'interaction, néanmoins le code pénal punit un responsable. En conclusion, les deux acteurs ne sont pas à égalité dans l'interaction: il y a une hiérarchie dans les responsabilités. La victime n'est pas responsable des coups qu'elle reçoit, mais les deux sont responsables du maintien de l'interaction dans laquelle les comportements de violence deviennent redondants et structurants. Les auteurs se démarquent du québécquois R. Philippe en précisant que les violences conjugales ne peuvent se produire que dans un contexte de consensus socio-culturel.

Chaque membre du couple prend part à une construction ritualisée, qui consiste en une alternance de "positions hautes et basses". Petit exemple: la femme compétente et responsable(haute) disqualifie son mari, qui se sent faible et incompétent(bas). Pour mieux correspondre à son idéal socio-culturel masculin il va chercher le pouvoir et le contrôle, pensant que c'est "tout ce qui lui reste pour être un homme". Il retrouve alors une position haute, et rejette la responsabilité de sa violence sur son épouse, qui nie le danger. L'homme, chef, viril domine la femme, soumise qui a appris qu'une femme pardonne et veut le comprendre. etc. Pour les auteurs, la seule solution est de sortir de ce jeu qui donne à chacun le sentiment de ne pas valoir grand-chose, de n'exister qu'en s'occupant l'un de l'autre.




  • Thérapie familiale 2000, vol.XXI, no 4 (Céline)

Violences conjugales, possibilités de retrouvailles et de reconstruction existentielle p. 381-390

Hernandez Cordoba A. ; Bruno N.; Rivera L.

Les auteurs sont une équipe de psychothérapeutes pratiquant à Bogota, Colombie.

A Bogota, il existe des "commissariats de famille" depuis 1996 qui consistent en un "espace de conversation et de concertation dans le but de protéger, d'assister et de guider les familles à propos de leurs droits fondamentaux et de les informer quand aux façons de résoudre les conflits internes." Plus concrètement, une assistance légale, sociale, médicale et psychologique est dispensée dans ces lieux.

Considérations conceptuelles Les auteurs sont en accord avec Perrone et Nannini, postulant que la violence n'est pas une maladie, mais un choix et un moyen de contrôle. Les interventions légales et psychosociales doivent être différenciées et complémentaires. Tout individu est garant de sa propre sécurité, et chacun peut devenir violent dans un contexte déterminé.

Les auteurs font également référence à la théorie des limitations (Alan Jenkins, 1993. Celle-ci indique que quand il y a absence de limitations, les relations sont pourvues de respect et de compassion. Les limitations sont définies comme dérivées des traditions, des croyances, des habitudes. Elles expliquent la forme que donnent les personnes usant de violence à leurs actes, et incite à ne pas prendre en charge sa conduite de manière responsable. Il existe des limitations socio-culturelles (patriarcat, mythification du statut; différences attribuées au genre, etc.); évolutives (abus physique et négligence envers l'enfant); interactionnelles (modèles de dépendance; l'agresseur justifie sa conduite et cuplbilise la victime); individuelles (habitudes, modèles émotionnels: manque d'estime de soi, immaturité, stratégies inadéquates de résolution des conflits...)

Approche systémique La violence intra-familiale y est interprétée comme un symptôme, et il convient de se demander quelle fonction elle exerce. En effet, il est nécessaire de poser la question des conséquences de la suppression de la violence.

Motifs de recherche d'aide. Une agression récente, la confirmation de l'infidélité du conjoint et les conflits autour de la relation et de la prise en charge des enfants sont les facteurs principaux déclenchant la recherhe de soutien extérieur auprès de SINAPSIS. Les auteurs insistent sur le changement de contexte que cela représente pour le couple, par rapport à un contexte judiciaire dans lequel on peut se réfugier derrière la norme. Au contraire, en contexte thérapeutique, les rôles de "victimes" et de "bourreaux" s'effacent, pour laisser la place à la réflexion sur la responsabilité individuelle.

Caractéristiques de la dynamique conjugale dans ces situtations En résumé les caractéristiques principales sont:

-difficulté à concevoir le couple comme un espace d'intimité -ressentiment (par frustration des besoins affectifs; face aux fausses promesses du conjoint) -malaise face à l'échec des statégies de communication -liens maintenus plus par rancoeur, vengeance et peur -rigidité du cadre de référence -difficulté à assumer sa responsabilité individuelle dans la relation.

Pour les auteurs, l'acte violent est l'ultime recours face à la nécessité de satisfaction des besoins de validation personnelle et d'affection inconditionnelle.Pour l'équipe de Bogota, c'est l'intensité émotionnelle, propre aux actes violents qui est le moteur de changement.



Thérapie familiale Vol.XXII – 2001 No 4 (Chantal)

Déconstruction des idées reçues sur la violence : une alternative à la violence. Kuenzi-Monard F.


Résumé : article qui présente une approche différente du phénomène domestique : la théorie des limites ; ainsi qu’un panorama de onze théories de la violence les plus fréquemment utilisées. L’auteure psychothérapeute issue du mouvement socio-constructiviste pense que la recherche d’une explication causale de la violence est peu utile. Par contre, qu’il est plus avantageux de considérer ce qui empêche la résolution ou la dissolution d’un problème.

La théorie des limites,

Panorama des théories les plus utilisées : L’auteure les répartit selon 7 niveaux

1.les théories qui localisent la violence à l’intérieur de la personne : la violence est basée sur un problème de santé mentale ; la théorie de l’impulsivité, le manque de contrôle de soi.

2.les théories qui localisent la violence dans le développement : les théories développementales de la violence et de l’apprentissage (expliquent l’abus comme une répétitions de comportements pathogènes au sein des familles) ; la théorie du blocage d’origine psycho-sexuel (la personne est bloquée à un stade de son développement.

3.les théories qui localisent la violence au sein des relations humaines : la théorie du contenant (capacité X de tolérer des frustrations, insatisfactions ou colère. Au-delà, c’est l’éclat) ; conséquence : l’homme a peu de possibilités de contrôler cette tension, donc peu de responsabilité quant aux éléments extérieurs qui viennent le saturer. le modèle de la frustration-agression : si je suis frustré, j’agresse.

4.les théories qui localisent l’abus dans des blocages de la communication : la personne violente souffre d’un pauvre développement des qualités sociales et relationnelles. Modèle explicatif intéressant mais qui ne donne pas d’alternative pour apprendre d’autres stratégies.

5.Les théories qui considèrent la violence comme l’effet d’un état chimique différent, comme la conséquence de l’utilisation d’alcool ou de drogues : la théorie de la désinhibition.

6.les théories circulaires sur la violence : celles-ci localisent la violence et la comprennent comme générée au sein d’interactions. La violence occupe une fonction homéostatique, le maintien de l’équilibre de la famille.

7.les théories féministes : l’explication féministe ou socio-culturelle qui voit la violence comme prenant sa source dans les structures sociales. La violence et le comportement abusif sont compris, favorisés, voire encouragés par le fonctionnement social.

8.la théorie fonctionnelle de Léonore Walker : la violence est une explication dynamique, fonctionnelle et non pas causale. La violence fonctionne sur trois phases distinctes, tension, épisodes violents, lune de miel. Walker démontre que la violence est un cercle addictif, les prisonniers de la violence sont dans un cercle infernal.

L’approche de Kuenzi-Monard : la théorie des limites. Elle est basée sur les travaux de Bateson qui prônait qu’une explication « négative » ou « en mouvement » d’un évènement est préférable à une explication « positive » ou « statique ». Ce type d’explication génère du mouvement, incite à s’orienter vers les conséquences des faits et ainsi vise à une prise de responsabilité.

L’auteure conclut qu’il est essentiel de faire une distinction entre l’explication causale et une limitation. L’explication causale clive la dynamique déjà polarisée entre victime et bourreau, elle maintient la violence plutôt qu’elle ne l’élimine. Elle constate que souvent il existe une rupture entre l’intention et l’action du psychothérapeute. Elle pense que le clinicien influence et est influencé par les questions qu’il pose. Et que les questions linéaires tendent à produire des raisonnements linéaires. Les questions circulaires tendent à influencer favorablement des raisonnements circulaires. La réflexivité et le questionnement créent de nouvelles possibilités.