L’enseignement en prison : du poids des contraintes pénitentiaires à l’éclatement des logiques professionnelles"

De DeWiki
Aller à la navigation Aller à la recherche

L’enseignement dans les prisons est aujourd’hui principalement pris en charge par des enseignants professionnels, instituteurs, instituteurs spécialisés et professeurs, intervenant à temps plein ou en heures supplémentaires en prison. Ceux-ci restent très libres dans la définition du contenu pédagogique de leurs enseignements. Cet article pose deux problématiques. La première est, d’une part, que les enseignants trouvent difficilement leurs place en prison car leur autorité professionnelle est très souvent contestée.

Elle est contestée car l’accès à l’enseignement est très souvent pensé en prison comme un privilège plutôt que comme un droit. Ils ont dû se battre afin d'obtenir un espace à eux afin de pouvoir enseigner, sans être surveillé. Il en est de même pour les contenus pédagogiques.

De façon quasi-générale enfin, l’enseignement est une activité que les personnels pénitentiaires réservent aux bons détenus, les plus calmes, ou à ceux à qui ils ne trouvent pas de meilleure occupation; la suspension d’enseignement est aussi un recours courant dans les sanctions disciplinaires utilisées.L’accès des personnes détenues à l’enseignement, s’il est défini juridiquement comme un droit, n’est donc pas un droit respecté. En ce sens, la prison ne se limite pas aujourd’hui à une simple privation de liberté; elle prive parfois les détenus de droits dont ils ne sont pas juridiquement privés.

L'auteur de cet article appuie le fait que comme l’accès à d’autres activités, l'enseignement est conçu comme quelque chose qui n’est pas indispensable et qui doit se mériter. Il y a là l'idée qu'il faut donner quelque chose pour pouvoir y avoir droit en échange et ce n'est donc pas tout le monde qui y a droit. Selon certaines personnes, l'éduaction devrait donc être réservée aux plus méritants.

Il peu arriver que certains détenus, peu désireux de suivre des enseignements, soient placés dans les structures scolaires, à titre d’occupation quasi-forcée.

L'article explique que toutes les personnes détenues sont en théorie reçues par un représentant du service scolaire dans les jours qui suivent leur incarcération. Les enseignants, après un court entretien et des tests d’évaluation, peuvent alors proposer aux personnes qui le souhaitent de suivre certains enseignements, mais celles-ci doivent aussi recevoir l’autorisation de la direction de l’établissement. Dans beaucoup d’établissements, seuls les détenus qui sont calmes et qui coopèrent avec les personnels pénitentiaires peuvent accéder à l’enseignement. L’accès à l’enseignement est ainsi très souvent posé comme une faveur, une récompense, en échange de discipline. Il y a alors un contrat moral qui se fait entre le détenu et la direction. Des exigences sont alors demandée, telle que le calme.

Etre scolarisé en prison, c'est donner l’espoir pour certains détenus d’obtenir des remises de peine supplémentaires par le biais de la réussite à des examens. La réussite aux examens, à l’instar de la bonne conduite en détention, sont des critères souvent pris en compte par les commissions de l’application des peines et par les juges d’application des peines pour proposer et prononcer des remises de peine, des libérations conditionnelles, des mesures de semi-liberté.


Les détenus les moins dociles sont souvent obligés de suivre des cours par correspondance, ce qui les prive du principal avantage connexe de l’enseignement : celui de sortir de cellule. Dans la même perspective, l’inscription aux cours du centre scolaire, contraignants quant à l’assiduité et à la motivation, devient parfois un moyen de priver les détenus les moins dociles des « cours loisirs » des bénévoles. L’accès aux cours des bénévoles est ainsi parfois réservé aux détenus les plus coopératifs pour lesquels l’Administration accepte qu’ils ne s’engagent pas réellement dans une action de formation et qu’ils trouvent dans l’enseignement une simple façon de passer le temps et de sortir de cellule. Paradoxalement, le refus fait à certains détenus d’accéder aux cours des bénévoles et l’obligation indirecte qui en résulte de s’inscrire dans le centre scolaire s’ils veulent tout de même sortir de cellule, peut ainsi conduire à faire de l’enseignement des professionnels une sanction, tout au moins un très faible privilège au regard des autres privilèges de la détention.